Chapitre 31: Surprise !

Une forte lumière vient taper sur mes paupières, mon réveil se fait en sursaut. J'aimerais voir de quoi il s'agit mais tout mon corps est bloqué par un poids lourd.

Johnson est complètement allongé sur mon ventre, ses cheveux caressant mon nombril à l'air.

J'essaie de le repousser mais c'est peine perdu, je ne peux rien contre toute cette masse de muscles.

- Lève toi. Je murmure alors dans l'espoir qu'il me laisse mon espace vitale.

Il ne bouge pas d'un millimètre malgré mes protestations à répétition.

Je m'enfonce alors à nouveau dans mon fauteuil.

L'habitacle est d'un noir apaisant, il n'y a plus aucun néon.

Une odeur de fin de soirée alcoolisée plane à l'intérieur, pas étonnant.

Mon horloge intérieur me dit que nous sommes le lendemain matin mais je ne peux pas vérifier, nos téléphones à l'avant de la voiture.

Le véhicule voisin au nôtre la veille a disparu, comme beaucoup d'autres.

Les lumières qui m'ont réveillées devaient être les phares d'un d'eux.

Malicia a donc ouvert le parking, ou bien je ne sais qui, dans tous les cas on peut enfin sortir d'ici.

Je tire sur une mèche de Johnson qui rumine dans sa barbe une phrase intelligible.

- Lève toi tu me fais mal !

Nos deux peaux moites sont restées collées l'une à l'autre toute la nuit et nos odeurs corporelles se sont mélangées.

- T'es hyper confortable, tu savais ça ?

Les yeux au ciel, je garde les lèvres cousues et l'observe s'étirer.

Je déteste le fait qu'il soit encore plus beau au réveil avec ses cheveux désordonnés et ses lèvres gonflées.

- À quoi tu penses ?

- À l'appel d'hier soir. J'avoue la bouche encore pâteuse.

Mes yeux s'ouvrent et se referment lentement, signe de ma mauvaise nuit.

- Tu penses que Noa sera en colère ?

- Comme ça on sera quitte. Il plaisante en enfilant son tee shirt.

Il n'a tout de même pas tord, je lui rends simplement l'appareil.

L'écran de mon portable s'allume et la date d'aujourd'hui s'affiche face à moi.

C'est bon.
C'est fini.
Cette journée est terminée.

Je suis soulagée d'apprendre qu'un an m'attend avant qu'il soit à nouveau le trois mars.

- Monte à l'avant.

Je le fais sans broncher, pressée de m'enfuir très loin de ce parking.

Le portail s'ouvre miraculeusement et la voiture peut finalement sortir.

La lumière du jour m'avait manqué.

Je n'imagine pas la gueule que j'ai mais suis persuadée qu'elle est encore pire que d'habitude.

Je contemple le paysage pour la cacher discrètement.

Les arbres nus qui dansent au gré du vent m'avaient manqué, ainsi que les routes désertes, les flaques d'eaux reflétant le ciel, les passants que j'adore scruter et les nuages qui passent de blanc à gris.

Thomas parvient à conduire alors qu'il se réveillait d'une nuit chaotique il n'y a pas cinq minutes.

- Je te ramène chez toi ?

Mon cerveau ne sait pas encore allumé, je retourne cette simple question plusieurs fois avant de répondre.

- Non.

La peur m'en empêche.

Noa a sûrement déjà du recevoir la vidéo et je ne me vois pas arriver à la maison comme si de rien était, son regard déçu posé sur moi.

C'est aussi pourquoi je n'ose pas ouvrir tous mes messages.

- Ok, tu peux attraper mon téléphone et lire mes messages.

Oh, il me fait assez confiance pour faire ça ?

- Moi qui pensais que tu avais tant de choses à cacher.

Il essaie de cacher son sourire mais je l'ai bel et bien aperçu.

Je me rends donc dans ses notifications pour y lire la multitude de messages qu'il a reçu.

- De Marcus, « Gros, y'a une fête ce soir pour les jeunes de seize à vingt-cinq ans, organisée pas la mairie !!! Vient avec ta meuf, je ramène sa soeur ».

Les sourcils froncés, il se déconcentre de la route durant une seconde.

- Hein ? J'ai pas compris la fin, tu peux répéter ?

- Apparemment je suis sensée être « ta meuf » et ma soeur sort avec Marcus donc-

- Attends... quoi ?

- Ah... tu n'étais pas au courant.

- Non ! L'enfoiré, il l'a vraiment fait...

