Chapitre 22

Jace

Ma cigarette se consumait trop rapidement entre mes doigts, si bien que j'en prenais une nouvelle dans son paquet avant même d'avoir écraser le mégot dans le cendrier.

- Est-ce qu'il a bronché ? demandai-je en recrachant une volute de fumée.

Les deux hommes chargés de surveiller l'enfoiré secouèrent leur tête de droite à gauche. Les yeux rivés sur les écrans de vidéosurveillance, ils épiaient le moindre de ses mouvements et avaient pour ordre de me prévenir à la minute où il lèverait le petit doigt.

Mais rien. Les minutes s'écoulaient sans qu'il ne se passe rien, emportant un peu plus de ma patience avec elles. Depuis notre arrivée, cet enfoiré n'avait pas bougé le cul de sa chaise. Il n'avait même pas daigné toucher son verre posé sur le bar. Il restait assis là, le visage tourné vers la foule, à la recherche d'un corps à vendre à des gros porcs en échange de quelques liasses de billets supplémentaires. Il était pourtant grassement payé. Mais l'argent pouvait vite monter à la tête et pousser les plus avides à faire les choses les plus abominables. Du trafic d'être humain... Cet ordure était tombé bien bas. Il me dégoutait et méritait ce qui l'attendait.

- Il a sorti son téléphone pour envoyer un message, me prévint soudain le blondinet tandis que l'autre, installé à ses côtés, acquiesçait sans jamais lever les yeux de son ordinateur.

C'était le moment. En épiant les vidéosurveillances des soirs précédents, nous nous étions aperçus que les évènements s'enchaînaient dans le même ordre. D'abord, l'autre dégueulasse de Pierce utilisait son téléphone pour prévenir ses complices une fois la fille choisie. Quelques instants après seulement, il se rapprochait d'elle, la droguait par n'importe quel moyen, avant de se retirer vers l'arrière du bâtiment où une voiture les attendait.

- C'est bon, il s'est levé et se dirige vers une fille.

Je me levais précipitamment, renversant la chaise sur laquelle j'étais installé, pour me placer derrière mes deux hommes. Je devais m'assurer qu'il aille au bout des choses avant d'avertir Clayton qui lui, se chargera de donner le signal auprès des autres hommes postés dans les alentours. Chacun attendait sagement les ordres.

La caméra filmait l'intérieur de la boîte, là où la fête battait son plein. Des corps transpirants qui se déhanchaient et s'entrechoquaient, une bagarre qui éclatait dans un coin et un agent de sécurité qui accourait pour mettre dehors les responsables, des débiles qui commandaient des bouteilles avec de l'argent qu'ils n'avaient pas, pensant que cela les rendait attirant aux yeux des filles. Mais tout ça n'était qu'une couverture. Le réseau de boîtes de nuit que je possédais ne servait qu'à écouler la drogue auprès des consommateurs et à blanchir les profits. Rien de plus. Rien de moins.

Pourtant, un de mes propres hommes se servait de notre réseau pour une toute autre raison. Et j'avais horreur qu'on se foute de ma gueule.

- C'est elle ! me ramena à la réalité le blondinet, en me désignant du doigt un point sur l'écran.

En plissant les yeux, j'approchais mon visage de l'écran. C'était bien une fille, bien qu'elle ne ressemble à aucune autre présente ce soir. Curieux, pensai-je. Pourquoi avait-il choisi cette fille, vêtue d'un pantalon large, d'une paire de baskets usée et d'un large teeshirt, et pas une de ces bimbos en jupe courte et talons hauts ? Elle était de profil, mais on pouvait facilement deviner son charme derrière son air pressé. Ou bien peut-être était-ce de la peur. Elle semblait agitée et cherchait désespérément quelque chose.

Et puis soudain, la réalité me frappa lorsqu'elle tourna la tête et que la caméra captura son visage. Mon cœur rata un battement avant de frapper plus fort dans ma poitrine, saccadant ma respiration. L'espace d'un instant, je pensai l'avoir seulement imaginée. Mais je n'avais pas rêvé, elle était réellement en mauvaise posture. Elle était sa cible.

