Chapitre 35
Révélation, tension et palpation
Violet
Je me retourne vers Charles pour voir sa réaction face à Greyson, et il s'est juste levé, le sourcil rehaussé. Grey a l'air hors de lui avec son visage rouge de colère et la veine sur son front. Il est presque méconnaissable, peu importe son maquillage.
- Vous êtes ?... demande-t-il en essayant de comprendre.
- Charles !
Sidonie arrive en courant dans le café, essoufflée de cette course. Très vite, Nate et ses parents émergent de l'extérieur, l'air à la fois inquiets et épuisés.
- Maman, qu'est-ce que t'as foutu encore ? Excusez-là monsieur, dit-il a Greyson en rejoignant sa mère. Elle ne comprend pas toujours le concept de mariage, de fidélité et tout ça. Je te jure maman je commence à en avoir ras le bol et...
- Dégage, lâche froidement Greyson.
Les deux se figent, choqués de l'attitude dangereuse de leur interlocuteur, mais pas un seul des deux ne décide de bouger. Sidonie s'avance un peu pour « protéger » son fils, le menton si haut et le visage d'un coup si cruel qu'elle me fait penser à Elizabeth. Avec ses cheveux bruns et son air condescendant, elle essaye de tenir tête à Grey. La pauvre, la redescende va faire mal quand il va te briser en deux. S'il y'a bien quelqu'un qu'il ne faut pas chercher dans ce pays, c'est un Myers.
- Tu n'es pas l'hôte de cet endroit, crache-t-elle avec un air mauvais. Dans ton club c'est d'accord, mais ici tu n'as aucun droit sur nous.
- Tu ne sais même pas où tu as mis les pieds sale garce, répond-t-il sur le même ton ce qui interpelle Layla.
Mon amie file chercher Eden qui devait sûrement faire une pause dans l'arrière boutique.
- Ne dis pas ce genre de choses devant une personne malade, dit-elle en parlant de moi comme si j'étais invisible.
Zut, je ne veux pas être mêlée à tout ça moi. J'ai rien demandé, je passais juste une bonne soirée avec Eden et Layla puis Nate un peu plus tard. Je m'en fous de Charles et de sa mère, je voulais juste passer une fête tranquillement...
- C'est toi la malade dans cette pièce, rétorque Grey en la dévisageant de haut en bas. Ne mêle pas Violet à cette histoire, tu sais très bien que ça ne concerne aucun d'entre eux.
- Qu'est-ce qui ne concerne aucun d'entre eux ?
Eden arrive en essuyant ses mains dans un chiffon qu'elle abandonne sur le plan de travail pour nous rejoindre. Elle regarde un peu la petite troupe puis les clients qui ont presque tous désertés le café. J'ai envie de lui dire que ce n'est pas à cause d'eux mais à cause de moi, mais quelque chose me dit que ce n'est pas le moment. En plus, tous ces cris et ce bruit m'a ravivé un vieux mal de crâne de ce matin. J'ai peur que ma jambe commence à devenir douloureuse.
- Greyson Hayes-Myers, explique-moi ce qu'il se passe s'il-te-plaît, dit-elle d'un ton ferme.
Grey relève le nez pour regarder son amie, mais son visage a drastiquement changé en entendant sa voix. Ce qui était de la colère il y a quelques secondes est devenue une profonde tristesse. Courtney sanglote depuis qu'elle est arrivée, mais là c'est Greyson qui semble souffrir.
- Grey, qu'est-ce qu'il se passe ? Elle insiste en posant un bras sur son épaule. Sidonie et son fils venaient rendre visite à Violet, je crois. Ce n'est pas la première fois que je les croise tu sais.
- Ce n'est pas la première fois ? relève-t-il avec panique, puis la veine réapparaît. Comment tu as osé Sidonie ! Tu sais qui elle est, hein ? Tu le sais.
- Non... chuchote-t-elle, soudain toute petite.
Greyson lui lance un regard noir qui me fait flipper. Sidonie qui a eu un élan de confiance se ratatine sur elle-même avant de lâcher un petit « oui » presque inaudible.