Je l'examine avec attention, il doit probablement sentir mon regard posé sur lui.

- Un problème ?

- L'autre jour, il m'a dit que s'il n'arrivait pas à te baiser il irait baiser ta soeur.

Oh merde.

Ses veines ressortent de plus en plus et ses doigts glissent doucement sur le volant.

Je vois ma soeur différemment maintenant que je suis au courant de... ça.

- Dis à ta soeur que c'est un dealer réputé dans le quartier, ça l'aidera peut-être à s'éloigner de lui.

Mon cerveau n'est pas tout à fait sûr de comprendre.

Marcus... un dealer ?

- Donc Amalia a couché avec... un putain de drogué dégénéré ?

- Ouais, si on veut.

- Mais c'est... illogique.

- Il se sert de son air de petit roux tout mignon pour amadouer les gentilles filles.

Il jette un coup d'œil à mon visage qui rougit de détresse et rajoute pour me rassurer:

- Mais ça reste un mec sympa. La preuve, avant que je ne t'annonce tout ça je parie que tu l'adorais.

Ça ne me rassure absolument pas.

- Oui, je l'adorais. Plus maintenant.

- Si je venais à t'apprendre que je vends aussi du shit, comment tu réagirais ?

- Je ne sais pas, puisque c'est faux.

Un rictus que je n'apprécie absolument pas se forme sur un coin de sa bouche.

En fin de compte, je ne connais pas vraiment Johnson.

Je ne sais pas ce qu'il fait de son temps libre à part jouer au basket et faire de la boxe.

Peut-être qu'il sort à peine de prison, je n'en sais rien et ça ne m'étonnerais pas plus que ça.

La voiture effectue un détour que je reconnais, ce qui m'indique que nous ne sommes plus très loin de la destination.

- Bref, reste loin de Marcus et éloigne ta soeur de lui s'il te plaît. Sa voix rauque s'est radoucie.

- Tu pouvais pas me le dire plus tôt ?

- Je pensais pas qu'il était sérieux !

Je croise mes bras devant ma poitrine tandis qu'il se gare à l'avant de sa maison, ou son château.

Curieuse, j'attrape son portable pour continuer à lire ses message.

De Eliott
> On profitera de la fête de ce soir pour donner quelques grammes au client. Il se plaint beaucoup en ce moment alors rajoute-en un peu pour qu'il ferme sa gueule.

Mes doigts tremblent en dessous de son portable, mes pieds sont ancrés dans le goudron.

Alors c'est vrai... Thomas et tous ses potes sont vraiment un groupe de dealers.

- T'attends quoi ?! Je l'entends crier de l'intérieur.

Je me dépêche de rentrer en évitant son regard, je ne suis plus sûr de pouvoir le regarder en face à nouveau.

- Ah c'est toi qui a mon téléphone.

J'acquiesce de la tête sans lever les yeux vers lui et le lui tends.

- Quoi ? T'as lu un truc qui t'as fait peur dessus ?

Il ricane et reprends son portable, la discussion entre lui et Eliott est encore affichée sur l'écran, il comprend subitement.

- Ah... merde.

- C'est tout ce que t'as à me dire ?! Je m'exclame la gorge resserrée par un nœud.

- Qu'est ce que tu veux ? T'aurais bien finis par l'apprendre de toute façon.

Je déteste sa façon de tout prendre à la légère, c'est pesant.

- Mais pourquoi tu t'acharnes à gâcher ta vie bordel ?!

- On a pas tous un passé merveilleux rempli de licornes Davis ! Je suis rentré dans ce groupe quand j'avais quinze ans et maintenant je suis forcé d'y rester !

Il a haussé la voix d'un seul coup, je tremble d'appréhension.

Et s'il me frappait sur le coup de la colère ?

- Un passé rempli de licornes ? Tu déconnes j'espère ?! Tu n'a aucune idée de ce que j'ai vécu avant aujourd'hui !

Nos cris résonnent dans sa maison vide, c'est encore plus effrayant.

- Commence pas à me faire chier avec tes problèmes à la con, on a tous une vie merdique !

Ses deux mains sont plongées dans ses cheveux, l'air tourmenté par cette dispute.

Ses yeux gris ne m'ont jamais autant glacé le sang que maintenant.

- Moi au moins je traine pas la nuit avec des détraqués et je bois pas à longueur de journée comme un connard sans avenir !

- Tire toi de chez moi.

- Quoi... ? Je demande comme si ça allait changer la situation.

- TIRE TOI DE CHEZ MOI DAVIS !

