Chapitre 28

Juste pour vous prévenir qu'il n'est pas corrigé (j'ai déjà trouvé la force de le terminer au milieu du covid, il faut pas m'en demander trop x)). Bonne lecture !

PDV Kanako

Leurs regards. Leurs rires, leurs blagues. Leurs présences, tout simplement. Ils sont là, et en ce moment, j'ai l'impression que rien d'autre ne compte. Il n'y a plus ce silence pesant, cette sensation néfaste qui me prend aux tripes. Non, il n'y a que de la joie. Pendant un moment, un long moment, j'oublie. Je ne pense qu'à eux. Qu'à Arwen, qui se goinfre de chips, qu'à Lewis, qui le charrie sur son appétit vorace tout en ne laissant aucune miette lui même du saucisson devant lui. Qu'à Natt, qui tente de tricher à chaque jeu et se victimise chaque fois qu'il se fait prendre, qu'à Charlotte, qui mène la danse, de sa prestance éclatante. Et qu'à William. William, dans le coin de cette pièce, appuyé contre le mur. Dans un fauteuil, derrière nous. Sur une chaise, en bout de table. Toujours silencieux. Toujours attentif. Son regard toujours braqué sur moi. Il m'analyse, me scrute, et pourtant, son attention permanente ne me gêne pas. Elle me touche. Elle me rassure. Elle me fait du bien. Il est là, et je sais qu'au fond, il est à l'origine de tout cela. Des moments qu'il n'apprécie pas vraiment, mais qu'il m'offre, parce que moi, j'aime ça.

J'aime comme cet homme tyrannique met de côté tout ce qu'il est pour me donner des moments de joie. Cette partie de sa personnalité qu'il n'accorde que peu aux autres, il me la laisse apercevoir. La toucher. Et je crois que je ne pourrais pas supporter qu'il arrête. Parce que je commence à m'attacher à cette facette de lui. A toutes ses facettes, en réalité. Il devient une constante dans ma vie désordonnée. Une constante dont j'ai besoin pour avancer.

— Bon sang, Natt, on a dit qu'on ne pouvait pas mettre un +4 sur un +2 !

— Et pourquoi pas ?

— Ce n'est pas le même chiffre !

— Ça reste une addition.

— Et depuis quand tu aimes les mathématiques, hein ?

— Je suis choquée que tu ne connaisses pas mon amour pour cette matière. Quelle piètre petite amie.

Il place une main sur son cœur, utilisant à tort et à travers son regard de chien battu, qui jusqu'à preuve du contraire, n'a jamais marché sur personne. Cha' menace lui envoyer une cacahuète en plus tête quand Arwen s'intègre au débat.

— Dans les faits, l'un des créateurs du UNO a annoncé aussi qu'on avait pas le droit de mettre un +2 sur un +2.

— Ça, c'est tout à fait faux. On le droit.

— Ça reste le créateur Lewis, je pense qu'il le sait mieux que nous.

— Et bien moi je pense qu'il ne sait pas jouer, voilà tout. Dans quel monde vit-on si on ne peut pas faire 3 tours de +2 et faire piocher à l'un des joueurs 36 cartes ? Ce jeu n'aurait aucun intérêt.

— Je suis bien d'accord !

— Natt, ça ne change rien au fait que tu ne peux pas poser ce +4, alors pioche, bon sang !

Dépité de ne pas trouvé de soutien même chez Lewis, le concerné rumine et attrape de mauvaise grâce les cartes qu'il doit piocher. Il me tire un rire tandis qu'il maugréé contre nous tous et que Charlotte met sa menace à exécution en lui envoyant des cacahuètes en plein visage. Il râle encore plus, se vengeant avec l'envoi de morceaux de papiers qu'il déchiquette de sa serviette, et qui n'atteignent jamais leur cible, trop légers qu'ils sont.

— Les éléments sont contre moi !

— Ça prouve que tu as tort, voilà tout.

Charlotte lui tire la langue avant de se tourner vers moi et de m'offrir un clin d'œil devant mon sourire. Elle pose sa main sur la mienne, dans un geste d'une grande douceur, qui me fait autant de bien que leur présence. Elle ne dit rien, elle n'en a pas besoin. Son sourire, son regard, la douceur de sa peau, tout me fait comprendre ce qu'elle veut me transmettre. Et cela gonfle mon cœur d'un sentiment que je n'avais pas ressenti depuis longtemps. Quoi que je me demande si je l'ai déjà ressenti.

Mon regard glisse un instant un peu plus loin, et rencontre inévitablement ce bleu pâle perçant qu'il aborde. Je n'y décèle rien, rien de plus qu'un demi-sourire, que je devine en même temps sur ces lèvres. Presque caché. Presque offert uniquement à mes yeux. Je n'y décèle presque rien, et pourtant, pourtant il me fait bouillir. Il me fait rougir. Dans une veine tentative de m'en échapper, de ne pas lui laisser le loisir d'apercevoir cette teinte sur mon visage, je me précipite vers la cuisine en attrapant un plat vide, leur faisant comprendre que je vais chercher d'autres choses à grignoter.

En réalité, je m'enfuis. Je fuis son regard, je fuis ma réaction, je fuis ce que je ne veux pas en comprendre. C'est plus simple.

