Chapitre 12 : La décision de maman
Je devais bien avouer que cette discussion m'avait fait du bien. Savoir qu'elle m'acceptait malgré mon sang humain, et surtout... Qu'elle n'arrivait pas à me détester. J'avoue que quand j'y repensais, j'avais un sourire idiot collé au visage. J'espérais juste ne pas me tromper, et que ça durerait. En tout cas, je ferai tout pour ça.
Et j'étais aussi content qu'elle m'avoue quelque chose d'aussi dur. La pauvre, franchement. Voir une femme, une vastaya comme elle, aussi meurtrie et trahie, ça me donnait des envies de meurtres. Et d'un autre côté, je me sentais honoré d'avoir réussi à avoir sa confiance malgré tout, car même si elle ne le disait pas, je me doutais que ce n'était pas une chose facile à obtenir de sa part.
Je voulais faire en sorte de devenir un vastaya dans l'âme, même s'il me serait difficile parfois d'appliquer leur code d'honneur à la lettre... Notamment sur le mensonge, j'essaierai. Je voulais être réellement digne d'être appelé son « partenaire », et me débarrasser, un tant soit peu, de ce foutu sang humain.
Ce fut donc repos forcé pendant une bonne partie de la journée, et ça nous faisait pas de mal. Entre moi qui avais oublié ce qu'était la retenue contre mon putain de père, et elle qui était épuisée... Et puis, apaisés comme on l'était après avoir parlé, rien ne nous empêchait de fermer l'œil. L'un à côté de l'autre. Comme si c'était la chose la plus normale qui soit. J'espérais que ça le reste.
Malheureusement, quelque chose me tira de mon sommeil si tranquille. Quoi ? La voix la plus agréable du monde – je déconne – bien évidemment, celle de Sekiko.
- Boss ! Désolée de vous déranger, mais nous devons gérer ce qu'il s'est passé hier. Et puis... Savoir si vous allez bien, on s'inquiète Boss.
J'avais grommelé, rabattant l'autre bout de l'oreiller sur mon oreille. Mais elle insistait !
- Tu devrais lui répondre, Sett.
Et Xayah qui s'y mettait. Bon, au moins, elle ne me rabattait pas le même refrain qu'elle. Responsabilités, argent, combat, paperasse. Bla. Bla. Bla.
- C'est bon, j'arrive ! Grognais-je vers la porte pour la faire taire.
Je soupirais de toute mon âme, me redressant en me frottant un peu les yeux. Si seulement j'avais pu dormir toute la journée... A croire que mon rôle de patron n'était qu'un titre sans aucune valeur. J'avais besoin d'elle, mais je crois qu'elle profitait un peu trop de ça... Il faudra que je règle ça, et vite. Mais pour l'instant j'avais plus urgent à gérer.
Je me tournais finalement vers Xayah, qui venait de remettre sa fameuse capuche.
- Tu viens avec moi ? Demandais-je sur un ton radicalement différent.
- Evidemment. Qui d'autre que moi pourrait éviter que tu égorges tout le monde parce que tu es ronchon au réveil ?
J'avais ri, surpris aussi par sa réponse à ma question vraisemblablement sérieuse.
- Pas faux.
Après une rapide toilette, on était sortis, et pour ne pas que cette fille me saute dessus, ou pire, qu'elle me touche, je lui avais assuré avoir soigné moi-même mes blessures que j'étais au mieux de ma forme. Ce qui n'était pas vraiment un mensonge au final, puisque j'avais rarement aussi bien dormi depuis longtemps.
Et je préférais ne rien dire concernant les soins de Xayah. Déjà que l'idée de l'accueillir ici ne semblait pas lui plaire, je ne voulais pas lui apporter de problèmes en parlant trop. Ce n'était pas vraiment un mensonge... Une demi-vérité. Je crois que je devrais me contenter de ça pour commencer.
Elle la regardait toujours avec un regard jugeur, et même si je savais que Xayah lui répondait avec un sympathique sourire narquois, je ne pouvais pas m'empêcher d'être agacé.
- Et concernant le détenu, il –
- Ça va, je sais. Tout ça ne te concerne pas. Ça ne concerne que lui, moi, et Xayah. Alors tu restes ici, ai-je été clair ?
