Épisode 3 - Longue nuit en perspective
— Putain ! C'était quoi ce bordel ? Un truc de malade ! T'es un sorcier à la Doctor Strange (1) c'est ça ? Et le mec là, c'était vraiment un démon !! Putain de bordel de merde !!
Au grand déplaisir de Lars, le petit Chat lui tomba dessus dès qu'il franchit la porte de la maison désormais à moitié en ruines. Un pistolet fumant dans chaque main, il s'agitait comme un enfant surexcité autour de Lars. Ce dernier dut se faire violence pour ne pas l'envoyer valser au loin pour la troisième fois de la soirée.
Un peu de calme, était-ce trop demandé ?!
— Hey ho, je te parle l'Aristo !
— Écarte-toi, boulet, répliqua sèchement l'interpellé en se précipitant vers ce qu'il pensait être la salle d'eau du rez-de-chaussée.
À défaut de pouvoir prendre un bain relaxant, il avait besoin de se décrasser et pas qu'un peu ! Il pourrait utiliser ses pouvoirs pour le faire, mais franchement, il n'y avait pas mieux que l'eau pour enlever la saleté. Et puis, Lars n'avait jamais été doué en magie domestique. Avec son talent dans le domaine, il risquerait plutôt de mettre le feu à ses vêtements que de les nettoyer.
— Non, mais ! Le boulet comme tu dis a sauvé ta sale gueule de prétentieux, alors va te faire foutre ! grogna l'autre en levant deux majeurs puérils dans sa direction.
Quel langage déplorable, songea Lars en le toisant avec dédain, une paume appuyée contre la porte entrouverte de la salle de bains. Le gamin lui rendit son regard avec défiance.
Leur échange visuel fut bien vite coupé par l'arrivée de Liv. Cette dernière surgit dans le couloir, tel un diable sortant de sa boîte. La jeune femme irradiait de colère.
— Bande d'enfoirés ! Vous alliez vraiment nous tuer !
Tout en hurlant, elle se jeta sur Lars et le petit Chat, clairement dans l'intention de les frapper. Mais Lars n'était franchement pas d'humeur, mais alors pas du tout.
C'est sans le moindre scrupule qu'il leva un doigt agacé en l'air et la ravissante maire se retrouva figée sur place. Le corps enveloppé dans une faible lumière violette, elle ne put que le fusiller du regard. Ses yeux bleus lançaient des éclairs meurtriers. En temps normal, Lars aurait trouvé cela très attirant, mais là, ça l'irritait plus qu'autre chose.
— Vous m'excuserez, mais j'ai eu mon lot de corps à corps violents pour ce soir.
Il se détourna ensuite dans de grands gestes pleins de dédain, puis s'engouffra dans la salle de bains, avant de claquer la porte bien fort derrière lui.
Enfin seul ! Lars laissa échapper un soupir de soulagement... qu'il ravala cependant bien vite lorsque ses yeux balayèrent la pièce dans laquelle il venait de s'enfermer.
Bon sang, l'endroit était mi-nus-cule ! Il eut immédiatement des sueurs froides à la vue des murs beaucoup trop proches à son goût. Mais comment ces gens arrivaient-ils à tenir et se laver dans une boîte à sardines pareille ?!
Pour lui, c'était tout simplement impensable, im-po-ssible ! Lars commençait déjà à suffoquer, comme à chaque fois qu'il avait le malheur de se retrouver dans un espace exigu. La respiration hachée, il tendit aussitôt les deux bras de part et d'autre de son corps. Ses paumes projetèrent un puissant halo qui se propagea dans la pièce telle une onde de choc. La magie repoussa les murs en arrière, ce qui eut pour effet d'agrandir l'espace.
Ce ne fut qu'une fois les cloisons à bonne distance les une des autres que Lars laissa enfin retomber ses bras le long de son corps en soufflant lentement. Il balaya à nouveau les lieux du regard et ses lèvres s'étirèrent en un petit rictus soulagé.
Ah voilà, c'était beaucoup mieux !
Le misérable placard à balai avait laissé place à une salle d'eau de taille respectable. Bon, l'endroit n'avait rien à voir avec son petit coin de paradis, chez lui, à Londres, mais au moins, il pouvait désormais s'y nettoyer sans faire une crise de panique.
Chose qu'il fit avec beaucoup d'application, face au miroir du lavabo. Lars claqua la langue de dégoût en frottant le sang et la bave sur ses joues et son cou. Il s'attarda particulièrement là où Déchet avait passé son immonde langue. Pendant un bref instant, il repensa au contact de l'organe visqueux sur sa peau et ne put retenir un violent frisson.
