Chapitre 40

Je garde mon adulte et j'en parle à un calme

Nate

Putain, je conduis comme un malade jusqu'au bar que m'a indiqué Eden pour aller chercher Violet. D'après sa tante, elle a un peu trop bu pour fêter sa rémission et elle a finit sur le trottoir avec les videurs. Layla l'a appelé, totalement paniquée un peu bouleversée pur expliquer qu'elle l'a défendu face à son ex, et que c'est parti en vrille. Elle est totalement hors d'elle, sûrement peu habituée à l'alcool qui parcourt tranquillement ses veines actuellement.

Honnêtement, je ne suis pas sûr que boire de l'alcool même après avoir arrêté la radiothérapie est une très bonne idée.

J'arrive au niveau du bar et je reconnais directement l'Amérindienne et ses longs cheveux bruns, près d'un vigile au visage dur. Près d'eux, un autre bloque le passage à un siège roulant qui comporte bien Violet. Elle a le visage rouge de fureur et elle essaye de toutes ses forces d'avancer sans réussir à faire bouger le vigile d'un pouce.

Quand je suis à leur hauteur, je baisse la vitre et le visage de Layla s'illumine. Malgré la nuit, je remarque qu'elle a les yeux rouges grâce aux éclairages de la façade. La pauvre, elle va avoir du mal à se remettre de cette séparation qui a l'air mémorable.

- Nate, tu peux ramener Violet ?

- C'est pour ça que je suis là, Eden m'a appelé.

- Ah, oui... Elle est avec son copain, Jesse. Je lui ai dit de ne pas s'en faire, de rester avec lui et que j'allais m'occuper de Violet mais...

- Mais elle est totalement hystérique ?

- Je ne l'avais jamais vu comme ça...

En effet, moi non plus je ne me souviens pas de l'avoir vu comme ça. Elle a arrêté d'essayer de rouler sur le pauvre homme pour croiser les bras sur sa poitrine et bouder comme une enfant.

- Vous êtes ? Demande le vigile qui discutait avec Layla.

- Un membre de sa famille. Je vais la ramener, si vous voulez bien m'aider.

- On va vous aider, mais on ne veut plus jamais la voir ici.

- Vous feriez bien de garder vos menaces pour vous, je crache en le regardant de haut en bas, ce n'est pas mon bar qui a servi de l'alcool à des mineurs. Et qui plus encore, l'une sort d'un lourd cancer.

Le vigile pâlit, comme s'il réalisait enfin le pourquoi du comment, puis il fait signe à son collègue. Je sors de la voiture pour les aider, attrape Violet qui ne dit pas un mot et la glisse sur le siège passager. Je plie son siège que je mets dans le coffre.

- Je te dépose quelque part Layla ?

- S'il-te-plaît, chez ma mère.

J'hoche la tête et monte au volant. Elle s'installe sur la banquette arrière et nous démarrons. De temps en temps, je me risque à regarder les filles pour être sûr que personne ne va gerber dans ma caisse, mais Layla semble juste anéanti quand Violet ne dit rien du tout.

Nous déposons Layla qui s'excuse encore de m'avoir dérangé, puis je décide de rentrer chez moi avec la miss. Elle a déjà dormi chez moi, et je pense qu'elle préféra ne pas rentrer dans cet état chez ses parents. Personne n'a envie de rentrer bourré pour tomber sur ses parents.

Je me gare puis comme la dernière fois, je porte Violet jusqu'au canapé vert qui orne mon salon. Je ne parle pas, elle non plus, alors je retourne chercher son siège. Je profite d'être dans le noir, dans l'air frais de la nuit pour souffler un bon coup. J'étais en pause au taff quand Eden m'a appelé, alors j'ai dû trouver Greyson en urgence pour quitter le Milady. Il m'a évidemment laissé partir plus tôt, mais ça m'embête un peu quand même, j'ai l'impression d'avoir une attitude tout sauf professionnelle.

Je monte les deux étages en soupirant, puis rentre dans mon appartement. La lumière est toujours allumée mais il n'y a plus de Violet sur le canapé. Je soupire encore plus bruyamment, espérant entendre quelque chose le temps que je me déchausse, mais elle a décidé de rester muette je crois. Je pose son siège contre l'îlot de la cuisine puis me dirige dans ma chambre plongée dans le noir.

Je sais que si j'étais bourré, c'est le premier endroit où je me dirigerais après les chiottes.

- Violet ? Je chuchote.

