(I) 10. un petit-déjeuner avorté



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LE PETIT-DÉJEUNER ÉTAIT LE REPAS PRÉFÉRÉ DE SIRIUS BLACK. Il aimait les toasts grillés qui craquaient sous ses dents, le jus de citrouille frais qui lui rafraîchissait la gorge, l'odeur du café brûlant rehaussé d'un nuage de lait et de deux sucres, les œufs brouillés à peine cuits, le bacon croustillant contre sa langue, les viennoiseries françaises qui craquaient et fondaient dans sa bouche. Il aimait le petit-déjeuner à Poudlard, accompagné de ses trois meilleurs amis, qui peinaient à se réveiller alors qu'il était en pleine forme.

Il avait fini par connaître par cœur leurs habitudes du matin : Lunard dormait peu, comme lui, mais avait désespérément besoin d'un thé vert entre les mains pour se réveiller auquel cas il était d'une humeur massacrante tout le reste de la journée; Cornedrue engloutissait toujours une demi-douzaine d'œufs brouillés suivis d'un gros bol de porridge au chocolat avant d'enfin s'estimer assez éveillé pour prendre la parole; et Queudver n'avalait jamais grand-chose le matin, un toast à la rigueur quand la nuit avait été longue.

Ce matin-là ne dérogeait pas à la règle et, satisfait de ce petit-déjeuner qui avait été jusque là à la hauteur de ses attentes, Sirius Black engloutissait son troisième croissant avec délices lorsqu'on tira violemment sur le col de son pull, le faisant se lever du banc précipitamment.

- Qu'est-ce que... commença-t-il, son reste de croissant toujours en main.

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase, car la propriétaire de la main qui l'entraînait furieusement vers la sortie lui avait jeté un silencio informulé. Sirius se demanda comment une fille de sa corpulence -car Aria Justice lui avait toujours semblé plutôt frêle, malgré sa taille supérieure à la moyenne des filles de son âge- était capable de le tirer hors de la Grande Salle avec cette force déconcertante.

Sur le banc, ses trois amis avaient levé la tête lorsqu'il avait disparu, mais s'étaient vite re-concentrés sur leur petit-déjeuner en voyant qui était la kidnappeuse de Sirius. "Faux-frères ", pensa Sirius avec hargne. En un rien de temps, ils étaient sortis de la Grande Salle et étaient hors de vue des professeurs; Sirius eut à peine le temps de sortir sa baguette qu'Aria le désarma, et le fit flotter dans les airs.

- Mais c'est une blague ! s'exclama-t-il, furieux.

Aria ne répondit pas et se contenta de le faire flotter à ses côtés, tandis qu'elle se dirigeait un peu plus loin dans les couloirs de l'école.

- T'es sérieuse, Justice ?! s'étrangla-t-il presque. Repose-moi tout de suite à terre, espèce de goule dégénérée !

Elle ne répondit toujours pas, et regardait droit devant elle, le visage fermé. Sirius se débattait vainement, tout en l'insultant à profusion, avant d'abandonner et de croiser les bras, d'un air boudeur.

- Ch'est complètement ridichule, commenta-t-il sombrement en mâchant le dernier morceau de son croissant, qu'il avait réussi à garder avec lui dans la précipitation.

L'étrange paire croisa un élève de deuxième année de Pouffsouffle, qui leur jeta un regard ahuri.

- Yo, ça va ? lui demanda Sirius avec un rictus sans joie. Si ça te dirait de m'aider... Mmmpf !
- Il va très bien, merci beaucoup, dit la Serpentard avec un sourire carnassier.

Aria venait de lui jeter un nouveau silencio, tandis que le deuxième année les dépassait en pressant le pas, apeuré.
Sirius se mit à faire de grands gestes tout en flottant dans les airs, et Aria se retint de rire devant le ridicule de son ennemi. Mais Sirius avait remarqué son sourire en coin, et s'énerva encore plus, battant l'air avec désespoir.

Ils arrivèrent dans la cour intérieure de l'école, déserte à cette heure de la journée. L'air était frais, le jour se levait à peine et la rosée du matin avait recouvert le sol pavé d'une fine couche d'eau. Aria relâcha Sirius de tous ses maléfices sans ménagement, et il tomba à terre dans un bruit sourd.

- Aïe ! râla-t-il. J'aurais pu me faire super mal !

Il était franchement énervé contre la jeune fille, qui lui avait gâché le meilleur moment de sa journée.

- Qu'est-ce que t'as, Justice ?! lui demanda-t-il en se relevant. C'est quoi ton problème, enfin ?!

Elle s'avança vers lui, sa baguette dirigée vers lui, les yeux emplis d'une fureur qu'il ne lui avait jamais vue.