- Bon, Greyson dit moi ce qu'il se passe ou tout le monde dégage de mon établissement ! S'énerve Eden.
Je sais qu'elle n'est pas vraiment en colère, juste agacée. Si elle était vraiment hors d'elle, elle se mettrait à pleurer d'ici quelques minutes. Mais rien n'empêche que la situation commence vraiment à la perdre tout comme moi. J'ai mal à la jambe maintenant, je suis fatiguée, et je ne comprends pas pourquoi tout le monde s'énerve autour de moi.
Sans un mot, Nate se déplace pour venir près de moi sans que personne ne remarque tellement tout le monde est occupé. Je le sens se poser dans mon dos, mains sur les poignées de mon siège. Savoir qu'il n'est pas loin me rassure un peu. Au pire, si vraiment je ne me sens pas bien, je pourrais lui dire discrètement.
- Sache Eden que cette personne ne devait jamais revenir ici, annonce Greyson, l'air grave.
- Putain Greyson accouche qu'on en finisse ! Je suis fatiguée et je vais bientôt fermer le café de toute façon.
Allez Greyson, on a tous envie de rentrer chez nous, crache le morceau...Il ouvre la bouche mais rien ne semble vouloir sortir.
- Je suis l'ex de Gareth ! Finit par lâcher Sidonie en levant les bras, énervée.
Ma tante la dévisage un instant, les sourcils froncés le temps que l'information ne monte à son cerveau. Je ne comprends pas trop pourquoi une ex pourrait faire autant de bruit, mais bon. En tout cas, ce qui est certain, c'est que Greyson ne semble pas vraiment apprécier cette femme. Au point de lui interdire de mettre les pieds dans l'Etat.
La main de Nate se pose sur mon épaule pour me la presser doucement. Dans ce geste infime, je crois deviner que lui vient de comprendre le problème. Il laisse sa main posée, signe que la tempête n'est pas encore passée, et ça ne me rassure pas du tout. Les yeux d'Eden non plus, en fait.
Comme si elle venait enfin de comprendre ce que ça signifie, ils sont remplis de larmes sans pour autant qu'elle ne permette qu'une seule dévale sa joue. Elle déglutit difficilement avant de parler d'un ton froid et rauque en même temps.
- C'est toi... Tu te permets de venir ici et... nan. Je peux pas y croire.
- Je suis désolé Eden... commence Grey mais elle la coupe.
- Non, c'est bon. Merci d'avoir voulu m'épargner ça mais je suis grande.
Elle s'approche lentement de Sidonie pour être à sa hauteur, un peu comme un lion qui vient en défier un autre, puis elle lève le menton comme le faisait l'autre précédemment.
- Tu vas dégager de mon café avec ton fils et ne plus jamais remettre les pieds. Si j'ose apprendre que tu es revenue dans les parages ou même qu'il a essayé de reprendre contact avec ma nièce, j'appelle Greyson pour qu'il appelle Juilliard.
Le visage de Sidonie devient blanc, Charles aussi. Le pauvre, il n'a pas l'air si méchant que ça et c'est lui qui prend pour sa mère. Je ne sais pas ce qu'elle a fait mais quand Eden est en rogne... cachez-vous !
- Greyson, tu n'es pas pote avec le doyen justement ? Ah, si, je crois bien. Ça serait dommage de voir un rêve de danse s'effondrer parce qu'on n'a même pas été pris en Quadrille.
Je mets 10/10 pour la pique ! Bien ciblée, pile poil où ça fait mal, un perfect !
Sidonie ne répond même pas et prend son fils pour l'entraîner à la sortie du café, tête baissée. Charles ouvre la bouche pour protester mais sa mère lui donne un léger coup dans les côtes qui lui empêche d'aggraver leur cas. Elle est si blanche que j'ai l'impression qu'elle va tomber dans les pommes.
Comme Eden en fait. Quand les deux ont passés la porte du café et qu'ils sont hors de vue, Eden s'effondre en pleurs, rattrapée par Greyson. Ah, en fait elle était en colère et j'avais raison avec les pleurs. Greyson la serre fort contre lui et mon cœur se contracte dans mon torse. Je ne sais pas si Eden pleure de soulagement ou pleure de tristesse, mais la bienveillance de Grey envers elle est touchante.
