Chapitre 48
PDV Kanako
— C'était grandiose, digne d'un film romantique, mon dieu, j'en ai encore des frissons.
Lewis, en dramaturge qu'il est, nous mine chacune de ses paroles avec intensité. Et ce n'est pas Natt qui le calme, rentrant dans son jeu sans aucune difficulté. Tous les deux s'évertuent à nous décrire précisément ce qu'ils ont ressenti lorsque William est monté sur le podium, il y a de cela quelques heures. Cependant, ils n'ont pas la moindre idée de ce que j'ai pu ressentir, moi. Et je ne pense pas réussir à le décrire.
A mes côtés, William reste calme, malgré les piques et les taquineries de nos amis.
— Je ne t'imaginais pas aussi chevaleresque.
— Chevaleresque ? Cha', il n'était pas un chevalier, mais un prince en mission pour récupérer sa princesse, la femme de sa vie, l'unique...
Avec empressement, Natt coupe Timon et reprend le flambeau de celui qui sera le plus enthousiasme.
— Un roi, même ! Un vrai conte de fée, cette histoire. J'aimerai tellement vivre la même chose.
— Et encore, imaginez si il avait posé le genou à terre sur ce podium, mon dieu, je crois que mon petit cœur aurait explosé.
L'idée de Lewis, bien que complètement surréaliste, fait rougir mes joues, tandis que William calme leurs ardeurs.
— N'abusez pas.
Malgré tout, il ne semble pas agacé des piaillements incessants de nos proches sur cette situation, et j'oserai même dire, à en juger par ce petit sourire qu'il arrive si bien à cacher aux autres, qu'il apprécie. Parce que ces piques rappelle une nouvelle réalité, une réalité que nous aimons autant l'un que l'autre. Nous.
— Et si on passait aux choses sérieuses ?
Pour appuyer ses dires, Charlotte dépose sur la table une bouteille de rhum, et active l'enceinte du salon.
— J'ai mon premier défilé à fêter.
— Yataaa !
Je ris devant l'engouement de son petit-ami, qui après avoir hurlé son contentement, plaque avec ferveur ses lèvres sur les siennes.
— Ma femme est la meilleure !
Il l'entraîne par le bras sur la piste, la colle contre lui, et la fait tourner à toute vitesse, alors qu'elle rit, rit, et rit encore. Arwen baisse les lumières tandis que Lewis nous sert des verres, et je les regarde tous s'amuser comme des fous.
Je tourne mon regard vers Will, qui toujours assis à mes côtés, ne pose pas une seule fois les yeux sur eux, pour les garder sur moi.
— Pourquoi me regardes-tu ainsi ?
— Pour la beauté de ton sourire quand tu es entourée d'eux.
Je cache mon visage dans mes mains, écartant suffisamment mes doigts pour le voir sourire, satisfait de son effet. Je mets quelques instants à m'en remettre.
— Tu n'es pas heureux pour Charlotte ?
Il s'approche de moi pour couvrir la musique dont le son a subitement bondi.
— Si. Mais j'ai autre chose en tête.
Je comprends sans mal ce qu'il sous-entend, et malgré ma gêne, j'ai envie d'en entendre plus, alors je le questionne sur ce qui lui passe par l'esprit. Pour toute réponse, il se contente de passer son pouce sur mes lèvres, et de me transmettre de par son regard toutes ces envies.
Et si je suis gênée de le reconnaître, elles font largement écho aux miennes.
Je lève mes propres doigts, mais avant qu'ils ne puissent rencontrer sa peau, une main s'entoure autour de mon poignet et me tire vers la piste. J'entends à peine la voix de Lewis me hurler de venir danser que je me retrouve au milieu de lumières éclatantes, les doigts de Charlotte entremêlés aux miens pour m'entraîner dans une danse exaltée.
Je ne sais pas combien de danses défilent, combien de verres on me présente, ni combien de temps nous restons là, mais je sais que je me sens bien. J'ai la sensation de flotter dans un monde de bonheur, entourée de rires, de bonne humeur, et d'une amitié à toutes épreuves. La joie qu'ils dégagent est grisante, elle m'emporte, me transporte, et me fait voyager dans un monde que je ne souhaite plus quitter.
Mon corps joue tout seul sur la musique, laissant de côtés les pensées qui pourraient m'en empêcher. En nage, mais foutrement heureuse, je relève le regard pour le planter dans celui de William, fermement accroché à ma personne. Il se tient là, un peu en retrait, appuyé contre un mur un verre à la main. Et il ne me quitte pas des yeux. Il me regarde danser, et bien que j'en rougisse, la lueur dans ses iris alors que je me déhanche à quelques mètres de lui me fait un bien fou. Elle me secoue à l'intérieur, vers mon cœur, et j'aime ça sans limites. J'y vois tant de sentiments, de désir, et tout un tas de choses que je ne sais expliquer, mais dont je suis folle, à vrai dire. C'est ce qu'il me fait ressentir. Une folie qui m'envahit mais de laquelle je refuse de me séparer.