Ecoeurant !
Et pour la millionième fois depuis sa très longue existence, Lars maudit les Divinités d'Asgard. Cette clique de petits pédants sans qui il ne serait pas coincé dans cette pathétique douche avec du sang et de la salive de démon plein la face.
Ciel comme il les haïssait !
Divinités, tu parles ! Ils n'étaient même pas fichus de régler eux-mêmes leurs problèmes. C'était toujours à Lars de s'en occuper, de ramasser les pots cassés et surtout de balayer sous le tapis. Toujours. Sous prétexte qu'il était de leur sang... Si ça ne tenait qu'à lui, Lars aurait préféré ne rien avoir à faire avec cette bande de dégénérés immortels !
Qu'est-ce qu'il ne donnerait pas pour vivre enfin une vie tranquille ? Une existence paisible loin de ces foutus Dieux et des ridicules missions qu'ils l'obligeaient à se coltiner tout le temps ! Lars ne désespérait cependant pas de trouver un jour le moyen de se débarrasser une bonne fois pour toutes de ses liens avec Asgard et les divinités mineures. Un jour...
Des coups frappés à la porte le tirèrent brusquement de ses pensées. La voix courroucée du petit Chat aux pistolets le houspilla de l'autre côté du battant.
— Hey, l'Aristo ! Mais tu fous quoi, là-dedans ?! Ça fait vingt minutes que la dame est figée dans cette espèce de lumière violette, là ! Tu pourrais au moins la libérer, surtout si t'as l'intention de faire ta diva encore longtemps dans la salle de bains !
Lars leva les yeux au ciel. Il en était presque à prier le soi-disant Dieu chrétien là-haut pour l'aider à garder son calme face à cet espèce de boulet qui tambourinait contre la porte. Pourquoi ne l'envoyait-il pas se faire voir quelque part en Sibérie déjà ? Bonne question !
Il claqua des doigts d'un geste agacé pour défaire la magie qui retenait sa charmante hôte prisonnière. Puis, sans plus se soucier de l'autre idiot, il retourna à sa besogne avec encore plus d'application que tout à l'heure.
Oui, il devait se dépêcher. Oui, ils n'avaient plus beaucoup de temps. Oui, la maudite Poubelle préparait sûrement quelque chose de mortel pour toute la ville. Oui, oui, oui, mais non ! Il était hors de question de passer le reste de la nuit couvert de toute... toute cette crasse immonde ! Lars ne sortirait de cette pitoyable salle de bains qu'une fois présentable. Son magnifique costume était fichu, mais il pouvait s'y faire, du moment qu'il n'y avait plus de sang et de bave. Il avait juste besoin d'être sec et recoiffé.
Un cri d'effroi explosa soudain dans toute la maison.
Mais quoi encore ?!
— L'Aristo, sort de là tout de suite ! ordonna le petit Chat.
Son ton autoritaire ne plut pas du tout à Lars qui le trouvait beaucoup trop familier à son goût. Il ouvrit la porte à la volée, dans l'intention d'envoyer cet espèce d'enquiquineur en vacances forcées au fin fond de la Sibérie, mais fut coupé dans son élan par la gamine de la maire. La jeune fille se jeta sur lui pour attraper son bras et le secouer avec panique.
— Sander a disparu !! hurla-t-elle, ses yeux larmoyants écarquillés comme des soucoupes.
Qui ?
— Le gosse, répondit le petit Chat à sa question muette. Il a filé pour rejoindre son "père".
— Il a dit qu'il voulait aller aux toilettes, alors je l'ai laissé monter à l'étage, mais... mais il n'est pas redescendu et... Maman est dans tous ses états, je ne sais pas où elle est allée, pleurnicha la gamine, toujours accrochée au bras de Lars. Je... je ne sais plus quoi faire ! Aidez-nous, s'il vous plaît, monsieur ! Il faut retrouver Sander !
— Luna, écarte-toi de cet homme tout de suite !
Liv déboula à nouveau dans le couloir, l'air cette fois-ci menaçant. Lars ne put retenir un sursaut de surprise face à son apparence : des milliers d'étoiles semblaient scintiller sous sa peau désormais translucide. Ses cheveux étaient devenus d'un blanc aussi pur que la neige et ses yeux bleus brillaient dans la pénombre tels des saphirs lumineux.
Une expression déterminée sur son visage diaphane, la jeune femme pointait vers Lars et le petit Chat un doigt légèrement tremblant et d'où émanait une boule de lumière blanche.