Personne ne me répond. Machinalement, je décide d'allumer la lumière de la pièce mais à peine fait, un cri plaintif retentit de la couverture.

- Merde ! Désolé !

J'éteins aussitôt et Violet continue de gémir de douleur. Au moins, elle n'a pas perdu sa langue tout compte fait.

- Tu ne veux pas te changer ou prendre une douche ?

- Mmmmmh.

Bon, je crois que j'ai ma réponse. J'abandonne la chose et pars moi-même me doucher. J'ai enfilé un haut en vitesse sur les paillettes qui courent sur mon torse quand Eden m'a appelée en catastrophe, je suis dégueulasse. Collant de sueur, je me tartine de gel douche de partout jusqu'à ce que mes organes internes sentent eux aussi bon. Je sors mais n'enfile pas de haut, juste un short pour la nuit, sachant que je vais dormir avec Violet qui a trainé dans un bar plein de microbes. J'avoue avoir hérité du côté maniaque de ma mère.

Je la rejoins dans la chambre, et je suis presque persuadé qu'elle dort. Si on m'avait dit il y a quelques années que tout ça nous arriverait et que je finirai par dormir plusieurs fois de suite avec elle, je ne suis pas sûre que je l'aurais cru.

- Tu as des médicaments à prendre pour ta jambe ou un truc comme ça ? Je la questionne sans attendre réellement de réponse.

Bingo, pas de réponse. Je soupire et me glisse sous les draps. Mon torse entre en contact de la froideur de ceux-ci ce qui me fait frissonner. Ça commence à cailler sévèrement ici, bientôt je vais mettre du chauffage.

- Nate ?

La voix endormie de Violet me fait rire mais je me contiens. On entend bien qu'elle est bourrée, je découvre une toute autre femme aujourd'hui. Je sais qu'elle boit de temps en temps, comme quand on s'est croisé en boite de nuit il y a quelques temps maintenant, mais de là à finir dans cet état je ne suis pas sûr. Dans tous les cas, je ne suis personne pour la juger.

Après tout ce qu'elle a enduré et la bonne nouvelle d'aujourd'hui, je comprends qu'elle veuille décompresser.

- Oui ?

Elle ne me répond pas de suite pour se tourner. Malgré la nuit et la pénombre qui ne me permet pas de la distinguer, je devine quand même qu'elle s'est bougée pour être face à moi. Malgré l'alcool qu'elle a ingurgité, elle sent toujours un parfum boisé, presque fleuri.

- Est-ce que Layla est toujours avec Noël ?

Malgré tout, je dois avouer qu'elle articule plutôt bien. Sa voix est trainante, fatiguée, mais compréhensible.

- Je ne crois pas.

- Ah.

Elle se tait avant de reprendre.

- Je me suis tapée la honte ?

- Je ne sais pas, je n'étais pas là.

Violet se redresse sur un coude presque au dessus de moi comme je suis sur le dos. Je sens une présence non loin de mon visage mais ça ne me dérange pas.

- Pourquoi tu n'étais pas là ?

- Je travaillais, Violet. Toi, tu faisais la fête.

- Ah. Oui. Tu étais avec tes putes.

Je fronce les sourcils en riant un peu. Jamais de la vie elle dirait de telles choses dans un état normal. Je sais que je ne devrai pas profiter, mais elle a envie de parler on dirait.

- Mes putes ? Non, mes clientes. Et j'ai des clients aussi.

- C'est pareil.

- Non.

- Si.

- Non.

- Depuis quand tu es devenu aussi beau ?

Sa question me prend de court et j'éclate de rire. Même si elle est franche en général, je ne m'attendais pas à de tels aveux de sa part.

- J'ai toujours été beau gosse, je réponds en riant.

- C'est vrai, tu as raison.

Elle bouge pour se retrouver sur le dos, sa tête à moitié sur mon bras. Comme moi, elle doit fixer le plafond sans le voir pour autant.

- Pourquoi tu es vieux ?

Je ris de plus belle, mais pas le temps de répondre quand elle est lancée.

- Parce qu'honnêtement, ça me saoule.

- Pourquoi Violet ?

- Parce que tu es ami avec Roméo.

- Le rapport, quel est le rapport ?

- Tu le sais le rapport.

Mon cœur se pince d'un coup en souvenir d'il y a trois ans. Oui, je viens de saisir le rapport. Décidément, même bourrée elle n'oublie pas ce qu'il faut oublier. Elle se tait et moi aussi. C'est le mieux. Je devine assez facilement ce qui doit traverser son esprit en ce moment tant bien même que j'essaye de ne pas penser à ça. C'est le passé. Un passé récent, mais un passé quand même. Je sais à quel point ça l'a blessé à l'époque, je ne voulais pas qu'elle y repense maintenant. Surtout bourrée.

