Chapitre 30 : Le début des temps sombres


On pouvait encore entendre les tonnerres d'applaudissement qui transperçaient le rideau de velours rouge. La respiration haletante, le cœur battant à tout rompre, les joues en feu, les danseuses retournèrent dans leurs loges, encore submergées par le flot d'émotions. Les petits rats de l'Opéra n'en étaient pas à leur première représentation, pourtant, la découverte du public et la pression de ne plus être à la hauteur de ses attentes persistaient chaque soir.

C'était pour cela que la rouquine eut énormément de mal à se débarrasser de ses chaussons de danse. Ses mains tremblaient, et sa vision était encore un peu trouble. Il était plus de 23 heures, et son ventre criait famine. Elle savait bien qu'elle aurait dû prendre un dîner plus consistant. Mais le trac lui avait encore une fois noué les entrailles.

« Tu as été splendide Sophie, lui murmura une de ses camarades à l'oreille.

— Merci, toi aussi d'ailleurs, répondit-elle en rougissant un peu sous ses cheveux. »

Elle acheva de mettre sa veste et de ranger les affaires qu'il y avait dans son casier, et se tourna une nouvelle fois vers ce qui restait de ses amies au vestiaire.

« Vous rentrez à pieds ? s'enquit-elle. »

Elle savait parfaitement que les plus jeunes avaient leurs parents qui les attendaient au parking, mais certaines fois, quelques jeunes filles devaient marcher un peu, et dans ces cas là, elle les accompagnait toujours, dans le doute. On ne pouvait pas prédire qui se tapissait dans l'ombre à cette heure tardive. Paris n'était pas toujours sûre.

« Non, mes parents sont dehors, dit une brune aux épaules carrées. Je dois y aller, je suis en retard, les pauvres sont sous la pluie... »

Elle embrassa ses coéquipières sur les joues et partit en coup de vent. Ce fut bientôt le cas des autres danseuses, et Sophie resta seule dans l'immense vestiaire. Tout était silencieux dans la salle, mais dehors, les machinistes et les autres travailleurs de l'Opéra veilleraient certainement jusqu'à une ou deux heures du matin. Elle pouvait presque distinguer leurs discussions sur le spectacle à travers les murs dépareillés.

Elle s'observa longuement dans le miroir, puis ferma les yeux. Elle aimait ces moments de paix, où elle pouvait respirer et apprécier le silence d'une courte méditation. Elle évacuait ainsi le stress d'une longue journée de représentation. C'était la raison pour laquelle, elle quittait l'Opéra après les autres petits rats. Elle rouvrit les yeux et se leva. Elle ferma la lumière en quittant le vestiaire, après avoir inspecté les recoins.

« Sophie ! l'interpella une voix alors qu'elle marchait dans le couloir.

C'était la responsable de l'accueil qui tenait un téléphone à la main. Madame Suzette était une vieille femme qui avait presque passé l'entièreté de sa vie, dans sa cage à recevoir les appels et à ranger, classer, distribuer et envoyer les milliers de documents administratifs qui transitaient dans son service. C'était aussi par elle que passaient les coups de fil personnels, et on la voyait souvent courir pour tendre le téléphone à cadran.

« Il y a quelqu'un pour toi, je crois que c'est ton grand-père. »

Sophie courut presque pour être à sa hauteur. Eugène n'appelait jamais après vingt-heures. Et d'une certaine manière elle savait déjà que ce qu'il allait annoncer ne lui plairait guère.

D'une main peu assurée, elle saisit le combiné et le porta à son oreille.

« Allô ? »

Une voix au fort accent irlandais lui répondit.

« Ma chérie, je n'ai pas beaucoup de temps. Je t'expliquerai tout plus tard, même si je pense, qu'intelligente comme tu es, tu sais déjà au fond de toi ce qui est en train de se dérouler dans l'autre-monde.

— Qu'est-ce...

— Ils te surveillent Sophie ! »

La jeune femme battit des paupière, la respiration coupée. Derrière la vitre, madame Suzette lui faisait des grands-gestes, comme pour s'assurer qu'elle allait bien. Elle devait être très pâle pour ainsi attirer son attention. Elle lui sourit et essaya du mieux possible de reprendre contenance.

« Qui ?

— Pourquoi poser la question, quand la réponse est une évidence, grogna-t-il. »

Sophie porta une main gantée à son visage. Bien sûr c'était évident. Ce n'était pas la première fois. Déjà en Russie, ils avaient été tenaces.

« Comment le sais-tu ?

