Chapitre 23
C'était le grand jour. Je quittai Paris, la France.
Je venais de faire passer mes bagages dans la soute. Etant en classe économique, je n'eus pas à faire grand-chose, le personnel se chargeait de tout. J'étais donc assise sur un siège, attendant l'annonce de mon vol. Je tournai mon visage vers ma mère qui avait le visage complètement défait. Ma famille était venue me souhaiter un bon départ ou plutôt me convaincre de rester comme le faisait ma mère depuis ce matin.
- Maman, arrêtes, tu sais qu'il ne va rien m'arriver.
- Je ne veux pas que tous mes enfants partent si loin de moi, bouda ma mère, en croisant les bras. Je vous ai si mal éduqués ? C'est pour cela que vous partez tous à l'autre bout du monde. Déjà David, puis Chloé, et Madden, et enfin toi. Ça va bientôt être le tour d'Alexandre et je ne pourrais même plus voir mes enfants ! Vous serez tellement loin que je vais mourir sans même que vous en rendiez compte. Je-
- Fail, stoppa mon père en posant sa main sur l'épaule de ma mère.
Cette dernière le poignarda du regard.
- Et n'essaie même pas de défendre mes enfants, Alfredo.
Mon père et moi, échangeâmes un sourire. Mes parents restèrent dix bonnes minutes encore, puis ils me laissèrent car ils étaient invités chez des amis.
Je soupirais. Mon cerveau était un vrai désordre. Depuis hier, je ne pensais qu'à Jeremiah et seulement à lui. Mon cœur souffrait de son absence. Il me manquait. Terriblement. Et c'était assez effrayant de voir tout ce que son absence me faisait ressentir. Mais pouvais-je vraiment être étonnée de ressentir cela ? Après tout ce que Jeremiah et moi avions traversé, il était normal que sa présence me manque, non ?
Je secouai la tête et bu une gorgée du smoothie payé plus tôt à un stand de l'aéroport bondé. Il y avait d'ailleurs beaucoup de personnes qui passaient devant moi. On remarquait facilement les touristes, avec leur guide touristique et leur regard presque adorateur et enthousiaste. Nous étions après tout dans une saison touristique. Noël arrivait dans plus d'une semaine, et les vacances scolaires venaient de commencer en France. Aussi n'étais-je pas étonnée de voir des familles presser le pas devant moi. On arrivait cependant à distinguer les provençaux aux Parisiens. Arrivaient enfin, les hommes et femmes qui avaient l'habitude de travailler. Le visage calme ou fermé, avec des papiers dans les mains ou une tablette, ils ne semblaient pas se rendre compte du monde qui les entourait.
Je voulais juste être ailleurs. Même si l'agitation régnant dans le hall de l'aéroport, me divertissait de mes pensées, je n'avais aucune envie d'être là.
Mais où irais-je ?
Je soupirais et feuilletais une de mes fiches envoyées par mes collègues. Mon avion devait décoller dans deux heures et demie et le temps me paraissait long. Je me sentais désespérément seule. Soudain, on me barra la vision.
- Surprise !
Je relevais la tête et fut stupéfaite de voir Javier et Ambrosio se tenir devant moi. Ils étaient, comme à leur habitude, diablement beaux. Javier portait l'un de ces longs manteaux et Ambrosio avait opté pour son éternelle veste en cuir. Mon cœur se gonfla de joie en les voyant. Mon corps se redressa et une euphorie soudaine me prit. Ils étaient exactement ce dont j'avais besoin en cet instant. Je me levai et me précipitai pour les prendre dans mes bras. Ils étaient mes plus proches confidents et amis en plus de Cassandre qui était partie en voyage avec son nouveau copain encore inconnu à ce jour.
- Les gars, qu'est-ce que vous faites là ?
- Si tu pensais qu'un simple au revoir par Skype allaient nous suffire, tu te trompes, renifla dédaigneusement Ambrosio.
- Eh, on n'est pas des sauvages tout de même.
Je leur souris d'une façon complètement niaise et remerciai intérieurement le ciel de les avoir fait croiser mon chemin. Ambrosio, ouvrit soudainement son sac bandoulière et en sorti une bouteille. Elle était pleine d'un liquide transparent où flottait quelques morceaux de fruits verts ; du citron vert. Il me tendit la bouteille suspecte et je le regardai stupidement.
- Eve, tu sais que je t'aime profondément, mais tu as une mine absolument horrible, dit Ambrosio en rangeant une mèche de ses cheveux derrière son oreille.