Courtney se rajoute a leur câlin puis John aussi, et il ne manquerait plus qu'Harper pour compléter la petite troupe. Nate contourne le siège pour se mettre à ma droite, puis il s'accroupit pour être à ma hauteur. Il se penche près de mon oreille et je sens ses cheveux effleurer mon front.
- Je pense qu'on devrait les laisser ce soir, il me chuchote doucement. Il vaut mieux qu'ils discutent entre amis de ce qu'il vient de se passer.
- Tu m'expliqueras ?
- Oui, je te ramène.
Il se redresse puis part chuchoter un mot au groupe de parents. Ils approuvent tous et me font signes d'au revoir sans parler, puis Nate me pousse jusqu'à la sortie. C'était un peu bizarre comme fin de soirée et je n'ai pas compris grand-chose. Ce que je retiens, c'est que les Lefebvre n'ont pas l'air recommandable et que Charles n'est absolument pas l'homme que je pensais qu'il était. Ça confirme plus qu'autre chose mes doutes quant à l'utilité des réseaux sociaux... À quoi ça sert de discuter avec quelqu'un s'il se comporte comme un con quand on se voit ? Ça me fait mal à la tête.
Nate me pousse en silence jusqu'à chez lui, mais ce n'est que quand on arrive devant l'immeuble que je percute.
- Pourquoi tu m'emmènes ici ?
Il tape le code d'entrée puis m'aide à rentrer dans le couloir.
- Eden m'a demandé de ne pas te ramener chez toi. Tu devais dormir chez elle de base, une petite surprise pour que tes parents puissent avoir une soirée en amoureux et toi une nuit avec ta tante préférée, pour la citer. Mais après ce qu'il s'est passé... Elle ne pense pas dormir de la nuit alors voilà, tu vas dormir chez moi.
- Ok.
- Ok ? Je pensais que tu ne serais pas d'accord, que tu hurlerais à la mort jusqu'à ce que mes voisins pensent que je séquestre quelqu'un.
Je ris doucement mais lève les yeux au ciel bien qu'il ne puisse pas me voir. Je m'en fiche de dormir chez lui après une soirée comme ça. J'ai juste envie de prendre mes médicaments et de dormir en espérant que la douleur montante dans ma jambe diminuera.
- Je vais devoir te porter par contre, il n'y a pas d'ascenseur.
J'hoche la tête et me prépare pour qu'il puisse me prendre dans ses bras. Dans d'autres circonstances, j'aurais fait ma tête de mule et je serai montée à cloche pied ou en rampant marche par marche, comme j'ai l'habitude de faire. Mais j'ai mal. En fait, plus les secondes passent plus j'ai une douleur aiguë dans la jambe. Enfin jambe, non, il n'y en a plus.
Nate me prend sur le côté, passant un bras sous mon genou et l'autre sur ma taille, puis il me soulève du siège sans problème. Je passe mes bras autour de son cou, un peu embarrassée de cette soudaine proximité mais pas le choix.
Il commence son ascension et je me blottis contre lui, persuadée que plus je me ferai petite, plus je serai légère. Il sent l'été, le monoï... mais pas assez fort pour me faire encore plus mal à la tête. C'est subtil en fait...
Violet ! Redescends sur terre !
On passe un premier palier puis il entame les dernières marches jusqu'à ce qu'on arrive devant la porte de son appartement. Je sais que c'était celui d'Eden avant mais je crois n'y avoir jamais mis les pieds. Une première donc.
Nate n'est même pas essoufflé ! Agile, il me lâche le genou en calant son autre main sous mes fesses pour me soutenir, cherchant ses clés dans une de ses poches. Je sens mes joues s'empourprer ce qui me donne largement envie de me cacher encore plus. La Violet adolescente aurait été ravie d'un tel rapprochement.
Il presse la poignée et une odeur beaucoup plus forte de monoï m'accueille. Je retiens ma respiration pour m'adapter mais j'avoue que c'est la rave party dans ma tête.
- Bienvenue chez moi, annonce simplement Nate en me reposant délicatement sur le sol.
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