Chapitre 11






Jeff prit un malin plaisir à me narguer, tout était tourné à son avantage, s'il me lâchait, il repartirait avec la brunette et se débarrasserait pour de bon de moi. Le regard noir, le sourire mesquin aux lèvres, le vide présent sous mes pieds, je lui gueulais au visage :

— Jeff ! Remonte-moi ! Ne fais pas le con !

— Les rôles se sont inversés, James ! C'est moi qui mène la danse !

— Jeff ! Remonte-le s'il te plait ! hurlait la brunette, essayant de se lever.

— Toi ! Tu n'as pas à me donner d'ordre ! Lui rétorquait Jeff.

Soudain Golden s'avança vers la porte du wagon afin de tirer ma manche, la brunette me demandait de lui tendre mon bras afin qu'elle m'aide à monter. Jeff rangeait alors son insolence et me tirait par le bras me laissant rentrer dans le wagon. En me relevant, je bousculais Jeff en le poussant vers la porte du wagon qui était toujours ouverte, je lui gueulais ainsi :

— Bordel ! Mais qu'est-ce qui t'a pris abruti ?!

— On ne peut plus rigoler ?

— Je ne rigole pas sur ça ! Tu n'es qu'un crétin !

La brunette décidait de refermer la porte tout en la laissant entrouverte de façon à regarder dans quelle direction nous nous dirigions. Je m'installais vers le fond du wagon, en jetant un coup d'œil dans ce dernier, des tonnes de caisses de marchandises se trouvaient dedans mais aussi des cartons de différentes tailles. Je m'appuyais contre l'un d'eux, ce que la brunette fit également. Le chien posait sa tête sur ses genoux tout en la regardant d'un air soucieux, je m'exclamais :

— Comment tu te sens ?

— Bien.

— Tu es sûr ?

— Comment tu veux que je me sente James ! Pourquoi nous sommes partis ?

— Des voleurs d'âmes, répondit Jeff en se laissant glisser contre la porte du wagon.

— Mais qu'est-ce que c'est ?

— Selon la rumeur, ce sont des gens qui ont perdu leurs humanités et qui se nourrissent d'âmes innocentes afin d'essayer de regagner en humanité.

— Mais c'est impossible.

— Oui, et pourtant ils le font sans scrupules, ils aiment tuer pour se procurer les âmes. Je ne savais pas que ce genre de personne résidaient dans le monde prison, je comprends maintenant pourquoi ils étaient à l'écart.

— Tous ces enfants et familles, que sont elles devenues ? On ne peut pas les laisser !

— Ce n'est plus notre problème désormais, lançais-je en baissant le regard.

— Non, James ! On ne peut pas s'enfuir comme des lâches, il n'y a des pauvres personnes qui n'ont pas pu s'enfuir, il faut que l'on fasse quelque chose.

— Et tu veux qu'on fasse quoi ?! Retourner là-bas ? Prendre le risque de se faire tuer et disparaitre à jamais ? Il est hors de question, on a une mission, on s'y tient !

— Mais...

— La conversation est close.

Je m'installais face à la brunette qui se tournait de l'autre côté de ma personne afin d'éviter tout contact avec moi. Jeff qui avait assisté à notre discussion, nous lâchait tout en rigolant :

— Eh, c'est intense entre vous deux !

Je jetai un regard des plus noirs en direction de Jeff, ce dernier me répondit :

— Hé ! Ne me regarde pas comme ça, je n'ai rien fait.

Je détournai mon attention de Jeff afin de le concentrer vers le paysage qui défilait sous mes yeux. La nuit avait recouvert l'ensemble des plaines du monde prison, nous nous rapprochions petit à petit de l'endroit où le dirigeant pouvait se trouver. Les heures défilèrent, en jetant un coup d'œil sur ma montre, cette dernière indiquait les cinq heures du matin. En tournant ma tête vers la brunette, j'aperçus qu'elle et le chien dormait paisiblement. Soudainement, un flash-back m'apparu.

