Chapitre 10
Un vent léger se levait, diffusant un parfum de fleurs printanières et de rosée du matin. Le monde des rêves avaient ses réalités qui semblaient s'y méprendre avec le vrai monde. Il était son reflet déformé, le domaine distordu qui n'appartenait qu'au rêveur.
Gabriel pouvait entrer dans ces songes. Il l'avait fait avec Mikhael lorsqu'elle avait été Anne, pour la mettre en garde concernant Lucifer. Il l'avait également fait avec d'autres humains, pour les prévenir ou leur livrer des messages de son Père. Il tenait ce rôle depuis tellement de temps que les rêves étaient devenus un lieu connu pour lui. Il en connaissait les rouage, pouvait les pénétrer et bien souvent les manipuler, les décortiquer pour en connaitre les vérités cachées.
Mais pourtant, là, il ne savait que penser.
Ce parfum qui explosait autour de lui, cette femme à l'apparence si particulière... Tout en lui tremblait alors qu'elle se trouvait là, devant lui. Une femme à la beauté si unique. De long cheveux cendrés dont les mèches s'emmêlaient avec les branches des arbres alentours... Une peau bien trop blanche... Et ces oreilles pointues. Même ses vêtements indiquaient une identité sylvestre. Une fée ? Possédait-elle des ailes ? Si tel était le cas, il lui fallait les voir pour être certain de sa nature.
Ses lèvres, fines et roses, s'écartèrent légèrement pour laisser un souffle en sortir. La poitrine de la créature se leva dans une respiration lente qui pétrifia Gabriel. Il faisait face à Lilith, une créature dont l'apparence véritable se révélait enfin à lui.
Avant de devenir des démons, ces monstres avaient parfois été autres choses. Lilith était devenue la Reine des succubes par un pacte. Avant, elle avait été humaine. Alors qu'elle était cette apparence.
Ses doigts délicats pincèrent les fils d'une harpe. Elle avait coincé l'instrument entre ses cuisses, ses genoux faisant l'effort de ne jamais se refermer pour éviter d'empêcher les fils de jouer. Le tissu de sa robe fine avait remonté son sa jambe, dévoilant les pieds dénudés. La chair en muscle était recouverte d'une peau paraissant douce.
Une douce mélodie s'élevait, bientôt accompagné par la voix de la femme qui ouvrait les paupières. Ses yeux gorgés de larmes livraient leur teinte lilas, très claire.
Nous étions seuls à deux près de l'eau claire et sous les fleurs d'un arbre
Mais aujourd'hui l'eau est écarlate et les fleurs fanent, tout devient macabre
Un frisson lui parcouru l'échine. Pourquoi un sentiment de familiarité s'emparait-il de lui ? Ce n'était pas seulement la chanson...
Entre la terre et la mer
Entre le ciel et les étoiles
Chantant l'espoir d'un cœur en forêt layonné
Mon amour m'a un jour abandonné
Le femme tourna le visage vers lui, les larmes perlant sur son visage de cristal. Et comme si ce qu'elle voyait lui plaisait, un sourire élargie ses lèvres.
— Tu es revenu.
Oui, il était revenu. Pour elle.
Prit par un instinct qu'il ne connaissait pas, il écarta ses bras. Aussitôt, elle se leva et abandonna son instrument pour accourir vers lui, ses longs cheveux tombant des branches sans jamais s'y emmêler. Elle plongea dans ses bras et Gabriel eu l'impression de se sentir enfin... bien. Oui, il se sentait bien.
Son visage se posa sur l'épaule de la femme, ses bras puissants menaçant de la briser tant la prise de son étreinte était forte, terrifiée à l'idée qu'elle disparaisse.
— Mon Gabriel a réussi, n'est-ce pas ? Je savais que tu m'aiderais, que tu tiendrais tes promesses. Tu ne peux pas m'abandonner, n'est-ce pas ?
L'abandonner...
Gabriel prit conscience de ce qu'il se passait. Quelque chose n'allait pas. Ce n'était pas Lilith qu'il tenait dans ses bras. Tout du moins, ce n'était pas la démone.
