Chapitre 4



Le liquide à la couleur chocolat fumait dans la tasse blanche. Je m'amusais à poser mes mains dessus afin de récupérer sa chaleur. Je ravalais un bâillement, toujours ensommeillée. Levant les yeux, je regardai distraitement la télévision de l'hôtel. Un dessin animé avec des fées passait sur une chaîne inconnue. Je bus une gorgée de mon chocolat chaud et souris bêtement. J'aimais vraiment le chocolat chaud. Je préférais cela au café.

J'étais allée passer deux jours chez mes parents. J'étais revenue la veille. Cela m'avait ressourcée et complètement fait oublier le désastre qu'avait été la soirée de vendredi. Je ne voulais plus y penser. Mes parents avaient été si heureux de me voir. Pour la première fois j'étais fière d'aller chez eux et n'être ni une jeune élève, ni une innocente étudiante, ni une quelconque stagiaire mais bel et bien une vraie femme avec un vrai poste dans une véritable entreprise de publicité internationale. J'avais revu Liam, mon ex-petit copain du lycée avec qui j'avais toujours un bon contact. J'avais passé mon temps dans le jardin de la maison familiale, profitant du soleil avec ma petite sœur Marguerite. Cela avait été vraiment reposant.

Après la soirée de clôture de la Fashion Week, mon moral était complètement nul. Je n'avais qu'une envie. Partir. Je ne voulais pas prendre à nouveau le risque de revoir Jeremiah. Jeremiah. Il hantait mes pensées depuis quelques jours. Même chez mes parents, je ne passais pas un instant sans ne pas penser à lui. Une chose était sûre. Je n'avais pas envie de le voir.

Je m'attaquai vivement aux croissants, affamée. Ils étaient chauds et croustillants –juste comme il le fallait. C'était délicieux. A ce moment-là, la porte s'ouvrit laissant entrevoir un Garrett tout sourire. Je relâchai le souffle que je retenais. Ma porte était ouverte, n'importe qui aurait pu entrer !

- On ne t'a jamais appris à toquer aux portes ?

- Pas quand il s'agit de ta chambre, sweetheart.

Je secouai la tête avec un sourire. Garrett était vraiment unique en son genre. Il s'affala tranquillement sur mon lit tout en me piquant mon verre de jus d'orange. Je me retournais vivement vers lui, le fusillant du regard.

- Ne sois pas stupide, Garrett. Rends-moi mon verre.

- Oh, j'avais presque oublié à quel point la nourriture compte pour toi, blagua-t-il.

Je roulais des yeux.

- Rend-moi mon verre, ordonnais-je.

Avec un grand sourire narquois, il le posa sur mon plateau et se plaça, allongé à mes côtés. Je me concentrai à nouveau sur le dessin animé, qui devenait de plus en plus captivant. Je mâchai mon croissant, le savourant agréablement. Au bout d'un moment, Garrett lâcha un soupir.

- Tu regardes vraiment cette stupidité ?

Garrett me jugeait de son regard incrédule. Je levai un sourcil, sarcastique.

- Excusez-moi, ô grand génie du droit, de regarder cette émission trop peu sérieuse pour vous.

Il rit et je le suivis bientôt. C'était facile de rire avec lui. Il reprit son souffle puis posa son bras autour de mes épaules.

- Allez-viens on sort.

- Pour aller où ?

- Il fait beau, il fait chaud. On est en juin, ma poule. Allons, je ne sais pas moi, visiter la ville.

Oh, je détestais qu'il me donne ces surnoms inutiles.

- Tu ne l'as pas fait depuis que tu es ici ?

- J'attendais ton expertise en la matière, susurra-t-il.

Je réfléchissais. Après tout pourquoi pas ? J'aimais le soleil. Et puis marcher dans Paris serait une bonne façon de sortir définitivement Jeremiah de mes pensées. D'un hochement de tête je fis comprendre à Garrett que j'acceptais. Il comprit le message et se leva pour quitter la chambre.

Je partis me débarbouiller rapidement avant de mettre mon tee-shirt multicolore et un jean troué à quelques endroits avec mes sandales rouges. Mes cheveux étaient restés fous et désordonnés. Je rangeai rapidement la chambre. Je pris mon sac et mis le nécessaire dedans. Je posais mes lunettes de soleil sur ma tête et ouvrit la porte.