— Je ne peux rien te dire. Sache juste qu'il y a une dizaine d'hommes qui t'attendent pour te cueillir à la sortie de l'Opéra. Ils connaissent ton trajet habituel... »

Ses entrailles se nouèrent de nouveau, comme avant la représentation. Puis en releva la tête, elle vit du coin de l'œil un mouvement furtif. Comme une ombre qui se dissimulait derrière un poteau. Elle haleta. Jamais personne n'avait essayé de la tuer jusque dans l'enceinte d'un lieu public comme un théâtre ou un Opéra. Elle reprit fermement le combiné dans ses mains pour qu'il ne tremblote pas quand elle murmurait ces mots.

« Ils sont déjà là papy... »


Elle perçut sa gêne, rien qu'au son perturbé de sa respiration. Il mit un instant à répondre, comme s'il pesait chaque mot.

« Tu sais quoi faire ma chérie. Souviens-toi de ce que tu as appris. »

Elle ne lui dit pas aurevoir. Madame Suzette reprit le téléphone, et Sophie tourna les talons, comme si de rien n'était. Elle ne devait pas pleurer. Elle ne devait pas avoir peur. Elle était plus forte que ça. Elle était plus forte qu'eux !

Le couloir était long jusqu'à la sortie de secours. Celle qu'elle n'empruntait jamais d'ordinaire. Ses talons claquaient sur le sol, lentement. Une fois, la porte ouverte, l'air frais de la nuit lui fouetta le visage. Elle remonta le col de sa veste, ajusta son sac à main, et lissa sa jupe avec ses gants.

En avançant, seule, dans l'obscurité, elle perçut très nettement d'autres pas se joindre aux siens, mais elle ne daigna pas se retourner. Se retourner signifiait mourir.

A l'angle d'un croisement, deux voitures attendaient, les phares allumés. Il était inutile de regarder à travers les vitres teintées pour deviner que plusieurs paires d'yeux détaillaient avec intérêt sa silhouette fine. En se rappelant ses enseignements, Sophie louchait souvent sur une vitrine éclairée par les lampadaire pour localiser les hommes. Un barbu qui faisait au moins deux mètres la suivait, suivi de près par un maigrichon aux airs de croque-mort. Leurs mains étaient crispées sur les replis de leurs vestes. « Leurs baguettes magiques, pensa Sophie. » Par précaution, elle glissa sa main droite dans son sac pour toucher le revolver. « S'ils veulent jouer à ce petit jeu...je les attends. »

Elle s'enfonça dans une rue étroite, avant de se dire que c'était une mauvaise idée. En effet, à l'autre bout, trois gaillards musclés s'apprêtaient à la coincer. Elle stoppa nette sa course, et inspira une grande bouffée d'air nocturne. Elle posa son sac par terre, il ne ferait que l'encombrer, mais elle garda le revolver dans une main ferme, qui n'hésitait plus.

Elle ne devrait plus hésiter. C'était elle. Ou eux.

Elle ferma les yeux.

Quelques larmes perlèrent aux coins de ses yeux.

Une main lourde et calleuse s'arrêta sur son épaule. Et sans réfléchir. Juste par instinct. Elle lui attrapa le bras et le lui tordit. L'homme poussa un hurlement de douleur. Elle le fit ensuite basculer sur son dos pour qu'il retombe lourdement sur les dalles du trottoir. Elle ne réfléchissait plus. Elle revoyait dans sa tête les cours d'arts martiaux.

Ils se jetèrent à plusieurs sur la danseuse, qui virevoltait et assénait coups sur coups. Elle était petite, frêle, fragile, mais rapide, et agile. Ils étaient grands, robustes, mais lents et agressifs. Elle frappait griffait, mordait, giflait, cognait, elle connaissait ces hommes, si elle ne se défendait pas, elle ne verrait plus sa famille, elle ne verrait plus le jour, elle mourrait. Peut-être pensaient-ils qu'elle ne valait pas la peine de recourir à la magie, puisqu'un seul daigna pointer sa baguette sur elle.

Mais quand il le fit, lui le barbu, le dernier debout, la lèvre en sang, elle se figea. Elle ne pouvait pas répondre à ça, n'est-ce pas ? Elle n'était pas de l'autre-monde. Alors elle fit ce qu'une moldue ferait, elle pointa son revolver. Il comprenait. Il savait ce qu'était cette arme. Certains étaient surpris et s'en allaient en courant quand elle tirait au hasard. Mais lui, il resta là, devant elle, à quelques mètres, les bras tendus.

