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- Gguk ! Regarde-moi quand je te parle !
La voix tonitruante du plus âgé provoqua des frissons le long du dos du brun, qui rapidement se tourna vers lui, les bras chargés des cagettes de fruits et légumes. C'était le jour de marché, et tout deux se devaient d'y être avant sept heures et demie afin de pouvoir disposer leurs produits. Il vit le châtain arriver à grandes enjambées vers lui, le faisant reculer de quelques pas craintifs, peu sûr du destin qu'il allait vivre.
- Donne-moi ça.
D'un geste brusque, témoignant de sa nervosité et d'une certaine colère, le plus âgé lui arracha des mains les cagettes de tomates, les disposant de manière précaire à l'arrière du camion.
- Je vais fermer la maison, monte à l'intérieur et on y va.
Le ton était sec, sans appel ; Jeongguk ne réfléchis pas à deux fois avant d'opiner de la tête en signe d'accord. Il attendit que son ami ait le dos tourné pour pouvoir mettre comme il faut les cagettes, voulant s'assurer que rien ne puisse compromettre la vente des produits. Hâtivement, il vint se mettre à la place du passager, attendant le châtain qui ne tarda pas à arriver.
Le silence était assourdissant, Jeongguk, appréhendant déjà la vente, se trouvait d'autant plus nerveux d'être en compagnie avec Hoseok, qu'il avait vu changer du tout au tout ces derniers temps. Comme il regrettait que ses grands-parents soient tombés malades. Il avait découvert un nouveau visage chez son ami, qu'il aurait préféré ne jamais voir ; il était effrayant à tel point qu'il se demandait s'il n'était pas possédé.
C'est avec soulagement que le brun sauta du véhicule, pouvant ainsi respirer plus normalement qu'à l'intérieur du petit habitacle clos qu'il venait de quitter. Par l'heure matinale, la brise rafraichissait son visage, l'air était agréable.
- Gguk, je te laisse prévenir qu'on est là, je ramène tout sur les étalages.
Ledit Gguk ne prit pas la peine de répondre, il saisit l'occasion opportune de s'enfuir loin de lui pour un petit moment. Il traversa le marché de la place, saluant les quelques maraîchers qu'il connaissait, et s'engouffra dans la petite cabanette au fond, où se trouvait la fiche pour inscrire son arrivée. Il n'y avait personne à l'horizon, et se sentant soudainement prit de fatigue, il se laissa tomber au sol, la tête collée au pied de métal de la table. C'était froid, et il avait considérablement besoin de cette fraîcheur pour se sentir d'attaque à entamer cette matinée au marché seul avec son bourreau d'ami.
Il vint rejoindre Hoseok une demie heure plus tard, le retrouvant à aligner les fruits et légumes de manière trop parfaite.
- Non laisse moi faire, tu cherches à faire une belle présentation mais ça sert à rien. Ce qu'il faut faire c'est mettre les plus beaux au-dessus, comme ça.
Le brun accompagna le geste à la parole, bougeant et déplaçant quelques fruits. De manière soudaine, il sentit deux bras forts l'enlacer par derrière, ce qui lui provoqua un violent sursaut. Un malaise s'infiltrait en lui, courant dans ses veines, jusqu'à son cœur qui battait la chamade. Il ne comprenait rien à la situation, pourquoi Hoseok l'enlaçait ici et maintenant alors qu'il était froid depuis ce matin ? Et pourquoi Diable son cœur s'emballait à ce point à ce contact ? Il le savait battre de nervosité, mais une chaleur presque étouffante le compressait, et il en savait l'origine. Il ne pouvait pas tomber, avoir un quelconque sentiment amoureux à son égard, c'était tout bonnement impensable.
- Hoseok, lâche-moi s'il te plaît, les gens vont bientôt arriver.
Et toujours aussi contradictoire, l'interpellé le lâcha subitement, se reculant à pas moins de trois mètres de lui, le visage neutre. C'était à ne plus rien y comprendre. Jeongguk en restait bouche-bé, il changeait si vite de comportement qu'il en devenait effrayant - encore plus qu'il ne l'était déjà. Il déglutit difficilement et partit se ranger derrière l'étalage, la tête baissée sur le carnet de compte.
