43. La pièce enflammée


     Les révélations de Tassilon avaient plongé Arthur dans un abîme d'enthousiasme et de réflexions.

Quel pouvait être ce troisième monde ? Il avait pourtant entendu dire qu'il n'en existait que deux. Où pourrait-il trouver des informations à ce sujet ? A la bibliothèque de l'Académie, peut-être, mais il serait évidemment une bien mauvaise idée de s'y rendre...

La question de ses origines semblait s'être encore complexifiée. Qu'en était-il de Rose, sa supposée sœur ? Elle devait elle aussi venir de ce même monde. Pourquoi Athanasios n'avait-il jamais parlé de sa famille au Prince Noir ? Quels secrets cachait-il ? Comme tout ceci était frustrant !

L'utilisation de ses pouvoirs obsédait Arthur encore davantage. De quelle façon pouvaient-ils bien fonctionner ? Pourquoi tous les efforts d'Arthur s'étaient-ils toujours révélés vains pour produire la moindre magie ?

— Puisque je te dis que je n'en sais rien, fulmina Tassilon qui semblait ne plus pouvoir supporter la moindre question. Tu ne prononçais jamais d'incantation. Tu semblais faire ce que tu voulais grâce à l'aide de ta seule volonté, accompagnée de temps à autres de gestes. Si tu voulais que ce rocher là-bas se soulève, il se soulevait, voilà tout.

Arthur regarda en direction de la grosse pierre recouverte de mousse que désignait l'elfe et au sommet de laquelle Cid était en train de les observer avec beaucoup de curiosité. Il se concentra, rassemblant toute sa volonté.

« Soulève-toi », pensa-t-il le plus fort qu'il puisse.

Le rocher ne bougea pas d'un millimètre. La corneille entreprit de se gratter les plumes pour faire sa toilette, l'air de s'ennuyer.

Dépité, le jeune homme s'efforça de faire comme s'il n'avait rien tenté.

— Tu devrais essayer sur quelque chose de plus petit, lui conseilla le Prince Noir qui n'était manifestement pas dupe.

L'elfe sortit une pièce de monnaie en bronze et la tint entre deux doigts. Arthur leva la main, imaginant que cette dernière était une sorte d'aimant. La pièce sembla hésiter, frémit légèrement puis bondit dans sa paume ouverte. Il la referma et l'ouvrit à nouveau pour montrer fièrement sa prise à Tassilon.

L'elfe haussa les épaules, guère impressionné.

— Avec ce joli petit tour, tu pourrais songer à te lancer dans une carrière de saltimbanque.

— Je voudrais t'y voir, marmonna le jeune homme, vexé.

Il ne put cependant s'empêcher de s'imaginer en train de réaliser un spectacle de rues avec Tassilon à ses côtés en train de jongler avec des dagues. Sans doute obtiendraient-ils un certain succès.

Arthur n'était pour sa part pas mécontent de sa prestation. Il s'agissait après tout de l'une des toutes premières fois où il était parvenu à faire consciemment de la magie. Et il ne comptait pas s'arrêter là.

Se concentrant à nouveau, il regarda la pièce qu'il avait posée à plat sur sa main, avec la vague idée de lui faire produire de la lumière. Elle sembla prendre subitement feu l'instant d'après. Le jeune homme la lâcha précipitamment sur le sol. La pièce incandescente continua un moment à émettre des petites flammes.

— Tu as toujours été particulièrement doué avec le feu, commenta le Prince Noir d'un ton neutre. C'est un élément qui fonctionne bien avec ta magie, semble-t-il.

— Tu aurais pu me prévenir, protesta son ami en massant sa main qui portait une légère trace de brûlure.

— Et comment aurais-je pu savoir ce que tu avais l'intention de faire, gros malin?

Mais le jeune homme ne l'écoutait déjà plus. Il se rappela son combat contre les ominosi dans cette ruelle parisienne, plusieurs mois auparavant. Le bout de plastique qu'il tenait pour se défendre avait pris feu au contact de l'un des monstres. Et s'il en était le responsable ? Avait-il utilisé ses pouvoirs sans avoir conscience ? Il se remémora également la crise dont avait été victime la petite Catherine. Robert lui avait expliqué que cela arrivait aux récepteurs de magie lorsqu'ils côtoyaient trop longtemps un mage puissant.

« C'était moi ! », songea-t-il, stupéfait.

Pris d'une brusque inspiration, Arthur écarta largement les bras. Tout lui sembla alors aller de soi. Entraînées par son mouvement, de longues flammes s'élevèrent sur l'herbe tout autour de lui.

Le jeune homme se sentit envahi par un immense sentiment d'allégresse et fit se propager le feu un peu plus loin. Il n'avait jamais été aussi aussi bien qu'à cet instant. C'était comme retrouver l'usage d'un membre amputé.

— Fais attention, protesta Tassilon qui se tenait prudemment en arrière. Sais-tu seulement comment arrêter ces flammes ?

Arthur haussa les épaules avec indifférence. Pourquoi devrait-il mettre fin à ce feu si magnifique ?

— Bah non.

L'elfe poussa un profond soupir.

Aqua ! prononça-t-il à voix haute.

Une pluie torrentielle s'abattit sur quelques mètres carrés et éteignit le début d'incendie, aspergeant copieusement Arthur au passage.