- O-Oui, très clair...
Je n'avais pas besoin d'ajouter quoi que ce soit pour que la vastaya me suive. Sekiko semblait surprise par ma froideur, et tant mieux. Qu'est-ce qu'elle croyait sérieux ?!
Bref, nous avions descendu les escaliers menant aux geôles. Un endroit sombre, humide, et grouillant sûrement d'insectes divers et variés. J'allais dire à Xayah qu'elle n'était peut-être pas obligée de me suivre jusque-là, mais elle avait son air habituel, nullement rebutée par les lieux. Elle m'adressa simplement un regard interrogatif lorsque ma tête se tourna vers elle, pour au final ne rien dire. Juste un sourire en coin étira mes lèvres, me trouvant idiot d'avoir cru, l'espace d'une seconde, qu'elle pouvait être comme les autres. Mais mon sourire s'estompa bien vite.
Nous avions passé plusieurs cellules, où des os traînaient ici et là. Et j'ignorais moi-même de quand ils dataient. Puis arriva enfin son tour. Il n'avait été soigné que rudimentairement, et son bras démoniaque était aussi noir que le charbon. Aucun de ses corbeaux n'étaient là pour nous narguer non plus. Voir Swain, le grand général de Noxus, réduit à l'état de prisonnier sans bien ni armure, dépourvu même de magie grâce à des menottes spéciales... C'était particulièrement satisfaisant. Pour moi comme pour elle.
- Alors, « général », qu'est-ce que ça fait de devenir un vermisseau dans l'arène de son fiston renié, hein ?!
Tout ce qui passa ses lèvres, c'est un soupir, avant de tousser bruyamment. Mais un certain sourire lui restait collé au visage. Et ça avait le don de me faire péter un plomb.
- Combien de fois il faut que je t'éclate la tronche pour décoller ton sale sourire de ta face de traître ?!
Je l'avais soulevé d'une main, sans armure ni magie, il n'était qu'un vieillard chétif ordinaire finalement. Quand je repensais à tout ce qu'il avait fait... Comment pouvait-il sourire ?!
Xayah vint poser une main sur mon bras, me faisant pester et le relâcher. Elle n'avait pas besoin de mots. Je savais que celle qui déciderait de son sort, c'était maman, et personne d'autre.
- Tu es devenu fort, Sett.
- J'ai pas besoin de tes compliments.
Qu'est-ce qui lui prenait ? Comme si j'avais envie d'entendre ce genre de trucs d'un père déserteur ! Un père parti à la quasi naissance de son fils, qui, à cause de lui était un bâtard. La naissance d'un être indésiré des humains comme des vastayas. Quoi que je fasse, rien ne suffisait à prouver que j'avais autant le droit de vivre que les autres. A cause d'un sang souillé, un sang que je n'avais pas demandé ! Dire que tout ce que je voulais à l'époque, c'est qu'on puisse être fier de moi. J'étais vraiment naïf. Tout ça, j'avais tenté tant bien que mal de ne pas y penser. Mais devant sa sale tronche, c'était difficile à ignorer.
Encore une fois, ce fut les doigts de Xayah qui me réveillèrent de mes pensées. Elle venait de les resserrer doucement pour me faire réagir, et j'avais posé ma main sur la sienne, relevant la tête. Oui, je devais lui faire face, la tête haute.
Il était retombé par terre, et je l'avais à nouveau saisi pour le faire se lever.
- Avance. Tu dois des excuses à quelqu'un.
Il se tourna vers moi, comme pour chercher une réponse à sa question silencieuse. Mais tout ce qu'il vit, c'était de l'indifférence. Mais s'il ne devinait pas, c'est qu'il était franchement con.
Nous n'étions pas passés inaperçus dans les rues de la ville, même si le soleil commençait à décliner fortement. Le trajet fut silencieux jusqu'à la porte de la maison de maman. Ma mâchoire se contracta, j'étais énervé à l'idée de la voir triste. Est-ce que c'était vraiment la bonne chose à faire ? Je commençais à sérieusement en douter.
