8.2🌖Ravaler son vomi

Je lui tends la main pour qu'il la serre et scelle notre collaboration, mais il se contente de la regarder de façon très étrange. Blake remet ses lunettes et me fout un vent, que dis-je, une tornade, en m'ignorant.

— Tu ne m'as pas dit si Mia s'était réveillée.

— Ce n'est pas... Bref. J'ai la date d'installation de l'application et si elle fonctionne par parrainage, alors quelqu'un a dû lui en parler à ce moment-là. J'ai consulté son agenda de ses dernières semaines et ça date d'un soir où elle est allée à une soirée mensuelle dans la boite d'un de ses amis.

— Vous ne sortiez pas ensemble ?

— Couple libre.

J'hésite à lui demander s'il est certain de la définition du « couple libre ».

Je n'imagine pas un Blake amoureux accepter que celle qu'il aime passe ses soirées à coucher avec des inconnus. Ni qu'il soit du genre à s'inscrire sur BitesDating pour chercher un coup d'un soir.

Blake a peut-être changé, mais il transpire l'aura d'un type passant ses soirées torse nu à jouer du jazz dépressif au piano, la clope à la bouche et un verre de sang à la main.

— De mémoire... quand nous nous fréquentions, tu étais...

— Quoi ?

Facilement jaloux et « un brin » possessif.

Il avait presque pété les jambes d'un de ses collègues marins ivres m'ayant frappé les fesses.

— Non, rien. Quand a lieu la prochaine soirée ?

— Ce samedi. On se retrouvera directement là-bas. En attendant... Est-ce que tu as assez d'argent pour continuer à vivre à l'hôtel ou tu as besoin d'un logement ? J'ai de la place dans ma planque londonienne.

— Je vis au frais de ton ami Dave dans un hôtel à Sussex Gardens.

Le tressautement de sa paupière et ses doigts qui se contractent me confirme mes précédentes pensées.

— Vous êtes dans la même chambre ?

— Voisins. Ça te pose un problème ?

— Je ne vois pas pourquoi ça m'en poserait un.

Et voilà, piètre menteur.

— Nous nous verrons dans quelques jours, annonce-t-il en se levant. Je t'envoie l'adresse par message. Je vais poursuivre mes investigations de mon côté.

— Attends.

C'est trop court. Je ne veux pas percer la bulle maintenant... mais je peine à trouver les mots pour le retenir. Avec Mia peut-être réveillée, il a des affaires bien plus pressantes qu'une conversation dans un Starbucks.

— Qu'est-ce que ça te fait de vivre pleinement dans le présent ? lancé-je finalement, espérant le captiver.

Blake me lance un regard appuyé, glisse ses mains dans ses poches, puis laisse son regard vagabonder vers le mur brun dénué d'intérêt derrière moi.

— Ce n'était pas si désagréable, jusqu'à ce que le passé me rattrape.



🌖



La pluie ruisselle sur la fenêtre depuis un temps infini. J'avais oublié à quel point la météo anglaise est si... étrange. Le soleil peut s'inviter à la fête l'espace de cinq minutes et décider de repartir en direction du bar pour ne revenir que deux jours plus tard.

— Toute cette eau me donne envie de pisser.

Abritée sous un parapluie Miraculous Ladybug qu'il a volé à une gamine de l'hôtel lui ayant fait une grimace, Ginger se serre un peu plus à moi pour éviter de se prendre la moindre goutte d'eau. Mon bras autour de ses épaules, je donne l'impression aux passants d'être une grand-sœur très protectrice et lui, un gamin traumatisé.

Gin a coiffé ses cheveux roux en arrière, avec du gel, et porte une chemise bleu marine, tout comme son pantalon, sous un blazer beige. Il n'a jamais eu autant de classe et je m'étonne que personne ne nous ait encore agressés à cette heure de la nuit.

Le bruit de mes bracelets est couvert par celui de la pluie et de mes talons marquant le sol alors que nous nous rapprochons de la boite huppée fréquentée par Mia Joy il y a un mois.

— Je ne suis pas fait pour ce temps, poursuit Gin en surveillant les alentours. C'est trop humide et imprévisible. J'aime les plages, le soleil, les grillons, les olives...