Nous déambulions dans les rues bondées de Paris depuis plus de deux heures. J'en avais mal aux pieds. La ville était si attractive en jour ensoleillé. C'était festif et j'adorais ça. Il y avait de la musique à chaque coin de rue. Tout grouillait autour de nous. Je ne faisais que prendre des photos de l'ambiance, des gens. Bon, on dissociait très bien les vrais Parisiens des étrangers. Les Parisiens se moquaient de vous bousculer ; ils avaient autre chose à faire. Bon c'était la même chose à New York. Mais maintenant, j'avais vraiment mal aux pieds. D'autant plus qu'il faisait chaud. Très chaud. Le soleil tapait sur mon dos dégagé. J'imaginai déjà la marque de bronzage que j'aurai en rentrant.

- Allez Garrett, j'ai mal aux pieds, geignais-je pour la énième fois.

Garrett souffla de mécontentement. Je lui tapais vraiment sur les nerfs. Cela faisait une heure que je me plaignais. Chacun son tour. Il passa ses mains sur le haut de sa tête et jeta un coup d'œil aux environs. Il sembla repérer un endroit qu'il me montra bientôt du doigt.

- Bon, ok, on va là-bas.

Nous nous dirigeâmes vers le café qu'il indiquait. C'était une de mes cafés préférés. Nous entrâmes et fîmes la queue discutant tranquillement. Enfin, quand je ne râlai pas et quand Garrett ne se plaignait pas de moi, nous discutions tranquillement. Je me moquai de lui. Nous commandâmes rapidement. Je pris un frappé caramel et Garrett un frappé chocolat. J'en avais l'eau à la bouche. Je jetai un coup d'œil au café-restaurant pour trouver une place où s'asseoir, quand une table attira mon attention. Ignorant les interrogations de Garrett qui se demandait où est-ce que je partais encore, je me dirigeai vers la tablée, un grand sourire collé sur la face.

- Hé, les gars, appelai-je.

Cassandre, Javier, Raphael et Ambrosio se retournèrent d'un même ensemble et j'éclatai d'un rire joyeux face à leurs têtes stupéfaites. Javier et Ambrosio, faisaient exactement la même tête étonnée qui ressemblait à une grimace hilarante. Raphael avait la bouche grande ouverte et ses yeux bleu clair étaient aussi ronds que des boules de bowling.

- Eve, se leva Javier avant de me prendre dans ses bras.

- Eve ! S'exclama son jumeau en me faisant aussi un câlin.

Leur odeur musquée m'enveloppa. Cela m'avait manqué. Ils me relâchèrent et parsemèrent mes joues de bisous. Je ris encore puis serra Raphael dans mes bras. Il était si grand que ma tête arrivait à peine à son ventre. Il m'avait manqué. Le relâchant je détaillais sa nouvelle couleur de cheveux.

- Rose ? Tu es sérieux Raph' ?

- J'aime bien, sourit-il avant de passer sa main dans sa tignasse... rose. Et puis c'est plutôt du magenta.

Je roulais des yeux, moqueuse. Puis, je me tournai vers Garrett.

- Garrett voici, Javier et Ambrosio, les fameux jumeaux, Raphael et tu connais déjà Cassandre, dis-je en les présentant tour à tour. Les gars, voici Garrett, mon ami.

Les gars se saluèrent d'une poigne et Cassandre m'embrassa avant de faire la bise à Garrett. Celui-ci fit une inconsciente grimace. Nous rîmes de la tête de Garrett. On ne fait pas la bise en Amérique et Garrett n'y était décidément pas habitué. Je dégustai mon frappé goulûment. J'avais tellement chaud et soif.

- T'étouffes pas, bébé, se moqua Garrett

Je le frappai à l'épaule alors que les autres riaient. J'étais heureuse. J'étais avec mes amis, même s'il manquait Addison. Nous discutions joyeusement, riant parfois. Garrett, malgré sa maîtrise quasi parfaite du français avait parfois besoin de temps pour suivre le fil de la conversation.