Le poing serré, presque tremblant, j'avais poussé Swain pour qu'il ne voit pas en proie à ce dilemme intérieur. Mais quand bien même je n'avais pas dit quoi que ce soit, puisque j'essayais de me contenir, Xayah vint doucement prendre l'une de mes mains dans les siennes. Mon regard s'éclaira, bien que j'étais surpris par ce geste aussi délicat de sa part. Décidément, qu'est-ce que je ferai sans elle ?
- Tout ira bien. Je suis là, Sett.
J'avais soufflé du nez, esquissant même un sourire. C'est qu'elle pouvait être mignonne quand elle voulait dites donc. Mais elle avait raison, je n'étais pas seul dans cette galère. Et ma mère avait le droit de savoir.
Redressant le menton, j'observais Swain qui semblait perplexe devant cette bicoque qui servait de résidence à ma mère. Si seulement elle acceptait de déménager, rha. J'aurai pu être fier de dire que j'avais mis ma mère à l'abri, alors que lui c'était barré du jour au lendemain !
Tant pis. Je repris mon paternel par le col pour le traîner dans la pièce principale, l'une des seules pièces en somme, mais ma mère n'était pas là.
- Maman ? J'ai un colis pour toi.
J'entendis des pas se rapprochant, je compris donc qu'elle était dans sa chambre. Peut-être qu'elle se préparait à dormir ? La pauvre, et si ça lui provoquait des cauchemars ? Mais il était trop tard pour reculer maintenant.
- Sett ? Tu es venu avec Xayah j'espère ? Qu'est-ce que tu... Fais là si tard ?
En entrant dans la pièce, et qu'elle vit Swain, il y eut un blanc. Tout deux se regardèrent, et le regard surpris de ma mère passa à la neutralité lorsqu'elle le reconnu. Elle ne semblait même pas en colère. En tout cas, elle ne le manifestait pas. Quant à lui, il baissa la tête après l'avoir détaillé des yeux pendant quelques secondes.
Brisant cette situation étrange, je l'avais forcé à s'agenouiller, alors qu'il balbutiait des mots incompréhensibles.
- Swain. Je n'ai pas besoin de t'expliquer la situation dans laquelle tu nous as mise en partant du jour au lendemain. Tu as préféré le profit à ta famille. C'est un acte impardonnable pour n'importe quel vastaya, et tu le sais très bien.
- Je sais, je... J'y ai beaucoup réfléchi, et je le regrette profondément. Je suis désolé.
- Foutaises ! Intervenais-je, ne pouvant pas rester silencieux face à ce mensonge. Tu sais pas ce que c'est d'avoir passé sa vie à être critiqué et insulté ?! Tout ça à cause de toi ?!
- Sett, laisse-le finir, déclara-t-elle d'un geste de la main.
Je savais que ça ne servait à rien de m'entêter, mais c'était tellement frustrant ! Heureusement, Xayah n'avait pas lâché ma main, malgré mes gestes brusques et la forte pression que j'exerçais maintenant dessus. Qui sait dans quel état il serait arrivé ici si Xayah n'avait pas été avec moi ?
- Ça ne rattrape en rien ce que j'ai fait mais... Si je t'ai aidé à devenir plus forte Xayah, c'était peut-être pour me racheter, en aidant une vastaya...
Il lui adressait un sourire, qui semblait sincère en plus ! Je l'avais rapproché de moi quand il déblatéra ses paroles sous l'air surpris de la concernée.
- Tu me donnes envie de vomir. Après l'avoir forcé à obéir à tes ordres, et l'avoir blessé, tu oses dire ça ? Devant moi ?!
- Je reconnais que la méthode n'était pas forcément la bonne. Mais les résultats sont là. Xayah, tu n'as jamais été aussi forte que maintenant. Je voulais que tu comprennes que tu n'aurais jamais été plus puissante en ayant rien à protéger. Je ne voulais pas que tu commettes la même erreur que moi !
Xayah paraissait ne pas savoir comment réagir, et je la comprenais bien. Elle devait se dire qu'il n'avait pas tort, mais ne voulait pas l'admettre devant moi. Tss, qu'est-ce que ça pouvait m'énerver.
- Ça suffit Swain. Je ne veux plus entendre un seul mot. Tu as commis des péchés qui, à l'époque, t'auraient coûté la vie. Mais je vois que tu as pris conscience de tes erreurs. Cependant, ça ne suffira pas à te les faire pardonner.