— Tu es l'âme de Lilith, devina-t-il en s'écartant à contrecœur de la femme.
Lorsqu'une personne pactisait avec un démon, qu'il devenait lui-même un démon, il perdait son âme. Et cette âme nourrissait les Enfers.
Alors Gabriel se tourna, cherchant le gardien. Il y aurait toujours un molosse pour garder ces âmes. Pourtant, l'âme de Lilith n'était pas enfermée avec d'autres âmes, elle possédait sa propre cage.
— Où sommes-nous Lilith ?
— Lilith ? Qui es Lilith ?
Non, bien sûr que non. Son véritable prénom ne devait pas être celui de « Lilith », qui était son identité démoniaque. Alors il tenta autre chose.
— Lily, je ne me souviens pas de cet endroit, confia-t-il en se souvent de la manière dont Viviane s'était exprimée en parlant à la démone.
Et Lili retrouva son sourire.
— Que dis-tu Gabriel ? C'est pourtant toi qui m'a montré ce lieu en me promettant que rien ne pourrait me faire de mal ici. Qu'il ne pourrait pas me retrouver si je voulais le fuir mais que tu viendrais toujours pour m'y rejoindre dès que tu le pourrais.
Cela frappa l'ange aussi durement que s'il avait reçu une claque. Cette âme ne lui mentait pas. Il avait connu cette Lilith, ils avaient partagé des souvenirs dont il ne se souvenait pas. Il avait perdu la mémoire.
— Tu as pactisé avec Lucifer pour disparaitre, devina-t-il avec une fureur bien étrange.
Un grognement sortit de la gorge de Lilith. Ses yeux lilas se mirent à brûler. La femme se métamorphosait pour devenir un chien dont l'ange s'écarta. Cerbère, un molosse immense à trois têtes, lui faisait face, et Lilith reparaissait assise, jouant de sa harpe tout en pleurant sans laisser le moindre sanglot lui échapper.
Le chien de plus de trois mètres montra les crocs. Gabriel avait retrouvé une part de Lilith, son âme. Et il était déterminé à la récupérer. S'il ramenait cette dernière à la démone, le pacte entre elle et Lucifer se briserait forcément. Par ce fait, Gabriel retrouverait ces souvenirs oubliés, il se rappellerait de la vérité. Une vérité que seuls Lucifer et Viviane semblaient connaitre. Et Lilith, qui la lui cachait depuis des siècles.
Gabriel laissa apparaitre sa véritable apparence d'ange, brandissant son épée de flamme. En soit, que Cerbère en personne protège le pacte entre Lucifer et Lilith le confortait dans l'idée que toute cette histoire cachait un mystère bien sombre, ce qui le rendait d'autant plus furieux. Ce fut dans cette rage qu'il parvint à blesser le chien grièvement. Il était un Archange, un être céleste d'une grande puissance. Ce n'était pas un chien de garde qui saurait l'empêcher de faire son devoir.
Cerbère devint alors un simple chiot. Apeuré, il rejoignit Lilith qui cessait de jouer pour le recueillir dans ses bras. L'animal blessé couinait pour s'accaparer l'attention et la protection de la seule personne qui pourrait empêcher Gabriel de le tuer.
— Pourquoi lui as-tu fait du mal ? pleura-t-elle les bras tremblant et serrant la bête contre sa poitrine.
Il l'attrapa par le poignet, la forçant à s'approcher de lui qui possédait du sang de ce chien sur le corps.
— Tu viens avec moi.
Et surement par peur, la femme déploya ses ailes. Par crainte, les fées le faisaient dans l'espoir de fuir. Mais ces ailes-là...
— Tu n'es pas une simple fée...
Tout lui parut soudain plus clair. Il comprenait enfin pourquoi son sang détruisait la vie autour d'elle. Ce n'était pas un sang qui souillait les sols et les terres fertiles. Non, c'était une gardienne qui perdait la vie et par ce biais, celui d'un territoire.
Lilith, dont les ailes étaient d'une apparence semblable à celle d'une colombe, était une fée de la vie. Et plus précisément...
— Tu es une Alfe.
Elle et ses sœurs...