« Laissez-moi en paix ! Rugit-elle. Je n'ai rien à voir avec vous. »

Pourquoi avait-elle ouvert la bouche ? Surtout pour un tel mensonge...Elle avait tout avoir avec cette histoire.

« Il veut que tu meurs cracmol. »

Ce n'était pas une découverte.

La pluie s'abattit sur eux. Les corps blessés des hommes remuèrent. Et les gouttes claquaient ses joues comme un compte à rebours. Il hésitait. Mais pas elle. Si elle se retournait, il lui lancerait un Avada Kedavra. Alors elle tira, et la balle heurta son tibias, ce qui lui donna le temps nécessaire pour prendre ses jambes à son cou et ne jamais revenir.

Elle eut juste le temps d'apercevoir l'ombre d'un aigle sur son poignet tâché de sang.

**

Evan traîna volontairement des pieds quand James les fit déambuler dans la multitudes de pièces et de couloirs de la maison des Potter. Il détestait déjà leur séjour ici. Primo, Lily ne lui accordait pas un regard, secundo, Potter lui tapait d'ors et déjà sur les nerfs. De plus, pour couronner le tout, il n'avait plus aucun moment seul avec ses deux amis. Non, ils étaient toujours accompagnés par un maraudeur.

Emily, quant à elle, était plus légère qu'à l'ordinaire. Et il savait qu'être loin de Connor pendant une semaine lui faisait du bien, surtout que depuis qu'elle savait que Fléamont Potter était auror de formation, elle se sentait en sécurité. Ce qui n'était pas peu dire au vu du démarrage des vacances...un peu tumultueux.

Seule Alycia n'ouvrait plus la bouche, elle se contentait...d'observer. Les informations données par Regulus lui trottaient dans la tête et elle détaillait toujours les Potter du coin de l'oeil. Elle était méfiante, et ne savait plus vraiment où était sa place. Il y avait Regulus qui était un mangemort, mais qui ne cessait de lui donner des indices sur un plateau d'argent...Les Vialesca qui l'accueillait chez eux, juste pour l'achever moralement...Et au milieu de tout cela, les Potter débarquaient, comme des sauveurs. Et se demandait sans cesse si elle devait croire en leurs beaux sourires.

« Et voilà la piscine, leur montra James. »

Alycia ne fit même plus semblant d'être émerveillée, et laissa se plaisir à Alice qui poussa un cri d'excitation, presque trop démonstratif. Franck grimaça, et plongea sa main curieuse dans l'eau fraîche.

« Bon, et bien...bienvenu, termina le myope. Je suis sûr que l'on va passer d'excellentes vacances tout ensemble ! »

Emily réprima un rire et se tourna, complice, vers son amie. Elle se pencha et lui murmura à l'oreille.

« On dirait qu'il ne se rappelle pas la gifle que lui a donné Lily ce matin. »

En effet, James avait une façon particulière de réveiller les gens, à une heure très matinale. Et ces méthodes n'avaient pas plu à la rouquine, qui avait passé une demi-heure à le poursuivre en le tirant par les cheveux, et en lui hurlant insultes sur insultes. La vie dans la salle commune des Gryffondor devait être palpitante...

« Et si, on commençait par...heu un jeu de cartes ? Pour dire de faire connaissance..., proposa James. »

Alice fut de nouveau celle qui soupira le plus fort. Emily et Alycia roulèrent des yeux pendant qu'Evan regardait ailleurs. Sirius et Remus étaient déjà morts de rire derrière une chaise longue, devant le pathétisme de James.

« Sérieusement Potter ? Tu es un très mauvais animateur de colo..., grogna Alice. Nous faire visiter toute ta maison d'accord, ça m'a permis de trouver les toilettes...Mais ne pousse pas trop loin s'il te plaît. »

Alycia jeta un coup d'oeil aux jumeaux. Tous les trois reculèrent et laissèrent seuls les Gryffondors. Alors qu'ils s'éloignaient de la véranda, ils perçurent les cris caractéristiques de Lily contre James, rapidement suivis des rires d'Alice et des paroles calmes de Franck. Ils pouvaient déjà sentir la semaine mouvementée qui s'annonçait.

« Comment se fait-il qu'on soit tous réunis ici ? s'enquit Alycia lorsqu'ils furent de nouveau seuls. Je ne comprends plus rien... »

Emily secoua nerveusement la tête.

« Tu as dit que Fléamont Potter avait la marque dont nous a parlé Black ? Se rappela Evan.

— Oui, je l'ai vu quand on est entré dans la voiture...

