(I) 32. la fructueuse insomnie de sirius black

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Après le dîner, Benji traîna Marlene et Luca Watercastle jusqu'à la table des Gryffondor et se précipita sur Will. Il s'en voulait pour la disparition de sa cousine, il avait attendu toute la journée qu'elle réapparaisse pour s'excuser, et là il commençait à être vraiment très inquiet de ne pas avoir de nouvelles. Will lui dit alors que la jolie blonde avait été aperçue dans son dortoir avant le dîner, mais qu'elle avait disparu par la suite une fois encore. C'est alors que Peter, maladroit, en dévoila un peu trop.

- T'inquiètes Benji, c'est pas vraiment de ta faute si elle a disparu, Tewn nous a expliqué pourquoi.

Tous se tournèrent vers lui : les Serdaigle intrigués, les Gryffondor consternés. Le regard de ces derniers sur lui fit comprendre à Peter qu'il en avait trop dit, et il se ratatina sur son banc.

- Queudver, dit Remus en souriant d'un air crispé, t'es bien bavard ce soir dis-donc.
- De quoi tu parles ? s'étonna Benji.

Un court silence d'hésitations fut sa réponse. Il ne tarda pas à échanger des regards surpris avec ses amis de Serdaigle.

- Qu'est-ce que vous cachez ? demanda une Marlene suspicieuse.

Will, incapable comme à son habitude de mentir ou de fausser la vérité, soupira.

- Honnêtement, c'est pas que je veux pas t'en parler, Benji, mais je pense que c'est une conversation que vous devriez avoir que tous les deux. Avec Aria.

Les autres Gryffondor acquiescèrent, même Peter, qui n'avait pas vraiment saisi en quoi il avait fait une gaffe, mais qui ne voulait surtout pas en commettre une autre de nouveau. S'il faisait exactement comme ses amis, il n'y avait pas de risque qu'il fasse ou dise n'importe quoi. Alors il secoua vigoureusement la tête de haut en bas. Benji, le pauvre Benji qui ne comprenait plus rien à cette journée, s'affala sur le banc à côté de Will et la supplia du regard de lui dire de quoi il en retournait.

- J'le savais que c'était trop beau pour être vrai, évidemment qu'il y allait avoir quelque chose qui allait foirer...

Marlene se précipita vers lui pour l'étreindre, attristée, tandis que Luca alla s'asseoir en face.

- Pourquoi tu dis ça ? demanda-t-il. Peut-être que c'est pas forcément grave et qu'elle a juste des choses à régler avant qu'il se passe quoi que ce soit entre vous.

Il jeta un regard vers Will afin qu'elle confirme son hypothèse, mais cette dernière, surprise, rougit et bafouilla. James prit le relais.

- C'est un peu ça, en fait. Mais même si elle essaie de régler ça toute seule, il va falloir que vous en parliez à deux.
- Mais qu'est-ce que c'est ? insista Marlene, intriguée. Elle est malade ?

Sirius, qui depuis l'arrivée des Serdaigle était étrangement occupé à refaire ses lacets, se mit à pouffer de rire. Tous le regardèrent en silence, intrigués, puis quelque chose sembla se débloquer chez Benji.

- Alors, toi, commence pas.
- Pardon ? répondit Sirius en relevant la tête, toute trace de sourire ayant disparu de ses lèvres.

Tous les autres échangèrent des regards alarmés et s'éloignèrent légèrement des deux garçons. Car, si personne n'en avait rien dit, tous avaient remarqué que le Gryffondor et le Serdaigle avaient depuis quelques jours des échanges de plus en plus tendus. Et ce soir était la première fois que Benji parlait si froidement à Sirius.

- J'ai dit : commence pas.

Sirius se contenta d'hausser un sourcil moqueur, ce qui fit sortir Benji de ses gonds. Lui qui était habituellement quelqu'un de très doux, sociable et qui surtout s'entendait à merveille avec le Gryffondor, le regardait avec un énervement non dissimulé.

- Tu supportes pas, hein, que quelqu'un d'autre que toi attire son attention ?

Le Gryffondor ne répondit pas, le visage fermé. Ses yeux, plongés dans ceux de Benji, lui lançaient des éclairs.

- Ils parlent de qui ? chuchota discrètement Peter à Remus, qui avait manqué quelques morceaux de la conversation en se perdant dans la contemplation des mains gracieuses d'une Pouffsouffle de sixième année, à la table d'en face.
- Aria, bien sûr, murmura Remus.
- Oh, commenta simplement le garçon.

Il était peut-être parfois un peu long à la détente, mais il ne fallait pas être Dumbledore pour se rendre compte que le comportement de Sirius envers Aria cachait quelque chose. Surtout depuis qu'elle s'était rapprochée de Benji.