Peu importait, ses questions nouvelles allaient trouver une réponse aujourd'hui. Et lorsqu'il obligea la fée à venir avec lui, qu'il retrouva le monde réel, tout se brisa.
Un chien aux côtés de Lilith, toujours endormie sous un arbre, grognait stupidement envers Gabriel, oubliant visiblement qu'il était redevenu un chiot. Il continuait de geindre, frottant son museau contre le visage de la douce créature endormie. Et Gabriel s'approcha.
— Réveille-toi Lilith.
Et comme une formule magique, les paupières de la jeune femme s'ouvrirent. Ses yeux lilas se posèrent sur lui. Alors une lueur s'échappa de la poitrine de Lilith et des images envahirent son esprit. La belle au bois dormant s'était réveillée et avec elle refaisait surface un passé oublié qui aurait sans doute dû demeurer dans l'ombre jusqu'à la fin des temps.
***
— J'ai fait un rêve.
La femme aux cheveux rouges se moquait de moi, mais par politesse sans doute, elle se contenta de rire discrètement, retenant les éclats de sa voix. Shany ne possédait que peu de retenu. Alors cet effort était à se souvenir comme d'une marque de respect et d'amour pour moi.
Ses yeux Lilas croisèrent les miens. « Shany aux yeux de rubis » ne portait pas un surnom en adéquation avec ses caractéristiques physiques. Du moins pas au premier abord. Mais il était vrai que dans ses plus fortes émotions, la magnifique créature possédait un regard si enflammé qu'on aurait pu le comparer à des rubis sous le soleil.
— Ne te moque pas de moi ! me vexais-je en voyant ma sœur rouge à force de retenir ses rires.
Et finalement, elle explosa, riant aux éclats au point d'alerter les oiseaux alentours qui s'envolèrent de peur.
— Désolé, mais vraiment Lys... Tomber amoureuse d'un homme que tu as vu en rêve...
Nouveaux éclats de rire.
Pourtant c'était la vérité. Cette nuit, j'avais fait un rêve. Et dans mon rêve...
— Ce n'était pas un homme, confiais-je à Shany.
— Peut-être était-ce un ange ?
Nous nous tournions vers la nouvelle arrivante. Une femme splendide, la plus belle d'entre nous et la plus ancienne. Une peau albâtre, des cheveux longs tout aussi pâle et des yeux si typique de nous autres. Une couleur de mauve pâle.
— Les anges, répétais-je stupidement.
Ce devait être ça, un ange. Un être aux ailes grandes et puissantes, un guerrier redoutable, un être de lumière... Tout comme nous. En quelque sorte...
— Décris-moi son apparence.
— Il possédait une chevelure d'or et une épée de feu. Son regard était enflammé d'une passion interdite et pourtant sacré...
— Eden, intervint Shany en se tournant vers notre ainée. Dis-lui qu'elle est stupide et qu'elle a déjà donné son cœur.
Mais Eden ne partageait pas cet avis. Elle vint s'asseoir avec nous, sous un kiosque.
— Lys a le droit d'aimer un rêve et de rejeter la réalité.
— Les humains sont bien mieux que les anges, continua de défendre Shany. Et Adam est franchement un bien meilleur partie qu'un rêve.
— Je n'aime pas Adam...
Ma plainte, murmurée, ne tomba pas dans l'oreille de deux sourdes. Mes sœurs plissèrent des yeux.
— N'avais-tu pas dit que..., commença Shany.
— L'Homme me fait peur.
— Il t'offre tant de fleur et d'attention pourtant. Et les humains sont la création nouvelle des dieux, il est normal que tu appréhendes un peu leur existence.
Mais les humains...
— Ils sont plus terrifiants que les dieux, avouais-je en m'enveloppant de mes bras. Adam me regarde de façon étrange et... il me fait peur.
Ce regard de fou... Cette obsession que je ne partageais pas pour lui...
Et tout en me recroquevillant sur moi-même, l'image de l'ange de mes rêves me revint en mémoire. Un simple rêve. Mais les rêves n'étaient-ils pas un autre domaine, un reflet distordu de la réalité ? Si tel était bien le cas, n'étaient-ils pas une autre forme de réalité ?