— On pourrait commencer nos recherches sur ce détails, proposa Emily. Même si pour le moment ça nous aide pas vraiment. Une personne qui porte la marque du cercle peut à la fois vouloir te sauver...ou vouloir te tuer. »

Alycia voulut rire. Mais elle se retint, ces dernières heures elle réagissait comme si quelqu'un d'autre habitait son corps ; le stress commençait à s'accumulait et elle craignait de craquer d'un instant à l'autre. Emily parut percevoir son trouble puisqu'elle posa une main affectueuse sur la sienne, qui fut bientôt rejointe par celle, un peu plus large, d'Evan.

« Tu n'as pas à t'en faire, la rassura Evan. Même si une sorte de secte d'intellectuels bipolaires veut ta mort, on te suit, les pieds en plein de dedans. J'ai presque l'air d'être normal, à côté de ces fous à lier ! »

Il arrivait toujours à les faire sourire, même quand rien n'allait dans le bon sens. Les deux jeunes filles se surprirent même à rire jusqu'à s'en tenir le ventre. Il les rejoignit. Et pendant quelques minutes, tout allait mieux. Tout allait bien. Tout irait bien.

**

Alycia avait définitivement perdu l'habitude des grands repas de famille. Il y avait bien les déjeuners à la Grande Salle de Poudlard, même ils étaient entre jeunes, et il n'y avait pas de figure maternelle pour leur dire de se tenir droit ou de ne surtout pas couper la salade avec leur couteau. Alors, le repas en compagnie des lions, des jumeaux et de monsieur et madame Potter lui sembla presque irréel. Chacun occupait une place précise.

Fléamont Potter lisait son journal en bout de table, un cigare dans la bouche. Elle l'observait depuis le début de la matinée, et il lui apparaissait toujours comme un parfait mystère. Il était très grand, et il ne ressemblait en rien à James. Il y avait parfois une main qui volait à son crâne dégarni, comme s'il se rendait juste compte qu'il ne pouvait plus rien ébouriffer. Mais le pire dans toute cette histoire, n'était pas ses vêtements extravagants d'ancien joueur de Quiddich, ni ses mimiques de clown chaque fois que James regardait Lily, c'était qu'il n'était absolument pas affolé. En fait, il était de marbre. Et cela contrastait un peu avec le personnage qui était venu les cueillir au manoir la veille. Elle était pourtant certaine de l'avoir vu inquiet. Était-ce quelqu'un chose d'inhabituel chez lui ? Que de montrer ses sentiments ?

Cela changeait bien d'Euphémia Potter qui courrait dans toute la maison avec un énorme sourire collé sur son visage rond. Elle était adorable, et Alycia surprit deux ou trois fois, Evan rougir comme un enfant quand elle insista pour qu'il reprenne de la purée. Les jumeaux n'étaient plus habitués à l'affection des adultes, il était donc normal d'apercevoir une lueur de panique dans les prunelles d'Emily lorsque Madame Potter lui posa plein de question sur ses notes scolaires et qu'elle la couvrit par la suite de compliments.

Le couple Potter n'était pas avare de discussion. Chacun enchaînait avec de nouvelles questions. Ainsi Alycia apprit que Remus détestait le balais car il était tombé dans un marais en volant quand il avait trois ans, qu'Alice ne jurait que par le shopping et qu'elle était la meilleure en négociation, que Lily adorait le jardinage, que Franck dansait parfaitement bien le tango. Quand vint son tour, elle se rembrunit et se cacha modestement derrière Evan.

« Et vous Alycia ? s'enquit Euphémia en lui tendant un peu de gâteau au chocolat. Qu'est-ce que vous aimez dans la vie ? Vous avez une passion ?

— Heu...J'aime beaucoup jouer du violon. Et je suis dans l'équipe de Quiddich de Serdaigle également. »

Elle vit très furtivement James lever les yeux au ciel.

« Oh ! Vous pourrez peut-être aller un peu voler dans le parc. James a plusieurs balais, je suis sûre qu'il voudra bien les prêter...Je

— Ce n'est pas une bonne idée, contrecarra Fléamont Potter d'une voix ferme qui jeta un froid dans la salle à manger. »

Même Alice reposa sa fourchette, ses yeux allèrent du patriarche à la silhouette menue d'Alycia. Et elle fut rapidement imitée par l'ensemble des lions. Seuls les jumeaux observaient le plafond comme s'il était soudainement très impressionnant.

« Pourquoi ? Demanda Alycia de but en blanc. »

Elle sentait bien que sa question était peu respectueuse, mais elle n'était pas connue pour sa patience, ni pour son manque de curiosité. Si Fléamont Potter était un membre du cercle, alors il allait devoir lui expliquer quelques petites choses. Elle était pratiquement majeure ! A ses côtés Emily secouait négativement la tête, lui demandant une énième fois de se montrer raisonnable.