- J'ai accepté de jouer à ton petit jeu ridicule pendant bien trop longtemps, Sirius Black. À cause de toi et de ton absence au duel que tu as provoqué, j'en paye le prix et ma carrière aussi !
- Mais arrête avec ça, rit-il froidement en levant les yeux au ciel, elle est loin d'avoir commencé ta stupide carrière ! C'est pas parce que t'as eu le droit à une semaine de retenue...
- Un mois, corrigea Aria avec fureur.
- ... Un m... Un mois ?! Wow, Sluggy y va pas de main morte dans les punitions !

Aria se contenta de fixer Sirius d'un air mauvais, tandis qu'il riait allègrement du malheur de la jeune fille. Elle avait passé la nuit à réfléchir à sa vengeance, après s'être fait longuement réprimander par un Slughorn en robe de chambre. Elle n'avait presque pas dormi, mortifiée de savoir que ce "regrettable incident", selon les dires de son directeur de maison, allait se retrouver dans son dossier scolaire. Mais malgré tout, elle n'avait pas trouvé de vengeance à la hauteur de sa colère qui ne soit ni illégale, ni allant à l'encontre du règlement de l'école. Alors, en se levant ce matin-là, elle avait décidé d'improviser.

- Qu'est-ce que je t'ai fait, moi, personnellement, pour que tu t'en prennes à moi comme ça en permanence, Black ?! Je suis loin d'être la seule sang-pur à Serpentard, et honnêtement, il y en a beaucoup qui sont bien pires que moi !

Sirius ne répondit pas, et se contentait de la regarder avec insolence. Le froid avait rosi ses joues de porcelaine, quelques mèches de ses cheveux blonds s'étaient échappées de sa queue haute pour lui entourer harmonieusement le visage, et ses grands yeux bleus lui lançaient des éclairs. Il lui trouva un charme qu'il ne lui avait jamais remarqué, et se rendit compte avec effroi qu'elle aurait tout à fait pu être à son goût si elle n'avait pas été sa pire ennemie.

Le Gryffondor n'avait pas beaucoup dormi non plus cette nuit-là, et même si c'était habituel chez lui, cette fois-ci c'était car il avait beaucoup réfléchi aux évènements de la veille. Après le départ des deux Justice, entraînées vers le château par un Hagrid tonitruant; Remus et Peter avaient ôté la cape d'invisibilité tandis que James et lui s'étaient retransformés en humains. Ils étaient en train de se disputer à voix basse : Sirius ne comprenait pas pourquoi James l'avait frappé comme ça alors qu'il voulait juste écouter la conversation; tandis que James ne comprenait pas pourquoi Sirius n'avait pas voulu bouger.

- Il était plus que temps de s'enfuir et de revenir en humains pour faire ce stupide duel, Patmol !
- Mais je demandais juste deux minutes de plus ! Elles parlaient de Regulus, avait-il ajouté, le visage fermé.

Ses amis n'avaient pas su quoi lui répondre, jusqu'à ce que Peter brise le silence :

- Vous le saviez, vous, qu'Aria était de notre côté ?

Remus avait jeté un regard furtif vers Sirius.

- Oui, plus ou moins. Tu sais, Cornedrue, quand je t'avais parlé de ce qu'elle m'avait dit à la bibliothèque ?
- Ah, oui, avait dit James en hochant la tête et en jetant un regard en coin à son meilleur ami.

Sirius, quant à lui, avait fixé ses amis à tour de rôle, abasourdi.

- Vous parlez de quoi, là ?
- Je te l'avais déjà dit, avait soupiré James, et Will aussi d'ailleurs, mais t'étais tellement obnubilé par la soi-disant appartenance de Justice aux mangemorts que ça a dû rentrer par une oreille et sortir par l'autre !
- Tout ce qu'elle a raconté, là ? avait craché Sirius. J'y crois pas une seule seconde.

Il avait croisé les bras et donné un coup de pied dans un caillou. Ses trois amis l'avaient regardé, incertains.

- Patmol...
- Hm ?
- Je crois qu'elle était sérieuse, avait tenté Peter d'une petite voix.
- Elle est loin de prôner les valeurs des sang-purs, avait ajouté Remus.
- Elle a même plus ou moins dit qu'elle voulait se battre contre Voldemort. Will passe son temps à essayer de te faire comprendre qu'Aria est loin d'être aussi mauvaise que tu le crois, et je pense qu'on en a eu quelques preuves ce soir, avait terminé James.

