Lorsque Voldemort rentra de sa petite expédition, satisfait, il sursauta en découvrant dans sa chambre Harry.
L'adolescent l'attendait, sagement assis sur un fauteuil, le regard dans le vague.

Le mage noir soupira et s'attendit à des hurlements mais il fut surpris du calme du gamin.
- Ron m'a tout dit. La lettre de sa mère et l'attaque à laquelle tu as échappé.
Méfiant, l'homme hocha la tête, essayant de décrypter les émotions dans le regard vert. Trahison, tristesse, lassitude...

Harry laissa échapper un petit rire triste.
- Je ne vais pas exploser de colère. Ni m'effondrer en larmes si c'est ce que tu crains.
- J'attends juste de savoir pourquoi tu m'attendais dans ma chambre.

L'adolescent se mordilla la lèvre, et haussa les épaules.
- Dumbledore... tu l'as tué non ? C'est ça que tu es parti faire ?
- Il est mort effectivement.

Harry chancela légèrement et soupira.
- Je pensais que... que ça me ferait plus de peine. Je l'aimais bien tu sais ? Un peu comme un grand père un peu excentrique. Mais depuis... depuis le tournoi des trois sorciers j'étais terriblement en colère contre lui. Je ne suis pas totalement stupide, j'ai bien vu qu'il ne voyait en moi qu'une arme. Il savait comment les Dursley étaient, mais je devais toujours y retourner...

Le jeune homme marqua une pause et se frotta les yeux - un geste de jeune enfant un peu perdu.
- Je lui faisais confiance, et il voulait me tuer. Il l'aurait fait sans hésiter, probablement en m'expliquant que c'était pour le bien du monde magique... Pour son plus grand bien.

Cette fois, Voldemort intervint, grognant presque.
- Il ne te fera plus de mal Harry. C'est terminé. Et son complice ignoble, l'Auror Maugrey sera le prochain sur ma liste.
Harry ne protesta pas, comme s'il était las de plaider la cause de gens qui le trahissaient à la première occasion. D'un ton plus bas - si bas que le mage noir dût tendre l'oreille pour comprendre - il demanda :
- Tom ? Tu n'as pas peur de te réveiller dans un monde en flammes ? Après tout, Dumbledore est... était le leader de la lumière.

Voldemort contempla longuement le Gryffondor. Le gamin était maigre à faire peur, même s'il avait repris du poids à ses côtés. Il était plutôt petit. Rien d'effrayant. Un petit garçon encore...
Pourtant, habituellement, sa puissance magique suffisait à comprendre qu'il était plus fort qu'il en avait l'air. Ça et la détermination qui brillait dans ses prunelles vertes.

Cependant en cet instant, il ressemblait à un enfant fragile prêt à se briser. Ses yeux étaient pleins de doutes, et il n'avait plus cet air de défi permanent.
A une époque, le mage noir aurait jubilé de le voir dans cet état. Abattu. Vaincu.

Mais les choses avaient changé. Radicalement.
L'homme s'approcha de lui, et posa une main sur son épaule, essayant de se montrer réconfortant.
- Dumbledore entretenait la guerre. Avec toi à mes côtés, sa disparition signe la fin d'une époque. Finalement, la guerre se terminera rapidement. Le Ministère va tomber, et d'ici peu, le monde magique aura retrouvé la paix.

Harry le dévisagea, incrédule.
- Je ne comprends pas ?
- Harry... si tu ne t'opposes plus à moi, personne ne le fera. L'ordre de Dumbledore... ils ne croient même plus en ce qu'ils font. Ce sont des sorciers effrayés qui essaient de survivre. Dès que j'aurais annoncé que les sangs-mêlés et sang-de... nés-moldus ne seront pas tués, ils me suivront les yeux fermés.

L'adolescent le fixa un long moment, puis il cligna des yeux.
- Si tu voulais diriger le monde magique, pourquoi tu n'as pas simplement pris la place de Ministre de la Magie dès le début au lieu de commencer une guerre qui a fait tant de victimes ?
- Déjà, parce que la folie m'a embrouillé l'esprit. Je pense que... J'ai fait quelque chose, un rituel de magie noire, qui a divisé mon âme et je me suis perdu. Notre lien m'a rendu la raison en quelques sortes.
- Divisé ton âme ?
Harry semblait révulsé. Voldemort écarta l'objection d'un revers de la main.
- Peu importe. L'essentiel c'est que je suis de nouveau capable de réfléchir convenablement, et que je ne suis plus aveuglé par l'envie de faire couler le sang. Ensuite... et bien j'ai légèrement changé mes objectifs pour toi.

L'adolescent hoqueta, stupéfait.
- Quoi ?
Il avait couiné la question, et il fixait son âme soeur comme s'il s'attendait à le voir éclater de rire et prétendre qu'il s'agissait d'une plaisanterie.

Voldemort grogna. Il n'aimait pas trop admettre que le lien l'avait changé. Qu'il avait changé plus exactement, pour faire plaisir au gamin.
Il n'allait certainement pas lui avouer que Bellatrix l'avait condamné à devenir de plus en plus humain à son contact, qu'il avait à coeur de le rendre heureux même s'il n'avait pas perdu sa personnalité initiale.

Au début de son règne, il avait eu pour ambition de privilégier les sangs-purs et d'éliminer toute trace de moldu dans le monde magique. Ce qui incluait les sangs-mêlés mais surtout les sang-de-bourbe.
Et puis, Harry avait débarqué dans sa vie comme un chien dans un jeu de quilles. Il avait tout bouleversé. Le gamin n'avait pas cessé de parler de son amie née-moldu, et Voldemort avait commencé à envisager de ne plus s'en prendre aux sorciers, quelle que soit leur origine.

L'idée de se montrer moins brutal ne semblait pas rebuter ses Mangemorts, tant que les sangs-purs gardaient leurs avantages. Et avant même qu'il n'en soit conscient, la décision était prise.
- Harry... penses-tu réellement que j'aurais cessé de tuer les sang-de-bourbe si tu n'avais pas été là ?

Le gamin grogna à l'emploi de l'insulte, mais resta silencieux, assimilant les paroles de celui qui avait été son ennemi. Finalement, il osa demander confirmation d'une petite voix.
- Donc ça va être vraiment terminé ? Pour de bon ?

Le Mage noir grogna.
- Que puis-je te répondre ? Je ne compte plus mener de raids et attaquer le chemin de Traverse. Seuls les sorciers qui s'opposeront ouvertement à moi seront... en danger.
- Et les Mangemorts ?
- La plupart seront ravis de ne plus avoir à se battre. Contrairement à ce que beaucoup pensent, ils ne sont pas des monstres assoiffés de sang. Pas tous en tous cas. Ils auront leur place au Ministère à mes côtés. Après s'être battus à mes côtés, ils méritent de modeler le monde dont ils rêvent.

Harry se crispa, craignant que les attaques ne reprennent, dictées par des envies de vengeance des Mangemorts. Mais Voldemort sembla lire dans ses pensées, puisqu'il se pencha vers lui afin de le fixer dans les yeux.
- Les promesses que je t'ai faites ne seront pas brisées, Harry. Je n'ai aucun goût à créer une démocratie : je serais l'unique dirigeant, et mes ordres devront être suivis sous peine de représailles...

Prompt de demain (et épilogue ) :   Un pas plus près