Alors qu'un nouveau titre se joue, plus sensuel, j'hésite un instant. Finalement, ce sourire joueur qu'il me lance a raison de mes doutes, et mon corps se mouve en rythme. Ai-je un jour tant osé ? Non. Pensais-je que je pourrais le faire ? Non plus. Les limites que j'ai toujours pensées avoir sautent, et je découvre à quel point je me sens libre maintenant qu'elles n'existent plus.
C'est comme si il n'y avait plus que lui et son regard, sur mon être qui balance au gré des notes. Son désir, qui appelle le mien, mon audace, qui augmente son sourire, ses iris, qui me font rougir. C'est une gêne que j'aime ressentir, et de laquelle je ne me lasse pas. Nos amis autour de nous ne sont qu'un lointain souvenir, la musique devient flou, au point que seul mon corps semble l'entendre encore. Moi, je ne perçois que deux sons. Les battements effrénés de mon cœur, et ma respiration haletante. Je ne suis pas essoufflée d'avoir tant dansé, mais bien transportée par l'intensité de notre échange silencieux.
William me fait l'effet d'une mélodie qui me prend au cœur et aux tripes. Et à défaut de pouvoir la chanter, je découvre que je peux encore la vivre, entièrement, comme avant. Il est ma mélodie, ma chanson, et ce que je ressens pour lui en cet instant, c'est un peu comme ma voix.
Je chante avec mon cœur, pour le sien, et j'ai l'impression qu'il reçoit mes notes, peu importe tout ce qu'elles peuvent bien contenir sans que je ne parvienne à m'en rendre compte.
Notre échange est coupée par les bras de Lewis qui s'enroulent autour de mon cou, lorsque la musique change pour devenir plus entraînante. Je reprends brusquement pied dans la réalité, sans que je n'en ai spécialement envie. Il arrive cependant à me faire rire, comme toujours, et je reste un instant à jouer avec lui avant de sentir ma gorge irritée.
Je lui fais signe que je m'éclipse à la cuisine pour aller chercher un verre d'eau, et j'en profite pour m'appuyer un instant contre le plan de travail avant de me servir.
— Fatiguée ?
Je sursaute presque d'entendre sa voix, pourtant, elle me fait du bien. Elle surplombes sans soucis la musique encore assez forte d'ici, mais me fait ressentir des frissons bien différents.
Je devrais sûrement être épuisé après tant d'efforts, pourtant, je me sens remplie d'énergie. Quelque chose me souffle que c'est autant grâce à l'alcool qu'à l'effet qu'il me fait lui. Je secoue la tête, et attrape le verre qu'il me tend, sachant visiblement ce dont j'ai besoin sans que je n'ai à lui en faire part.
— Tu sais danser.
Il s'approche de moi tandis que je rougis, et me tend son téléphone pour que je puisse lui répondre.
— Pas tant que cela.
— Je trouve que tu te débrouilles bien. Très bien, même.
Son sourire colore un peu plus mes joues, mais je n'entends pas le laisser gagner si facilement. Parce qu'avec lui, j'aime jouer. J'aime qu'il me laisse répondre, quand bien même il finit bien souvent par gagner. J'aime retrouver ma personnalité, celle que j'ai largement laissée de côté depuis que j'ai perdu tout ce qui comptait.
— Es-tu aussi doué pour danser que pour regarder ?
— Est-ce une invitation ?
Comme pour lui répondre, la musique change une nouvelle fois, pour un son latino qui ne laisse que peu de possibilités quant au type de danse associée. Devant son sourire narquois, et son regard malicieux, je ne peux que détourner les yeux, gênée à cette idée.
Pourtant, la seconde suivante, ses doigts ont attrapé le devant mon haut et m'ont tirée à lui. Il colle nos corps, glisse sa main dans le bas de mon dos, et approche nos visages suffisamment pour que je sentes son souffle sur mes lèvres. Il m'entraîne dans une danse sensuelle qu'il semble maîtriser à la perfection. Un moment rien qu'à nous, hors du temps, où nos corps jouent l'un avec l'autre, se collant, s'éloignant, et se retrouvant en rythme.
Il glisse sa bouche à mon oreille, laisse son souffle me faire frissonner avant d'enfin parler.
— Préfères-tu que je danse ou que je te regarde ?
J'aimerai pouvoir choisir, mais j'en suis bien incapable. Et il le sait autant que moi.
— Je pense que tu aimes autant mes mains que mes yeux sur toi.
Si il pouvait voir mon visage, il n'y trouverait que cette couleur qu'il affectionne tant, et pourtant, malgré l'effet que me font ses mots, je veux qu'il continu de les prononcer.
— Et cela tombe bien, car j'adore y poser les deux.
Et tandis qu'il me fait tourner, il profite de mon léger déséquilibre pour me coller à lui, et plaquer ses lèvres sur les miennes. En dansant toujours, il entraîne nos langues dans leur propre ballet, et je me laisse subjuguer. Tout explose en moi, un millier de sensations qui semblent toutes plus fortes les unes que les autres.
Mais il y en a une qui surpasse tout.
Une pour laquelle il ne peut y avoir qu'un nom.
Amour.
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