- Eh, les gras, s'exclama Raphael. J'ai une super blague ! Qu'est ce qui fait neuf cent quatre-vingt-dix-neuf fois "TIC" et une fois "TOC" ? ...Un mille pattes avec une jambe de bois.

- Pitié, Raphael, la ferme, maugréa Cassandre.

Ce dernier s'étouffait de rire. Avait-il vraiment 25 ans ? Je laissai un soupir passer ma bouche. Raphael continuai de rire tel un dérangé alors Javier lui frappa le front. Raphael couina comme un enfant. Sérieusement, on n'était pas sensés être des adultes ?

- Euh, je n'ai pas vraiment compris la blague, dit Garrett d'un air confus.

- Heureusement pour toi, souris-je.

A ce moment-là, rien ne pouvait m'enlever le sourire. J'étais à Paris, la ville de mon cœur. J'étais avec mes amis, ces personnes qui ont appris à me connaître et à m'aimer. Et en plus de cela le temps était clément à toute joie et j'étais dans un bon café. Le frappé était rafraîchissant et agréablement sucré.

Vous savez ces moments dont vous savez qu'ils resteront gravés dans votre mémoire. Eh bien, celui-là en faisait partie. C'était joyeux. Sans soucis, sans angoisses. Juste mes amis et moi. Personne d'autre.

Mon téléphone sonna dans mon sac, me coupant dans mes pensées. Bien sûr, il était au fond de mon grand sac beige et je tardai à le trouver. Je trifouillais, fouillais avant d'enfin le trouver. Cependant lorsque je le pris dans m mains, je vie que j'avais raté l'appelle. Un papale d'Hilary. Je me demandai bien, ce qu'elle voulait. Hilary n'appelait que très rarement ses éployés. Le téléphone était réservé aux grands clients qu'elle chérissait. Je m'excusai rapidement auprès des autres et me levai. Je sortis du café climatisé et me retrouvait dans la lourde chaleur de l'extérieur. J'appuyai sur la touche « rappeler » et attendis. La sonnerie tonna cinq fois avant qu'Hilary ne décroche enfin.

- Eve, chérie ?

- Oui, c'est moi. Bonjour, Hilary.

- J'avais complètement oublié de te joindre. Il fallait que je te dise quelque chose d'important... mais maintenant que je t'ai à l'appareil, j'ai complètement oublié.

- Et bien, tu vas t'en souvenir, souris-je.

- Oh, oui, mais je me souviens que c'était urgent... Tout cela à cause de Tabitha. Elle a encore de la fièvre tu sais. Elle me fatigue à être autant malade. Ne le dis pas à Susan si tu la croises. Elle me tuera si elle savait ce que je dis sur nos enfants. Enfin, bref, je m'égare.

Tabitha était la plus jeune fille d'Hilary qu'elle avait adoptée avec Susan, sa femme. Je souris. Hilary avait souvent l'idée en l'air. Heureusement que Cale, son assistant, était là pour l'aider à se souvenir de tout. C'était une vraie tête en l'air. Mais elle était adorable envers ses employés, même quand elle voulait se faire passer pour autoritaire.

- Bon, parlons d'autre chose. Si tu te distrais l'idée va revenir d'elle-même.

- Ok. Riley, devient un petit homme. Je l'ai vu discuter par texto avec une « amie » du lycée, dit-elle en faisant ressortir le mot amie.

- Eh bien c'est bien. Au moins, il n'est plus aussi turbulent, dis-je.

Riley était le fils ainé d'Hilary. Je l'avais presque vue grandir et s'affranchir de la tutelle maternelle. Il avait passé sa phase de rebelle et commençait doucement à mûrir du haut de ses quinze ans.

- Oui, mais tu sais, ça va me manquer de ne plus avoir mon petit garçon. Je me souviens encore du jour où je l'ai vu dans la maternité rudimentaire au nord de Kampala. Avec ses grand eux sombres. Oh, mon petit bébé.

Hilary était absolument gaga de ses enfants. Elle ne pouvait s'empêcher de parler d'eux. C'était une mère affectueuse et aimante.

- Je comprends, Hilary. Et donc, Tabitha est encore malade ?

