Chapitre 17

PDV Lester

Si il y a bien une chose que je déteste chez les gens, c'est la stupidité et la méchanceté gratuite. Oui, ça fait deux, mais ça va de paire. Cela me conforte toujours dans l'idée que moins l'on est entouré, mieux l'on se porte. Je n'ai jamais compris ce principe. A quoi cela sert-il sérieusement de faire du mal aux autres ? Il n'y a aucun intérêt. Est-ce pour gonfler l'égo ? Se sentir supérieur ? C'est con, parce que ça produit l'effet inverse aux yeux de tous ceux qui ont un cerveau. Mais comme les personnes stupides ne cherchent l'approbation que des autres personnes stupides...

L'humanité me désespère parfois.

Quand je vois ces ados qui se moquent d'une fille parce qu'elle est un peu enrobée. Quand une mère dit à son gamin « tu dois travailler à l'école pour ne pas finir comme le monsieur » en pointant un agent d'entretien. Quand une vieille rabaisse une caissière. Il y a tant de situations qui me dégoûtent un peu plus des autres chaque jour.

J'ai toujours trouvé ça aberrant. Quand dans la cours de récrée, tout le monde mettait de côté ce petit garçon, parce qu'il n'aimait pas jouer au foot, et qu'il préférait parler sans cesse. Les garçons le trouvaient bizarre, les filles suivaient la vague. Je le revois seul sur son banc, à jouer avec des feuilles, puisque personne ne s'intéressait à lui. Je revois les petits doigts pointés sur lui alors que les rires résonnaient, et sa petite tête baisée, ne comprenant pas cet acharnement. C'est la seule fois où je suis intervenu. Je me suis juste assis avec lui. Je n'étais pas celui dont on avait le loisir de se moquer, alors les rires ont cessé. Si les enfants étaient stupides, pas les parents. En sachant qui était mon père, ils avaient bien briefé leurs morveux. Ne l'embête pas, et surtout, devient son ami.

Aucun d'eux ne m'intéressait. Le petit garçon non plus. Mais depuis le jour où je me suis assis sur ce banc, il n'a plus jamais été loin de moi. Et petit à petit il est devenu un ami. Et maintenant, tous ceux qui se moquaient de lui lui mangent dans la main, en rêvant qu'il leur accorde de l'attention. Parce que maintenant il est le chanteur des Madness, mon meilleur ami, cet idiot de Carter.

Le reste de ma vie, j'ai arrêté d'intervenir face à la bêtise humaine. Je ne voulais pas être un sauveur, je ne sais pas pourquoi j'ai agis pour Carter, à l'époque. Peut-être qu'au fond je savais qu'il allait devenir quelqu'un pour moi.

Mais si je n'interviens pas, je vois, et je suis fatigué de constater que les années passent mais rien ne change. Peu importe l'âge, la stupidité touche tout le monde, et beaucoup trop de monde.

On en a encore l'exemple parfait aujourd'hui. Une tâche. Une simple tâche, qui pourtant a soulevée une vague de rire et de commentaires à l'instant même où ils l'ont aperçu. J'ai vu les joues de l'Ovni rougir et sa tête se baisser de honte. Elle a remis sa veste, alors même que le soleil tapant sur les vitres réchauffait très largement la pièce. Elle n'a rien dit, encore une fois, s'est contentée de faire comme si elle ne voyait pas. Elle voyait, et moi aussi, tout comme j'entendais.

Les remarques sarcastiques, les moqueries, la méchanceté, envers une personne qu'ils ne connaissent pas, pour une raison stupide.

Il est midi, et cela n'a pas cessé. 4 putain d'heures ont passés et ils sont toujours en boucle sur cette histoire, et cela commence à me gaver. Je n'en peux simplement plus de l'entendre, d'entendre leur imbécillité à longueur de temps. Parfois j'aimerais vivre dans un monde où il n'y a personne d'autre que moi, seulement pour être tranquille.