- Mais tu vois, Sirius, à force de lui sauter à la gorge pour faire en sorte de toujours rester dans un coin de sa tête, ça a fini par la faire réellement te détester.
- Erhm... tenta vainement James, qui regardait son meilleur ami d'un air inquiet.
- Et tu sais quoi ? continua Benji. Tu le mérites, en fait. Parce que t'es tout sauf ce qu'il lui faut. T'es juste horrible avec elle...

Plus personne n'osait parler. Toute couleur avait quitté le visage de Sirius, qui se contentait de regarder fixement le Serdaigle ; tandis que ce dernier ne semblait plus pouvoir s'arrêter. Comme s'il avait emmagasiné, des mois et des mois durant, une rancœur de plus en plus amère envers Sirius.

- Et devine quoi ? C'est à cause de toi que j'ai pas osé l'approcher avant. Parce qu'Aria, ça fait presque deux ans que je suis intéressé par elle. Mais avant, je me disais que vous passiez tellement de temps à vous disputer en permanence que ça voulait certainement dire que vous alliez finir par sortir ensemble. Personne ne se comporte de cette manière, à moins d'être franchement amoureux et complètement aveugle. Et surtout loin d'être doué pour le montrer.

James se mit à rougir, les paroles du Serdaigle résonnant douloureusement en lui. Il s'était effectivement souvent comporté en parfait imbécile auprès de Lily par le passé, surtout parce qu'il était très maladroit et peu subtil. Mais maintenant qu'il y réfléchissait un peu, il se rendait compte que le comportement de Sirius envers Aria était assez similaire. Dans une autre mesure car plus violent, mais similaire...

- En plus, moi j'étais trop content de t'avoir dans mes potes, et je savais que si jamais je me mettais à l'approcher je pouvais dire adieu à ton amitié. Ta si précieuse amitié qui te fait me traiter comme un pestiféré depuis que je me suis rapproché d'elle.

Autour du petit groupe, tous les élèves avaient commencé à se lever et quitter la Grande Salle, afin que l'installation des scènes pour le Club de Duels puisse avoir lieu. Lily apparut aux côtés de James, souriante, mais son visage laissa vite place à un air inquiet lorsqu'elle remarqua la tension ambiante.

- J'avais que des soupçons jusque-là, mais j'ai vite fait le calcul.

Sirius croisa les bras et leva les yeux au ciel, glacial, toujours muet.

- Je vois comment tu la regardes.

Tous autour retenaient leur souffle et tournèrent la tête vers Sirius, en attendant sa réponse. Qui ne vint pas.

- Le pire dans tout ça, c'est que je crois que tu viens seulement de t'en rendre compte. Alors, mec, non seulement c'est trop tard ; mais en plus faut que tu révises un peu ton panel de sentiments. Parce que si c'est aussi ce genre de haine que t'éprouves envers Voldemort, par exemple, j'ai vraiment pas envie de continuer à traîner avec toi.

Sirius se leva tranquillement, posa ses deux mains à plat sur la table, et se pencha vers Benji. Son visage ne laissait paraître aucune émotion. Ses trois meilleurs amis échangèrent des regards inquiets. Ils l'avaient rarement vu dans un état si... Paisible. Remus frissonna. Cela n'augurait rien de bon.

- Je riais, commença Sirius d'une voix trop calme pour l'être réellement, parce que non, Aria n'est pas malade, mais sa famille l'est. Car elle fait partie des vingt-huit sacrées, et que par conséquent les seules personnes avec lesquelles elle peut potentiellement s'unir doivent obligatoirement être des sang-purs. Je sais de quoi je parle, j'ai grandi dans ce milieu, et Will peut aussi en témoigner. Je riais, car Aria se retrouve dans une impasse dont elle va difficilement réussir à sortir, parce que sa maison est un nid de vipères et qu'elle risque de pas avoir la paix avant longtemps.

Benji regardait son interlocuteur avec un air de défi. Il était sûr que Sirius se défilerait, et il avait visé juste.

- Maintenant, fais tourner un peu ton cerveau de moineau et demande-toi si c'est pas un peu aussi de ta faute quand même, toute cette situation. Peut-être que si tu t'étais pas comporté d'une manière aussi ridiculement grandiloquente hier soir, les choses en seraient pas là aujourd'hui. Et si t'as enfin fini de me lancer des pierres, je pense que tu devrais aller chercher après ta si précieuse Aria plutôt que de rester là à bêtement déblatérer des débilités.

Il se leva et se dirigea vers la sortie. Remus courut à sa suite, entraînant Peter dans son geste, et tous trois disparurent dans la foule qui se pressait à la porte de sortie.

La séance du Club de Duels pour les sixièmes et cinquièmes années venait d'être lancée, et il régnait dans le reste du château une ambiance calme, presque inquiétante. Sirius montait les escaliers en compagnie de Remus, Peter, Benji et Marlene. Contrairement à son habitude, Marlene faisait presque toute la conversation seule. D'ordinaire, Sirius et elle s'amusaient à se taquiner et animaient à deux la discussion, mais après l'échange glaçant ayant eu lieu entre Benji et lui, personne d'autre que la jeune fille n'avait envie de parler.