Début du flash-back :

— Laisse-moi tranquille, tu ne me sers à rien, tu n'es qu'une distraction pour moi, rien de plus ! Ne te fais pas de film ma petite.

— Je sais que c'est uniquement la colère qui te fait agir ainsi ! Tu n'es pas comme ça en temps normal ! Si seulement tu pouvais arrêter de boire !

— Jamais, tu m'entends, mais je vais arrêter de te fréquenter, mes bouteilles sont plus utiles que toi !

Fin du flash-back :

Tout en me serrant le crâne de mes mains, les yeux fermés, un bruit de bouteille raisonnèrent tel un écho. Des dizaines de débris de verre sont à terre, des dizaines de sanglots se firent entendre à la fin de cet écho. Puis un claquement de porte, je n'étais pas la personne sanglotante, mais encore une fois, j'étais la voix masculine. En ouvrant les yeux, un bruit me fit revenir à la réalité, j'aperçus alors la porte du wagon grande ouverte, ainsi que mon sac ouvert. En saisissant mon sac, je m'aperçus que la carte de Artus n'y était plus. Jeff avait disparu en emmenant avec lui la carte.

***

La lumière du jour apparu, un ciel gris avec de nombreux nuages dominant les cieux, un temps qu'offrait sans cesse le monde prison. Je me rapprochai de la jeune femme en la secouant assez fortement, cette dernière s'exclamait en ma direction :

— Toi, tu sais réveiller les femmes ! C'est bon, je suis réveillée, cesse de me secouer comme un arbre !

— Dépêche-toi, on a du chemin !

— Où est Jeff ?

— Il est parti dans la nuit et pas tout seul.

— Ah bon ? Avec qui ?

—Avec notre carte, connaissant cet idiot, il n'ira pas bien loin, on peut le rattraper.

— Mais comment faire sans la carte ?

— Ton instinct.

— Ah bon maintenant, tu fais confiance à mon instinct ?

— Vu que c'est tout ce que nous avons, oui, prépare-toi à sauter.

— Quoi ?!

— Tu es prête ?

— Attend, mais il est hors de question que je saute d'un train en marche.

— Ce train ne s'arrête jamais et nous devons descendre ici, les montagnes sont plus proches.

— Mais je n'ai jamais fait ça encore ! Tu n'es pas James Bond !

— Et pourquoi pas ? Je saute à trois, lançais-je en m'équipant du sac à dos.

— Non, attend, je ne suis pas physiquement prête !

— Un.

— Non !

— Deux.

— Attend !

J'attrapais la main de la jeune femme, la tirait vers moi tout en sautant hors du train, le chien nous suivis. Nous atterrissons dans l'étendu d'herbe sèche de la pleine se trouvant près des rails du train. Tout en roulant jusqu'à se stopper, je me retournais afin de voir si la brunette allait bien. En me relevant, j'essuyais les brindilles accrochées à ma veste puis je m'approchais vers la jeune femme en compagnie de Golden :

— Cava ?

— Mais tu es complètement fou ! Tu me réveilles en me secouant pour ensuite sauter d'un train en marche ! Ton plan, c'est de me tuer encore une fois ?

— Cesse de te plaindre, j'aurai pu sauter tout seul !

— Je n'ai même pas mangé en plus, tu me fais faire du sport directement !

— Tu t'attendais à quoi ? Que l'on aille prendre un petit-déjeuner ?

— Non mais que l'on prenne au moins le temps de se réveiller.

— Je n'ai pas le temps pour ça ! Dépêche-toi ou je pars sans toi !

Je commençais à marcher en compagnie de Golden, un champ de blé asséché était devant nous, je m'avançais vers ce dernier. Le chien courrait tout en sautant dans le champ, il disparut et réapparut dans la seconde suivante. Tout en le regardant, un léger sourire s'esquissait de mes lèvres, en me retournant, j'aperçus la jeune femme arriver à mon niveau en s'exclamant :

— Au moins, il y en a un qui s'amuse.