J'ai besoin de décompresser, aussi, je vais vers mon mini-refuge ici. Personne ne va jamais là-bas, ils savent tous que c'est mon coin à moi. C'est très bien comme ça, car je ne supporterais pas de ne pas avoir un endroit où je ne les vois et ne les entends pas. Mais quand je pousse la porte, je m'arrête en voyant une silhouette assise dos à moi. Pas difficile de la reconnaître, surtout qu'un chien est assis en face d'elle. Je l'observe quelques instants. Je suppose qu'elle ne savait pas pour cet endroit.

Note finit par lui signifier ma présence et elle se retourne rapidement vers moi. Sa main va rapidement sur son visage, mais c'est trop tard, je l'ai vu. La larme. Il ne faut pas être devin pour savoir à quoi elle est dû. Et je ne sais pas pourquoi, mais plutôt que de me faire chier qu'elle soit ici, c'est de la voir dans cet état, qui m'agace.

Peut-être parce que j'ai en face de moi une nouvelle victime de ce qui m'irrite au quotidien. Si je ne montre rien, en mon fort intérieur, je souffle un bon coup, agacé de ce que je vois. Elle se lève pour partir, ayant vraisemblablement comprit que je comptais être seul, mais je la devance en me retournant. Et alors que j'avance dans les couloirs, et que je sais ce que je m'apprête à faire, je ne comprends pas pourquoi j'agis ainsi.

J'en ai rien à faire, qu'elle pleure. Alors pourquoi j'ouvre mon casier, et j'attrape ce putain de t-shirt ? Pourquoi j'y retourne, et que je lui tends ?

Pourquoi je ne peux m'empêcher de trouver sa réaction mignonne, alors qu'elle découvre l'habit à mon nom ? Pourquoi je me demande à quoi elle va ressembler, quand elle le portera ?

Je m'énerve à me poser toutes ces questions, alors je ne perds pas de temps et repars. Sa voix m'arrête dans mon élan.

- Je te le rendrais.

Mais je ne veux pas qu'elle me le rendre, et je ne sais pas pourquoi, encore une fois. Je lui dis de le garder et me contente de partir, en continuant à me demander quelle est la raison qui m'a poussée à l'aider. Ce n'est pas dans mes habitudes, ce n'est pas moi, d'aider les autres. La dernière fois que je l'ai fais, j'avais 5 ans, et jamais depuis je n'ai recommencé.

J'ai envie de me frapper quand je la vois quelques minutes plus tard, le t-shirt sur le dos, et que je me dis malgré moi que ça lui va bien. Je ne devrais pas penser ça, alors ça m'agace de le faire, surtout que je le pense à chaque fois que je la croise, pendant cette fichue journée, c'est-à-dire tout le temps, puisque l'on est dans la même putain de classe.

Je suis presque sur les nerfs, quand je rejoins le groupe pour notre répétition d'avant concert. Nous jouons tous les mercredis soirs dans un club de la ville, et avant nous devons nous assurer des réglages. Quand j'arrive, ils sont tous déjà là, et je suis presque étonné de les voir à l'heure. Ce n'est pas dans leurs habitudes. Définitivement, cette journée est particulière.

Je pose ma guitare et commence à vérifier mon ampli ainsi que les câbles, quand Cart' s'approche de moi.

- Euh, Les', où est ton t-shirt ?

Je me doutais bien que l'un d'eux poserait la question, mais je dois avouer que j'aurai préféré qu'ils oublient et ne le remarquent pas.

- Perdu.

Sam fronce les sourcils et s'avance à son tour.

- Perdu ? Le t-shirt du groupe, le truc fait sur mesure pour chacun d'entre nous en un seul et unique exemplaire ?

- Bah ouai, perdu.

Je vois du coin de l'œil Arthur secouer la tête, comme si il n'y croyait pas une seule seconde. Mon meilleur ami s'accroupit alors et met sa tête près de la mienne. Trop près. Je le pousse de la main et il tombe sur les fesses.

- Hey !

- Distance de sécurité.

- N'importe quoi, j'ai pas la gale !

- Non, mais ta connerie est peut-être contagieuse.

Il me pointe du doigt en riant comme si je venais de lui révéler une information contre mon gré.

- Quoi, pourquoi tu ris ?

- Quand tu cherches à cacher quelque chose, tu parles de ma connerie.

- Je parle de ta connerie tout le temps.