En sortant de la Grande Salle, tout le petit groupe s'était décidé à organiser une recherche intensive d'Aria. Il valait mieux profiter des couloirs vides et moins surveillés que d'ordinaire avant que la séance du Club de Duels ne soit terminée. Une fois encore, les plus jeunes n'avaient pas eu le droit d'y assister, ainsi ils étaient tous rentrés dans leur salle commune. Presque tous les autres élèves étaient au Club, même si bon nombre de septième années vaquaient à leurs occupations.

Il avait été décidé que les recherches se feraient par paires. Les cachots et le rez-de-chaussée furent laissés à Will et Luca. Lily et James, qui devaient de toute manière en tant que Préfets-en-Chef faire des rondes dans le château, furent chargés d'inspecter les deux premiers étages de l'école. Marlene et Benji se chargeraient des troisième et quatrième étages, Remus et Peter des cinquième et sixième, tandis qu'un Sirius de très mauvaise humeur avait plus ou moins acquiescé sans grande conviction lorsqu'on lui avait demandé d'aller inspecter le septième étage.

Tous s'étaient séparés et s'étaient mis en route vers leur secteur de recherches. Petit à petit, le groupe s'étiola et il ne resta plus que Sirius, qui montait les marches menant au dernier étage. Will avait émis l'hypothèse que Sirius, au lieu de chercher Aria, profiterait de n'avoir que cette partie du château à fouiller pour rentrer dans son dortoir. James avait pris la défense de son ami avec ferveur, mais c'était en réalité exactement ce que ce dernier s'apprêtait à faire.

Sans aucun acquit de conscience, le jeune homme se dirigeait vers sa salle commune lorsqu'à un croisement il se stoppa net. Il avait deux options. Soit tourner à droite et continuer son chemin vers la chaleur réconfortante de sa maison ; ou tourner à gauche et aller enquêter sur ce qu'il avait vu la nuit précédente sur la Carte du Maraudeur.

Il n'avait aucune raison de croire en ce que lui avait craché Benji au visage ; et, de toute manière, il avait déjà essayé de démêler les raisons pour lesquelles il agissait si étrangement en présence d'Aria et s'était heurté à une incompréhension pure et dure. Il ne savait pas pourquoi il était comme ça avec elle. Mais de là à dire qu'il en était amoureux... Son corps fut secoué de frissons à cette pensée. Il ne savait pas ce qu'il ressentait envers elle (certainement pas de l'amour, il ne fallait pas exagérer), et il n'avait tout bonnement pas envie de savoir.

Quoiqu'il en était, cela ne l'avait pas empêché d'être intrigué par le comportement de la jeune fille, la veille au soir. Dans son lit, en proie à ses insomnies habituelles qui étaient cette fois-ci peuplées de cette vision déconcertante de Benji et Aria en train de s'embrasser ; il avait sorti la Carte du Maraudeur et avait, par simple curiosité, vérifié qu'Aria était bien dans son dortoir. Lorsqu'il avait vu qu'elle n'y était pas, il avait automatiquement cherché la tour de Serdaigle afin de s'assurer qu'elle n'était pas avec Benji. Et il avait presque été rassuré en voyant que cela n'était pas le cas. Fenwick dormait vraisemblablement paisiblement dans son lit, seul.

Alors, Sirius avait passé une bonne demi-heure à décortiquer en long, en large et en travers la carte, passant au peigne fin tous les étages, toutes les salles, tous les passages secrets. Mais pas de signe de la jeune fille. Et, au moment où il allait abandonner, elle apparut soudainement au beau milieu d'un couloir du septième étage, où elle resta quelques minutes puis disparut à nouveau. C'était quelque chose que Sirius Black n'avait encore jamais vu, et il lui prit presque l'envie d'aller voir de plus près de quoi il en retournait, lorsqu'il avait entendu Remus se réveiller. Lui aussi dormait très peu. Les deux garçons étant tous deux de grands insomniaques, ils avaient développé, au fil des années, l'habitude de s'installer sur le rebord de la fenêtre du dortoir et de se perdre dans de grandes conversations aux sujets divers et variés, jusqu'à ce que le sommeil les attrape de nouveau. Cette nuit-là fut similaire aux autres, et Sirius ne se voyait pas expliquer à son ami l'étrange raison pour laquelle il souhaitait sortir du dortoir cette fois-ci.

Après un instant de réflexion, poussé par sa curiosité, Sirius tourna à gauche. 

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Je suis pas trop fan de ce chapitre-ci, ni du précédent. Je crois que je me sens beaucoup plus à l'aise quand j'écris sur Aria haha. 


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