Chapitre trente-huit

AZALÉE

Tout se chamboulait dans ma tête. Les images ainsi que les souvenirs d'hier refaisaient surface. Je ne cherchais même pas à connaître la cause de mon exclusion. Je savais juste ce qu'il s'était passé et pas pourquoi on m'avait accusée.

Peut-être que j'étais trop étrange par rapport à la masse de moutons circulant dans ce lycée. Peut-être que les gens différents ne méritent pas d'être tranquillement installés dans l'établissement mais doivent absolument souffrir. Après tout, vous m'avez vu ? Je fais peur à voir et je suis tout le temps seule. J'avais forcément une tête de délinquante qui enferme des abrutis dans une pièce.

Si je voulais vraiment me venger d'eux, je n'aurais pas fait ça. Mais évidemment, personne ne me croyait. Je leur aurais plutôt fait ce qu'ils me faisaient sans arrêt, jusqu'à les forcer à se faire souffrir en espérant que ce soit une échappatoire à leur souffrance. Alors qu'on sait tous qu'il n'y en a pas, hormis la mort.

Les heures passèrent. Et comme dans toutes les routines ennuyantes de la vie, je devais me préparer à aller au lycée : me forcer à manger, me laver, me brosser les dents, préparer mon sac et faire mes devoirs. Et une fois tout cela terminé, j'avais un peu de temps pour moi : c'est-à-dire, dormir.

En réalité, nous n'avons jamais le temps, nous devons nous préparer à notre demain alors que demain on se préparera à notre surlendemain, et ainsi de suite.

Après mon « demain » préparé, je me suis affalée sur mon lit. Toutes mes actions avaient été bâclées mais au moins, elles avaient été faites.

Je ne savais pas quoi faire pendant mon exclusion. Je me suis levée pour aller voir mes parents. Je descendais souvent les escaliers, comme si je redoutais la confrontation avec eux. A vrai dire je ne leur parlais pas souvent.

Seul mon père était à la maison à ce moment-là. J'ai toqué à la porte de son bureau et j'ai attendu une réponse.

- Tu peux entrer, Lana.

Il s'en fiche de toi, tu le vois bien.

Pas maintenant.

- Lana n'est pas encore rentrée de l'école, c'est moi Azalée.

Qu'est-ce que tu veux ? A-t-il lancé froidement.

- Entrer, déjà.

- Tu as le droit d'entrer, Azalée.

J'ai doucement ouvert la porte. Mon père était en face de son bureau à trier des papiers. J'avais peur de le déranger.

- Pourquoi as-tu fait ça à tes camarades ?

Et voilà, il ne me croyait pas. Personne ne me croyait. C'était insupportable de connaître une vérité dont personne n'est convaincu. Ce n'était pas moi, j'en étais persuadée. Je ne savais pas quel connard avec fait cela et pourquoi on m'avait accusée, mais je ne méritais pas ça.

Tu n'es qu'une menteuse, Azalée.

Je pensais que ma dose de malheur était suffisante.

- Non, ce n'est pas moi, papa. Ai-je répondu calmement.

- Alors je n'ai pas envie de parler avec toi, je ne veux pas parler à une petite menteuse. Tu ne fais aucun effort pour que tout aille mieux, alors débrouille-toi. Tu pourras récupérer ton téléphone après ton exclusion, essaye de survivre sans d'ici là.

- C'est bon, je sais vivre sans. Ai-je marmonné en partant.

Même en faisant des efforts, ils te détestent.

Tais-toi.

Jamais.

***

J'ai encore menti, je ne savais pas survivre sans. J'ai voulu le récupérer en cachette mais mon père restait constamment avec, jusqu'à l'emmener au travail avec lui. Donc il m'était impossible d'utiliser mon portable.

L'ennui était insurmontable. Je ne savais pas quoi faire.

J'essayais de réviser mais je n'y arrivais plus. J'essayais de faire du sport mais mon corps me disait non. J'essayais de dessiner mais des larmes imbibaient le papier. Une voix cruelle résonnait dans ma tête. Alors je regardais des films toute ma semaine d'exclusion. Je n'avais pas faim, je n'avais pas sommeil.

Je voyais tout de même Léna. Mais je ne disais plus rien. Je n'avais aucune motivation.

A vrai dire, je n'avais personne à qui parler : Samuel avait disparu, personne ne me croyait et Léna était juste une source de mon imagination, à croire que j'étais schizophrène.

Tu es folle.

***

Je me suis rendue au lycée, je pouvais enfin écouter la musique résonnante dans mes écouteurs. Et c'était reparti pour une routine des plus ennuyeuses, au moins j'étais au côté de mon téléphone pour pouvoir m'isoler du monde.

C'est en voulant m'isoler que Gaëtan et Maxence sont venus vers moi. Cela faisait depuis le départ de Samuel que je ne leur avais pas parler. Parfois je les croisais dans le lycée, on aurait dit que son absence ne les affectait pas. Ils vivaient normalement.

- Bonjour Azalée, j'ai entendu parler de ton exclusion. A commencé Maxence.

Et voilà, ils venaient me parler de ça et non être gentil. Personne n'est gentil, il ne faut pas se faire de faux espoirs.

- Maxence, ce n'est pas comme ça que tu vas lui donner envie de nous parler, a répondu Gaëtan. Désolée Azalée, tu vas bien ?

Pas du tout.

- Oui, tout va bien, et toi ?

- L'absence de Samuel est vraiment affreuse.

- Oui, il est absent, mais vous pouvez toujours lui grâce à son téléphone. Ai-je dit.

Alors que moi, il ne me répondait plus.

- Non, à vrai dire il ne nous répond plus depuis longtemps, est intervenu Maxence. Il a disparu du jour au lendemain.

Ne les crois pas, Samuel t'a abandonnée. Il te déteste.

C'était exactement le même cas que moi. Peut-être qu'il ne me faisait pas la tête.

NE LES CROIS PAS.

Quelque chose a sûrement dû arriver à Samuel.

Comme sa mort ?

Nous ne sommes pas dans un film.

Mais les drames n'arrivent pas que dans les films.

J'étais perdue, qui croire, quoi penser. Je ne savais plus quoi faire. Si ça se trouvait, ils me mentaient. C'était peut-être un plan de Samuel pour que je lâche prise. J'étais dans un monde de mensonge, impossible de savoir qui croire. Dans les deux cas, j'avais à perdre : Samuel me faisait la tête ou il lui était arrivé quelque chose. Dans les deux cas, j'étais perdante.

- Azalée ? A lancé Maxence lorsque j'étais perdue dans mes pensées.

- Oui, désolée. Moi non plus je n'ai plus de nouvelle de lui, et depuis un bon bout de temps. Je ne peux pas vous aider.

- On s'en doutait bien lorsqu'on est venu te voir. Ce n'est pas dans ses habitudes de disparaître sans prévenir. Il a forcément une raison, ne t'inquiètes pas. Nous ne sommes pas venus pour ça.

- Alors pourquoi ?

Pour se servir de toi.

- Juste pour rester avec toi car vu ce que Samuel a dit sur toi, tu dois forcément être géniale. A répondu Gaëtan.

J'aurais pu demander ce que Samuel avait dit, mais ça n'allait plus me briser qu'autre chose. J'ai accepté de rester avec eux ce jour-là. Après je leur disais que j'avais des choses à faire. Parce que le simple fait de rester avec eux me rappelait Samuel.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top