37. Le repaire d'Athanasios


     Lorsque Arthur ouvrit les yeux, il constata qu'il était - une fois n'est pas coutume – allongé dans un lit moelleux surmonté d'un édredon. Il sursauta et se redressa, inquiet de se retrouver entre quatre murs. Le Prince Noir n'était visible nulle part. Avaient-ils été capturés ? Non, c'était peu probable. La pièce ronde dans laquelle il se trouvait était bien trop spacieuse et confortable pour ressembler à un cachot.

Le jeune homme s'efforça de se remémorer les derniers événements qui étaient assez flous dans son esprit. Il se rappela la source, le champignon que Tassilon l'avait forcé à avaler. L'elfe l'avait drogué. Pour quelle raison ? Probablement parce qu'il ne voulait pas qu'Arthur puisse connaître l'emplacement du bâtiment dans lequel ils se trouvaient actuellement. Quelle conclusion en tirer ? Ils devaient avoir gagné le fameux repaire d'Athanasios dont Robert lui avait un jour parlé. Cet endroit que personne n'arrivait à localiser dans lequel étaient gardés les otages du mage noir. Bien sûr, le Prince Noir ne faisait pas suffisamment confiance à Arthur pour lui permettre d'en connaître la position.

Le jeune homme décida de ne pas s'en formaliser plus que cela et s'étira longuement. Il se sentait frais et reposé. Et il avait faim. Combien de temps avait-il dormi ?

A sa grande satisfaction, Arthur s’aperçut qu’un plateau bien garni de nourriture était posé sur une petite table à côté de son lit. Il s'empara avidement d'une assiette contenant une sorte de ragoût épicé qu'il avala en quelques bouchées. Le plat avait refroidi depuis le moment où il avait été déposé ici, mais cela faisait des mois et il ne savait plus combien de jours que le jeune homme n’avait pas mangé aussi copieusement.

Le ventre plein, Arthur se sentit l’esprit plus réveillé. Il sortit de son lit avec un certain regret et regarda autour de lui avec curiosité. S'il ne s'était pas trompé dans son hypothèse, il avait probablement été déposé dans cette pièce parce qu'il s'agissait de la chambre d'Athanasios. De sa chambre. Jamais le jeune homme n'avait disposé d'une telle occasion pour tenter d'en apprendre davantage sur son ancienne personnalité.

Athanasios aimait visiblement la sobriété. Les murs en pierre n'étaient recouverts que par une simple tapisserie à motifs géométriques et par une bibliothèque hétéroclite bien garnie. Arthur ouvrit l'armoire de taille modeste qui se trouvait non loin de son lit. Il en sortit au hasard une tunique et un pantalon qui lui semblaient parfaitement de sa taille et regarda autour de lui pour chercher un moyen de se laver. Il remarqua alors qu'une deuxième pièce était accolée à sa chambre. Il en ouvrit la porte... et se retrouva face à une salle de bain dernier cri comportant un lavabo, des toilettes et une douche.

Arthur resta figé sur place, stupéfait par ce brusque changement de décor. Se trouvait-il bien toujours à Mundus ? Depuis quand utilisait-on l'eau courante dans ce monde ? Ou alors s'agissait-il d'un système qui fonctionnait grâce à quelque subterfuge magique ?

Décidant de remettre l'explication à plus tard, le jeune homme se précipita dans la cabine et fit couler de l'eau. Lorsque la température fut supportable, il se déshabilla et glissa son corps sous l'eau avec soulagement. Il était incroyablement agréable de pouvoir passer sous le jet ses muscles endoloris par les longues journées de marche. Il était également absolument satisfaisant de se débarrasser enfin de toute la crasse qu'il avait accumulée. L'eau qui coulait à ses pieds était noire de saleté. Il attrapa un pain de savon et frictionna tout son corps, se rinça, puis recommença deux fois la même opération jusqu'à se sentir parfaitement propre. Il attrapa alors une serviette et l'enveloppa autour de sa taille.

Il était à présent grand temps d'éclaircir le mystère de cette eau courante. Le jeune homme se glissa à quatre pattes sous le lavabo pour essayer de comprendre son fonctionnement. L'évier semblait cependant relié au sol par un tuyau exactement comme sur Terre et…

— Il faut tourner le robinet pour faire sortir l'eau, commenta soudain une voix froide derrière son dos.

Arthur fit un bon en l'air, se cogna contre le lavabo et se retourna précipitamment pour faire face à une humaine aux longs cheveux blonds qui se tenait à quelques pas derrière lui.

Il eut un mouvement de recul involontaire en se demandant avec effroi depuis combien de temps cette jeune fille était présente. Elle lui semblait vaguement familière sans qu'il puisse savoir pourquoi. Il se redressa, horriblement gêné de se trouver ainsi à moitié nu devant elle.

— Euh...merci, je sais, répondit-il d'une voix hésitante. Euh...qui êtes-vous ? Et que faites-vous ici ?

Son interlocutrice lui jeta un regard hautain.

— Et vous ? Vous n'êtes pas un elfe, mais vous ne semblez pas non plus être un prisonnier.

— Euh...euh…, bredouilla le jeune homme en réfléchissant à tout allure.

Il lui semblait peu pertinent de révéler sa véritable identité à cette personne qui semblait heureusement l'ignorer.

— Je m'appelle Arthur Montnoir, finit-il par dire. J'ai été amené ici par le Prince Noir parce que...euh...parce que j'étais autrefois une sorte d'allié d'Athanasios.

Il remarqua du coin de l’œil que la jeune fille avait serré les poings en entendant parler du mage noir.

— Vous êtes donc mon ennemi, déclara-t-elle d'un ton féroce.

— Non, protesta aussitôt Arthur. Je ne suis plus celui que j'étais ! J'ai perdu la mémoire et je vous assure que je n'éprouve plus aucune sympathie pour Athanasios.

Elle ne répondit rien, continuant à le jauger du regard.

— Êtes-vous l'une des otages ? continua le jeune homme qui ne voyait pas d'autre explication à la présence de cette humaine.

Son interlocutrice hocha la tête, toujours méfiante.

— Oui. Je vis enfermée depuis maintenant fort longtemps. Mais, pour une raison que j'ignore, cet abominable prince des elfes est venue me voir dans ma cellule il y a quelques minutes pour me faire venir ici, me demandant de vous servir.

Elle insista sur le dernier mot avec mépris, visiblement offusquée de devoir jouer le rôle d'une servante.

Arthur était quant à lui parfaitement horrifié. Qu'avait Tassilon en tête pour lui envoyer une otage comme domestique ? L'elfe s'imaginait-il qu'il souhaiterait profiter de cette jolie fille ? Le jeune homme n'avait pas la moindre envie d'utiliser les prisonniers d'Athanasios comme des esclaves, bien au contraire !

— Je ne veux personne pour me servir, s'indigna-t-il. Et je ne suis pas votre adversaire. Je vous assure que nous nous trouvons tous deux dans le même camp.

Elle haussa un sourcil.

— Si c'est vraiment le cas, allez donc me chercher des armes pour que j'aille écrabouiller cet infâme Prince Noir et ce méprisable Athanasios, libérer les autres otages avant de tous nous enfuir de cet horrible endroit !

Une lueur de compréhension s'alluma soudain dans le regard d'Arthur.

— Vous êtes Charlotte d'Aspignan ! s'exclama-t-il.

Elle sursauta et plissa les yeux avec suspicion.

— Comment le savez-vous ?

Il sourit.

— Vous avez certaines caractéristiques propres à votre famille.

Et c'est ainsi que je rencontrai Arthur Montnoir pour la première fois.

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