J'avais toujours apprécié ce domaine...
— J'aime Gabriel.
Il s'était ainsi nommé. Un prénom magnifique. Mais à l'entente de ce nom, Shany se glaça.
— Tu as dit... Gabriel ?
— Oui. Il s'appelait comme ça.
— Lys, ce n'est pas un ange mais un Archange.
Un Archange... Aurais-je dû avoir peur ? Ces êtres bien plus puissants que leurs frères possédaient une autorité que nous n'apprécions pas. Ce qui était considéré comme précieux pour eux, pour leur père, devenait leur possession.
Et lorsque deux bras se saisirent de moi, me tirant en arrière pour me capturer dans une étreinte presque forcée, ces doutes disparurent. La peur d'Adam n'existait plus, ni les craintes, ni les obligations de mon rôle. Mon visage se tournait vers celui qui me serrait contre lui avec un sourire. Les plus doux des sourires.
— Je t'ai vu en rêve.
— Et je t'ai rejoint dans cette réalité.
— Tu existes.
— J'existe.
Un bel ange, un bel Archange...
Tout allait si bien dans le jardin d'Eden, le jardin de ma sœur aînée. Tout était si parfait. Pourtant un jour il me fallut prendre une décision. La plus terrible d'entre toutes...
Mes paupières s'ouvraient pour laisser des larmes fuir mon regard. Une chaleur au niveau de ma poitrine attira mon attention. Un pacte s'en déroulait pour se lire d'une voix venue d'outre-tombe. Gabriel avait arraché mon âme pour me la redonner, brisant cette protection que j'avais pactisé.
— Que ton âme appartienne à l'Enfer et à son Prince Lucifer, que sa lumière encore la nourrisse. En échange de la protection de l'ange déchu, ta vie en tant que Lys, Douzième Alfe de lumière, Douzième fée de la vie, n'aura jamais eu d'existence. Tu seras Lilith, démon succube ayant succombé aux tentations de l'Enfer et à sa luxure. Lys sera effacée de l'histoire, Lilith prendra sa place...
Le pacte se lisait de lui-même, libérant les vérités.
— En échange d'une mémoire intacte, Viviane la Fée des eaux consent à livrer son apparence et offrir son identité pour une durée déterminée par la contractante Lys, Douzième Alfe de lumière, Douzième fée de la vie...
Viviane avait été de ces fées m'ayant offert leur amitié. Elle avait été ma meilleure amie... Et en entendant mon problème, ce fut tout naturellement qu'elle força Lucifer à modifier ce contrat pour l'y intégrer. Pour me protéger...
Autrefois, comme certains priaient la Lune ou suppliaient le Diable, j'avais fait un vœu. Un souhait innocent et naïf, ignorante des vérités de la vie pour ne pas dire stupide. J'avais voulu aimer et être aimée en retour. J'avais aimé et trahi.
Autrefois, comme un enfant curieux désobéissait au avertissement de sa famille, j'avais été à la découverte de ces créations des dieux. J'y avais fait la rencontre d'un bel homme au charme certain et aux jolies paroles trompeuses. Bien loin du jardin d'une sœur puissante, Adam avait su prendre mon cœur. J'avais réalisé bien trop tard que l'homme était dangereux. Et au moment de le quitter, la vérité m'avait éclaté au visage. Adam n'avait voulu qu'une fée de la vie pour lui, posséder ma puissance et se servir de ma vie.
En voulant me protéger, Eden en avait payé le prix.
Le choix n'avait plus été à faire. Adam avait trompé et dévoré un fruit défendu, obtenant le pouvoir qu'il souhaitait avec une humaine qui lui serait toujours soumise. Mais son obsession pour la plus jeune des Douze fées de la vie ne disparu pas. Ce fut à moi de prendre la décision de disparaitre.
Lucifer n'avait rien abandonné de sa mission première. Il avait été notre porteur, notre protecteur. L'ange préféré de Dieu avait vécu avec nous pour veiller à notre vie. Il avait toujours été le porteur de notre lumière, et ce fut tout aussi naturellement qu'il proposa ce pacte. Un pacte offrait tant de pouvoir...
