Chapitre 4.
C'est Simon qui a conduit jusqu'à leur territoire. Le trajet a duré plus de cinq heures. Les cinq heures les plus longues de mon existence. Damien a tenté quelques approches afin de discuter avec moi, mais je me suis contentée de l'ignorer et j'ai fait semblant de dormir pendant le trajet pour qu'il me laisse tranquille. Je n'ai pas le cœur à discuter. Même Simon a essayé plusieurs fois de me faire parler, sans succès. Ils m'ont alors laissé tranquille au bout d'une heure.
— Nous sommes arrivés. Bienvenue chez moi.
Je redresse la tête, quelque peu assommée par le trajet et regarde autour de moi. La voiture est arrêtée devant une immense bâtisse en bois, qui a des allures d'immense chalet, ce qui me plaît beaucoup. Damien descend de la voiture et vient m'ouvrir la portière pour que je puisse sortir. Je le remercie, et admire les lieux. Il y a de larges escaliers pour accéder à la maison, qui dispose de grandes fenêtres pour laisser la lumière de jour éclairer l'intérieur. Lorsque je m'avance vers la maison pour l'admirer de plus près, Damien se tient à mes côtés et m'explique l'histoire de cette maison.
— C'était une maison abandonnée. À la mort de ma mère, mon père a fait construire une autre maison qui se trouve un peu plus loin dans le territoire, car celle-ci lui rappelait beaucoup trop de souvenirs. Je suis tombé par hasard sur elle il y a environ trois ans, et je l'ai retapé entièrement avec quelques amis, je l'ai agrandi et y ai fait quelques aménagements pour la rendre la plus accueillante possible. Elle te plaît ? C'est ici que tu vas séjourner pendant ces deux prochains mois.
— Elle est pas mal, je réponds.
Je dois bien reconnaître que je suis sous le charme de l'aspect extérieur. Damien me devance et me tiens la porte pour que je puisse entrer. Je tombe amoureuse de la maison. L'intérieur est principalement de couleur blanc, ou taupe. Il y a quelques touches de couleur avec divers vases disposés dans l'entrée ainsi que dans le salon. J'ai toujours préféré les couleurs neutres aux couleurs vives, apparemment c'est le cas de Damien également. En plus d'être galant, il a bon goût en matière de décoration. Je visite la maison pendant qu'il monte à l'étage y déposer mes affaires. Tout est épuré, rangé, c'est une maison digne d'être dans les magazines de déco. J'adore. Lorsque Damien me rejoint dans le salon, je suis en pleine admiration devant le grand terrain derrière la maison, dont l'accès se fait par une simple baie vitrée. Des parterres de fleurs donnent une touche colorée à ce grand espace où le vert est omniprésent, des dizaines d'abeilles sont occupées de butiner dans les fleurs. Cet endroit est magnifique.
— De ce que mon père a bien voulu me dire, je sursaute lorsque Damien prend la parole, ma mère adorait jardiner. Elle aimait admirer son travail l'été, voir les oiseaux voler au-dessus de la propriété, les abeilles tourner autour de ses fleurs bien aimées...
Je souris à cette pensée. Mon esprit s'amuse à dessiner sa mère, et à l'imaginer jardiner un jour de printemps. Dans son salon, plusieurs photos d'elle sont disposées dans de jolis cadres en bois d'acacia, ou du moins c'est la femme que je pense être sa mère vu l'ancienneté des photos et la ressemblance plutôt frappante avec Damien sur plusieurs traits physiques, comme leurs cheveux bruns, leurs grands yeux bleus. Je me retourne et découvre une femme âgée de la quarantaine, qui nous regarde totalement attendrie.
— Bonjour ! nous salue-t-elle, tout sourire. Vous devez être Emilie ?
Sa voix légèrement aigue est tout de même agréable à entendre, on sent une certaine douceur dans sa voix, ce qui me rassure et m'aide à me détendre.
— Bonjour. Oui c'est bien moi, et vous êtes ?
— Je suis Nathalie, enchantée ! Oh qu'est-ce que vous êtes jolie... J'ai hâte de voir à quoi ressemblerons vos futurs enfants, ils seront magnifiques !