« Personne ne sort de cette maison sans mon autorisation. »

Sa voix était si froide que James releva la tête et détailla son père comme il avait pu le faire la veille : comme s'il se tenait devant un étranger, comme s'il ne le reconnaissait plus. Il devait être bouleversé, puisque ce fut lui qui poursuivit la conversation.

« Tu veux dire qu'on ne peut pas aller dans le jardin ?, s'insurgea James.

— Exactement. »

Lily avala de travers sa purée, et Alice dut lui donner quelques tapes dans le dos pendant que Sirius se mordait les doigts.

« Maintenant, allez-vous en. Faites vos devoirs ou je-ne-sais-quoi de plus intéressant mais ne sortez pas de cette foutue maison ! »

C'était un ordre comme on en entendait rarement. Cela sonnait presque comme une menace. Avait-il peur ? Cette question hantait l'esprit de la blonde : si Fléamont Potter avait peur, Dumbledore aussi avait-il peur ? Sa mère, au fond de sa cellule, avait-elle peur ? Si les adultes étaient plus effrayés qu'eux, qu'elle était donc la gravité exacte de la situation. Avaient-ils atteint un point de non retour ?

Elle était plongée dans ses tourments, si bien qu'elle ne perçut pas la légère pression sur son bras. Quelqu'un la tira, et elle se retrouva quelques secondes plus tard, assise sur un sofa, dans un salon confortable au deuxième étage. Tout le monde était là, et des milliers de questions brûlaient sa gorge. Quand elle voulut ouvrir la bouche, aucun son n'en sortit, car il y avait trop de choses à dire, tout simplement.

Ce fut, celle que l'on attendait le moins qui brisa le silence : Lily.

« J'aimerais que l'on me réexplique ce qu'il s'est passé hier soir, fit-elle en s'adressant tout particulièrement aux maraudeurs.

— A partir de quel moment Evans ? demanda Sirius, avec lassitude.

— Celui où vous êtes tous les quatre venus nous alpaguer pour former un groupe de je-ne-sais-plus-trop-quoi..., poursuivit Alice qui semblait avoir le cerveau connecté à celui de son amie. A partir de là tout à merder.

— Si tu nous fait grâce de tes vulgarités Fortescue, grogna Sirius.

— Et toi, de tes allures d'aristocrate raté, renchérie-t-elle avant que Franck ne s'interpose.

— J'aimerais entendre ce qu'ils ont à dire Alice... »

James observa tour à tour ses amis, et visiblement, mit quelques temps à trouver les mots corrects. Alycia se doutait que c'était à cause d'eux. Il leur manquait une pièce du puzzle. Et cela perturbait fortement Evan qui jouait nerveusement avec les fils qui dépassaient du canapé.

« En fait...nous voulions. Enfin nous nous sommes dit, en entendant le discours des Vialesca...que quelque chose se tramait. Quelque chose de pas très bon. Et je pense, que l'attitude de mon père a un peu confirmé les choses...C'est un autre niveau de la guerre si on peut dire ça comme ça. Maintenant, ce n'est plus seulement les moldus, c'est nous tous. Et...je ne sais pas pourquoi ou si c'est l'arrestation de Katleen Parker qui est la cause de toute cette étrange atmosphère, où si c'est beaucoup plus gros qu'on ne le pense... En fait, je m'en fous un peu. »

Il se passa une main hésitante dans ses cheveux d'ors et déjà décoiffés. Alycia n'avait jamais vu James nerveux à ce point là. Mais elle était curieuse de savoir où est-ce-que son discours allait les mener.

« Tout ce que je sais. C'est qu'Alycia est en danger. Et que si elle l'est, alors nous le serons aussi bientôt. »

Elle releva brusquement la tête. C'était pour elle qu'ils se retrouvaient tous ici ? Les jumeaux ne paraissaient pas très sûrs de ce qu'ils venaient d'entendre et Emily vint jusqu'à poser un bras sur ses épaules.

« Je sais que c'est étrange, assura-t-il avant qu'Evan ne pouffe bêtement.

— Oh oui ça l'est ! Combien de fois vous nous avez montré que vous ne l'aimiez pas ? s'exclama Evan qui n'y croyait pas un seul mot.

— De bonnes centaines de fois, intervint Remus. Mais...

— Ils sortent quasiment ensemble, coupa net Sirius. Donc en l'occurrence, si elle tombe, on tombe tous les quatre avec.