Je suis en train de couper une pizza lorsqu'une voix me fait sursauter. Pourtant, je l'ai senti arriver. Son parfum s'est insinué jusqu'à mes narines, la tonalité de ses pas, de sa respiration. Et l'aura qu'il dégage, venue doucement m'effleurer. Comme si j'avais un sixième sens, pour rattraper celui perdu. Mais seulement pour lui.

— Tu veux en parler ?

Je me tourne vers lui, et vois la cassette dans sa main. Je n'ai besoin que d'un regard pour savoir qu'il a compris. Et je ne m'en étonne même pas.

— Regarder tes anciennes prestations en ce moment, était-ce l'idée du siècle ?

Je pourrais lui dire qu'il a raison. Je pourrais me confier. Mais tandis que son regard plonge dans le mien, je sais que je n'en ai pas besoin. Qu'il a déjà ses réponses. Et que la seule chose dont j'ai vraiment besoin, à ce moment là, c'est de son caractère butant contre le mien. D'un sourire. Le sien, le mien. Le notre. Alors je tire mon téléphone de ma poche, et je fais en sorte de l'obtenir.

Es-tu en train de sous-entendre que j'ai de mauvaises idées ?

Un rictus se dessine, et mon cœur semble s'envoler. Au final, c'est tout ce qu'il manquait à cette soirée.

— Je ne sous-entends pas, j'affirme.

Comment dois-je le prendre ?

— Que veux-tu, tu es un petit zombie, on ne peut pas trop t'en demander.

Dis le tyran qui m'en demande toujours plus.

Il avance de quelques pas, s'appuyant sur contre le plan de travail où je découpe la nourriture. Il est proche, et pourtant, je me refuse à dire qu'il l'est trop. Parce que d'ici, je distingue deux fois son sourire. Sur ses lèvres, et dans son regard. Cette lueur qui s'illumine au fond d'eux, qu'il ne réserve qu'à quelque personne. Comme j'aime la voir briller en face de moi.

— Tu es bien téméraire, ce soir.

Je ne peux pas cacher mes joues qui rougissent, pas plus que je ne peux détourner mon regard de son sourire qui s'agrandit, fier de lui. Je sais pertinemment que je ne gagnerai pas au jeu des taquineries avec lui, pourtant, je ne suis pas prête à mettre un terme à cette conversation. Tant pis pour ma gêne, je préfère rougir devant lui que d'instaurer le silence.

Peut-être suis-je simplement moi-même.

— Le petit zombie sait se défendre.

Il peut attaquer aussi.

Il retient un rire quand Natt passe sa tête par la porte pour demander si nous avons besoin d'aide. Je le soupçonne d'avoir voulu espionner, plutôt.

— J'espère que tu n'embêtes pas ma Kana, monstre sans cœur !

William hausse un sourcil en croisant les bras, son regard braqué sur son cousin.

— Ta Kana ? Devrait-on demander à Cha' ce qu'elle pense de cette formulation ?

— Tu es vraiment... vraiment...

— Reviens nous voir quand tu auras trouvé un mot pour finir cette phrase.

Il lève les yeux en ciel quand le blond quitte la pièce en râlant, et je suis gênée qu'il détourne son regard sur moi pour me trouver souriante en le regardant.

— Quoi ?

Rien... C'est juste que j'aime les interactions que tu peux avoir avec lui.

Il m'observe, sans rien dire de plus, et je me surprends – ou peut-être pas – à ressentir un manque de sa voix. Alors malgré moi, je reviens sur ce sujet que je n'ai pas envie de lancer, simplement pour l'entendre encore un peu. Je reste consciente que le moment touche à sa fin, car malgré toute ma bonne volonté à découper très longtemps cette pizza, il ne me reste pas grand-chose à terminer. Je me retrouve à vouloir profiter des dernières secondes, sans silence, avec son timbre si particulier.

Comment tu as deviné ?

Je lui pointe du menton la cassette qu'il a déposé à côté de lui.

— Avec un accessoire qui s'appelle cerveau. Je sais que peu de personne dans cette maison à l'heure actuelle en sont dotés, mais ça sert vraiment.

J'attrape un torchon à côté de moi et lui lance sur le torse, ce qui lui provoque un rictus toujours un peu plus joueur.

— Tu t'es senti visée petit zombie ? C'est toi qui l'a interprété de cette façon.

Tu es bien loquace, ce soir.

Et pourtant, je ne voudrais pas qu'il le soit moins. Il capte que je reprends ses mots et s'en amuse, mais semble avoir capté bien plus que ce que je n'aurai voulu qu'il comprenne.

— Tu veux que je me taise, peut-être ?

Je baisse les yeux sur le plat dont je m'occupe toujours pour lui éviter mon visage couleur tomate, qui je sais ne lui échappe pourtant pas.

— C'est bien ce qu'il me semblait.

Un sourire étire mes lèvres, en entendant le sien dans son timbre.

— Bon, tu es en train de la fabriquer cette pizza Nala ?!

La voix de Lewis à travers les murs me rappellent que je ne peux plus traîner indéfiniment, alors j'attrape l'assiette et retourne les voir. Je suis accueillie à coup de grandes exclamations, et c'est presque si je ne fais pas tomber le tout quand plusieurs mains voraces se jettent sur l'assiette encore en équilibre dans mes bras.

Je remarque bien vite que William ne m'a pas suivi, et avant que je n'ai le temps de me demander pourquoi, mon téléphone vibre. Et mon cœur aussi.

Ne restes pas seule la prochaine fois. On est là.

Parce que dans son on, je lis un je. Même si je n'en ai pas le droit.  


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