- Tu sais que je suis toujours de ton côté, mais je dois avouer qu'il a raison, renchérit Javier.
- Mais heureusement que nous sommes là. J'ai exactement ce qu'il te faut fit son jumeau en secouant la bouteille.
Je leur envoyai un sourire forcé. Après le départ de Jeremiah, la veille, j'avais stupidement éclaté en pleurs dans ma chambre d'hôtel. Désespérant, je sais. Je détestai être pathétique à ce point, mais c'était plus fort que moi. J'avais mal. Et c'était sans espoir. J'étais complètement abattue.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Mojito fait-maison. Le meilleur sur le marché noir.
Je pouffai et pris la bouteille de ses mains. Je tournai le bouchon et avalai une gorgée de cette boisson au goût exotique et sucré où l'alcool restait supportable. Le liquide était frais, refroidissant la tension émanant de chaque partie de mon corps. Je pris une autre gorgée, savourant le liquide transparent à l'odeur citronnée et mes épaules se détendirent. C'était un bon mojito.
- Ah, tu vois ! Rien ne vaut un bon verre de mojito pour se détendre et apprécier le moment, s'exclama Ambrosio à ma droite.
Je tournai ma tête vers lui, lui envoyant un faible sourire.
- Oui, j'avoue que ça détend, admettais-je, en buvant à nouveau ma boisson.
Javier souffla brusquement ramenant notre attention vers lui.
- Bon, assez de babillages inutiles. Dis-moi ce qu'il se passe, ajouta-t-il à mon encontre.
- Hm ? Feignis-je.
Il m'envoya son regard qu'il voulait dire qu'il savait très bien ce qu'il se passait. Javier était décidément le plus paternel des deux. Il était attentif et à l'écoute, tandis qu'Ambrosio avait toujours de bons conseils. Ils étaient totalement complémentaires et se comprenaient parfaitement. Mais ils restaient tout de même d'invétérés dragueurs, bien qu'ayant atteint la trentaine.
- Jeremiah est arrivé ce matin au bureau, sans saluer personne. Il est venu à sept heures moins le quart, est entré dans son bureau et n'en n'est ressorti qu'à midi. Il n'est pas revenu depuis. C'est Paule, la concierge qui me l'a confirmé.
J'ouvris de grands yeux. Oh, non. Immédiatement, mes pensées allèrent vers Jeremiah. J'étais inquiète pour lui. Je restai muette alors que Javier m'inspectait.
- Je sais que son attitude à un rapport avec toi, Eve. Tu es la seule raison qui peut le pousser à devenir ainsi. Tu le sais autant que moi.
Je soupirai. Etais-je vraiment la raison derrière l'attitude de Jeremiah ? Avais-je autant de pourvoir sur lui ? Autant que lui en variât sur moi ?
Abattue, je tombai sur une chaise et les jumeaux me suivirent, s'asseyant à chacun de mes côtés. Je me battais pour que mes larmes ne coulent pas. Bon sang, je pouvais me contenir. Les jumeaux restèrent silencieux.
- C'est...compliqué, lâchais-je.
- Mais enfin, qu'est-ce qu'il peut bien y avoir de compliqué. Tu l'aimes et il t'aime. C'est aussi simple que ça ! déclara Ambrosio.
- Vous ne comprenez pas.
- Explique-nous.
Je ruminai. Je ne pouvais décidément pas tout leur dire. Jeremiah s'était confié à moi. Et il y a des choses qu'on ne peut pas dire à mes ses meilleurs amis. Je ne leur raconterai alors pas la totalité de la conversation mais assez pour qu'ils comprennent ma situation. J'aimais Jeremiah. Mais je ne pouvais pas utiliser cela comme prétexte alors que je risquai de le faire souffrir. Je ne savais pas si j'étais prête pour être avec lui sans le faire souffrir.
Après avoir patiemment écouté mon discours récapitulatif de la situation, les jumeaux restèrent silencieux. Puis Javier prit la parole.
- Je comprends. Je te comprends, Eve.
- Pareil. S'il y a bien quelque chose que j'admire chez toi, c'est le fait que tu fasses toujours des choix réfléchis. Tu as la tête sur les épaules. Regarde, je sens que ce que tu fais, en t'éloignant de Jeremiah n'est pas bon, pourtant, en t'écoutant, je me rends compte que cela n'était pas évident pour toi, ajouta Ambrosio.
