14.
Ils se levèrent se jetant des regards se voulant complices alors qu'ils se sentaient tout les deux coupables que pour un instant, rien qu'infime ils avaient osé penser de leurs vies respectives. Du passé, du présent, mais inconsciemment aussi du futur. Après que ce passera t-il ? Ils étaient jeunes. Maintenant. Aujourd'hui. Et demain ?
Amélia leva les yeux aux ciels. L'alcool et les petites pilules magiques de Scar ne faisaient pas bon ménage. Elle se la jouait rebelle et anticonformiste. Alors pourquoi voulait-elle désespérément lui plaire ? Il n'avait ni un sourire qui plaisait, ni des yeux dans lesquels on pourrait s'y perdre. Alors, bon sang, qu'avait-il de plus ? Le cœur a ses raisons que la raison ignore.
Ils recommencèrent à danser quelques instants au rythme entraînant de la musique, un sourire factice voulant montrer qu'ils s'amusaient, même si tout les deux ne gesticulaient que pour faire comme les autres. Cela revenait toujours au même point, pour faire comme les autres. Pour plaire aux autres.
Pourquoi avaient t'on tous ce besoin omniprésent de plaire. De jouer la comédie ? De camoufler sa personnalité, de sorte à pouvoir en revêtir une autre. Une autre personnalité complètement différente voire même à l'opposé de la vraie personne qui se cachait en dessous. Juste histoire de plaire. Mais peut-être au fond, on voudrait tous changer. Changer de personnalité, de vie, rien qu'un instant. Rien qu'un instant d'oublier sa vie et par la même occasion en profiter pour s'oublier.
Mais cet instant n'est rien de plus que ça : un instant. Et puis soudainement on revient à la réalité, on se remémore la vérité. On repense aux problèmes que l'on affronte. Peut-on se permettre de se plaindre quand tout le monde à les siens à faire face et affronter ? Peut-on se permettre de se montrer égoïste lorsqu'ailleurs c'est pire ? Alors que fait-on ? On se tait, on inspire un grand coup et on essaye à survivre à tous ça. Attendant seulement qu'on passe au dessus des problèmes. Ou que les problèmes passent au dessus de nous.
- Tu ne trouves pas qu'on s'ennuie ? lui demanda-t-il.
- Tiens, parce que tu peux t'ennuyer toi ? lui répondit-elle ironiquement.
- Possible.
- Tu proposes quoi ?
- Rien de spécial. Un petit truc. En souvenir du bon vieux temps.
- Quel petit truc ? demanda-t-elle suspicieuse.
- J'ten pose moi des questions ?
Il s'en alla juste après, dans une démarche nonchalante que lui seul savait faire et qui le caractérisait si bien. Elle continua à se trémousser sur la piste, se voulant attirante. Elle se demandait bien ce qu'il avait préparé. Tout ce qu'elle voulait c'était de s'amuser ! Elle sentait bien que les effets de la drogue commençaient. Ce moment où la raison se déconnectait enfin, et laissait place à la folie et laisser faire toutes les choses que personne ne pourrait en tant normal. Il revint quelques instants plus tard, suivit d'une jeune femme. Amélia haussa un sourcil, l'air intrigué. Elle avait l'habitude, même lorsqu'ils étaient ensemble qu'il ramène une fille avec elle. Après tout, et comme il l'avait répété maintes et maintes fois « C'est tellement vieux jeu de sortir qu'avec une et unique personne, lorsque tu vois tout ce que tu rates ». Il l'avait dit sur le ton le plus naturel du monde, tel Dom Juan.
Il s'approcha d'elle, une main posa sur les hanches de la brune près de lui. Elle était très élancée, dépassant même d'une tête Scar, qui pourtant était assez grand. Ses talons n'arrangeaient pas la chose. Elle agitait la tête de haut en bas qui du même mouvement faisait tressauter ses courts cheveux bruns qui lui retombaient à la poitrine. Elle avait sur son visage une expression hagarde. Elle avait sans doute dû forcer sur la boisson pendant cette soirée. Quand Scar fut assez près d'Amélia, il fit les présentations.
- Amélia, je te présente Daisy.
- C'est Dina répondit celle-ci, la braquant immédiatement et croisant ses bras sur sa poitrine.
- Qu'importe ? dit-il avec sa désinvolture habituelle.
Tout d'abord, cette dernière resta pantoise, mais ne parla pas est resta muette. Elle regarda partout autour d'elle, peut-être à la recherche de ses amies qu'elle avait sans doute du perdre. Scar resserra resserra son emprise sur elle.
- Donc Dai..., Dina, reprit-il, est ma conquête du soir.
- Je suppose donc que c'est maintenant à moi de trouver ma « conquête du soir », dit-elle.
- J'ai toujours su apprécier ta perspicacité.
- Je l'ai toujours apprécié aussi.