Le marché était bruyant, les familles se promenaient en faisant leurs achats du dimanche. La joyeuseté était à son paroxysme, hormis pour nos deux protagonistes au visage neutre. Depuis le début des ventes, seul le plus jeune s'attelait à encaisser les clients, le plus âgé restant en retrait dans son coin, analysant chaque personne passant devant leur étalage.
Un jeune homme, sûrement dans leur tranche d'âge, se fit honteusement pousser par ses amis devant eux. C'est les joues rouges écarlates qu'il balbutia un bonjour à Jeongguk, qui le regardait de ses grands yeux de biches. Il n'affichait plus son air neutre mais sympathique, non, il avait tout bonnement un sourire attendri ; ce qui n'échappa pas à l'œil de lynx d'Hoseok, qui décroisa bien vite ses bras. Il s'avança d'un pied ferme à leur rencontre, fusillant du regard le pseudo-client qui tentait de passer commande.
- Tu veux combien de grammes de fraises ? Si tu en prends cinq cents grammes il y a une réduction de moins vingt pourcent.
- Sauf pour les petits timides dans ton genre, on augmente les prix à deux euros de plus. Cracha le châtain de manière venimeuse.
Le jeune fut pris de court, ses yeux s'exorbitant face à cette aura terrifiante qui émanait du nouveau venu.
- Hoseok ! Tu la fermes ! Depuis tout à l'heure je m'occupe seul des ventes, ce n'est pas pour que maintenant tu foutes la merde. Retourne bouder dans ton coin, on part dans moins de trente minutes de toute façon.
Jeongguk aurait peut-être dû se retenir de faire cette remarque, les yeux noirs posés sur lui le liquéfiaient instantanément sur place. Il tourna bien vite son visage vers le jeune client qui n'avait pipé mot depuis cinq minutes, l'interrogeant sur son choix. Bredouillant, il prit les cinq cents grammes de fraises et se dépêcha de déguerpir.
- On s'en va. Maintenant.
Le ton était sans appel. Jeongguk ne pouvait que s'y plier. Tout deux remballèrent leurs derniers produits invendus, se dirigeant vers le camion garé sur le parking. Le silence était de plomb, aucun des deux ne décrochait la parole. Une atmosphère oppressante se profilait à mesure qu'ils avançaient, les sombres pensées envahissaient leurs esprits.
Le plus jeune rangea avec épuisement la dernière cagette, claquant la portière arrière, avant de se retourner. Il fit face à son aîné, qui le toisait déjà du regard. Des sueurs froides coulaient le long de sa colonne vertébrale au fur et à mesure qu'il voyait la main de son « ami » se lever. Il se recroquevilla rapidement, s'agenouillant au sol, voulant s'assurer que la gifle qu'il prendrait serait atténuée par sa position.
Pour autant, rien ne vint, seul le silence planait au-dessus de lui. Par peur de recevoir un coup, il resta campé sur sa position, attendant qu'Hoseok s'éloigne de lui pour avoir un périmètre de sécurité. Doucement, il vit ses pieds faire un pas, puis deux en arrière. Il releva avec crainte la tête, tombant sur un visage terrifié.
Le châtain tomba soudainement par terre, s'écorchant les genoux par la même occasion.
- Je t'aime Gguk, si fort. Tu sais que je t'aime, hein ?
Seul le silence lui répondit, un silence froid et peu amical.
- Dis-mois que tu sais que je t'aime ! Dis-le-moi !
Un voile recouvrit les yeux dudit Gguk, éprit par la terreur. Qu'arrivait-il à Hoseok ? Pourquoi devenait-il si violent ? Ça ne pouvait être une preuve de ce prétendu amour. Ou alors, quel amour était-ce ?
- Non, tu ne m'aimes pas.
Le regard du plus âgé était insistant sur lui, il semblait le dévisager, il ne comprenait pas ce qu'il venait de lui dire.
- Je me répète. Hoseok, tu ne m'aimes pas.
Le vent soufflait, il faisait plus froid que ce matin, mais aucun d'eux ne cilla. Mais les premières gouttes tombèrent bien vite, et Hoseok lâcha ses premiers sanglots, ses mains allant cacher son visage anéantis. Jeongguk, lui, les laissait couler silencieusement ; c'était un signal de détresse.
4ème et avant-dernier chapitre ! Un peu plus long que les autres, et le prochain aussi sans doute, à voir. La fin arrivera peut-être cet après-midi !
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