Je soupirai. Si même mes meilleurs amis ne pouvaient pas trancher pour moi, c'était vraiment mal. Le téléphone de Javier se mit soudainement à sonner. Il se pencha et l'alluma et je vis un sourire si éblouissant se former sur son visage, que je fronçai les sourcils. Avant que je ne puisse lui demander de qui il s'agissait, Javier releva la tête vers son jumeau et ils échangèrent, un regard. Le fameux regard qu'eux seuls pouvaient comprendre. Ambrosio sembla comprendre le message puisqu'il hocha la tête et me fit un sourire radieux.
Je sentis le mauvais coup à trois kilomètres.
Je croisai les bras et les dévisageaient tous les deux.
- Qu'est-ce que vous complotez, tous les deux ?
- Rien, répondirent-ils d'une même voix.
Très bien, j'adorais être mise à l'écart. Je laissai cependant passer, bien trop occupée à penser à mon départ.
Les jumeaux partirent quelques minutes plus tard. Mon avion devait décoller dans une heure et demie. Je vais quitter la France, Paris, mes amis, ma famille.
Jeremiah.
C'était la seule chose à laquelle que pensais depuis ce matin. Malgré la présence de mes parents, puis celle de jumelas, rien n'avait pu me distraire de mes pensées.
C'était douloureux. Chaque fibre de mon corps, voulait être avec lui. Tout mon être ne demandait que sa présence. Mais je ne pouvais pas. Jeremiah avait eu un passée dur et ma présence dans sa vie n'avait fait que raviver les douleurs du passé. Il m'était tellement nt cher, que je ne pouvais pas me permettre de le garder avec moi. Parce que cela serait totalement égoïste. Je ne suis pas faite pour lui.
Je ne suis pas sans défauts, je le savais. Tout le monde avait de défauts, Jeremiah aussi. Mais mes défauts avaient eu le pouvoir de le faire souffrir comme jamais. J'étais ambitieuse. Cela nous avait déjà coûté. Je ne voulais pas le faire souffrir. Et je ne pouvais pas m'imaginer le faire. Non.
Oui, j'allais le quitter, mais c'était pour son bien. Pour son bien. Je ne pouvais pas me permettre de blesser aussi profondément que sa mère. Je l'aimais bien trop pour cela.
Oui, je l'aimais, avec chaque partie de mon corps.
Mon esprit s'égara dans les souvenirs que je gardais de tous mes moments avec lui. De notre première et maladroite rencontre, alors que je n'étais qu'Eve-la-stagiaire et lui, le plus bel homme qu'il m'est été donné de rencontrer. De nos éternelles disputes. Sa posture imposante voire majestueuse qui se tendait dès que je le défiais. De notre premier baiser.
Oh que j'aimais ses lèvres. Ces lèvres chaudes et puissantes possédant ma bouche. Embrasant mon corps. Frôlant mon visage, mon cou, mes épaules. Ses mains. Ses mains caressantes néanmoins fermes et dominantes. Qui, effleurant chaque parcelle de mon corps, me rendaient fébrile.
Et enfin ses yeux. Ses yeux bleus qui parfois, m'étaient complétement illisibles et pourtant bouillaient d'émotions plus vivantes les uns que les autres. La colère, le désir, la joie, le tourment. C'était un véritable tourbillon. Je m'y perdais et rêvais de m'y perdre à nouveau.
Cela me frappa.
Bon sang, j'étais tombée amoureuse de lui. Je ne l'aimais pas comme on aime un ami proche. Je l'aimais de façon forte et irréversible. Il était tout ce que, au plus profond de moi, j'avais toujours souhaité. J'avais besoin de lui. De lui tout entier. De son corps et de son âme. Je n'avais réussi à me le faire admettre, mais peut-être cela était dû à mon entêtement.
Depuis, ma jeunesse, je m'étais inconsciemment érigée une carapace où seule mon ambition était au centre. Rien d'autre ne comptait. J'avais un tel désir d'accomplissement, que j'avais empêché toute personne de vaincre cette armure. J'avais toujours était complexée de par mon manque de confiance et m'étais enveloppée dans un but unique : la réussite. Et voilà que Jeremiah arrivait et enlevait pierre par pierre ce mur, me dévoilant totalement. Ce n'était pas en forçant, non. Il avait réussi peu à peu à me comprendre, me soutenir, m'aimer et voilà ce qu'il avait fallu pour briser cette enveloppe. Et je savais que je ne laisserais personne d'autre le faire. C'était pourquoi, il m'était si cher. C'était la seule personne qui me connaissait le mieux.
Il était tout. Et je l'aimais de façon inconditionnelle.