— Oui, c'est bien le seul, allez ne trainons pas !

— James, est-ce qu'il t'arrive de t'amuser toi aussi ?

— Non.

— C'est impossible, je n'y crois pas !

— Et pourtant si ! Avec qui veux-tu que je m'amuse ?

— Avec tes amies ! À moins que tu n'en ait pas ?

— Je n'ai pas d'amie et je n'en veux pas !

— Si tu es toujours grognon ainsi, je comprends pourquoi tu n'en as pas !

— Des amies ? Dans le monde prison ? Les gens ici sont tellement hypocrites les uns envers les autres ! Ils se manipulent ! Ils se jouent des uns et des autres ! Ils disent qu'ils sont tes amies, mais ce n'est pas vrai ! Dès que tu en as besoin, ils décampent en moins de deux secondes. Ici, si tu as de l'argent et de l'influence, tout le monde te flatte et traine avec toi. Mais dès qu'il t'arrive une misère, ils te laissent tomber, personne ne veut te voir et personne ne vient t'aider ! Il y a que leurs petites vies qui comptent, d'ailleurs, j'ai décidé de faire comme eux.

— Vu comme ça, c'est sûr que ça ne donne pas envie. Autrefois, tu étais sans cesse avec tes amies, tu les faisais même passer avant moi. Il n'y avait pas un jour où tu étais tout seul. À mes yeux, c'étaient des hypocrites comme tu viens de les décrire. Mais tu ne voulais jamais m'écouter et me croire.

— Et bien ton James est un crétin, l'amitié est éphémère, tout le monde le sait ça !

— Il suffit de trouver la bonne personne, je pense. Tu as trouvé Sam.

— C'est lui qui m'a trouvé ! Bon cesse de parler, on doit traverser ce champ de blé.

Après plusieurs minutes à traverser ce champ de blé dont je ne voyais plus le bout, j'aperçus au loin de la lumière jaillir et entendu des rires. Sans réfléchir, j'ordonnai à la brunette de se cacher dans le champ de blé, ce qu'elle fit. Je me penchai afin de voir d'où provenaient ces cris, il s'agissait d'un rassemblement en plein air de forains. Différentes attractions se trouvaient une grande roue, des autos tamponneuses, des stands de tirs, des manèges vertigineux, mais aussi une foule était présente, ce qui me surprit. De la musique, des lumières et surtout de la couleur étaient au rendez-vous. Tout en tournant les talons, je me rapprochais de la jeune femme lui disant :

— Écoute, nous devons faire demi-tour en passant par la foret sur la gauche !

— Encore une foret ? Mais attend d'où vient cette musique ?

— Rien, c'est un squat de jeunes avec ce qui s'est passé avec Marcus et les chasseurs d'âmes ! Il est hors de question que l'on aille là-bas.

— Très bien, on détourne chemin.

La fille avançait en ma direction lorsque cette dernière détournait le regard vers la fête foraine. Tout en se retournant vers moi, les sourcils froncés, elle s'exprimait à vive voix :

— Mais ça n'a rien d'un squat ! C'est une fête foraine ! Attend, tu voulais vraiment me priver d'un instant de bonheur dans ce monde de morts ?!

— Je te connais, je sais que tu vas y aller et on n'a pas le temps !

— Allez viens juste un peu !

— Non !

— Tant pis, j'y vais seule !

La jeune femme descendait la pleine tout en s'approchant de la fête foraine, je la guettais au loin lorsque Golden se mit à me grogner dessus. Tout en le regardant, je lui lâchais :

— Quoi ?! Il est hors de question que j'aille avec elle, on perd du temps !

Golden se mit à m'aboyer dessus en me tirant le bout de ma veste. Tout en soufflant, je m'exclamais face au chien :

— Lâche ma veste ! C'est bon, je vais avec elle !

