Chapitre 34 : peux-tu garder un secret ?

Le soleil illuminait de ses doux rayons la ville encore endormie de Magnolia. Seuls les plus courageux étaient levés à cette heure matinale un dimanche matin. Dans l'hôtel où reposaient, encore assoupis, Lucy et Natsu, pas un bruit ne se faisait entendre. Enfin si : un bruit, un faible ronflement qui semblait venir de la suite 610...

Il provenait de la jeune fille blonde, qui tenait serré contre elle le corps musclé du chanteur. La bouche ouverte, les paupières closes, sa poitrine se levait et s'abaissait de manière régulière, accompagnant le ronflement ténu.

Quand soudain, peut-être par la faute des malicieux rayons de soleils qui perçaient à travers la fenêtre, elle s'éveilla. La première chose qu'elle vit fut le visage paisible de Natsu. Elle sourit, attendrie, et se fit une fois de plus la réflexion qu'il ressemblait à un gamin. Mais un gamin mignon ! Elle s'aperçut ensuite qu'elle le tenait serré entre ses bras fins et recula, le coeur battant à tout rompre, priant pour qu'il ne se soit aperçu de rien. C'est à ce moment que le jeune homme s'éveilla, clignant des yeux.

-Bonjour ma Luce...

Le cœur de l'adolescente fondit comme neige au soleil à l'entente du surnom. Elle sentit une vague d'amour la traverser de part en part, et sa poitrine se gonfler de joie. Ses pensées s'entremêlèrent. Elle était tellement heureuse d'être là qu'il n'y avait pas de mots assez forts pour décrire son état d'esprit. Elle voulait juste figer cette instant à tout jamais. Mais rien n'était capable de le faire, alors elle se contenta de répondre d'une voix encore ensommeillée :

- Bonjour ! Bien dormi ?

- Oui et toi ?

Elle se retint de justesse de répondre "évidemment, j'étais dans tes bras" pour simplement opiner. Natsu sourit alors, et reposa sa tête contre l'oreiller.

Ils restèrent encore quelques instants chacun de leur côté du lit, enveloppé dans le silence, puis le chanteur se leva et annonça qu'il allait prendre sa douche. Lucy resta seule dans le grand lit, et en profita pour se pelotonner sous la couette dans une tentative de se rendormir. Elle y parvint à demi, blottie sous les couvertures, coupée du monde extérieur pour se réfugier dans son propre petit univers peuplé de rêveries romantiques.

Ainsi, elle n'entendit pas qu'on frappait à la porte, ni cette dernière s'ouvrir, ni les pas se rapprocher jusqu'au lit. Quand elle entendit la voix appelant Natsu, il était déjà trop tard. 

Peut-être que si elle avait réagi avant, si elle s'était cachée, dissimulée dans l'un des recoins de la pièces, ça ne serait pas arrivé. Mais elle ne pouvait pas savoir, elle ne pouvait pas imaginer qu'il viendrait jusque ici.

-Natsu ? Tu dors encore ? Tu sais que j'ai prévu un photoshoot à 9h ? Il te reste plus qu'une demi-heure, hop hop hop, magne toi !

Les inflexions de la voix grave qui lui parvenaient jusque sous l'épaisse couette traversèrent les limbes embrumés de son cerveau avant d'atteindre leur destination. Et soudainement, elle réalisa qui se tenait là, à l'extérieur, et son sang se figea dans ses veines. Elle se recroquevilla sous la couette, comme si cela pouvait la protéger, priant pour qu'il ne pousse pas ses recherches plus loin. Elle revoyait Lisanna devant elle, et presque en écho les horribles phrases qui lui avait valu sa descente aux enfers.

"Arrêtez ! Je vous en supplie, arrêtez !"

Le responsable de tout cela... Celui qui avait fait de la vie de Lisanna un enfer.... N'était autre que Mr Mashima, qui se tenait à l'instant même juste à côté d'elle !

-Natsu, fais pas le difficile s'il te plaît, je sais que t'as eu une dure soirée mais faut se lever !

À la grande horreur de Lucy, l'homme commença à tirer sur la couette. Elle tenta de résister mais fut moins forte. Le duvet valsa dans les airs, la révélant en sous-vêtements devant le manager de son petit ami.

-Lucy ?! s'écria-il, réellement surpris.

-Mon... monsieur Mashima... bredouilla-elle, tentant de cacher sa peau nue avec les oreillers ayant survécu à la bataille de la veille.