J'avais disparu. Adam m'avait oublié. Gabriel m'avait oublié. Viviane et Lucifer furent les seuls confidents.
— Qu'as-tu fait ? sanglotais-je alors que le pacte cessait de se révéler.
Le rouleau sortit de ma poitrine s'enflamma pour disparaitre. Il venait d'être brisé. A cause de Gabriel. Cerbère, à mes côtés, lécha une larme, reprenant sa taille et sa force initiale. Mais l'Archange ne fut pas aussi doux. Sa prise à mon poignet était d'une violence que je ne lui connaissais pas. Il me tira à lui, me forçant à me lever de mon lit improvisé par la nature. Nos visages furent si proches... Nos souffles s'effleuraient.
— Tu as changé l'histoire, tu m'as écarté de ta vie, Lily...
Lily... Le surnom que m'avait donné les fées.
— Je me souviens de tout. De notre rencontre, de notre vécu. De tout ce que nous avons partagé ensemble... Tu m'as abandonné.
— J'avais si peur ! Gabriel, tu n'aurais jamais pu tuer Adam ! Même pour moi...
Il était le premier humain de son Père. Et dans une compétition entre les dieux, où chacun de ces créateurs façonnaient des humains en espérant qu'ils prolifèrent pour donner naissance à d'autres fidèles, tuer Adam simplement parce qu'il menaçait son amour de jeunesse... Gabriel aurait été rayé de l'existence par son créateur.
— Je t'ai fait trois promesses, Lily. La première était de ne jamais rompre une promesse que je t'aurai faite.
— Tu as rompu celle-ci en appelant tes frères à l'hôtel, lui rappelais-je avec une certaine amertume.
— Je ne me souvenais pas, tu n'as pas le droit de le compter, se fâcha-t-il alors en me défiant de le couper à nouveau. La deuxième était de ne jamais te donner à d'autres que moi.
— Cela vaut aussi pour toi.
— Ce n'est pas moi qui ait couché avec des individus différent en rêve.
— Ça ne compte pas ! Un succube se nourrit d'énergie sexuelle ! Sais-tu seulement à quel point résister à ses instincts primaires de survie est difficile ? En plus j'ai déjà voulu tenter de me nourrir de toi mais « Monsieur l'ange » était trop répugné par la démone.
— Bien fait pour toi, s'écarta-t-il alors de moi.
Médusée, bouche bée, je ne savais même pas quoi répondre à ça.
— Tu n'avais qu'à pas m'arracher la mémoire.
— Je n'avais pas le choix.
— Tu l'avais ! Tu aurais très bien pu rajouter une condition qui épargnerait ma mémoire.
— Si je l'avais fait, tu aurais continué de me fréquenter.
— En effet.
— Et on t'aurait arraché les ailes, tu serais devenu un déchu. Un ange ne peut fréquenter un démon.
Si Mikhael et Lucifer avaient le droit à ce privilège sans que Mikhael ne perde son statut d'Archange, ça n'aurait jamais été le cas pour Gabriel. Pas à cette époque. Mikhael et Lucifer avaient toujours été les préférés de leur Créateur. Ils auraient toujours le droit à un traitement spécial.
Gabriel n'aurait jamais pu supporter d'être rejeté de son Paradis, même pour moi. Il aurait toujours regretté ce ciel et ses frères...
Pourtant, l'Archange toujours furieux, revint à la charge pour me saisir à la gorge. Ses grandes ailes se déployèrent dans son dos pour nous entourer.
— Pour toi, Lily, j'aurai été prêt à me brûler les ailes. A quoi me servirait un Paradis si tu ne t'y trouves pas ?
— Espèce d'enfoiré, sanglotais-je dans un demi souffle.
Mes deux poings posés sur sa poitrine, je voulais seulement le marteler de coups misérables. Mais finalement, ma tête tomba lourdement contre lui et mes larmes s'exprimèrent. Sa main se glissa dans mon dos.
— Tu es celle qui m'a trahi, qui a brisé notre troisième promesse, Lily.
« Peu importe les obstacles, nous serons toujours ensemble et les combattrons ensemble », repensais-je avec nostalgie.