Tout en dévalant la pleine, je me rapprochais de la brunette qui avait pris les devants. Une fois devant la fête foraine, j'aperçus la brunette me tendre un sourire tout en s'exclamant :

— Oh, tu as décidé de venir t'amuser avec moi ?

— Rêve ! Je suis venu pour avoir un œil sur toi, on ne reste pas longtemps ! Et on s'en va ensuite !

— Très bien, maintenant viens, il faut trop qu'on essaye ce manège !

La brunette m'attrapait le bras tout en courant, je marchais à pas rapide vers le stand de tirs, une fois devant, un homme assez grand d'une quarantaine d'année, moustachu, sentant la cigarette à plein nez, annonçait :

— Bienvenu ! Ici, il n'y a pas besoin d'argent, jouez pour le plaisir ! Attrapez le fusil et tirez sur les cibles ! Trois cibles touchées, c'est gagné ! Repartez avec le cadeau de votre choix !

La brunette, le sourire aux lèvres avait des étoiles dans les yeux, elle avait le regard fixé sur un lapin blanc avec un grand nœud rose en guise de tour de cou. Elle saisit le fusil en main et tirait sur les cibles rouges. Son premier essai fut un échec, même chose pour le deuxième et troisième, tout en reposant l'arme sur le comptoir, elle décidait de passer à une autre attraction. Elle avait de l'admiration pour ce lapin, je ne savais pas ce qu'elle comptait en faire, mais je ne voulais pas voir une mine de déception sur son visage. J'attrapais le fusil d'une main et annonçait à l'homme moustachu :

— Très bien, à mon tour !

Je pris la carabine en main, viser la cible avec précision puis appuyait sur la détente laissant partir le coup de feu. La première cible touchée, la deuxième également, même chose pour la troisième. En reposant la carabine, je montrais du doigt la peluche que la brunette désirait avoir, ce que l'homme me remit en main. Je rattrapais la brunette qui s'en était allée avec Golden, en la rattrapant, je m'exclamais en lui remettant la peluche en main :

— Tiens ! Je te l'ai gagné, bon, on s'en va ?

— James ! Mais t'es trop fort ! Comment tu as fait ?

— Suffit de bien viser.

— Merci, c'est gentil.

— Mais pourquoi cette peluche en particulier ? Il y avait tellement mieux à prendre.

— Parce que celle-ci a de l'importance pour moi.

— Cool, on y va ?

— Tu veux même pas savoir la raison ?

— À vrai dire ça ne m'intéresse pas, j'ai plus urgent en tête.

Je me dirigeai entre deux attractions afin de regagner la foret à proximité de la fête foraine. En me retournant, je me rendis compte que j'étais en train de faire cavalier seul, la fille avait disparu. Je fis demi-tour dans le but de la retrouver, en intégrant une nouvelle fois la foire, j'aperçus la brunette devant un carrousel dont les chevaux étaient assez rouillés, je me demandai comment ce manège pouvait encore attirer des personnes. La brunette siégeait sur un cheval blanc qui avait perdu de sa couleur, elle me fit un signe de la main, je hochais la tête de gauche à droite en signe de négation. Le manège se mit à tourner, je restai debout, planté devant l'attraction en marche. J'aperçus la brunette rigolait aux éclats, le cheval dont elle s'était assise monter et descendre de la barre dont il était accroché. Je me concentrai sur la brunette, cette dernière respirait la joie de vivre, à chaque tour où elle passait devant moi, elle me lançait un signe de la main, le sourire aux lèvres. Cette fille avait le don de me désespérer, mais je voyais en elle ce que je n'avais jamais aperçu chez quiconque. En jetant un coup d'œil sur ma montre, cette dernière indiquait les coups de quinze heures, en levant mon regard vers le manège j'aperçus que l'attraction s'était arrêté. Je cherchais du regard la brunette que je n'aperçus plus, je fis le tour du carrousel afin de la retrouver, il m'a fallu une seconde de distraction pour perdre de vue la brunette. Il fallait à tout prix que je la retrouve...

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