Elle se retourna et scruta la salle. Elle était remplit de monde. C'était un petit jeu entre eux. Voir à quel point ils pouvaient plaire. A qui ils pouvaient plaire. Et puis ils revenaient avec leur trouvaille, et repartaient, jugeant chacun le partenaire de l'autre. Au début, Amélia trouvait ce jeu complètement stupide et futile. Elle n'en voyait d'ailleurs toujours pas l'utilité, mais Scar aimait voir à quel point ils plaisaient aux filles. Il fallait bien avouer que la fille qu'il avait amenée était très jolie. Grande et brune, les traits fins dans un mélange de fragilité et d'innocence qui plaisait tant aux hommes.
Elle repéra non loin de la piste un jeune homme d'une vingtaine d'années qui dansaient sur la piste avec des amis à lui. Ils avaient l'air un peu éméché ce qui lui faciliterai la tâche. Elle passa sa langue sur sa lèvre et s'avança vers lui d'un pas déterminé tout en essayant d'éviter les danseurs environnants. Il était un peu plus petit qu'elle, à vue d'œil. Ses cheveux étaient blonds et fins. Il avait tenté de les plaquer à l'arrière de son crâne faisant ressortir ses oreilles. Sur l'une d'elle il y avait d'ailleurs une boucle d'oreille qui pendait. Il était plutôt mignon dans son genre pensa-t-elle. Petit et musclé. Elle s'approcha de lui et commença à danser comme tous les autres pour pouvoir se fondre dans la masse. Elle l'observa quelques instants. Il était peut-être beau, mais avait deux pieds gauches. Ce petit détail qui repoussait sans doute beaucoup de personnes, lui fit sourire. Beaucoup de personne n'oserait pas danser sur la piste avec un tel niveau de danse. Surtout lorsque c'était une boîte plutôt connue. Mais lui, il dansait comme si à côté les autres avaient un niveau pitoyable alors que la réalité était tout autre. Elle adorait ce genre de personne s'assumant totalement et prenant la vie telle qu'elle était : avec ses avantages, et ses désavantages. C'était cela qui lui la décida à lui parler.
- Salut, lui dit-elle.
- Salut.
Elle continua à danser en ne le quittant plus du regard. Un regard se voulant aguicheur et séducteur. Un regard qui était finalement bien aguicheur et séducteur puisque il lui répondit par un sourire engageant. Plus ils dansaient, plus ils se rapprochaient avant d'être tout à fait proches. Il avait posé ses mains sur sa hanche et dansaient à l'unisson. Elle lui sourit, dévoilant ses dents et ses fossettes.
- T'es vraiment mignonne.
- Merci. T'es pas mal dans ton genre non plus.
- On me le dit souvent.
- Il faut que je te présente à quelqu'un, lui dit-elle dans un murmure.
- Tes parents ? Je ne suis pas encore prêt, dit-il d'un ton taquin.
- Pire ! Mon copain, ironisa-t-elle.
Quand elle le lui annonça, il se figea retirant immédiatement ses mains de ses hanches. Son visage se ferma lui aussi, une mine inquiète au visage.
- Si c'est une blague, ce n'est pas drôle du tout.
- Bien sûr, que ça l'est, lui dit-elle dans un éclat de rire. Détends-toi. C'est juste mon ami.
- D'accord... J'espère que c'est vrai, dit-il d'un ton peu rassuré.
- T'inquiète. Avec moi tu ne court aucun danger, dit-elle dans un éclat de rire.
Elle lui prit la main et l'entraîna vers Scar qui était occupé à embrasser la grande brune. Elle ne savait même pas pourquoi il avait accepté de la suivre, mais il le faisait tout de même. Alors tant que ça arrangeait Amélia elle ne se posait pas plus de questions que cela. C'était sans doute un mélange de l'atmosphère de cette nuit, de leurs attirances, de la boisson. Enfin, un sacré cocktails d'émotions.
- Scar ! Scar ! répéta-t-elle.
- Ah ! Amélia ! Te revoilà enfin ! Et tu es de retour avec quelqu'un...
- Eh oui. Comme promis. Je te présente...
- Théo. Je m'appelle Théo.
- Oui, voilà Théo, dit Amélia en le présentant d'une main.
- Enchanté. Moi c'est Scar. Et voici... Daisy.
- Dina... corrigea aussitôt celle-ci lassée.
- Ouais, bon. Grande et brune, comme je les aime, dit-il en lui lançant un clin d'œil.
- Super... Dans quoi je me suis laissé emporter, soupira Théo.
- Détrompe-toi ! C'est là que le jeu devient plus intéressant, dit Scar de son éternel sourire malicieux.
Amélia restait pensive à côté. Elle n'arrivait pas à réfléchir correctement. Tout ce qu'elle voulait faire c'était de s'amuser. Alors pourquoi n'énonçait-il pas ses foutus règles !
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