C'était tout ce qu'il me fallait réaliser. Voilà, la vraie raison pour laquelle, j'avais peur de le blesser, et de le quitter. Mais maintenant, j'en étais sûre, je ne le blesserais jamais à nouveau. C'était contre-nature.
Il fallait que je le retrouve.
Je me levai d'un bon et constatai que mon avion se préparer à l'embarcation. Je secouai la tête. J'avais quelque chose de plus important à faire. Qu'importe, mon travail, mes résolutions, Jeremiah était l'homme de ma vie. Et j'allais faire tout ce qui était en mon pouvoir pour le retrouver et le lui dire en face. Je n'allais plus me laisser faire comme une fille sans conscience. J'allais récupérer mon homme.
J'allais prendre ma valise quand, mon téléphone sonna. Bien que pressée et déterminée, je décrochai en voyant le nom d'Hilary, ma patronne s'afficher sur mon portable. J'allais lui dire que je restai à Paris et tant pis pour mon travail.
- Bonjour Hilary, saluai-je en anglais.
- Eve ! Oh mon Dieu, où es-tu ?
Alertée, je fonçai les sourcils à son ton effréné.
- Hilary ? Tout va bien ?
- Où es-tu, répéta ma patronne.
- Euh, à l'aéroport, pourquoi ?
Je l'entendis prendre une grande inspiration.
- Ecoute, je suis vraiment désolée, chérie, mais tu vas devoir annuler ton vol.
- Quoi ?
- Tu vas rester ici. J'ai besoin de toi. J'avais complètement oublié. Tu sais Tabitha était de nouveau malade et- Ok, je m'égare. Voilà, la grande marque de française de luxe, Dior, nous demande pour leur faire la publicité de leur nouvelle collection. Depuis la Flashions Week de Paris, nous avons eu des tonnes de demandes de la part de sociétés françaises. Cela allait devenir trop compliqué pour toi de prendre toutes ses demandes en compte de l'autre côté de l'Atlantique.
J'étais un peu perdue. Hilary débattait un flot de parole extrêmement rapide. Mais je n'eus même pas le temps de l'interrompre qu'elle continua inlassablement son monologue.
- Alors j'ai tout bonnement eu l'idée de faire construire un siège français de la Simulcom Media Group. A Paris. Et comme tu es française et que je sais que je peux compter sur toi, j'ai pris la décision de te nommer présidente de la SMG France. Je sais que j'aurais dû t'en parler. Mais je te connais, Eve, et je sais que tu veux rester en France. C'est ton pays. Et je sais aussi que ce poste ne peut que te plaire. Cela fait beaucoup de responsabilités à prendre mais je prends le risque.
Quoi ? Avais-je vraiment bien entendu ? Hilary me proposait une... promotion et une mutation ? En France ?
Je n'arrivais pas y croire. Est-ce que cela signifiait... que je pourrais rester ici ? Près de Jeremiah. Mon cœur se remplit de joie et je sentis mes yeux s'embuer. Mon Dieu, pouvais-je vraiment espérer d'avoir une chance pareille. C'était décidé.
Il fallait que je le retrouve.
- Tu me nommes présidente de la SMG France ? M'étouffai-je.
- Oui, je sais que c'est pré-
- Non, c'est parfait ! coupais-je.
- Alors, c'est oui ?
- Laisse-moi une journée et je te dis ma réponse.
Et si Jeremiah me refusait ? Je ne pourrais pas alors m'imposer à Paris. Non. Je raccrochai.
J'avais toujours influencé mes choix par mon ambition. Mais maintenant c'était par amour, que je reconsidérais tout. Je rangeais mon téléphone dans ma poche et mis mon sac sur mon épaule. Je pris une grande inspiration et marchai résolument vers les portes de l'aéroport.
Je m'arrêtai soudainement. Mon souffle fut coupé et je restai figée.
Jeremiah.
***
Hola ! Que dire après une chapitre pareil. Je le trouve super important on comprend enfin Eve. Certaines parmi vous étaient fâchées contre elle mais j'espère que vous comprenez maintenant :)
Il fallait que je fasse apparaître les jumeaux dans ce chapitre. Etaient-ils a la hauteur?
Enfin, j'espère que vous avez aimé ce chapitre et je poste le prochain le plus vote possible... enfin si vous le méritez. J'ai pas eu beaucoup de commentaire dans le dernier chapitre et je dois avouer que j'étais un peu déçue. Alors faites moi rêvez et battez notre record de commentaires !
Votez et comentez ! ;)
TatianaNg
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