- Nate ?

- Oui ?

- Pourquoi on s'est embrouillé si vite déjà ?

Je soupire, et elle prononce un « oh » très bas. Le rapport est toujours le même, elle oublie vite.

- Je ne voulais pas vous abandonner, je voulais vivre mes rêves.

- Et tu voulais me fuir aussi.

- J'étais jeune et blessée.

- Tu m'as blessé aussi en te comportant comme une enfant.

- J'en étais une.

- Tu as raison.

Nouveau blanc. Si je gagnais un dollar à chaque blanc, je serais riche.

- Nate ?

- Oui, Violet ?

- Je suis désolée.

- Je sais, moi aussi.

- Pourquoi tu es vieux ?

- C'est comme ça. Pourquoi tu es jeune ?

- C'est comme ça.

Je souris dans le vide et hésite à enregistrer notre conversation sur mon téléphone. Tout ça est lunaire, je veux une preuve pour être sûr que tout ça a bien existé.

- Nate ?

Je ne réponds pas mais je la sens se redresser.

- Je suis beaucoup bourrée ?

- Un peu, je dirai.

Roulement de tambour... Nouveau silence ! Je sais que je la regarde, qu'elle est juste au-dessus de moi malgré les ténèbres qui nous englobent. Je sais que ses prunelles brunes sont plantées dans les miennes. J'entends son souffle près de moi, je sens son parfum près de mes narines.

- Violet... je la préviens avant qu'elle ne fasse une bêtise.

- Nate...

Je fronce les sourcils même si elle ne peut pas me voir. Mon cœur se met à battre fort dans ma poitrine quand une chaleur douçâtre se répand dans mon ventre.

Merde.

- Violet... je préviens encore plus sévèrement, presque paniqué.

Son parfum se rapproche et je me rends compte que je suis dans la merde. Je ne sens plus que les fleurs autour de moi.

- V...

- Eh merde, me coupe-t-elle en plaquant ses lèvres sur les miennes.

Instinctivement, je place ma main derrière sa nuque pour agripper ses cheveux mais je ne rencontre que la douceur de son crâne. Ça ne me dérange pas du tout tant mon esprit est focalisé sur les lèvres chaudes de Violet contre les miennes. Son corps se presse contre le mien, faisant naître pour de bon le désir que je sentais apparaître il y a quelques secondes.

J'essaye de me reculer mais je suis coincé contre le lit, Violet presque entièrement sur moi. Elle m'embrasse avec avidité, désir, comme elle ne l'a jamais fait. Elle essaye de me faire comprendre qu'elle n'est plus la petite fille que j'ai connu, et je le comprends totalement maintenant quand sa main glisse sur mon torse nu.

Je m'écarte pour de bon en tournant brusquement la tête. Le visage de Violet s'écrase dans mon cou et elle éclate de rire.

- Violet, je dis à bout de souffle en essayant de retrouver mes esprits.

- Tu bandes, dit-elle entre deux rires.

Elle roule sur le côté pour retrouver sa place, totalement hilare. Je souffle un bon coup, essayant de calmer les tremblements de mon corps. Il vient de se passer quoi là ?

- Ouais, mais c'est pas la question.

- Hum hum...

Punaise soit elle est totalement bourrée, plus que je ne le pense, soit je deviens fou.

- Tu n'as pas toute ta tête là, dis-je en me levant du lit.

Il faut que j'aille quelque part où elle n'est pas. Mon cerveau sait pertinemment qu'elle n'est pas elle-même, mais une partie de mon corps en particulier n'en a rien à foutre. Comme elle ne me répond pas et continue de rire, je m'éloigne en cherchant à tâtons la sortie de la chambre, mais Violet arrête de rire d'un seul coup.

- Nate ?

- Oui ?

Son sérieux soudain me perturbe encore plus que ce qu'il se passe dans mon froc.

- Je me souviendrai de ça demain, hein. Je ne regrette pas.

Je me tais, pince mes lèvres avant de lui répondre calmement.

- On en reparle plus tard, là tu dois dormir.

Je ne la vois pas mais je sais qu'elle hoche la tête. Une fois que j'ai entendu le bruit des draps qu'elle remet sur elle, je m'éclipse et m'enferme dans la salle de bain, les mains toujours tremblantes.

Merde, c'était quoi ça ?

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