— Merci l'égoïsme, railla Evan de mauvais poil.

— Quoi ? Attendez deux secondes. ATTENDEZ ! »

Alice venait de se lever brusquement en faisant presque tomber Franck du canapé. Elle tendait ses bras, et ses yeux ressemblaient à des soucoupes. Elle haletait à la recherche d'air, comme un poisson hors de l'eau.

« VOUS SORTEZ ENSEMBLE ?! »

Elle pointait maintenant des doigts accusateurs vers les deux concernés, qui rougirent de concert. Alycia se cacha presque derrière ses épais cheveux, mais ce n'eut pour effet, que de faire crier un peu plus cette commère nommée Alice.

« Ce n'est pas le moment Fortescue..., soupira James.

— SI ! J'ai clairement loupé un chapitre.

— Ce n'est pas important Alice vraiment. Ils font ce qu'ils veulent. Et puis ce n'est pas comme si tu avais déjà parié la moitié de tes économies sur eux, enchaîna Lily. Je suis contente pour vous vraiment. Mais j'aimerais beaucoup entendre la suite de la seule chose intelligente que Potter dira de toute sa vie. »

James suffoqua, visiblement outré par la remarque. Mais le reste du groupe ne put faire autrement que de rire ouvertement de cette boutade, qui sortait du coeur.

« Hum...heu...

— Tu veux que je prenne le relais James ? l'interrogea Remus qui percevait parfaitement son trouble. »

James secoua furieusement la tête, comme cette proposition équivalait à une insulte à sa personne.

« Donc voilà...Je voudrais. Enfin...on s'entend pas tous très bien. Heu, nous avons mal commencé l'année avec toi Alycia. Nous t'avons jugé un peu trop vite...Tout comme les jumeaux. Même si les choses vont un peu mieux entre nous, ce n'est pas encore l'idéal. Ne parlons même pas de nous deux Lily...C'est une vraie catastrophe. »

La rouquine ne prit même pas la peine de rouler des yeux. Elle se contenta de hocher pensivement le menton pour l'inciter à continuer.

« Alice...On se connaît depuis l'enfance et pourtant on se dispute toujours à intervalles réguliers. Et Franck, ça allait au début, et puis tu es sorti avec Alice, et donc...Tu te disputais aussi avec nous. Bref. Pourquoi vous ? Pourquoi nous ? Je vous l'ai dit, c'était dans le but de procurer à Parker un soutien. Car à Poudlard ça va être l'enfer avec l'arrestation de ta mère...

— Je n'ai pas besoin de vous, j'ai les jumeaux, affirma-t-elle. »

Il y eut un silence, avant qu'Emily ne tousse dans son mouchoir.

« Tu sais un peu de coup de main ne serait pas de refus, s'interposa la jeune fille une fois qu'elle se soit mouchée. Je crois que vu la gravité des choses, plus on est nombreux...mieux c'est. Je suis d'accord avec James. Et toi Evan ? »

Il avait du mal à l'admettre, car au fond, il n'arriverait jamais à être familier avec le myope. Mais il pouvait mettre son ego de côté. Juste...deux secondes ; le temps de murmurer.

« Oui...j'avoue que ça ne serait pas mal. »

James cligna des yeux, et les remercia avec la moitié d'un sourire. A ses côtés, Sirius s'était redressé de sa posture peu digne la tête à moitié vers le bas, un peu sonné par la réponse peu attendue des jumeaux. Lily qui cherchait toujours à saisir la chose, insista de nouveau pour que James achève son propos.

« Donc si je résume. Je voudrais qu'on se serre les coudes, le plus souvent possible. Je sais que c'est un peu forcer une amitié. Sachant qu'on a tous nos différents. Mais clairement, je sais pas en qui d'autre j'ai confiance. Au moins dans cette pièce, je sais qu'il n'y a pas de futur mangemort.

— Tu en es vraiment sûr ? Le coupa Alice. Je peux avoir des arguments ?

— Tu veux vraiment qu'on te jette des fleurs Fortescue ? Râla Sirius.

— Mais je t'en pris ! »

James s'assit lourdement sur le sol, comme s'il commençait déjà à regretter ses plans. En parcourant la pièce du regard, Alycia se demanda si c'était vraiment une bonne idée. Elle n'avait jamais eu autant d'amis à la fois, de plus, elle doutait qu'un jour ils soient tous aussi proches. Ce que voulait James, qu'ils s'entendent tous, c'était un peu une utopie : beau mais irréalisable.

