2.1🌖Le club du 7ème ciel

Ils peuvent t'insulter,

M'interdire de te fréquenter,

M'emprisonner pour me punir,

Chaque seconde de mon existence

sera un combat pour te retrouver.


— Je planterais des épingles dans ses couilles.

— Ensuite ?

— Je découperais sa queue et je la donnerais à manger à des chiens.

— Tu n'as pas mieux ?

— Je mettrais des punaises de lit dans tout son appartement.

— Ouh ! Tu es diabolique, Raven !

Je hausse les épaules tout en souriant alors que Ginger montre nos faux passeports au contrôle de l'aéroport de JFK New York. Tout se passe sans encombre et, malgré tous mes souvenirs aux États-Unis, je suis heureuse de quitter le pays qui a failli causer ma mort.

Quoi ? Moi ? Responsable de mon propre sort parce que j'ai causé la mort d'un étudiant à cause d'une erreur ? Bien sûr que non. Et il était tout aussi responsable. Affaire classée.

Presque classée.

— Je regrette de ne plus avoir mon portable et accès à tout ce qui était lié à Maverick Granth. Si seulement je pouvais me reconnecter à ses réseaux et savoir si Blak-

— Oublie ! Je n'ai pas utilisé une de mes neuf vies pour que tu retournes en taule !

— Comment est-ce que tu parles à ta maitresse toi ?

Je décoiffe ses cheveux roux avec vigueur alors qu'il pousse des petits cris devant tous les gens de notre Terminal. Il est rouge de honte, pour mon plus grand plaisir, et finit par s'éclipser au Duty Free pour aller s'acheter des tablettes de Toblerone géante.

Je fais de même du côté des parfums, à la recherche de ce qui sera ma nouvelle signature olfactive pour ma vengeance, lorsque les prix me font grimacer.

OK, j'ai beaucoup d'argent depuis des siècles, mais en perdant l'identité de Maverick, c'est un sacré pécule qui m'a échappé. Ginger m'a assuré que l'un de ses contacts pourrait retrouver un accès à mes comptes et tout me renvoyer, mais ça prend un peu de temps.

Soudain, une odeur de tabac me prend au nez alors qu'un quarantenaire plutôt beau gosse se place à côté de moi et fronce les sourcils. Il a une cigarette dans la bouche alors qu'il est interdit de fumer, mais visiblement, ça lui en touche une sans faire bouger l'autre.

Ses cheveux bouclés mi-longs et attachés en chignon négligé sont d'un brun intense mêlé à quelques mèches grises, tout comme les poils de sa barbe de trois jours. Sa peau noire ne cache pas ses cernes marqués sous ses yeux en amande alors qu'il masse ses tempes de ses doigts pendant de longues secondes.

Avec son jean troué, ses baskets et son t-shirt blanc taché de café, il me donne l'impression d'être un peu paumé.

Qu'est-ce qui pourrait lui plaire... murmure-t-il en espagnol avant de saisir l'un des parfums et de l'éloigner très rapidement de son nez.

Besoin d'un cadeau ?

Je lui réponds dans sa langue que je pense être natale, avec un léger accent, mais suffisamment bien pour capter son attention.

L'homme me dévisage attentivement, lorgnant une seconde de trop sur mon décolleté, avant de tapoter de son doigt une boite de parfum.

— Il me faut un truc pour un pote, répond-il finalement en anglais. Il va se marier et je dois être son garçon d'honneur, mais en plus d'être en retard, j'ai complètement zappé de lui ramener un cadeau.

— Ça va être compliqué, sauf si votre ami aime les parfums féminins.

Il lève la tête et jure en voyant l'écriteau confirmant qu'il ne regarde pas le bon rayon. Une des vendeuses en profite pour lui rappeler qu'il ne faut pas fumer ici avant qu'il retire sa clope de sa bouche pour l'écraser dans son cendrier de poche.

— Vous pouvez m'aider ? Ce n'est vraiment pas mon truc, « faire plaisir ».

Tout chez lui pue le charisme mêlé à une profonde lassitude et, si je n'étais pas autant obsédée par la vengeance sur mon ex, je pourrais envisager de me remettre en selle avec un type comme lui.

Le genre qui s'en foutrait royalement de ce que je suis réellement.

Je l'entraine un peu plus loin jusqu'à atteindre les cigarettes, qu'il a déjà dans son sac, avant d'arriver aux alcools forts.

Je me rappelle ce dont m'avait parlé Blake au sujet du whisky japonais et j'utilise le peu de connaissance que j'ai pour le conseiller. Un court instant, je me perds dans notre souvenir de ce rendez-vous à l'aquarium.

De ces frissons que je ressentais à chaque fois que j'étais près de lui et qu'il me parlait.

Il aurait pu m'expliquer le concept de Blockchain pendant des heures que j'aurais tout de même bu ses paroles.

— C'est pas mal, m'avoue l'étranger en soulevant la bouteille que je lui ai suggérée. Ça pourrait plaire à ce con. Merci...

Lorsqu'il croise mon regard, ses yeux semblent subitement pétiller de malice avant qu'il ne me tende la main pour la serrer.