Il hausse les épaules, peu soucieux que sa théorie tombe à l'eau.

- J'aurai essayé. Il est où alors ?

- Je viens de le dire.

- Non, tu viens de mentir. Tu es Lester. Tu ne perds jamais rien. Surtout pas ce t-shirt.

Il est vrai que j'aurai peut-être dû travailler une meilleure excuse, mais j'ai passé tout mon temps à me demander pourquoi je lui avais donné, ce fameux t-shirt. Surtout que je lui ai bien dis de le garder. Depuis qu'elle est arrivée dans ce bahut, je me pose beaucoup trop de questions, beaucoup trop de questions qui la concernent. Et j'ai beaucoup trop de pensées étranges, qui dérivent souvent sur elle, ou partent d'elle, où ont un rapport avec elle. Je dois être malade, c'est l'explication la plus logique. 

Pendant de longues minutes, Cart' et Sam m'emmerdent pour que je finisse par leur révéler ce que j'ai fait du fameux vêtement, et ils arrivent à avoir le dernier mot quand je n'en peux plus de les supporter.

- Je l'ai donné à Lyra ok !

Je le cri presque, ce qui a pour effet de les faire taire. Je vois leurs yeux et leur bouche ouverts en grand, et même Arthur laisse apparaître une expression de stupeur.

- Tu as... quoi ?

- Je l'ai donné à Lyra. Elle avait une tâche sur son t-shirt, tout le monde se foutait de sa gueule et ça me fatiguait, donc je lui ai donné. Rien d'extraordinaire.

Ils restent silencieux un instant, avant que Carter n'affiche un petit sourire.

- Tu as dis donné, pas prêté.

Je souffle. Il fallait vraiment qu'il remarque ce détail ? Il se met à rire en voyant ma réaction.

- Tu voulais la voir avec ton nom sur elle ?

J'envoie un coup de la jambe de Sam.

- Ferme là donc un peu toi.

Le coup ne semble lui avoir fait ni chaud ni froid.

- Elle était mignonne ? Ça lui allait bien ?

- Mais vous me fatiguez, préparez vos instruments.

- Ça veut dire oui !

Sam se met à sauter et Carter le rejoint. Ils se mettent à danser en chantant, me donnant presque envie de me casser.

- On va avoir une belle-sœur, on va avoir une belle-sœur !

- Vous allez avoir mon poing dans la figure surtout !

Ils arrêtent leur manège et vont prendre leur place en ricanant. Si je ne tenais pas à ma guitare, je leur aurais fracassée sur le crâne. Bordel, qu'ils sont chiants. Encore une bonne raison de ne jamais les laisser rencontrer l'Ovni.

Alors que je règle ma guitare et qu'ils se sont calmés un peu, je ne peux m'empêcher d'y repenser. Pourquoi lui ai-je donné ce t-shirt, celui-ci en particulier ? J'aurai bien pu prendre un haut de sport dans les vestiaires, il devait m'en rester un. Mais j'ai choisi de lui donner celui-ci. Et Carter a raison sur un point, j'ai bien dis donner. Pas juste lui prêter, le temps qu'elle rentre chez elle. C'est mon seul t-shirt de groupe, l'unique qui ai été crée à mon nom. Personne n'en a de similaire, pas même nos fans. Mais aujourd'hui je lui ai donné.

Je secoue la tête pour me convaincre que ce n'est pas grand-chose. J'ai seulement fait cela car elle était au plus mal, qu'elle n'en pouvait vraiment plus. Elle était trop mal pour que je ne fasse rien, c'est tout. J'ai seulement réagis en humain, cela n'a rien d'exceptionnel.

Mais au fond de moi, j'ai une petite voix qui me souffle une rengaine que je refuse cependant d'écouter.

« Pour quelqu'un d'autre, jamais je ne l'aurais fais ».  

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Ohoh, le t-shirt donné, avait une certaine valeur... qu'est-ce que cela peut bien signifier ? Pas sûr que Lester ne le comprenne lui-même. Ne croyez pas qu'il est amoureux hein, c'est trop tôt. Mais contre son gré, il doit bien y avoir quelque chose qui se passe...

La suite vendredi, 

Kiss :*

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