Un décor d'une blancheur parfaite s'étend à l'infini devant moi. Encore cet endroit...
Je soupire en me retournant vers celle qui se dit être la « vraie Johanna ».

- Bon, qu'est-ce que tu me veux cette fois-ci? T'en as pas marre de toujours t'incruster dans mes rêves?

- Tu t'es bien incrustée dans ma réalité, toi.

- OK, c'est reparti pour un tour... m'exaspéré-je à mi-voix de sorte à ce qu'elle ne m'entende pas.

- Je dirais même plus, reprend mon alter ego. Tu t'es incrustée dans mon corps.

- Euh... Pardon?

- Tu as très bien compris ce que j'ai dit.

Houlà...

- Hum... Écoute ma chère « véritable Johanna », je ne pense pas que voler le corps de quelqu'un soit possible. Ah, pardon; si c'est possible: dans les séries B où des aliens prennent les corps des humains pour mieux envahir la Terre.

- Haha, très drôle...

- N'empêche que tu dois reconnaître que ce que tu racontes n'a absolument aucun sens.

Elle se rapproche alors de moi. Désormais nous ne sommes plus qu'à une dizaine de centimètres l'une de l'autre.

- Tout ce que je sais, c'est qu'un soir tu t'es infiltrée dans mon esprit pour prendre le contrôle de mon corps. J'ai lutté, mais tu as quand même réussi; à mon réveil, ou plutôt à ton réveil, ma conscience était comme en arrière plan, supplantée par la tienne. J'entendais tes pensées, je voyais tes actions... Mais ce corps n'était plus le mien. Cependant, en me reléguant au second plan, tu as perdu la mémoire. Personnellement, je pense que c'est parce que ma mémoire vient de moi, de mon conscient, pas de mon corps. Tu t'es peut être emparée de mon enveloppe charnelle, mais pas de ma conscience. Quant à qui tu étais avant... Je ne sais pas pourquoi tu l'as oublié. On va dire que c'est ta punition. Mais tout ceci n'a aucune importance. Parce que je vais continuer à lutter pour reprendre le contrôle de mon corps. N'as-tu pas déjà remarqué que j'étais de plus en plus présente dans ta tête? Tu ne peux rien y faire; petit à petit je vais regagner du terrain. Et je te vaincrai.

Je me réveille complètement médusée. Donc en gros, selon cette folle, je serais une personne malveillante ayant pris possession de son corps.

Honnêtement, je ne sais plus trop quoi penser. Existe-t-elle vraiment ou est-ce juste le fruit de mon imagination? Je ne sais même pas si je serais capable d'inventer une énormité pareille...

Quoi qu'il en soit, il faut que je me prépare à aller au lycée.
Je réalise ma routine habituelle du matin avant de partir.

Sur le chemin, je me remémore ça que m'a dit mon sosie...
...
Elle a bien dit qu'elle entendait mes pensées, non?
Je veux dire... Toutes?

***

Contrairement à d'habitude, Jonathan ne m'attend pas au coin de la rue. Je mets ça sur le compte de ce qu'il s'est passé samedi.

La cloche sonne au moment où j'arrive, ce qui fait que je n'ai même pas le temps d'aller discuter avec mes amis avant le cours.

Après deux heures de français et tout autant de torture, je vais voir les deux Léa. Évidemment, je m'excuse platement auprès d'elles. Et évidemment, elles me pardonnent.
Il se passe ensuite la même chose avec Jonathan, et tout redevient comme avant.
Je dois avouer que je suis franchement soulagée.

***

Fin de la journée (vive les ellipses).
À la sortie du lycée, Jonathan m'interpelle:

- Hey Jo! Ça te dirait qu'on aille quelque part ce soir?

- Bah ouais! T'as prévenu les autres?

Il se met à se gratter la nuque, l'air gêné.

- Hum... Eh bien justement, j'aimerais que ce soit juste nous deux.

- Oh. Très bien alors. Où est-ce qu'on va?

Un sourire s'épanouit sur son visage.

- Un petit ciné, ça te va?

- Ok!

J'envoie un SMS à mes parents pour les prévenir et nous nous mettons en route.

« Il en pince pour toi c'est sûr. »
Je m'arrête brusquement. Cette voix... Oh non, ne me dites pas que...

« Eh oui, tu as bien deviné. C'est moi. Je t'avais dit que j'étais de plus en plus présente dans ta tête non? »

- Dégage de mes pensées... grommelé-je.

- Mmh, tu as dit quelque chose? me demande Jonathan.

- Oh, nan c'est rien!

J'accélère mon allure pour le rattraper.

« Alors soit je deviens schizophrène, soit tu existes vraiment... » reprené-je, mais mentalement cette fois-ci.

« La seconde option est évidemment la bonne. »

« ... Tu me tapes sur le système. Littéralement. »

« Je ne comprends vraiment pas ce qu'il te trouve... »

« Mais de quoi tu parles là? »

« Jonathan. »

« Bah quoi Jonathan? »

« Il t'aime, ça crève les yeux. »

- Non mais n'importe quoi toi!