Après avoir sursauté, je prends peur et m'enfuie en courant comme il me l'a demandé.

*

C'est déconcertant la façon dont une situation peut tourner au désastre en une fraction de seconde.

Je fais bouger ma bague de haut en bas sur mon index, la tête ailleurs.

Mes genoux sont rétractés sur moi, assise sur le bord d'un trottoir comme une prostitué j'attends que la nuit tombe.

J'épluche une feuille pour qu'il ne reste plus que la tige, en la jetant j'aperçois une longue voiture noir vernis qui se gare face à moi.

C'est une jambe féminine qui en sort d'abord, son talon fait résonner la rue entière puis c'est tout le reste de sa silhouette parfaite qui apparaît devant mes yeux.

- Qu'est ce que tu fiches ici Ciliama ?

- Mon prénom c'est Malicia désormais, maintenant monte dans la voiture avant que je ne change d'avis. Ses dents blanches s'efforcent de sortir pour afficher un sourire bienveillant.

- Change d'avis au plus vite dans ce cas.

Je compresse mes avant bras et me mords l'intérieur de la bouche, ça canalise mon cerveau en ébullition.

- Allez Lola, fais pas ta connasse pour une fois, t'as nulle part où rester.

- Je préfère encore pourrir ici que rentrer dans ton jeu merdique.

Je ne comprends ce qu'elle essaie de faire, sachant qu'elle est au courant que je sais déjà tout au sujet de son petit plan.

- Ne m'oblige pas à utiliser la force.

C'est plus fort que moi, j'explose d'un rire aiguë qui dure assez longtemps pour que Malicia me dévisage avec interrogation et dégoût.

J'ai peut-être un peu trop ris puisqu'elle fait un signe avec ses doigts et par la suite de grands hommes vêtus totalement de noir sortent de la limousine pour m'attraper sous les aisselles.

- Lâchez moi !

- On ne ricane plus ? La voix rauque du mec sur ma gauche me surprend.

Malicia, les bras croisés sur sa poitrine, me détaille de haut en bas avec ce sourire satisfait que je hais scotché sur ses lèvres roses.

Ils me jettent comme un sac de pommes de terres à l'arrière du véhicule.

L'un d'eux prend le volant et démarre à toute vitesse.

- Tu vas voir, c'est splendide chez moi. M'explique cette sorcière assise juste à un mètre de moi.

Je me demande d'ailleurs comment peut-elle être aussi riche.

D'après Internet, sa mère est tombée en dépression avant de se suicider et son père l'a abandonné pour reconstruire sa vie après ça.

Comment cette fille a pu gagner autant d'argent et de pouvoir à elle seule ?

C'est flippant.

La route n'a pas été longue, la limousine se gare devant une villa plus grande encore que celle de Thomas.

Mais ce n'est rien comparé à l'intérieur, on se croirait dans la maison de rêve de Barbie.

Tout, absolument tout est rose.

Les murs, le canapé, les tables, toutes les pièces et même le papier toilette.

J'en ai la nausée.

Les hommes me jettent un mauvais regard avant de disparaître pour me laisser seule avec cette vicieuse.

- Alors, qu'est ce que tu veux faire en premier ? Choisir ta robe ? Le maquillage ? Ta coiffure ? À moins que tu n'es faim je-

- Attends, pause. Tu penses réellement qu'on va se faire une petite soirée pyjama comme des meilleures amies ? Je ne tomberais pas dans ton vice Malicia, rentre toi ça dans le crâne.

Elle incline sa tête sur le côté comme si elle n'avait pas compris le sens de ma phrase mais je sais parfaitement qu'elle a tout enregistré.

- Oh excuse moi, tu penses avoir le choix ?

J'effectue un pas en arrière mais elle en fait un plus grand en avant seulement par prétention.

- Je vais t'expliquer ce qu'il va se passer et tu vas faire exactement ce que je vais te demander. Compris ?

- Dans tes rêves probablement.

Sans perdre une seconde de plus, elle se jette sur moi et passe son bras sur l'entièreté de ma gorge comme un animal sauvage.

- Tu vas venir à la soirée de ce soir à mes côtés et faire comme si nous étions inséparables. C'est bien clair ?

Il m'ait impossible de répondre, je me bats tout de même pour continuer à respirer.

Quand elle s'aperçoit qu'elle risque de me tuer, elle me lâche brutalement et me gifle d'un coup sec pour s'assurer que je n'oserais plus jamais la contredire.

- C'est clair ?!

- À vos ordres Cruella.

Elle lève les yeux au plafond et me fais signe de la suivre à l'étage.