- Oui, j'ai tellement peur pour elle. Elle est si fragile, cette enfant. Et puis tu savais qu'elle avait même commencé à s'intéresser à la mo- Oh je me souviens !

Son exclamation soudaine, me fit éloigner le portable.

- Pardon ?

- Je me souviens de ce dont je devais te parler !

- Et, donc ? De quoi est-il question ?

- Laisses moi le temps de remettre mes idées en place...

Elle parut réfléchir en murmurant. Je patientai, sachant que la brusquer ne ferait pas avancer les choses. Elle restait ma patronne bien qu'elle soit adorable.

- Ah, oui ! Tu n'es pas encore revenue à New York, hein ?

- Non, je suis allée chez mes parents. Pourquoi ?

- Super, je n'aurais pas à te payer de billet.

Euh, aurais-je manqué un épisode ? Je fronçai les sourcils.

- Mon billet pour quoi ?

- Tu vas rester à Paris un peu plus longtemps, annonça-t-elle, joyeuse.

- Quoi, comment ça ?

- Oui ! Tu sais mon ami, Jeremiah Haccews. Eh bien il m'a dit que tu avais travaillé pour lui. Et je n'étais même pas au courant. Enfin, je sais que je suis patronne depuis un peu plus d'un an, mais je pensais savoir des choses sur toi quand même, enfin, je veux dire-

Mon cerveau a arrêté de tourner au nom de « Jeremiah Haccews ». Je restai silencieuse alors que ma respiration s'accélérait sous l'angoisse. Ça ne sentait pas bon mais alors pas bon du tout.

- ...Et comme Indigo veut se lancer dans la cosmétique, il lui fallait une directrice artistique telle que toi. Il a presque insisté pour t'avoir comme étant celle qui se chargera de la promotion du parfum, continua Hilary, imperturbable.

Je restai sans voix. Je tentai de garder mon calme mais c'était trop.

- Eve ?

- Oh, euh, oui ?

- Oh, j'ai cru t'avoir perdue. Donc tu commences lundi prochain à neuf heures. Garrett est au courant, il restera avec toi pour régler le contrat. Addison te rejoindra le plus vite possible, je l'ai envoyé aider Rachel, du service polonais. Cette femme est complètement débordée.

- O-ok.

- Super ma chérie. C'est réglé ! S'il-te-plaît rends-moi fière.

Hilary raccrocha avant même que je ne puisse souffler. Je restai raide, mon bras tenant le téléphone s'abaissant le long de mon corps. Bon au bout de trois ans j'avais bien compris le mode de fonctionnement d'Hilary. Elle pouvait m'envoyer à l'autre bout de la Terre en m'avertissant deux jours avant. Elle prenait toutes les opportunités. Mais je ne m'attendais vraiment pas à cela. J'étais complètement abasourdie. J'allais travailler avec Jeremiah. A Indigo. Bon, c'était une chance de travailler à Paris mais pourquoi en collaboration avec lui ?

Puis, une idée germa dans ma tête. Une explication, peut-être. Je me souviens des mots de Jeremiah. « On se retrouvera- Je ne te laisserai pas me quitter une seconde fois. ». Les mots sonnaient dans ma tête comme un éclaircissement. Et si, Jeremiah avait prévu tout cela. Pour me piéger. Il avait dit « On se retrouvera » et nous allions finalement nous revoir. J'ai bien peur d'être paranoïaque mais cela sonnait comme cela. Et cela m'agaça grandement.

***

Devait réviser ses oraux -> a désespéré -> s'est retrouvée comme par magie face à l'ordinateur -> a ouvert word -> et voilà comment ce chapitre est né. 


Oui, bon, il ne se passe pas grand chose, mais ce genre de chapitre est essentiel. Et puis, comme on dit, le calme avant la tempête. Je ne peux pas faire des scènes Evemiah à chaque chapitre, il faut patienter. Mais je vous promet que la suite sera... explosive et très frustrante. Pas grand chose à dire à part que je m'amuse à écrire le personnage de Garrett surtout que je sais qu'il est énervant mais attachant à la fois (enfin pour moi hein) 



Avez-vous des questions sur l'histoire ? 

Des idées de la suite ? 

Les personnages qui vous ont le plus manqué ? 



A bientôt


TatianaNg

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top