- Putain ! hurlai-je en courant vers la porte. Avertissez Clayton que je me charge de ce fumier moi-même, lui et les gars s'occupent des complices !

Je ne savais pas exactement ce qui me mettait le plus en colère. Savoir qu'elle m'avait désobéie en cherchant à s'échapper ou bien savoir que cet enfoiré lui voulait du mal.

- Putain ! criai-je à nouveau dans le couloir qui me mènerait dans la salle principale.

Pourquoi m'avait-elle désobéie ? Pourquoi fallait-il qu'elle complique toujours tout ?

- Elle ne pouvait pas rester bien sagement dans ce foutu bureau ? me demandai-je tout haut en tâtant la ceinture de mon pantalon, à la recherche de mon arme.

Peut-être que si tu ne le l'avais pas kidnappé puis obligé à venir ici... commença à sous-entendre la petite voix dans ma tête. Je l'ignorai, saisissant mon arme à feu et pressant un peu plus le pas. Je sentais ma haine prendre le contrôle. Pierce, répétai-je en boucle dans ma tête.

- T'es mort, enfoiré.

Lorsque je pénétrais dans la salle principale, ni la musique ni la foule en délire ne réussirent à me distraire. Je ne pouvais pas perdre une seule seconde au risque de ne pas la retrouver.

Mes yeux analysaient le moindre mouvement en direction de l'issue de secours, mais j'étais comme aveugle. C'était comme chercher une aiguille dans une botte de foin.

- Putain, Ana... dis-je, les deux serrées. T'es où ?

J'étais trop concentré pour remarquer que quelqu'un s'approchait de moi en titubant dangereusement. Soudain, une liquide froid et collant se déversa sur la peau de mon bras nu, me faisant détourner les yeux pour fusiller du regard la coupable. Cette dernière, bien trop jeune pour se trouver dans ce genre d'endroit sordide, m'offrît un sourire désolé.

- Pardon, je ne l'ai pas fait exprès.

Dans une tentative vaine de se rapprocher pour me parler à l'oreille, elle perdu l'équilibre et s'écroula dans mes bras.

- Putain ! la maudis-je, mon arme à feu dans le creux de ses reins.

Le contact de l'objet froid sur sa peau bouillante la surpris et elle se redressa rapidement pour voir de quoi il s'agissait. Sans me laisser le temps de cacher le pistolet, elle se saisit de mon poignée pour observer attentivement ce que tenait ma main.

Je vis ses grands yeux noisettes s'écarquiller de terreur et avant qu'elle ne puisse hurler et attirer les regards indiscrets, je bâillonnais sa bouche à l'aide de ma main libre.

- Chut ! lui ordonnai-je tout en cherchant du regard un de mes agents de sécurité pour qu'il me vienne en aide.

Mais ce faisant, quelque chose attira mon attention près de l'entrée principale. Un homme de dos sur l'épaule duquel reposait une tête aux longs cheveux châtains. Elle ne semblait plus capable de tenir sur ses jambes, si bien que l'homme devait fermement la tenir contre lui.

En même temps que je les observais, j'eus l'impression que ma poitrine était prise dans un étau et que celui-ci se resserrait à chaque nouveau pas qui rapprochait cet homme de la sortie. Ana.

Relâchant ma prisonnière, je me précipitais dans leur direction. Derrière mon dos, la fille hurla à en perdre la voix mais ça m'était égal à présent. La seule chose qui importait était d'attraper ce fumier et de récupérer Ana saine et sauve.

Pressé de sortir d'ici au plus vite et sans se faire remarquer, il ne réalisa pas que je le suivais, prêt à l'égorger s'il osait quelque chose sur Ana. Les agents de sécurité me repérèrent derrière Pierce et l'un d'eux se leva. Je le fusillai du regard pour lui faire comprendre de ne pas broncher. Si j'étais découvert par sa faute, il le paierait cher.