— Tu es celui qui ne m'a pas accepté même lorsque j'étais une démone.
— Je t'ai accepté, je n'ai simplement jamais succombé à la tentation de posséder une démone... Jusqu'à il y a quelques jours, dans ce domaine des fées où tu m'as repoussé.
Le rouge aux joues, l'image d'un Gabriel luxurieux me revint en mémoire.
— Si j'ai voulu te ramener au Paradis, Lily, c'était pour te garder là où j'étais certain de pouvoir te protéger.
Il laissa ses doigts monter jusqu'à mes cheveux, les tirant en arrière pour lever mon visage vers le sien. Allait-il m'embrasser ? M'aimer comme autrefois, avant que les tragédies ne s'empilent et me poussent à commettre l'irréparable en un pacte cruel ?
— Gabriel !
Le hurlement me fit sursauter. Gabriel était repoussé par Lucifer. Le Prince infernal venait d'apparaitre, un trou ayant été créé pour révéler un escalier menant sans aucun doute à l'Enfer.
— Espèce d'imbécile ! Tu as détruit le pacte entre moi et Lys ! s'égosillait-il.
Gabriel faisait apparaitre son épée enflammée. Les deux étaient prêts à se battre. Jusqu'à ce qu'une main frappe Lucifer à la tête.
— Maintenant ça suffit, ordonnait Mikhael.
L'ange aux traits féminins fusillaient le déchu du regard.
— Ce qui est fait, est fait. Tu aurais surement fait pareil à sa place.
Il ne répondit rien, laissant l'ange s'approcher de moi non sans continuer de défier Gabriel du regard.
— Je me souviens de toi, Alfe Lys, Douzième fée de la vie.
Les Alfes étaient des êtres de lumières, des créatures célestes assez peu connues, et souvent controversées. Nous étions toutes des femmes, créées par une divinité toute aussi inconnue. Et douze d'entre nous avions été créée avec ce petit plus qui nous liait à la Terre. Bien avant l'humanité et le règne animal, nous avions été chargées de veiller sur les terres, notre vie y étant liée. Ces Alfes particuliers avaient été appelés Fées de la vie. Certaines créatures connaissaient les fées de la vie, mais avec mon pacte, rien ne les liait aux Alfes. A présent que ce dernier était brisé, la vérité venait d'éclater dans le monde.
J'étais Lys, Douzième Alfe de lumière, Douzième fée de la vie. Et bientôt, les tragédies connues de mon espèce envahiraient le monde, ramenant à la surface des dangers terrifiant.
Lorsque le Bien et le Mal s'uniront
Que la glace et le feu se marieront
Tombera du ciel la fin des mondes
Le verrou s'ouvrira
Alors que le cadenas tombera
Renaitra la Princesse sacrée
Fille d'une foi blessée.
Mikhael et Lucifer s'étaient depuis bien longtemps unis, faisant ainsi renaitre l'espoir et l'amour dans un domaine de mort et de souffrance. Puis l'ange aux flammes infernales avait rencontré la demi-divinité à l'Hiver éternel, Yuki.
Ce que beaucoup avait oublié était l'identité du verrou et du cadenas.
Je me tournais vers Lolita qui apparaissait, alertée avec le reste de la troupe par nos cris et nos colères. Lorsque sa nature avait été révélée au grand, qu'elle était redevenue Calice, la métaphore avait pris sens pour certain. Pour moi, qui avait alors crains ce maudit passage « Tombera du ciel la fin des mondes ».
Oh bien sûr, certains penseraient que j'étais la princesse sacrée. Après tout, les Fées de la vie étaient des êtres sacrés. Et dans la même comparaison, peut-être que pour une quelconque raison j'aurai mérité ce titre de princesse. J'étais bien concernée par cette prophétie, Viviane me l'avait confirmé. Mais ce n'était pas ce passage qui m'était dédiée.
Mon regard revint vers Gabriel. Mon ange s'approchait, désireux de simplement poser sa main sur moi, sur mon visage.
— Tu pleures.
Mes paupières se fermèrent, il recueillait la larme unique.
« Je serai l'annonce de l'Apocalypse ».
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