L'homme fit de grands yeux ronds et ouvrit la bouche avant de la refermer, bien trop stupéfait pour pouvoir articuler quoi que ce soit d'intelligible. Mais il reprit son sérieux aussi vite et fronça les sourcils d'un air menaçant.

-Je croyais pourtant t'avoir fait comprendre que ta relation avec Natsu était impossible, rétorqua-il d'un ton agressif. J'espère que personne ne vous a vu ensemble ?

Lucy se garda bien de lui annoncer qu'ils s'étaient baladés en plein centre-ville, un samedi soir. Elle se contenta de ramener la couette sur elle et de fixer avec autant de hargne qu'elle le pouvait les petits yeux noirs et froids de Mashima. Mais à son grand étonnement, il s'adoucit et commença à parler :

-Je vois bien qu'à tes yeux, je suis le méchant. Mais il faut que tu saches que je ne le fais pas non plus de gaieté de coeur.

Il poussa un long soupir et s'assit sur le bord du lit.

-Tu vois Lucy, le succès, c'est éphémère.

Il marqua une pause pour accentuer son effet, et reprit d'un ton monocorde :

-Certaines personnes ont de la chance. Elles parviennent à se hisser au sommet de la gloire sans trop d'efforts. D'autres triment pendant des années sans jamais percevoir la moindre reconnaissance. Alors quand elles rencontrent enfin le succès escompté, elles font tout pour ne pas retomber dans l'oubli. Tous les moyens sont bons, à ce jeu-là, même les pires ou les moins légaux. J'ai connu une jeune fille, une violoniste, talentueuse. Elle se fichait pas mal d'être connue ou non, mais ce n'était pas le cas de sa mère. Cette dernière l'a forcée à se produire dans des salles de plus en plus grandes, à enchaîner les entraînements, les concours. Elle voulait voir sa fille briller, et aveuglée par ses rêves de gloire, elle ne se préoccupait plus de son bien-être.

-Qu'est-il arrivé à la fille ? murmura Lucy, un horrible pressentiment lui  tordant l'estomac.

-Elle s'est suicidée, répondit simplement le manager. Elle ne supportait plus la pression, sa passion était devenue son chemin de croix. Ce que je veux expliquer par là, c'est que la célébrité monte vite à la tête des gens. Et le succès ne dure pas toujours. Natsu, Gajil, Sting, Wendy, ils sont jeunes, et si fragiles, même s'ils n'en ont pas l'air. Pour l'instant, ils sont adulés de partout, et peu de détracteurs se font entendre, mais est-ce que cela durera pour toujours ? Rien n'est moins sûr. Et les mauvaises critiques peuvent faire plus de mal qu'on ne le pense, en particulier chez  des adolescents. Pour éviter ça, mon boulot c'est qu'ils continuent à être au top, jour après jour.
Quand je suis arrivé dans leur loge hier, ils m'ont mis sous le nez cette histoire de contrat, comme quoi il n'était pas légal, etc. J'ai dû leur en expliquer les enjeux, alors je vais faire pareil avec toi. Je t'assure que ce n'est pas contre toi , Lucy. Natsu et toi formez un joli couple. Simplement, le public des Dragon Slayers est composé majoritairement de filles âgées de 12 à 18 ans. Ces filles sont souvent à la recherche d'une idole, un garçon la plupart du temps, avec lequel elles peuvent expérimenter les premières phases du sentiment amoureux. Bien souvent, lorsqu'elles sont fans, elles affichent des posters, achètent des objets dérivés, etc.

Lucy songea à Lila, à sa chambre pleine d'affiches.

-Ces jeunes filles rêvent d'être repérées par leur idole, et parfois même de sortir avec. C'est là le coeur du problème. Si le garçon dont elles rêvent est déjà pris, cela ne laisse pas la place aux fantasmes. Elles s'en désintéressent, puisqu'il n'est plus accessible.

-Mais c'est stupide ! argumenta Lucy. Certaines peuvent aussi aimer le couple qu'ils forment ! Et puis elles savent bien que c'est impossible qu'elles sortent avec !

-Tttt. Elles savent que c'est impossible, mais elles aiment rêver. Ainsi, Natsu n'a pas l'autorisation de sortir avec quelqu'un, car cela ferait baisser sa cote de popularité.

Lucy n'en croyait pas ses oreilles. Elle se redressa d'un bon, oubliant sa tenue.

-Tout ça, c'est pour une vulgaire histoire de popularité ?! J'y crois pas ! Vous avez BRISÉ la vie de Lisanna ! Vous l'avez forcé à changer de lycée ! Vous l'avez fait passer pour une - une - une fille de joie !