— Tu utilises de la magie humaine ? s'étonna ce dernier en épongeant sa tunique détrempée. Je croyais que les elfes avaient leur propres dons.

Cette douche forcée l'avait sorti de sa transe et il observa l'herbe calcinée avec un certain effroi. Tassilon avait raison. Sans doute faudrait-il qu'il apprenne à canaliser ses pouvoirs avant de les utiliser à tort et à travers.

Le prince avait pris son petit air supérieur.

— La magie elfique est de loin la plus ancienne. Ses origines remontent à la nuit des temps. Son utilisation est cependant lente et demande une longue préparation. Pour éteindre un feu, il est préférable d'utiliser de la nouvelle magie. Et son maniement n'est pas un apanage humain, contrairement à ce que tu as l'air de penser.

Tassilon n'aimait pas que l'on puisse s'imaginer que les humains étaient plus puissants que les elfes sur un point quelconque.

— Et moi, je pourrais pratiquer de la magie elfique ?

— Non, ça ne marche pas dans ce sens.

— Mais tu ne peux pas utiliser non plus mes pouvoirs spéciaux.

— Je t'ai dit que tu étais à ma connaissance le seul à les posséder, répondit le Prince Noir, l'air franchement agacé.

— Et ma magie est plus puissante que celle des elfes ?

Tassilon se renfrognait de plus en plus.

— Elle est difficilement comparable. La tienne est peut-être un peu plus... spectaculaire. Mais c'est tout. Je te prierai d'ailleurs d'éviter de mettre le feu au manoir.

—Et donc je suis plus fort que toi, conclut Arthur avec un malin plaisir.

Son ami lui envoya un regard furibond.

—Souhaites-tu en faire le test ? Il serait temps de reprendre ton entraînement à l'épée, tu ne crois pas ?

 

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Bonjour à tous !

Nous sommes enfin arrivés au moment où Arthur découvre qu'il a encore des pouvoirs. A partir de là, il va devenir un peu plus actif.

Je sais que ce chapitre est très court, alors, pour me faire pardonner, je vais vous apprendre 10 choses plus ou moins inutiles au sujet de cette histoire :

1. J'ai prévu de faire trois tomes. Le premier est globalement écrit. Je le modifie sans arrêt, enlève et rajoute des passages et poste les chapitres au fur et à mesure. Je suis en train d'élaborer parallèlement le scénario des 2 et 3.

2. J'avais commencé ce roman il y a 8 ans. J'avais écrit le début, jusqu'à l'arrivée d'Arthur au château d'Aspignan. Puis, impatiente de pouvoir faire apparaître le Prince Noir, j'étais passé au moment où il découvre son identité et rencontre Tassilon. Puis j'avais écrit la toute fin. Puis je n'y avais plus touché pendant plusieurs années.

3. Katsuo était censé être un petit blond nommé Hugo, mais j'ai trouvé que mon roman manquait de diversité.

4. Les humains ont des prénoms capétiens. Les elfes blancs des prénoms romains. Les elfes noirs des prénoms mérovingiens et carolingiens. Et il n'y a aucun sens à chercher à tout cela.

5. Je ne me souviens plus de pourquoi j'ai choisi le prénom d'Arthur (à cause du roi, probablement). Je suppose que Robert a été nommé ainsi à cause de Robert d'Artois (pour ceux qui connaissent les Rois maudits). Les autres Aspignan ont des noms typiques de la fin de MA (suivant l'absence de logique du point précédent)

6. Le nom de Tassilon est inspiré du duc de Bavière Tassilon III (741-794), un homme adorant les intrigues qui s'est plusieurs fois rebellé contre son cousin Charlemagne avant de finir destitué. Quant au Prince Noir, j'ai repris le surnom donné à Edouard (1330-1376), prince de Galles et d'Aquitaine, fils aîné du roi d'Angeterre Edouard III. Il a été appelé ainsi parce qu'il se battait avec une armure noire. Il a été un personnage très actif de la guerre de Cent Ans et a fait plusieurs chevauchées en France (des raids, si vous voulez). Pour info, il est mort un an avant son père et n'est donc jamais devenu roi.

A propos, je prononce son prénom Tas-si-long. De même, Mundus se dit moundouce (bon, si vous avez pris l'habitude de dire « Tassilone se ballade à Maindu », vous pouvez continuer)

7. J'ai en revanche mis 8 ans avant de trouver les noms d'Athanasios et d'Absalom. Dans mon manuscrit d'origine, je les désignais respectivement par « Bbb » et « *** ». Ça m'allait très bien, mais c'était quand même assez ridicule et long de prononcer dans ma tête « astérisque astérisque astérisque ». J'ai trouvé Absalom assez facilement, mais Athanasios a failli s'appeler Aghation, Eurynome, Malphas, Orobas, Demetios, Apophis ou encore Néferkaré.

8. Comme je l'ai déjà dit à certains, Cid est inspirée d'une corneille tombée du nid que nous avions adoptée avec mes frère et sœurs au moment où j'avais commencé le roman.

9. La partie 38 a été publiée à Edimbourg devant le pub où on dit que J.K. Rowling a écrit le tome 1 d'Harry Potter...

10. Tassilon va réellement épouser la fille d'Arthur.

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