— Maman ?! s'écria sa fille, complètement éberluée.
— Ouah, c'est quoi ce bordel, souffla le petit Chat, le regard fasciné.
— Une Alfe, murmura Lars pour lui-même.
Il aurait dû s'en douter. Odin et sa clique n'auraient jamais confié l'Anneau à n'importe qui. Les Alfes étaient le choix logique : ils avaient toujours été maîtres dans l'art de dissimuler des artefacts, mais surtout de se cacher des autres. La preuve : même lui, Lars Strøm, n'avait rien vu venir quant à la véritable nature de la ravissante maire. Or cela faisait des heures qu'il avait cette splendide créature sous le nez. Impressionnant.
Et terriblement vexant. Surtout que Déchet devait sûrement le savoir, sinon il n'aurait jamais pris l'apparence d'un proche de Liv pour parvenir à ses fins.
— Luna, viens par ici, s'il te plaît, répéta celle-ci sans lâcher Lars et le petit Chat du regard.
Elle continuait de les menacer de son doigt, la boule de lumière grossissait d'ailleurs à vue d'œil. Lars s'écarta de sa fille par prudence. La magie des Alfes avait la réputation d'être puissante. Bien qu'il était curieux de voir ça, Lars n'avait pas spécialement envie d'en faire les frais. Et ce même si la ravissante maire ne semblait pas aussi farouche qu'elle voulait leur faire croire. Ses yeux allaient de Lars au petit Chat avec angoisse et nervosité.
— Maman, qu'est ce que...
— S'il te plaît, ma chérie. On doit retrouver Sander.
— Non ! explosa la gamine, hystérique. Je ne comprends plus rien à ce qui se passe ! Mon petit copain a tenté de nous tuer, oncle Sören s'est transformé en démon, Sander a disparu et toi, Maman, tu... tu ressembles à une fée ! MAIS MERDE, QU'EST-CE QUI SE PASSE ?!
— Langage, jeune fille ! la rabroua sèchement sa mère, avant de se reprendre et s'adoucir. Luna, s'il te plaît. Je promets de tout t'expliquer, mais il faut qu'on aille sauver Sander.
La jeune fille resta un instant clouée sur place. Mais elle finit bien vite par abdiquer et se jeta dans les bras de sa mère pour sangloter bruyamment. Cette dernière lui caressa les cheveux en lui chuchotant des paroles rassurantes. Elle l'attrapa ensuite par l'épaule d'une main pour l'entraîner à sa suite. De l'autre, elle continuait de menacer Lars et le petit Chat.
— Vous n'allez pas vous balader dehors ainsi ? intervint Lars d'un ton posé, alors qu'elles s'éloignaient à reculons. Vous connaissez les Humains, ils ne vous feront pas de cadeau.
— Qu'est-ce que ça peut vous faire ! cracha son interlocutrice en relevant vivement la tête pour le toiser avec colère.
Le geste eut pour effet de rejeter ses cheveux en arrière et dévoiler ses oreilles pointues. Elle était encore plus captivante sous sa véritable forme.
— Ne faites pas comme si mon sort vous importait. Vous alliez tous nous tuer tout à l'heure !
Elle se tourna ensuite vers le petit Chat pour le toiser avec hargne.
— Et toi ! Que fais-tu encore dans ma maison ? Va-t'en ou je te tue !
— Hey, on se calme ! protesta l'interpellé en levant deux mains conciliantes en l'air.
Son geste de paix aurait pu être convaincant s'il ne tenait pas ses deux pistolets.
— Écoutez, on m'a demandé de liquider un démon, j'étais pas sûr lequel d'entre vous et votre beau-frère c'était. Mais maintenant que je le sais, vous n'avez plus rien à craindre de moi, je vous assure ! Pour prouver ma bonne foi, je vais ranger mes flingues, OK ?
Joignant les gestes à la parole, il fourra ses armes dans son blouson sous l'œil méfiant de la maîtresse des lieux. Celle-ci continua de le fixer avec suspicion pendant encore de longues minutes, puis consentit enfin à baisser son doigt et se détendre. Juste un peu. Les lèvres pincées, elle attira sa fille davantage contre elle dans un geste protecteur.
— Qui vous a demandé de... commença-t-elle et Lars leva les yeux au ciel.
— Mais qu'est-ce qu'on en a à faire, franchement ! la coupa-t-il, perdant patience. Le plus important est de récupérer l'Anneau avant que Déchet ne le fasse. Dites-moi où est cachée cette maudite relique. L'autre s'y trouve sûrement déjà avec tous les enfants, dont le vôtre.