La colère la faisait bégayer.

-Et tout ça pour que votre petit groupe continue à être au top ? Ça me répugne ! Vous êtes un homme ignoble !

Elle haletait, debout sur le lit, un doigt pointé sur Mashima. Curieusement, il semblait presque ... coupable ?

-Je sais, et c'est pour ça que je suis là aujourd'hui, répondit-il simplement. Je veux faire quelque chose pour vous. Les autres du groupe m'en ont fait prendre conscience. Je n'ai pas le droit de priver ainsi Natsu de sa jeunesse...

-Quoi ? fit Lucy, abasourdie, en retombant sur le matelas qui tressauta.

-Je t'autorise à sortir avec Natsu.

La jeune fille ne releva pas le verbe, qui selon elle n'avait rien à faire là, étant dans un pays libre elle n'avait pas besoin d'autorisation, mais elle écarquilla les yeux.

-Vous... mais... le contrat ?

-À la condition, reprit Mashima, que jamais cela ne s'apprenne.

-Vous voulez ... Qu'on se voit en cachette ?

-C'est à peu près ça, oui. Que je ne retrouve pas votre histoire à la une de tous les journaux. Vous pourrez faire ce que vous voudrez, du moment que personne n'est au courant.

Lucy n'y croyait pas. Après tout ce speech, ils avaient le droit d'être ensemble ? 

-Hey, Luce, qu'est-ce que tu dirais de... commença Natsu en sortant de la salle de bain.

Il se figea en voyant son manager.

-Qu'est-ce que tu fais là ?!

Mashima leva les bras en signe de paix.

-Du calme ! Je viens t'annoncer que désormais, tu peux être avec ta petite copine.

-Quoi ?

La réaction de Natsu fut presque la même que celle de Lucy, exception près qu'il se jeta sur la chanteuse pour l'embrasser à pleine bouche.

-Oi ! Vous n'êtes pas obligés de vous peloter devant moi ! protesta Mashima en se levant. Je vous laisse vous habiller, mais Natsu, tu as séance de photos je te rappelle. Lucy, tu veux que j'appelle un taxi ?

Après tout ce qu'il avait fait, il semblait si gentil, si attentionné ! L'adolescente avait encore du mal à y croire.

-Non merci, je vais me débrouiller, assura-elle.

Elle rassembla le peu d'affaires lui appartenant éparpillées dans la pièce et s'habilla rapidement, puis adressa un petit signe de la main à Natsu.

-On s'appelle ! lui cria-elle en fermant la porte.

Une fois dans le couloir désert, elle ne put s'empêcher de pousser un petit cri d'excitation. Rapidement, elle dévala les escaliers jusqu'à arriver à la réception où elle salua deux ou trois personnes assises sur les canapés en cuir. Puis elle sortit, toujours vive et fraîche, et commença à chercher un plan des lignes de métros quand une voix familière lui parvint :

-Lucy ? LUUUUCYYYYY !

Surprise, elle se retourna, et aperçu sa soeur, Annabeth et Liz qui attendaient toutes les trois près d'une voiture noire.

-Lucy ! On t'a cherché partout, commença Liz en arrivant, essoufflée.

-Je savais que t'étais là ! clama Lila au même moment.

Et elle se jeta dans les bras de Lucy, qui sentit une pointe de remord lui tordre le coeur. Depuis son retour à Magnolia, elle avait ignoré sa petite soeur, ne s'occupant que de Natsu. Il fallait qu'elle rattrape ce temps perdu, maintenant que tout était arrangé.

-Désolée de vous avoir causé autant de soucis, s'excusa-elle auprès de Liz.

-T'en fais pas, va, je sais que t'es une grande fille.

Le retour jusque chez Lucy et Lila s'opéra dans un joyeux bavardage, tournant principalement autour du concert. Lucy se retenait de ne pas clamer tout haut "je sors avec NATSU DRAGNIR!", car s'il y avait une personne qui ne savait pas garder les secrets, c'était bien Lila. En revanche, dès qu'elle fut chez elle, dans sa chambre si familière, elle s'empressa d'appeler Reby pour tout lui raconter.

-Allô ? Ohlala, c'est un truc de fou attend faut que je t'explique tout !...

Lucy était si absorbée qu'elle ne remarqua même pas la porte de sa chambre entrouverte, et Lila appuyée derrière qui ne manquait pas le moindre détail...

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