« Alycia, tu es chiante, mais tu n'es pas une mauvaise personne, énuméra James qui ne lâchait pourtant pas l'affaire. Emily, tu es courageuse, et tu n'as pas peur d'aller donner des coups de pieds aux mangemorts, c'était du jamais vu... »

Alycia ouvrit la bouche pour savoir de quoi il parlait, mais Evan la coupa d'un regard qui signifiait bien plus, que simplement tais-toi. Il y avait un secret entre les jumeaux et les maraudeurs, qui expliquait leur soudain rapprochement, et cela l'énervait un peu plus qu'elle ne le laissait paraître. S'était-il passé des choses sans qu'elle n'en soit informée ?

« Evan...tu es...insupportable.

— Merci, je le prends très bien, rétorqua le blond.

— Et Alice et Franck, je connais vos familles ce sont des gens biens, je ne pense pas que...

— Sirius n'est pas un mangemort, mais son frère si, ça ne veut rien dire du tout la famille, assura Alice. »

Sirius se tendit et faillit renverser une carafe qui traînait non loin de lui. Il tressaillit et lança un coup d'œil furibond à la brunette.

« Je m'excuse James, je te taquine. Je te montre à quel point tu devrais savoir dans quoi tu t'embarques...La vie en tant qu'ami potentiel d'une Fortescue n'est pas de tout repos. Et Sirius, désolée aussi pour ton frère. Il n'est pas...

— C'est vraiment un mangemort, avoua le ténébreux avec une mine sombre qui ne lui appartenait pas d'ordinaire. »

Alice donna l'impression d'avoir reçu un coup de massue. Elle se tourna vers les maraudeurs, comme si elle avait désespéramment besoin d'une confirmation. Son visage perdit toute couleur. Alycia voulait se lever pour la prendre dans ses bras, mais Lily s'en chargea. C'était toujours un peu dur de faire face à la réalité des choses. Elle avait vomis en plein repas en apprenant la nouvelle. Et elle n'avait pas été aussi innocente sur la guerre qu'Alice pouvait l'être. Combien d'illusions venaient de se briser ?

« Je...je suis désolée... »

Sirius balaya ses excuses d'un geste de la main, comme s'il s'en foutait, mais on pouvait lire dans ses prunelles, que c'était tout le contraire. Ce qu'avait dit Alice venait de l'atteindre en plein cœur.

« C'est peut-être pour ça que James a raison, couina Peter.

— Je vote oui pour former un pseudo-groupe, annonça d'une voix forte Remus. Qui me suis ? »

Alycia vit Emily poser presque immédiatement sa main sur la sienne. Ce geste étonna la plupart du groupe, si bien qu'elle se retourna et se justifia brièvement :

« Je sais que c'est pas dans mes habitudes mais...j'ai envie d'y croire...à ce pseudo-groupe. »

Elle regardait surtout son frère, comme si elle cherchait une quelconque approbation. Et Alycia ne pouvait s'empêcher de noter ce revirement de situation. Emily avait toujours compté que sur elle-même. Même dans le duo des jumeaux, elle était la responsable. Ils étaient solitaires, presque sauvages. On ne pouvait pas les apprivoiser. Et c'était presque un miracle qu'elle soit dans leur groupe. Alors pourquoi accepter ce brusque changement ? Savait-elle quelque chose qu'ils ignoraient tous ?

Puis son regard dériva sur Sirius. Et une pensée, ridicule, insensée, vint se glisser dans ses méninges. Emily Jenkins venait-elle d'être attendrie par la rapide démonstration des émotions du beau Black ? Non impossible...

« Tu sais que je te suis, où que tu ailles...sauf aux toilettes évidemment..., marmonna Evan comme s'il était contraint d'accepter. Par contre va falloir apprendre à rire à mon humour ! »

James parut réjouit de son succès, puisque Alice, Franck et même Lily décidèrent d'approuver également, même si la rouquine refusait pour le moment de le regarder. Finalement, Alycia se retrouva à être la dernière à choisir.

« C'est pour toi que l'on fait ça, et tu es la plus hésitante, remarqua Remus. »

Comment lui expliquer qu'elle avait toujours survécu seule. Que ça s'était mal fini pour la seule personne qui avait voulu aller la protéger jusqu'au bout ? Comment dire devant tout le monde que s'être ainsi attaché aux jumeaux était dangereux pour eux ? Pourtant, elle aussi avait envie de se soutien. De ce sentiment qu'elle ne serait jamais seule...

Elle ferma les yeux et sa main se posa délicatement sur les leurs.

Au fond d'elle, elle pouvait sentir une bulle d'espoir naître. Et sa bague devint si froide qu'elle s'en mordit les joues.