— Comment tu le sais ? commenta le petit Chat en s'allumant une cigarette.
Lars ne répondit pas, absorbé malgré lui par le spectacle qu'offrait cet idiot en train de fumer. Nonchalamment adossé contre le mur, le gamin le dévisageait d'un air sceptique. Sans quitter Lars des yeux, il aspira une longue bouffée de nicotine, puis expira lentement des ronds de fumée dans l'air. Il était diablement sexy dans sa manière de coincer sa cigarette entre ses lèvres. Sans parler de sa petite moue insolente !
Lars en aurait bien fait son quatre heures, là tout de suite... mais il n'avait pas le temps.
Et puis quel enquiquineur, franchement ! Cet abominable gamin le fatiguait déjà alors qu'ils ne se connaissaient que depuis une heure. Déjà que "connaître" était un bien grand mot. Lars ne se souvenait même plus de son prénom : Theo ? Nemo ? Pierrot ?
— Et donc, comment tu sais pour le démon et les gosses ? insista le petit Chat pour sa plus grande irritation. Lars tapa du pied sur le sol avec impatience.
— C'est évident, pourtant ! Déchet va utiliser l'âme des gamins pour nourrir son aura et forcer l'entrée de la crypte. Et maintenant, pourrais-tu arrêter avec tes questions stupides ?
— Quoi ? Elles sont légitimes et non stupides, répliqua le gamin du tac au tac. T'en connais vachement un rayon sur les démons. T'es un expert genre Constantine (2) ou quoi ?
Constan-qui ? Lars haussa un sourcil agacé, il ne comprenait rien au charabia de cet idiot. C'était navrant comment une si jolie bouche pouvait débiter autant de bêtises à la minute. Affligeant. Les courants d'air devaient s'en donner à cœur joie entre les quelques pauvres neurones qu'abritait son cerveau de petit Chat. Au moins, le gamin était très beau. La nature s'était montrée généreuse avec lui sur ce point. Encore heureux !
Et puis zut ! De toute façon, rien ne l'obligeait à répondre à ses questions.
Lars se détourna en soufflant dédaigneusement. Bien décidé à ignorer cet enquiquineur de première, il reporta son attention sur Liv. Le petit Chat revint cependant à la charge avec aplomb. Mais qu'est-ce qu'il était énervant !
— Ok, c'est quoi le plan pour mettre la main sur ce démon ? Je propose qu'on lui tombe dessus : madame la maire nous dit où le trouver, ensuite toi l'Aristo, tu lui fais du charme pour le distraire. J'ai juste besoin de trois secondes pour viser et lui exploser la tête. Voilà, vite fait, bien fait.
— Attends un peu, comment ça "on" ? fit Lars en le toisant de haut en bas d'un œil mesquin. Sache mon mignon petit Chat que je n'ai pas besoin de toi pour tuer ce déchet des enfers. Dois-je te rappeler ton inutilité lors du combat qui vient de se dérouler ?
— Ah ouais ? Parce que si je me souviens bien, sans moi, ta belle gueule de Dorian Gray (3) aurait fini en pâture pour démon lubrique ! répliqua l'autre avec arrogance.
Tout en parlant, il se planta devant Lars, un horripilant petit sourire suffisant au coin des lèvres. Il était grand et ne se gênait pas du tout pour le dominer de toute sa taille.
C'était diablement sexy...
— En plus vu comment il te léchait la face, ce gros pervers ne voulait pas juste te torturer ou te tuer. Encore un peu et il te prenait directement sur place ! Ne me remercie pas surtout.
Lars pinça les lèvres face à sa tête insolente. Piqué dans son amour propre, il s'apprêta à cracher une réplique cinglante, mais le petit Chat le devança avec de nouveaux arguments stupides.
— Je vois pas où est le problème : on fait équipe pour sauver les gamins, tu récupères ta bague de fiançailles et moi la tête de ce foutu démon. Tout le monde est content !
Bague de fiançailles... En d'autres circonstances, Lars aurait ri de ce manque de respect flagrant envers un puissant artefact divin. Il devait admettre que cette boutade était vraiment excellente. Mais là, maintenant, il ne sentait pas d'humeur à plaisanter.
— Mon problème, espèce de petit chat idiot et arrogant, c'est que tu me fatigues ! Pour moi, tu n'es qu'un boulet. Et tu pourras argumenter autant que tu veux, je ne suis pas là pour faire du babysitting, d'accord ? Je n'ai pas toute la nuit et donc pas de temps à perdre.
