𝐼𝓃𝓈𝓅𝒾𝓇𝒶𝓉𝒾𝑜𝓃

Il était presque impossible à Namjoon de ne pas s'extasier sur la vue imprenable d'Amalfi Coast, au moment du coucher de soleil.

« On raconte que lorsqu'ils voulaient écouter le chant des sirènes, les dieux de l'Olympe empruntaient le sentier qui surplombe la côte amalfitaine, de Bomerano à Nocelle : le sentier des dieux. Aujourd'hui, les sirènes se sont tues. Les dieux ont pris leur retraite. Mais le sentier, lui, demeure, huit kilomètres à flirter avec l'abîme, d'est en ouest. »

Seokjin lui avait lu cette légende provenant d'internet, les yeux étincelants de curiosité, il y a six mois.

182 jours s'étaient écoulés et il pouvait s'en rappeler comme si c'était hier.

Ses yeux piqués d'envie, sa bouche pleine et aguicheuse, lui relatant chacune de ses trouvailles. Seokjin était si plein de vie. Il était la gentillesse, la bienveillance, la définition de la douceur incarnée. Seokjin était l'amour de sa vie, le premier, le plus merveilleux et sans aucun doute le plus douloureux.

— Namjoon, je t'ordonne de prendre plein de photos ! Le paysage, là-bas, est beaucoup trop beau !

Namjoon pouvait encore entendre sa voix pleine de charme, s'adresser à lui comme s'il était sourd. Cette pensée le fit sourire tristement. Il leva son appareil photo et le porta à son œil le plus aguerri pour s'exécuter. Il lui avait promis de revenir avec tout un tas de souvenir, sans imaginer que ceux auxquels il tiendrait le plus, c'était les leurs.

Qu'est-ce que Seokjin lui manquait.

Non, ce mot était beaucoup trop faible pour représenter une once de ce que ressentait Namjoon en cet instant. Face aux falaises d'Amalfi Coast, face au paysage dont avait rêvé toute sa vie, Seokjin, Namjoon sentit son cœur se comprimer dans sa poitrine. Pourquoi avait-il eu le droit d'assister à tout ça ? Pourquoi avait-il accepté de décoller pour l'Italie ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?!

Namjoon sentit la colère à nouveau prendre le pas sur la beauté du moment et ses bras retombèrent le long de son corps. Il connaissait parfaitement la réponse, il ne voulait simplement pas y penser, car s'il le faisait, il était sûr de ne pas pouvoir accomplir sa mission.

Et il fallait qu'il aille jusqu'au bout. Pour Seokjin. Pour lui.

Soufflant un bon coup pour reprendre son calme, il porta à nouveau son outil de travail à son œil et mitrailla le tableau face à lui, avant de reprendre son itinéraire.

Seokjin avait vraiment tout prévu, même le temps de trajet de son hôtel à la plage, en contrebas, qui était totalement supportable à celui qui détestait marcher. Le comble du paradoxe en sachant que Namjoon était photographe de profession et qu'il partait souvent en expédition.

La plage à cette heure-ci était très prisée, Namjoon choisit de s'asseoir un peu à l'écart de tout ce monde. Comme le fantôme qu'il souhaitait devenir, il ne faisait attention à personne et personne ne semblait apercevoir sa peine.

Namjoon était le meilleur photographe selon Seokjin, mais ce dernier était persuadé qu'il n'était pas totalement objectif. Comment le pouvait-il ? Son regard remplit d'amour pour ses photos, pour lui, n'avait rien de fair-play pour ses confrères.

     Seokjin.

Même son prénom résonnant dans son esprit lui brisait le reste des morceaux de son cœur. Namjoon avait été si heureux dans ses bras, il avait connu la jouissance, les doutes, la peur, l'Amour. Avec un grand A.

Celui qui nous bouleverse, nous hante, nous brûle, nous insuffle du courage et nous prend parfois tout espoir. L'Amour qui nous transperce, nous brise et nous fait grandir. Namjoon avait encore tant à découvrir de cet Amour, car il ne s'épuise jamais. Il ne meurt jamais.

Contrairement à ceux qui l'éprouvent.

Namjoon sentit les larmes lui monter aux yeux en récupérant à son hôtel, l'objet de son plus grand malheur. Il était resté assit sur la plage pendant des heures, éloignant le plus possible, l'heure fatidique. À présent, les rues d'Almafi étaient désertes à cette heure avancée de la nuit. Au moins, il n'avait pas à subir les regards persistants qu'il avait rencontrés en quittant Séoul et en arrivant en Italie. De toute façon, personne ne pouvait comprendre ses intentions.

Les mains tremblantes, il fit à nouveau le chemin menant à la plage, le vent accompagnant les larmes dévalant ses joues. Le cœur meurtri par la douleur, Namjoon s'avança vers la mer avec pour témoin, la Lune qu'il adorait contempler autrefois avec Seokjin.

Comme si elle avait été conviée une dernière fois.

Namjoon sentit son cœur se briser une nouvelle fois lorsqu'il entendit le chant des sirènes, pleurer la mort de la plus belle âme que la Terre avait portée.

Il progressa dans l'eau froide sans hésitation et s'arrêta lorsqu'elle fut à hauteur de sa taille. Cette urne sombre qu'il n'avait pas quittée une seule seconde, il devait à présent s'en séparer. Namjoon leva les yeux au ciel, persuadé que le satellite brillant, au-dessus, n'était pas là par hasard. Il n'y avait jamais eu de hasard avec Seokjin. La pureté d'un amour comme le sien ne pouvait pas être une coïncidence, c'était une évidence.

Namjoon ferma les yeux et laissa son cœur parler une dernière fois. C'était sa dernière mission, le dernier rôle qu'il devait jouer dans cette histoire. Celle de rependre les cendres de l'homme de sa vie dans cette ville d'Italie. Parce que c'était le dernier cadeau qu'il pouvait lui offrir.

Même si cela sonnait la fin.

À toi qui été mon plus beau voyage et ma plus belle destination. À nous. À notre amour qui m'a poussé à devenir la meilleure version de moi-même. Tu vois, j'ai hésité à mener à bien ta dernière volonté, mais j'ai réussi.

Je suis là, avec toi mon amour. Tu peux t'en aller et enfin te reposer.

Je sais que je dois te dire Adieu, je sais que c'est le moment et qu'après ça, je devrais me reconstruire sans toi. Je sais que demain, après demain et durant le reste de ma vie, tu ne seras plus là. Du moins physiquement. Car mon amour, tu vivras toujours en moi. Tu es mon âme-sœur, ma moitié, mon tout, ici et dans toutes nos prochaines vies. Tu es mon passé, mon présent et je sais que tu seras mon futur.

Seokjin, tu seras à jamais mon foyer. Celui qui me fera me sentir aimé, celui qui se blottira contre moi, celui qui mettra tant de jolies couleurs dans ma vie, celui dont je tomberais amoureux encore et encore.

Car après le décollage, il y a l'atterrissage.

Et que tu seras à jamais le monde pour lequel mon cœur bat.

Je t'aime. Je t'aime si fort... A bientôt mon cœur, on se retrouvera. Je te le promets. Dans une autre vie...

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|   FIN   |

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