Jonathan se retourne et me regarde, les yeux ronds comme des soucoupes.
Oups, je me suis mise à parler à haute voix sans faire exprès. Il doit me prendre pour une grosse folle maintenant.
(Oui cette situation est complètement clichée, mais cette fille m'a juste vraiment énervée. Voilà.)

- Ah euh... C'est rien, je repensais juste à un truc qui m'agaçait, expliqué-je.

Il hausse les épaules.

« Raconte pas n'importe quoi. » continué-je mentalement. « Il me voit comme sa petite sœur, rien de plus. »

« Je ne comprends pas. »

« Qu'est-ce que tu ne comprends pas? »

« Tu es clairement intéressée par lui et pourtant tu n'as pas envie qu'il te voie autrement que comme une amie. Pourquoi? Il est plutôt beau, sympa, intelligent... Si il t'aime, ne devrais-tu pas te réjouir? »

« ... Qu'est-ce qui t'a fait croire qu'il m'intéressait? »

« Je te rappelle que je peux lire dans tes pensées. »

« Sauf que je ne l'ai jamais pensé. »

« ... Et je peux ressentir tes émotions, aussi. »

« ... »

« ... »

« Ça ne change pas le fait que ça ne m'a jamais effleuré l'esprit. »

« Si, mais tu ne veux pas l'admettre. »

« C'est totalement crétin. »

« Je suis entièrement d'accord. C'est bête de se voiler la face comme ça... »

« Mais tu vas arrêter à la fin? »

« Pourquoi tu n'essaies pas de sortir avec lui? »

« Mais ta gueule! »

« C'est ballot, tu ne peux même pas mettre ta main devant ma bouche pour m'empêcher de parler. Vu que je suis dans ta tête. »

« Ferme-la. »

« Je n'arrêterai pas tant que je n'aurai pas ma réponse. »

« Tu n'as qu'à aller fouiner dans mes pensées si tu y tiens tant que ça. »

« J'ai essayé. »

« Et alors? »

« Tu n'en es pas consciente toi-même alors je n'ai rien trouvé. »

« Alors comment tu veux que je trouve la réponse si je ne sais pas moi-même? »

« Tu n'as qu'à y réfléchir. Tu ne l'avais pas fait avant. Sur ce sujet, je veux dire. »

Je ne réponds pas. Nous sommes arrivés.

- Quel film tu veux voir? me demande Jonathan.

- Mmh...

Je fais mine de réfléchir intensément en fronçant les sourcils. Ça le fait rire, bien sûr, et il me donne un léger coup de coude.

- Hé! m'exclamé-je.

Il rit de plus belle. Pff...
Je l'observe du coin de l'œil. Il y a une chose que je dois accorder à l'autre Johanna; Jonathan est en effet beau, sympa et intelligent.

- Je crois que j'aimerais regarder celui-ci, dis-je en montrant du doigt l'affiche d'un blockbuster promettant action et effets spécieux à gogo.

J'ai besoin d'arrêter de réfléchir quelques minutes. Et c'est le film idéal pour ça (parce qu'il faut bien se l'avouer, les blockbusters vont pas bien loin niveau scénario).

- Ok.

Il achète nos places et nous allons nous installer dans la salle.

- Jo...

- Oui quoi?

- Nous sommes un gars et une fille dans une salle obscure... chuchote-t-il avec un ton plein de sous-entendus surjoué.

- Oh non Jonathan arrête ça tout de suite s'il te plaît! m'exclamé-je alors que je commence à glousser.

- Imagine tout ce que nous pourrions faire...

- Arrête idiot! dis-je de façon pas du tout crédible étant donné que je suis à présent morte de rire.

Il glisse sa main sur une de mes cuisses et murmure à mon oreille:
- Ne t'en fais pas je serai doux. Un vrai gentleman.

Mon rire reprend de plus belle.

... Jusqu'à ce que je me rende compte qu'il est près. Vraiment très près. Mon cœur s'emballe. Pourquoi est-ce que je réagis comme ça? Il me fait tout le temps ce genre de blague! (Sa nature de dragueur qui ne veut pas complètement partir sans doute) Mais c'est la première fois que j'ai une réaction aussi absurde.

« Tu vois, je te l'avais dit. » annonce fièrement l'autre Johanna.

Je fronce les sourcils.

« Non, ce n'est pas... »

« Alors ce serait quoi d'autre? Mmh? »

- Jo, ça va? s'inquiète Jonathan en voyant mon air perdu.

- Ouais, ça va, répondé-je en souriant faiblement.

Bah merde alors.
L'autre folle dans ma tête avait raison.

J'ai un faible pour Jonathan.

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Heyy!!
Enfin Jo se rend compte de ses sentimentsi! (Enfin, à moitié XD)
Bon, même si personnellement, ce que j'ai préféré écrire dans ce chapitre c'est les dialogues entre les deux Johanna... ^^
Sur ce, à la prochaine! ;)
- Nalvera