Sirius n'avait rien répondu. Bien sûr qu'il avait entendu tout ça, et évidemment qu'Aria n'avait aucune raison de mentir, surtout qu'elle pensait ne parler qu'à sa cousine... Et, certes, elle semblait beaucoup plus gentille et humaine qu'il ne le pensait. Mais alors, pourquoi est-ce qu'il ressentait toujours autant de haine à son égard ? Si elle s'avérait être une alliée dans la guerre contre le mage noir, il n'y avait plus de raison de la détester à ce point, si ?

C'était ces pensées qui avaient empêché Sirius de dormir, cette nuit-là. Pourquoi diable n'arrivait-il pas à ressentir autre chose que de la haine, de l'exaspération, de l'agacement envers cette fille qui, finalement, ne lui avait jamais rien fait ? Il savait qu'il haïssait tout ce qu'elle représentait, mais en tant qu'être humain, elle n'avait jamais rien fait de mal; elle était même respectée par beaucoup. Était-il aussi mauvais que ses parents, à juger de la sorte la valeur d'une personne juste d'après ses origines sociales ? Cela avait-il du sens d'haïr Aria Justice pour ce qu'elle était, alors qu'il avait quitté la maison des Black pour cette même tendance que ses parents avaient envers les nés-moldus ?

Sirius Black n'avait pas les réponses à toutes ces questions, et n'avait vraiment pas envie de s'excuser envers elle alors qu'elle venait de le trimballer tout autour de Poudlard comme un vulgaire ballon de baudruche. De plus, il était fatigué de sa nuit blanche, et était en train de manquer son moment préféré de la journée. Alors il croisa les bras et s'assit simplement à terre. Pour une des premières fois de sa vie, il ne savait pas quoi dire.

Aria se tenait face à lui, le souffle court, et ne comprenait pas ce soudain revirement de situation. Mais qu'est-ce qu'il fichait, encore, celui-là ?

- Puis-je savoir ce que tu fabriques ? avait-elle pesté.
- Tu puis, tu puis, avait répliqué Sirius, le sourire aux lèvres. Assieds-toi donc, ma chère, et je te dirai.

Elle ne bougea pas, suspicieuse. Jamais Sirius Black ne lui avait demandé de s'asseoir avec lui, et elle ne voulait pas prendre le risque de déclencher une quelconque farce du Gryffondor en se pliant à ses exigences. En face, Sirius réfléchissait à toute vitesse à ce qu'il allait bien pouvoir lui raconter, car lui-même d'en avait aucune idée.

- Je suis très bien debout. Pourquoi, par tous les poils de barbe de Merlin, n'êtes vous pas venus hier soir ? Je pensais que tu étais quelqu'un de parole, Black. Je n'aurais jamais pensé que tu te dégonflerais.
- On est venus, Justice, mentit-t-il, mais vous étiez pas là.
- Parce qu'on s'est fait repérer par Hagrid ! s'énerva-t-elle. On était là à partir de minuit moins le quart jusqu'à au moins minuit et quart. On est restées une demi-heure dans cette stupide et atroce forêt et vous ne vous êtes jamais présentés !

Sirius se contentait de rire, ce qui attisait la colère d'Aria.

- Tu n'es qu'un lâche, finalement, constata-t-elle.
- Je suis loin d'être un lâche, répondit-il tranquillement, la voix néanmoins tremblante.

Sirius Black était beaucoup de choses, mais certainement pas un lâche. Et gare à quiconque osait l'appeler de ce nom. La colère reprenant le dessus en lui, il lui répondit sans réfléchir :

- Toi, par contre, tu en es une bien belle, de lâche. Si tu veux te battre contre Voldemort dans cette guerre, c'est pas en restant dans les bureaux du Ministère que tu vas changer quoi que ce soit !
- Je suis persuadée qu'on peut... avait commencé Aria en criant.

Elle cessa tout à coup de parler, suspicieuse.

- Attends. Comment es-tu au courant de cela, toi ? Je ne t'en ai jamais parlé, à ce que je sache ?

Sirius ouvrit de grands yeux alors qu'il réalisait l'immense bêtise qu'il venait de faire.


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Okay, on avance doucement, mais sûrement... Un premier début de rapprochement pour Aria et Sirius :) Je sais que c'est un chapitre court, mais si je rajoute la suite il va faire 5000 mots et ça sera beaucoup trop long là encore :/ J'arrive pas encore à trouver la quantité d'écriture idéale pour les chapitres, mais j'y travaille ;)

Vous aimeriez voir d'autres chapitres du point de vue des Maraudeurs ? :) J'ai pas encore vraiment pu les introduire correctement dans toute leur personnalité et leurs relations entre eux (pareil pour Will, Lily etc :/) parce que je restais focalisée sur le point de vue d'Aria et ce n'est peut-être pas une si bonne chose au final... Dites-moi ce que vous en pensez !

Et aussi, on approche des 400 vues ! C'est cool cool cool 💕
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