Elle se rapprocha pour se mettre à sa hauteur, avant de venir relever son visage de ses deux paumes. Et malgré tout, elle lui souriait.
- Va t'en. Va t'en loin. Expie des fautes, et peut-être un jour pourrons nous sourire ensemble à nouveau, Swain.
Voir ma mère endosser le véritable rôle d'une vastaya pure souche était... Perturbant. Enfin, pas autant que sa sentence. Elle aurait pu me demander n'importe quoi, elle le savait. Mais elle avait choisi de le bannir, purement et simplement. Il était clair... Qu'elle l'aimait encore. N'empêche qu'il semblait aussi surpris que moi, et je devais bien le reconnaître, il semblait s'en vouloir pour de vrai.
Je n'avais pas d'autre choix que de le détacher, et de le jeter dehors avec une dernière réprimande. Pour ma part, j'espérai qu'il ne remette jamais les pieds à Ionia.
Une fois ça fait, j'avais refermé la porte, regardant ma mère qui soupira en se laissant tomber sur une chaise, et Xayah lui amenant un verre d'eau.
- T'es sûre m'man ?
- Plus que jamais mon fils, me sourit-elle, soulagée.
Xayah me regarda, visiblement un peu inquiète. Pour ma mère, pour moi ? Sûrement les deux. Elle devait être encore perplexe de ce que cet enfoiré lui avait dit, aussi.
Je n'avais plus qu'à me gratter l'arrière du crâne, poussant un soupir bruyant. Si c'était ce qu'elle voulait, je m'en contenterai.
- Vous vous êtes battus contre lui, n'est-ce pas ?
- Euh...
Merde, c'est vrai qu'elle détestait que je me batte, et clairement ça se voyait là. Je réfléchissais à une excuse valable, quand Xayah me devança.
- Ne lui en voulez pas. Sett n'a fait que m'aider vous savez. Contre Swain... Et contre moi-même.
Ma mère posa une main sur le crâne de la violette, comme je pouvais le faire de temps en temps. Mais d'une façon bien plus maternelle.
- Tu n'as pas vécu des choses faciles, n'est-ce pas ? Ça ira pour cette fois, mais que ça ne se reproduise pas, Sett !
- Quoi ? Me battre pour aider Xayah, c'est pas une raison assez justifiée ?
Elle prit un air pensif, nous regardant tour à tour. Je me demandais bien ce qu'elle avait dans la tête.
- Bon, d'accord. Mais je compte sur toi pour ne pas lui laisser l'occasion de se servir de cette excuse, Xayah.
- Comptez sur moi, sourit-elle.
Voir une telle complicité entre elles me faisait chaud au cœur. C'était sûrement dû au fait que Xayah était toujours là, m'avait accepté tel que j'étais malgré un père humain pourri et qu'elle n'avait pas cessé de me soutenir.
- Et merci pour ce que tu as fait pour Sett. Il ne te le dira pas, mais je suis certaine qu'il est très touché !
- Maman !
Manquait plus que ça ! J'avais mis ma main sur le visage, au moins ça cachait les quelques rougeurs qu'elle avait provoqué. Et puis c'était pas vrai, je lui avais dit ! Du moins, j'espérais qu'elle l'avait compris.
Xayah sembla aussi gênée que moi, avant de répondre qu'elle n'avait rien fait d'extraordinaire. Après tant d'émotions, j'avais bien le droit de la taquiner. Après tout, je ne l'avais presque pas fait de la journée !
- Je croyais que le code d'honneur des vastayas prohibait le mensonge ?
- C'est mon ressenti, pas une vérité ! Rétorqua-t-elle du tac au tac.
Notre petite scène, entre moi très calme qui surenchérissais, et elle qui s'énervait, avait fini par faire rire ma mère. Et ça avait aussi calmé la vastaya à plumes.
Finalement, tout ça se termina avec ma mère autour d'un bon repas, pour me « féliciter de ne pas l'avoir égorgé » et remercier Xayah d'avoir retenu son « fils aussi borné ».
Mais une chose était sûre. Un jour, on entendrait à nouveau parler de Swain. De mon père. Et si c'était en mal, cette fois... Je lui briserai la nuque pour de bon.
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