Chapitre 30
PDV Kanako
— Si tu veux mon avis Nala, on peut dire que Stephan aurait été le meilleur choix pour Elena.
Je secoue vivement la tête devant l'affirmation de mon comparse. Je ne sais pas vraiment comment cette conversation est venue sur la table, mais Lewis m'a l'air passionné par le sujet, au contraire de notre Pumba national.
— Je ne comprends pas ce que tu trouves à cette série.
— Ce n'est absolument pas le sujet, Arwen. Là, je débats du meilleur partenaire pour Elena avec Nala. C'est très sérieux, ne nous interromps pas.
Le plus timide des deux ne répond rien et se plonge dans l'exercice d'anglais que nous sommes censés travailler. Ce qui n'arrête pas pour autant Lewis.
— Et puis franchement, tu n'as pas de goût ! Il faut qu'on en discute mon vieux !
— Je croyais que le sujet était sérieux et qu'on ne devait pas vous déranger ?
— Je ne dis pas le contraire. Tu vois, tu nous déranges !
Je laisse un rire m'échapper, ce qui ramène l'attention de Lewis sur moi.
— Ne crois pas que tu vas y échapper Nala ! Je ne peux pas te laisser dire, et même penser que Damon était vraiment le bon choix !
— Tu as des arguments ?
— Tu sais quoi, d'habitude je n'argumente pas, car je me refuse à devoir prouver l'évidence, mais pour toi, je vais faire une exception.
— Quelle chance.
— Je ne te le fais pas dire. Je sais que vous les filles vous adorez le genre bad boy, ténébreux et tout le bazar. Ce n'est pas pour rien que William plaît autant, le bougre. Tu vois, tu rougis.
Je cache mes joues derrière mes mains avant de lui envoyer mon crayon de papier quand il continu de se foutre de moi.
— Oui bon en réalité, je vous comprends, hein, si j'en étais une, je tomberais aussi en pâmoison devant lui.
— Toutes les femmes ne tombent pas en pâmoison devant un homme. C'est très restrictif.
— Ce n'est pas le sujet. Le sujet, c'est que Damon plaît parce qu'il est beau, ténébreux, mystérieux, et qu'on a le culte du grand méchant qu'on peut transformer en agneau par amour. Mais dans la réalité, il se passe quoi ?
— Dans la réalité, les vampires n'existent pas.
— Alors ça, c'est encore un autre sujet. On en parlera plus tard. Ce que je veux dire, c'est que dans la réalité, c'est un putain de psychopathe qui aurait fini en taule. Comment peut-on aimer un tel mec ? Je ne trouve pas ça cool, d'arracher des cœurs.
Je grimace, ne lui donnant pas tout à fait tort.
— En même temps, Stephan n'était pas mieux. Rappelle toi de son passé.
— Il a changé.
— C'est vite dit.
Il s'apprête à répliquer quand une boule d'énergie entre dans la pièce et prononce mon prénom avec un entrain démesuré pour un matin. Charlotte s'approche de nous, un grand sourire aux lèvres, et dépose un baiser sonore sur ma joue avant de taper dans la main des garçons.
— Ma petite Kana, ce soir, je t'emmène après ta séance avec le grand méchant loup.
— Si il t'entend, je ne donne pas cher de ta peau.
— Très cher Timon, je me fous du danger. Moi, j'aime le danger. Je me ris du danger.
— Belle référence !
Je les regarde, un sourire dans les yeux, appréciant cette ambiance si particulière qu'ils mettent dans ma vie depuis qu'ils y sont entrés. Parfois, j'ai simplement envie de m'effacer. De me mettre en retrait pour les observer interagir, parce que j'ai l'impression que je n'ai besoin de rien de plus pour me sentir bien.
— Je ne reste pas plus longtemps, j'ai un cours de sciences. Fais attention ma belle, j'en connais un qui n'est pas de très bonne humeur.
Je n'ai pas le temps de lui demander de quoi il en retourne qu'elle s'éclipse déjà, avant de répondre en coup de vent à Lewis qui lui hurle :
— Charlotte, Stephan ou Damon ?!
— Damon évidemment !
Et déjà, elle disparaît, tandis que je lance un sourire satisfait à un Timon défait.
**
« En 1988, Robert J.Sternerg, à partir de ses recherches, une théorie sur la constitution de l'amour. Ainsi, il détermine que l'amour possède trois composantes, la passion, l'intimité et l'engagement. Ces composantes sont dimensions, qui sont susceptibles de varier en intensité. Les rapports entre ces composantes sont représentés par un triangle. Les rapports, ainsi que l'intensité de ces dimensions déterminent la nature de l'amour, ainsi que sa force.
L'intimité se définit par le désir d'être attaché à l'autre par un lien significatif. La passion implique des sentiments puissants, qui créent une attirance romantique et physique. Enfin, l'engagement, lié au temps, s'entend par la décision d'aimer dans le présent et de maintenir cet amour dans le temps. »
Mes yeux parcourent les phrases de l'article sans vraiment en comprendre le sens. Mon esprit est ailleurs, mon attention aussi. Déportés sur le corps de mon comparse, qui s'attaque à un bouquin philosophique qui me donne mal au crâne rien que par sa taille. Je sais qu'il va finir par se rendre compte de ma fixation, et que j'en ressortirai mal à l'aise. Pourtant, cette réalité ne me retient pas. Je cherche la moindre trace de cette humeur dont Charlotte m'a parlé. Ou plutôt, je cherche le moindre détail qui me permettrait de comprendre. Sans trop savoir pourquoi, je ressens une envie irrépressible de savoir ce qui pourrait affecter ses émotions. Peut-être parce qu'il n'a aucun mal à déterminer ce qui me touche, ou influe sur mes sentiments. J'aimerais que la réciproque soit vraie, mais William est loin d'être un livre ouvert. Au contraire, il m'apparaît plutôt comme un ouvrage complexe, dans une langue inconnue voire morte, impossible à comprendre sans quelques clés. Clés qu'il n'a pas l'air d'offrir à grand monde.