**

La nuit ne tarda pas à tomber, et pendant que les jeunes étudiants riaient à gorges déployées dans une rue illuminée de Londres, en savourant une nouvelle alliance rassurante, un autre groupe s'apprêtait à se rencontrer dans une toute autre ambiance.

Dans une ruelle sombre, de la banlieue industrielle de Londres, deux hommes marchaient côtes à côtes, d'un pas hâtifs, comme s'ils craignaient d'être suivis. Le plus grand tenait son chapeau melon dans une main pour éviter qu'il ne s'envole, et le plus petit fumait distraitement un cigare.

« Ton fils est-il au courant ? demanda le plus petit au second.

— Non. Je ne tiens pas à ce qu'il se mêle à toute cette affaire.

— Mes fils savent. Ma fille également.

— Emmeline ? s'étrangla le plus grand. Mais enfin Willy !

— Tu devrais en parler à James. De toute manière, tu ne pourras pas repousser ce moment indéfiniment. »

Fléamont voulut contredire son meilleur ami, mais il savait qu'il avait raison. Dans quelques mois, James, malin comme il l'était, comprendrait. Et il se doutait bien que cela changerait son fils pour toujours.

Ils ne parla plus du trajet. Peut-être par crainte que l'image de son fils, perdant son innocence, ne ressurgisse dans son esprit. Il savait pertinemment les risques qu'il faisait encourir à sa famille, il ne les rendrait pas malheureux par dessus le marché.

« On arrive, l'avertit William Vance. »

C'était une vieille usine désaffectée. Un endroit insoupçonnable était la clef d'un rendez-vous secret réussit. En effet, qui aurait pu se douter que la moitié des membres du cercle se réuniraient en cette soirée si belle, dans un lieu si...ordinaire.

En pénétrant dans l'étrange bâtisse, les deux hommes remarquèrent qu'ils n'étaient pas les premiers. Un groupe, silencieux, était déjà présent. Et en les comptant du regard, Fléamont réalisa qu'ils étaient les derniers arrivants, tous les membres étaient là.

« Nous vous attendions, clama une voix claire et pure. »

Ils se rapprochèrent, et le cercle se reforma aussitôt. Combien étaient-ils ? Probablement une quarantaine, voire un peu plus. La plupart avait passé la trentaine. Mais la lueur d'intelligence qui trônait autrefois dans les regards était toujours intacte. Voire plus forte qu'auparavant.

« Abraxas vient d'envenimer les choses. En emprisonnant Katleen, c'est nous tous qu'il menace, poursuivit la femme que Fléamont reconnut immédiatement.

— Il veut aller plus loin que cela Augusta. Il veut sa fille désormais. Et il sait qu'il ne peut pas l'atteindre, répondit-il.

— Est-elle en sécurité ? s'enquit un homme sur sa gauche.

— Elle est avec moi, avoua Fléamont. »

Un soupire de soulagement parcourut les rangs.

« Ce n'est pas parce qu'elle inatteignable, qu'il ne peut pas lui faire de mal, rétorqua Augusta Londubat. Il a envoyé les hommes du cercle, ceux qui le soutiennent encore, tuer ses proches.

― Alors il faut que l'on réplique de manière plus vive, s'insurgea William Vance. »

Les membres lui lancèrent un coup d'oeil suspicieux. Mais il n'était pas un homme qui baissait les bras, il avait une idée, et il irait jusqu'au bout.

« Nous avons perdu le contrôle du Ministère, il est tend de le reprendre ! »

L'idée était un peu suicidaire, pourtant, elle fut votée à presque à l'unanimité ce soir là, seule Augusta émit une réserve. Au fond, il savait tous, qu'elle était la plus sensible quand il s'agissait de la vie de son fils. Alors, ils firent comme si de rien n'était. Et ils repartirent chez eux, sans se douter que cette décision les mènerait bien trop bas...

Car Abraxas ne laisserait pas facilement son pouvoir lui glisser entre les doigts. Il était trop près du but pour ça. 


Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Je viens d'introduire un nouveau personnage Sophie : elle sera hyper importante pour la suite, tout comme Emmeline Vance. Je leur prépare des choses...particulières. J'espère que vous apprécierez.

Le cercle, une moitié gentille...une autre complètement machiavélique...Mais que veulent-ils donc ? Mouahahaha je vais vous laisser imaginer des scénarios.

Je n'ai pas encore trouvé d'autre titre à l'histoire, alors si vous avez des suggestions n'hésitez pas. 

La suite devrait arriver dans la semaine. 

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