- Bonne soirée, lança Pierce en passant devant eux.

Ces derniers hochèrent la tête et le laissèrent passer.

Quelques mètres plus loin, je m'avançai à mon tour pour sortir. L'un des agents me tint la porte et me parla à l'oreille :

- Est-ce qu'on prévient les autres ?

- Dîtes à Clayton que Pierce est sorti par devant et que je risque d'avoir besoin d'aide.

En franchissant la porte blindée, je saisis mon arme à deux mains, un doigt sur la détente, prêt à tirer en cas de besoin.

L'entrée principale donnait directement sur le parking où stationnaient de nombreuses voitures. Certains s'étaient même garés au bord de la route, par manque de place.

Sans jamais perdre du regard Pierce qui maintenait toujours Ana dans ses bras, je m'assurais qu'aucune oreille indiscrète ne traînait dans les parages. J'avais autre chose à faire que de m'occuper d'une autre galère dans le genre.

Une fois assuré que personne ne rôdait sur le parking, j'accélérai le pas jusqu'à me trouver derrière lui. Seulement à cet instant, je braquais mon arme contre sa tête.

- Bonsoir, Pierce.

Ce dernier cessa tout mouvement. C'était terminé pour lui, et il le savait. Je l'avais pris la main dans le sac et manque de chance, avec la mauvaise personne.

- Tourne-toi doucement, ordonnai-je froidement. 

Je voulais le voir putain. Je voulais voir la panique déformer son visage. Pire que ça, je voulais voir la peur dans ses yeux en réalisant que je n'aurai aucune pitié pour lui. Pas après l'avoir choisi, elle. Mais il ne saurait jamais que son choix avait signé son arrêt de mort.

Les chaussures de Pierce crissèrent sur le gravier lorsqu'il changea de direction pour me faire face. Mais son regard qui rencontra le mien était terrifiant, vide du moindre sentiment. Pourtant, il ne m'intimida en rien. Il n'avait plus rien à perdre à présent, alors se plier aux exigences de son patron était révolu. Il serait prêt à tout désormais pour m'échapper. Je devais donc rester vigilant.

Mes yeux tombèrent sur le visage d'Ana reposant sur l'épaule de Pierce. Ses yeux brillaient même dans la pénombre. La drogue qu'il lui avait administrée la rendait impuissante mais elle continuait à être pleinement consciente de son environnement. Elle était prisonnière de son propre corps, et je pouvais facilement imaginer qu'elle était effrayée. Cette découverte m'atteint mais je ne laissai rien paraître.

- Tu vas gentiment la lâcher et me laisser te faire regretter d'être un trou du cul.

- Comme tu veux, Jace.

C'était trop facile. Et le sourire vicieux qui étira ses lèvres confirma mes soupçons.

Il lâcha Ana qui tomba lourdement sur le sol. Je voulais la rattraper mais ne pouvais pas prendre le risque de baisser mon arme. Tu vas le regretter... pensai-je. Mais dans un geste rapide, il sortit son arme et la dirigea dans ma direction. Le tenant toujours en joue, j'appuyai sur la détente. Le coup partit dans un bruit assourdissant et une balle se logea entre ses deux yeux, du sang rouge vif noyant son visage.

- Putain d'enfoiré ! l'insultai-je en réalisant qu'il s'était encore foutu de ma gueule.

Il savait très bien qu'en me menaçant de son arme, il n'aurait aucune chance. Il savait ce qui l'attendait et préférait mourir rapidement que dans d'affreuses souffrances.

- Brûle en enfer connard !




Ciao ragazzi,

L'attente fut longue pour certains, je le sais. J'ai reçu tous vos messages et commentaires et je tenais à vous remercier pour votre soutien mais aussi à m'excuser pour cette longue absence !

J'espère que ce chapitre saura vous redonner le sourire en ce début de semaine.

Bacio

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