— Je ne suis pas sûr que le résumé de l'article soit noté sur mon visage.
Inévitablement, je rougis, pourtant préparée à ce qu'il finisse par me piquer pour ma discrétion inexistante. Il relève les yeux des pages qu'il lisait et plante son regard dans le mien, comme pour me sonder. Ce qu'il semble réussir à la perfection.
— Qu'est-ce que tu cherches à déterminer petit zombie ?
— Tu es de mauvaise humeur ?
Il hausse un sourcil, avant de déposer son livre et de s'appuyer sur la table à côté de moi.
— Dans la mesure où je n'ai pas crié depuis que je suis ici, je suppose que cette information t'a été donnée par une autre personne, et non pas par cette observation profonde que tu effectues depuis une bonne demi-heure.
Je ne réponds rien, consciente que c'est tout de même une réponse. William n'a pas toujours besoin de mots, avec moi. Je pourrais peut-être dire qu'il a trop peu souvent besoin de mots, d'ailleurs, et que cela devrait m'interroger, à défaut de m'effrayer.
— Donc, Natt ou Charlotte ?
— Charlotte.
— Elle a dit pourquoi ?
Je secoue la tête pour nier qu'elle ait cafté quoi que ce soit.
— Donc c'est ce que tu cherches à savoir.
— Je ne veux pas paraître intrusive.
— Mais tu veux tout de même la réponse.
Je rougis, ce qui lui suffit pour saisir ce que j'en pense. Je ne poserais sûrement pas la question, mais je risque de continuer à le fixer de façon insistante, bien contre ma volonté.
— A ton avis, qu'est-ce qui peut m'avoir énervé ?
J'hésite à le dire, parce qu'au fond, je crains toujours ses réactions. Je crains toujours de le braquer et de couper court aux moments que nous passons ensemble. Puisque pour une raison que j'ignore, chacun de ces moments m'importent réellement, peu importe son contenu. Même lorsque je ressens un mal être face à mon reflet dans un miroir, même lorsqu'il est difficile de me replonger dans des souvenirs qu'il me demande de lui exprimer. Ce qui pourrait s'apparenter à de mauvais instants ressort finalement bien lumineux et agréable dans mon esprit. C'est l'effet qu'a sa présence. Un effet que je ne comprends pas, et que je ne veux pas comprendre. J'ai la sensation que la réponse marquera un tournant dans notre relation et dans ma vie, virage que je ne suis pas encore prête à prendre.
— Cesses d'hésiter et exprime-toi. Ou je me mets en colère.
Son sourire en coin fait monter un instant le mien, tandis que son regard me ramène à mon sérieux quand il s'agit de lui répondre.
— Ton père, ou ton demi-frère.
— Les deux, en l'occurrence.
— Pourtant, tu es là.
— Je suis là.
— Pourquoi ?
— Dis tout de suite que tu aurais préféré ne pas me voir.
Je rougis, et si j'avais pu parler, j'aurais sûrement bégayé une négation, des explications, des excuses, ou tout autre mot qui aurait rendu la phrase incompréhensible.
Pourtant, je ne tente pas la moindre justification à l'écrit. Parce que c'est ce qu'il attend. Que je rentre dans ce schéma, où il aurait enchaîné les taquineries, afin que ma question soit passée sous silence. Je ne le veux pas. Si je ne me sens pas légitime à lui demander des informations sur sa vie, cette fois, je ne peux me retenir de le faire. Nous verrons bien ce qu'il en ressort.
Je lui tends simplement une nouvelle fois l'écran sur lequel ma question s'affiche toujours. Il me fixe un moment, sans que je ne baisse le regard. Cherche-t-il à me faire abandonner ou à déterminer si j'insisterai, je ne le sais pas. Toujours étant que dans ce échange silencieux, il semble trouver ce dont il a besoin pour accepter de me répondre.
— Pour toi.
Mon cœur loupe un battement, avant de démarrer une course si folle que j'envisage sérieusement l'idée qu'il ne parvienne à l'entendre. Est-ce que je rougis ? Peut-être. Est-ce que je souris ? Peut-être aussi. J'ai l'impression d'être déconnectée de mes propres réactions, pour m'accrocher aux siennes. Ce silence qu'il laisse peser, sans s'expliquer plus que cela. Ce regard qu'il pose sur moi, dont je ne parviens à déterminer le sens ou la profondeur. Ce visage qui me semble inexpressif, et en même temps plein d'émotions auxquelles je n'ai pas accès.
A ce moment là, William m'apparaît vraiment comme cet ouvrage d'une langue morte que je ne sais pas déchiffrer.
Une langue morte que j'ai envie de ressusciter. Pour que je comprenne le sens de sa personne. Et que je sois la seule.
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Et vous Damon, ou Stephan ? x)
Je vous mets une info en ligne demain concernant la période de mise en ligne de la suite.
Kiss :*
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