La voix onctueusement méprisante, Lars fit courir deux doigts sur le torse de son interlocuteur d'un geste lent et provocateur. Rictus aux lèvres, il leva ensuite la tête pour croiser ses yeux verts, décidément jolis comme tout. Contre toute attente, le petit Chat lui rendit son sourire. D'un geste vif, il attrapa son poignet et le tira légèrement vers lui.
— T'as pas le temps, hein ? fit-il d'un ton moqueur et doucereux. C'est drôle parce que tu t'es pourtant pas gêné pour faire ta diva dans la salle de bains tout à l'heure.
Tout en parlant et toujours sans desserrer sa prise, le petit Chat se pencha lentement vers Lars. Celui-ci lui rendit son regard amusé, presque taquin. Leurs visages étaient désormais tout proches, son souffle roulait sur sa peau. Ce n'était pas désagréable du tout...
— STOOOP ! hurla soudain Liv, mettant fin à leur échange. Non mais JE RÊVE ! Des enfants ont disparu, un démon s'apprête à dévorer leurs âmes innocentes et vous trouvez encore le temps de flirter ! Vous formez vraiment une belle paire de connards !
Le petit Chat sursauta, tel un gamin rappelé à l'ordre par sa mère. Il relâcha aussitôt Lars et s'écarta d'un bond, la mine à la fois furieuse et horriblement gênée.
— N'importe quoi, on flirtait pas du tout ! s'écria-t-il avec véhémence.
Il se détourna ensuite en grommelant dans sa barbe. Lars se surprit à le trouver mignon à croquer avec ses joues et ses oreilles rougissantes. Cette pensée lui arracha un minuscule sourire qu'il ravala cependant bien vite en se raclant exagérément la gorge.
— Bref ! fit-il avec autorité. Liv, dites-moi où est l'Anneau, s'il vous plaît.
Celle-ci le fusilla des yeux en réponse. Elle ouvrit la bouche, sans doute pour l'envoyer paître par la grande porte, mais fut coupée dans son élan par des clameurs provenant de l'extérieur.
Mais-quoi-encore ?!
Énervé au plus haut point par tous ces imprévus rocambolesques, Lars ne put s'empêcher d'agiter les mains d'un geste irrité, presque enfantin. Ses iris s'illuminèrent et il constata avec beaucoup de déplaisir qu'une foule déchaînée s'agglutinait désormais dans la cour.
Merveilleux !
— Sors de là, démon !! hurla une voix haineuse par-dessus le brouhaha.
— Ce brave révérend, grinça Lars, les yeux plissés de dédain.
Il l'imaginait très bien menant fièrement sa petite troupe de moutons, avec sa stupide croix brandie bien haut vers le ciel. Heureusement que le ridicule ne tuait pas.
— Un envoyé du diable est dans cette maison ! Nous devons le détruire ! beugla encore l'imbécile en soutane dans une pitoyable tentative de galvaniser sa troupe.
— Je vais essayer de les calmer... commença Liv, mais Lars l'arrêta d'un geste autoritaire.
— Inutile. On s'en va, on perd du temps.
— Ma voiture est garée un peu plus loin, intervint le petit Chat.
— Hors de question de monter dans une voiture ! protesta aussitôt Lars avec virulence.
Jamais il ne mettrait ne serait qu'un pied dans ces horribles moyens de transport. Plutôt mourir ! Où même prendre le thé avec la plèbe dehors, tient. Lars n'était pas du tout inquiet sur ce point. Neutraliser une clique de paysans enragés n'était qu'un jeu d'enfants pour lui.
Mais il avait mieux à faire. Avec un petit soupir, il tendit un doigt en avant et le fit tourner dans le vide d'un geste négligeant. Un vortex de la même couleur que ses yeux se matérialisa devant lui, augmentant lentement de taille jusqu'à devenir immense.
Une spirale infernale diraient certains, la porte du salut pour Lars. Il avait vraiment hâte de laisser cette bande d'arriérés fanatiques derrière lui.
— Bon, allons-y, ordonna-t-il aux trois autres. Et dépêchez-vous, ce portail ne va pas rester ouvert longtemps. Il ne manquerait plus qu'un de ces moutons le traverse !
Puis sans plus se soucier d'eux, Lars traversa le portail d'un pas décidé.
Il avait un démon à éliminer.
(1) Doctor Strange : un puissant sorcier des comics Marvel
(2) John Constantine : un puissant sorcier et exorciste des comics DC
(3) Dorian Gray : le protagoniste du roman éponyme d'Oscar Wilde.
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