— Les types qui se baladent torse nu devant toi avec un bronzage parfait ?

— Exactement. Et pas les gars tout pâlots que tu affectionnes tant.

— Oui, mais Blake est sexy. Et tu sais ce que je veux ?

— Embrasser un gars comme Dave sans avoir la figure de ton ex qui apparait dans ton esprit ?

Je baisse les yeux et reste silencieuse alors que Gin savoure sa petite victoire. Je lui laisse celle-là, parce qu'il faut bien que parfois, je lui donne l'illusion qu'il est plus spirituel que moi.

Lorsque nous arrivons devant une devanture décorée de lierre et aux allures de la Grèce antique, je m'apprête à négocier mon entrée avec le vigile quand nos compagnons d'infortune arrivent.

C'est Edgar qui, tout de noir vêtu, court vers nous en agitant le portable de Blake dans sa main où un QR code s'affiche en plein écran. L'oiseau n'a visiblement pas l'habitude de se servir de ses jambes et il arrive essoufflé devant l'homme de la sécurité scannant le QR code contenant nos laissez-passer.

— Miaou, laisse s'échapper Gin tout en ayant un regard lubrique face à Edgar, tu me donnerais presque envie de te croquer !

Edgar e réagit pas à sa question et s'attarde sur moi et mon expression surement fascinée par l'arrivée lente de Blake. Une cigarette pend entre ses lèvres, il rejette en arrière ses cheveux noirs et humides, tout en secouant son parapluie, ignorant l'averse qui continue de tomber.

Ce qui m'intrigue le plus chez lui aujourd'hui, c'est l'absence de ses lunettes habituelles. À la place, il arbore une lentille de contact d'un marron profond sur son œil aveugle.

— « Il n'est nullement irrationnel d'imaginer que, dans une existence future, nous puissions considérer cette vie comme un songe. » murmure le corbeau citant du Edgar Allan Poe.

— Un doux et cruel songe, ajouté-je, juste avant que Blake ne se poste devant moi.

Blake est si proche que sa grande taille me domine et son regard intense me fait frissonner. Ça, ou peut-être l'air humide.

— Est-ce que la fumée de ma cigarette te gêne ? demande-t-il, sans préambule.

— Je ne peux pas t'y empêcher. L'odeur me rappelle juste quelqu'un d'autre que toi.

Nos familiers restent en retrait, anticipant une tension palpable, jusqu'à ce que Blake écrase sa cigarette sous la semelle de ses chaussures en cuir.

— Entrons, il commence à faire froid.

Le timbre de sa voix, putain.

Quelques mots suffisent à me faire fondre et déclencher un ras de marré en moi. Edgar m'adresse un regard empli de compassion, tandis que Gin me dépasse avec une expression désabusée qui semble dire : « Craquer pour son ex, c'est comme ravaler son vomi ».

Passant les lourds rideaux qui isolent l'entrée et séparent le vestiaire de la salle principale, je découvre la raison de la popularité de ce lieu secret.

— Raven.

Mes yeux s'écarquillent devant l'élégance de la décoration, qui semble nous transporter à travers les âges. Les murs sont décorés de fresques mythologiques, baignées dans des nuances de blanc et d'or, tandis que d'imposantes colonnes supportent le plafond, instaurant une ambiance digne de la Grèce Antique.

— Euh... Raven ?

À proximité immédiate de l'entrée, un large comptoir en marbre blanc, veiné de gris, est illuminé par des lanternes suspendues qui diffusent une lumière douce sur les bouteilles de spiritueux et les verres scintillants.

Les serveurs, vêtus de toges, déambulent en offrant des cocktails méticuleusement préparés, alors que les clients, assis sur des tabourets stylisés, échangent des regards entendus.

Et pour cause.

— Raven, tes vêtements !

C'est une boite échangiste et, sous les manipulations d'un succube, je réalise que j'ai perdu la moitié de mes vêtements sans même en avoir conscience.



Nouveau chapitre MARDI 9H

Comment Raven imagine Blake passer ses soirées :

N'hésitez pas à soutenir cette histoire en votant/cliquant sur l'étoile et en laissant un petit commentaire. Ça fait toujours plaisir de lire vos retours et ça m'encourage à continuer !🥰

🌖🌖🌖



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top