Je la regarde, complètement déroutée, lorsque Damien prend la peine d'intervenir. Des enfants ?
— Nathalie, nous n'en sommes pas encore à ce stade, calme-toi.
— Nous venons tout juste de nous rencontrer..., ajouté-je. Il est bien trop tôt pour parler d'enfants.
Nathalie nous regarde tour à tour, elle semble perdue puis son visage s'attriste. J'ignore si elle est au courant de l'accord entre mon père et son Alpha, mais au vu de sa réaction je pense que non. Mieux vaut la préserver de ce sombre marché. Son visage redevient joyeux et elle s'en va en direction de la cuisine préparer le déjeuner. Je la suis, curieuse de la voir aux fourneaux et nous discutons un peu pendant qu'elle cuisine. Je lui ai proposé de l'aider, mais elle a refusé et m'a demandé à la place ce qu'il me plairait de manger.
— Du chili... Il y a longtemps que je n'en ai pas mangé.
Elle sourit et sort les ingrédients nécessaires. Je me souviens que lorsque j'étais petite, j'aimais aider ma mère en cuisine, j'en profitais pour goûter toutes les préparations dans son dos. Damien vient me chercher en cuisine pour me faire visiter l'étage qui est composé de deux salles de bains, dont chacune à une chambre attenante, ainsi que deux chambres d'amis et une petite buanderie. Il me fait entrer dans une jolie chambre avec la salle de bain attenante, et je découvre mes valises posées sur le lit. La chambre est neutre, les murs sont peints dans des tons gris et blanc.
— Ce sera ta chambre pour les deux prochains mois. La mienne est juste en face si jamais tu as le moindre souci, ou si tu as besoin de compagnie... Le repas doit être prêt, allons manger. Je ne sais pas toi, mais je meurs de faim !
Je me retiens de rire face au ton enfantin qu'il vient de prendre et le suit jusqu'à la cuisine où deux assiettes fumantes remplies à ras bord nous attendent sagement sur l'îlot central. L'odeur qui s'en dégage me met l'eau à la bouche et mon estomac sort de sa léthargie puis se met à gronder.
— C'est délicieux, dis-je à Nathalie après plusieurs bouchées. C'est l'un des meilleurs chilis que je n'ai jamais mangé !
Elle me remercie du compliment et part dans la demeure. Damien m'explique qu'elle est au service de sa famille depuis son plus jeune âge, il l'a toujours connu et lorsque son père est parti, il a demandé à Nathalie de rester travailler pour lui. C'est elle aujourd'hui qui s'occupe de l'entretien de la maison et de la cuisine lorsqu'il n'a pas le temps de cuisiner ou s'il reçoit des invités. Elle est un peu comme une mère pour lui. L'affection qu'il lui porte me touche beaucoup. Peut-être n'est-il pas aussi présomptueux avec les femmes que comme il l'a laissé croire chez moi lors de sa proposition d'alliance.
— Que veux-tu faire aujourd'hui ? me demande-t-il. Visiter le territoire, regarder un film...
— Pour l'instant j'aimerais défaire mes valises si ça ne te dérange pas. J'aimerais bien parcourir le territoire ensuite.
Il acquiesce et se charge de débarrasser la table. Je vais à l'étage défaire mes valises et en profite pour donner quelques nouvelles à mes parents, ainsi qu'à mes amis. Ils me manquent tellement. Ma mère m'explique que Jérémy est fou de chagrin depuis que je suis partie, mes amis ont dû venir le chercher à la maison et le ramener chez lui pour qu'il se repose et se remet de sa blessure. Ma poitrine me fait mal en pensant à lui. Jérémy... Sentant les larmes arriver, je me reprends et défais mes bagages. Par la fenêtre je vois un loup arriver, un gros loup au pelage semblable à la couleur de chocolat noir. Lorsqu'il se métamorphose à l'entrée, je reconnais Simon, son Bêta. Après avoir tout rangé, je m'approche des escaliers lorsque j'entends les deux hommes parler. Je m'arrête et décide d'écouter leur conversation.
— Alors comment ça se passe avec elle ? Elle ne te donne pas trop de fil à retordre ?