— Dave. En route pour Londres. Et vous ?

— Raven. Même destination.

Ses sourcils se froncent un court instant avant qu'un sourire ne fasse disparaitre la fatigue sur son beau visage.

— Première classe ?

— Pas les moyens. Économique.

— Dommage. À plus tard, mademoiselle.

Son clin d'œil aurait pu faire rougir la prude que j'étais il y a des siècles. Aujourd'hui, il m'excite.

Cinq années, voire plus, à me toucher en solitaire ont dû me rendre accro au moindre contact physique intense avec quelqu'un du sexe opposé.

— Maitresse ! s'exclame Ginger en arrivant jusqu'à moi avec un gros paquet de M&M's.

— Pas ce mot en public, s'il te plait. On va croire que j'ai des délires bizarres avec un garçon à peine majeur.

— Beurk ! Bref, c'était qui le type avec qui tu parlais ?

— Une rencontre intéressante.

Encore plus intéressante lorsqu'en embarquant dans l'avion, Gin et moi assis au bout de l'appareil, une hôtesse vient me voir pour m'annoncer qu'on m'a demandé en Première classe.

Ginger, qui s'est battue contre moi pour avoir sa place côté hublot, est si jaloux que j'en jubile.

Je fais ma diva en sortant ma plus belle marche de mannequin lorsque j'arrive au niveau des sièges ultras luxueux et du fameux Dave du Duty Free.

— Je ne pouvais pas laisser la femme qui m'a aidé, passer un si long vol dans de médiocres conditions. Installez-vous.

— Champagne ? me demande l'hôtesse.

Je ne me fais pas prier et savoure ce moment que je n'aurais pas cru vivre il y a encore quelques jours depuis ma cellule.

Dave ne me pose pas de question personnelle et vice versa, mais s'intéresse à mes goûts en matière de cinéma pour choisir un film que nous pourrions regarder ensemble.

C'est après le premier Chucky, notre repas gastronomique et Sweeney Todd que Dave s'intéresse enfin aux raisons de mon voyage vers le vieux continent.

— Je dois retrouver mon ex.

— Pour le récupérer ?

— Pour lui faire payer de m'avoir brisé le cœur une deuxième fois.

— Désolé pour vous.

— Désolée pour lui, parce qu'on va l'entendre crier de douleur jusqu'en Inde.

Son petit rire me rassure. Il ne me prend pas encore pour une timbrée.

— Pendant que vous ferez la misère à votre ex, moi j'irais à un mariage qui s'annonce très ennuyeux.

— À ce point ?

— Ça doit être extravagant, avec des gens connus et tout ce qu'on peut rêver de mieux... mais je ne sais pas, ça ne me donne pas envie.

— Vous n'êtes pas heureux pour votre ami ?

Dave est à deux doigts de sortir une cigarette de son paquet avant d'avoir un sursaut de bon sens et de le ranger dans sa poche.

— Je ne sais pas s'il l'aime vraiment. Enfin si, ça doit être le cas parce qu'il ne s'est jamais marié depuis que je le connais. Elle doit être spéciale, mais...

— Vous doutez.

— Il était très attaché à une autre femme. Je ne l'ai pas connu, mais il avait l'air... « passionné » quand il parlait d'elle.

— Vous craignez qu'elle vienne au mariage et fasse tout capoter ?

— Non. J'ai peur que mon pote ne se rende compte trop tard qu'il a fait une erreur.

Je ne trouve rien à lui dire de spirituel et lâcher un « tant pis » serait mal venu. Alors je reste silencieuse pendant que les lumières autour de nous deviennent de plus en plus tamisées.

— Ton ex est un con.

Je tourne à peine la tête vers lui que Dave s'est dangereusement approché de moi. Sa main est déjà sur la mienne et son odeur de tabac froid m'envahit.

— J'espère qu'il sait ce qu'il a perdu en te faisant du mal.

— On peut lui faire regretter.

Il arque un sourcil avant de caresser délicatement ma joue puis de descendre jusqu'à mes lèvres. Il est si proche que nos respirations se mêlent et bientôt, nos corps.

Ma corneille.

Je romps notre proximité d'un coup, comme si je m'étais brûlé et avant même d'avoir effleuré sa bouche. Dave me dévisage avant de retrouver une expression mi-compatissante, mi-blasé et de dire :

Scream comme film, ça te tente ? Ou tu veux dormir ?

— Je crois que j'ai besoin de me reposer, merci et... déso-

— Tu n'as pas à t'excuser. Vraiment pas.

Il met son casque avant de démarrer le film pendant que j'incline mon siège pour en faire un lit et que je m'emmitoufle dans mon drap.

Aujourd'hui, je ne pense pas rejoindre le club du 7ème ciel.

Pas parce que je manque d'envie, non.

Si je ne veux pas craquer, c'est parce que je crains de voir Blake à chaque fois qu'un autre tentera de se rapprocher de moi.

J'ai peur que la haine m'envahisse et qu'elle me pousse à mordre des lèvres innocentes.



Raven à Gin quand elle va en première classe :

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