18 - trésor

Jean faisait les cent pas dans le salon, si nerveux qu'il se rongeait les ongles. Et il ne se rongeait plus les ongles depuis le collège ... Mais là ... C'était trop.

- Cesse d'agir comme un lion en cage. Tu vas creuser une tranchée.

Il fit volte face, le cœur au bord des lèvres, face à sa grand-mère. Enfin !

- Grand mère, comment ...

Elle l'interrompit d'un geste de la main, avant de finir de descendre les escaliers, à son rythme. Puis elle fit un détour vers la cuisine, et Jean la suivit, trop impatient pour attendre ne serait-ce qu'encore plus.

Il la trouva en train de préparer du thé, avec tranquillité. Une tranquillité qui acheva d'un coup de grâce le peu de patience qui lui restait.

- GRAND-MÈRE !

Elle lui jeta un tel regard que ça lui en cloua le bec. Et d'un geste impérieux, elle lui ordonna de s'asseoir à la table de la cuisine. Bon gré mal gré, il obtempéra, en serrant les dents. Quelques minutes plus tard, sa grand-mère s'assit enfin en face de lui, et posa une belle tasse de tisane devant lui.

- Grand-mère, je ...

- Tim va bien, mon petit, finit-elle par lui répondre, en avalant une petite gorgée.

Il souffla longuement, et la tension qui l'envahissait depuis maintenant presque une heure s'évanouit enfin.

- Dieu merci ...

- Il a eu beaucoup de chance. Tu l'as trouvé au bon moment. Ton ami ... Tim a frôlé l'hypothermie.

- À ce point ? souffla Jean, en déglutissant.

- Oui. Pauvre petit ... Il a été enfermé dehors, ou bien ?

Enfermé dehors ... Il repensa au mois dernier, quand il avait récupéré Tim sur un banc au parc. Il était dans un sale état, mais au moins il ne frôlait pas l'hypothermie.

Il avala une longue gorgée de tisane, qui lui brûla la gorge, et lui remit les idées en place.

- Grand-mère ... Tim ... Je pense qu'il ...

- Je sais. Je sais, moi aussi. Mais ... C'est compliqué, comme chose. Très compliqué.

Et elle savait de quoi elle parlait, sa digne grand-mère, après tout.

- Tu penses ... faire quoi ?

- Je ne sais pas, mon petit. Mais il faut ... lui laisser du temps. C'est à lui de faire le premier pas. Sinon, ça ne cessera jamais.

Il baissa la tête, sur sa tasse de thé, et ferma les yeux. Il avait ... Envie que ça cesse. Que Tim ...

Tim.

- Je peux aller le voir, grand-mère ?

- Bien sûr. Vas-y, je m'occupe du reste.

- Merci.

Il vida le reste de sa boisson chaude, et monta directement à l'étage, sautant une marche sur deux.

Lorsqu'il arriva enfin devant la porte de sa chambre, il prit une grande inspiration et l'ouvrit le plus doucement du monde.

Tim dormait dans son lit, sous un amoncellement de couvertures. Et son sommeil avait l'air agité, au vu de son visage tendu. Doucement, il s'approcha de son ami, et posa sa main sur son front, avec une expression soucieuse. Il était tiède ... Il récupérait comme il pouvait.

Lorsqu'il l'avait vu perdre conscience ainsi, tout à l'heure, Jean avait eu la peur de sa vie.

Il avait tenté de le réveiller, mais ce dernier n'avait même pas pu garder un état de semi-conscience, en délirant à moitié, appelant un certain Sam ... Heureusement sa grand-mère était arrivée peu de temps auparavant, et avait pris Tim en charge. Dans sa jeunesse, elle avait travaillé dans la clinique privée de son ex-mari, et avait probablement été sa meilleure chirurgienne. Elle était devenue de facto leur médecin non officiel, et avait pris soin de Tim mieux que quiconque aurait pu le faire, lors de son "accident de vélo".

Elle avait aussi fait du bon travail, il le savait, mais là ... Jean ne pouvait s'empêcher d'être inquiet.

Et malgré les couvertures qui le couvrait déjà ... Il alla chercher celle de sa mère.

Quand il était malade, elle l'enveloppait dedans avec un merveilleux sourire, et lui soufflait que tout irait mieux. Petit, il était persuadé que cette couverture avait des pouvoirs magiques. Comme un vrai trésor.

Et ... c'est aussi un peu pour ça qu'il avait enveloppé son ami de cette couverture, la dernière fois.

Il ... Il avait besoin d'aide. Tim avait besoin d'aide. Mais surtout, il avait besoin de réconfort.

Alors il ramena la couverture dans la chambre, et enveloppa Tim dedans, aussi doucement qu'il le put.

Un frisson parcourut son corps endormi, mais Tim se contenta de se détendre, doucement. Le cauchemar était-il terminé ? Tant mieux ... Peut-être que son trésor avait vraiment des pouvoirs magiques, finalement.

Il se laissa glisser par terre, juste à côté du lit, et posa une main sur son épaule, avec une attention toute particulière. Et il ferma les yeux, doucement, avant d'émettre une prière muette. Il ne savait pas vraiment en quoi Tim croyait, mais il espérait que quelqu'un l'entende.

Ne serait-ce que lui.

- Ça ira, Tim. Ça ira. Tu n'es plus seul, mon ami. Tu n'es plus seul. Ça ira.

Soudain, la couverture glissa doucement sur les épaules de Tim, et frôla ses doigts. Et mû par un réflexe instinctif, sans doute, son ami s'en saisit, et serra le poing dessus.

Et lentement, un semblant de sourire se forma sur ses lèvres. Un sourire que Jean ne put s'empêcher de copier.

Oui, peut-être que son trésor était magique.

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