— Je n'ai pas à me plaindre pour le moment. J'ai suivi ton conseil, j'ai décidé de la faire dormir dans la deuxième chambre plutôt que de l'obliger à dormir avec moi. Je doute qu'elle soit prête pour cela.
Il voulait me faire dormir avec lui ? Est-il sérieux ?
— Mec... Elle ne t'a pas reconnu. Tu sais ce que ça signifie...
— Je sais... Mais pourquoi suis-je le seul à sentir ce lien ? Depuis hier je n'ai qu'une seule envie, la prendre dans mes bras, la chérir... Pourquoi est-ce qu'elle ne ressent pas le lien d'âme-sœur ? Si c'est à cause de ce loup blanc j'aurais mieux fait de le tuer !
Le lien d'âme-sœur ? Pourquoi en parle-t-il ? Troublée, je continue d'écouter, avide d'informations.
— Et faire de cette meute une meute ennemie ? Tu as assez d'ennuis avec d'autres meutes pour en ajouter d'autres Damien, le sermonne-t-il. De ce que j'ai cru comprendre, ce fameux loup et Emilie ont été très proches par le passé. Peut-être qu'ils ont eu une aventure et qu'elle l'aime encore, c'est l'explication la plus logique.
J'entends un juron et quelque chose se briser au sol. Tuer Jérémy ? Il se prend pour qui ? Je maîtrise tant bien que mal la colère qui me ronge et descends tout en faisant semblant de n'avoir rien entendu. Je salue d'un signe de tête Simon, et aperçois un verre brisé au sol.
— Simon va se charger de te faire visiter le territoire, si tu veux tu pourras aller rencontrer les habitants pour faire connaissance avec eux. J'ai des affaires urgentes à régler, je te retrouve ce soir.
Le ton glacial qu'il a pris me laisse sans voix pendant plusieurs secondes, et lorsque je souhaite le remettre à sa place il est déjà à l'étage. Simon m'adresse un petit sourire en gage d'excuse, et m'emmène à l'extérieur. Nous nous transformons, et il me fait une visite guidée de la forêt environnante, ainsi que le village où habitent les membres de la meute. Les infrastructures sont très modernes, et de ce que je vois, les gens sont heureux de vivre ici. Plusieurs m'ont regardé d'un œil curieux, peut-être est-ce le pelage de mon loup qui les intrigue ainsi ou bien le fait qu'ils ne me connaissent pas, quand j'ai interrogé Simon une fois rentrés, il m'a expliqué que toute la meute avait été mise au courant de mon arrivée. Je le remercie pour la visite et il est rentré chez lui, ou parti assurer ses fonctions de Bêta, je l'ignore.
Je pars dans le salon et vois Damien, un verre à la main, à me fixer.
— Qui était le loup blanc de ce matin ? Ton petit-ami ? me demande-t-il, le ton acerbe.
— Mon meilleur ami, je lui réponds sur le même ton.
Mieux vaut qu'il ne sache pas la relation que Jérémy et moi avons eu par le passé. Je ne tiens pas à ce qu'il arrive quoique ce soit à mon meilleur ami, et je n'apprécie pas du tout la manière dont il me parle à l'instant.
— Pourquoi est-il venu ce matin ? Pour t'empêcher de venir avec moi ? Pour t'arracher à moi ? Réponds !
— Tu nages en plein délire ! je m'énerve. Il voulait me dire au revoir, tout simplement. Et même, je ne vois pas en quoi cela te regarde car toi et moi n'avons aucun lien, et n'aurons jamais de lien. Enfonce-toi dans le crâne que je reste ici pendant deux mois et qu'après, les seules fois où tu me reverras ce sera au Conseil des Alphas lorsque je vais succéder à mon père.
Énervée, je monte dans ma chambre et la ferme à clé, alors qu'il me demande de revenir. S'il pense que je vais le laisser me parler de la façon dont il vient de le faire, il se met bien le doigt dans l'œil. Il avait un coup dans le nez en plus ! Je soupire, exaspérée par son comportement et me dis que si les deux mois doivent se passer ainsi, le temps va être très long.
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