Je balance mes chaussures dans un coin et la suis tel un bon chien respectueux envers son maître.

Les marches de l'escalier en spirale me semblent interminables, quand nous arrivons finalement en haut j'ai la sensation d'avoir couru un cross entier.

Sa gigantesque chambre ressemble à celles qu'on trouve dans les magazines d'agence immobilière.

Son lit peut sûrement accueillir trois couples et la quantité de miroirs dans cette pièce est effrayante.

- Suis moi.

Elle m'attrape par le bras, tout excitée de me faire découvrir son dressing aussi long que ma scolarité.

Il y a un endroit réservé à chaque couleur et à l'intérieur on y trouve un endroit pour chaque style de vêtement.

- Avec tout ça tu peux porter une tenue différente chaque jour de l'année.

- Encore heureux, imagine porter le même habit deux fois dans la même année ? L'horreur ! 

Sa joue semble soudainement appeler ma paume mais je resserre ma main pour éviter de réveiller une nouvelle rage en elle.

- C'est culotté venant d'une ancienne pauvre. Je sors alors avec un regard insistant sur son visage.

- Si tu veux pas que j'te fasse bouffer mon poing, ferme ta gueule et fais ce que je te dis.

- Vu ton gabarit j'pourrais même te bouffer tout entière.

Elle se contente d'avaler sa salive lentement avec agacement.

Je m'accoude sur le mur en attendant qu'elle choisisse sa tenue et la mienne puisque je n'ai pas mon mot à dire.

Le temps passe à une lenteur que je n'aurais jamais pu imaginer.

- C'est bon !

- C'est pas trop tôt. Soufflé-je entre mes dents à voix basse.

Elle me tend une longue robe vert sapin en satin et j'en ravale carrément ma remarque.

C'est probablement l'une des plus belles robes que j'ai vu dans ma vie.

De minuscules diamants verts parcourent le haut du décolleté pour le mettre en valeur.

Les deux longues manches arrivent jusqu'aux poignets.

Elle m'a l'air cependant si moulante et resserrée que je ne suis pas sûre de rentrer à l'intérieur.

- Mets ça, et dépêche toi, on a pas beaucoup de temps.

Encore cette soirée.

Si ça ne tenait qu'à moi je ne participerais plus jamais à une soirée durant le reste de ma vie.

La première a tellement tourné au désastre que j'aurais voulu que ce soit aussi la dernière.

- Je comprends pas.

- Tu comprends pas quoi ?!

- L'intérêt de se faire passer pour des meilleures amies ce soir.

- Mets la robe je t'expliquerais sur le chemin.

- Mais-

- METS LA !

Je m'écarte sous le feu de surprise et accours dans la salle de bain qui fait probablement plus de mètres carré que ma maison toute entière.

Il me faut une quinzaine de minutes pour rentrer dans cette fichue robe beaucoup trop splendide pour être portée par quelqu'un comme moi.

La matière est si légère que je l'a sens à peine mais j'ai tout de même l'impression d'être emballée dans du film plastique.

Mes clavicules ressortent tout particulièrement aujourd'hui, ainsi que les os de mes hanches et côtes.

Rien ne pourra jamais me rendre aussi heureuse que de voir enfin mes os ressortirent après m'être privée de nourriture durant une si longue période.

Maman sera peut-être enfin fière de moi.

Papa ne me frappera peut-être pas.

J'entends Malicia frapper à la porte au point de la casser si elle avait cogné une fois de plus.

Je m'empresse d'ouvrir en imaginant ses coups se propager sur moi si je ne m'exécute pas assez vite.

- Il était te-

Elle s'arrête net lorsque ses yeux croisent ma silhouette.

Ses yeux sculptent chacune des parties de mon corps comme un laser, j'en viens à me racler la gorge pour lui rappeler ma présence.

Ses sourcils se froncent avec dégoût ou jalousie, je ne saurais pas décrire le sentiment qui se peint sur son visage à cet instant même.

- Un problème ?

- Absolument pas.

Elle fait demi tour en attendant que je la suive.

Je remarque finalement qu'elle porte elle aussi une robe magnifique qui met en valeur sa poitrine et ses courbes.

Du rose, comme à son habitude.

Elle doit sûrement penser que l'exagération de cette couleur dans sa vie fera penser aux autres qu'elle est tout aussi douce et bienveillante.

Ou peut-être veut-elle se convaincre elle même qu'elle n'est plus la fille aux pensées sombres d'avant.

*

Deux heures se sont déjà écoulées.

J'ai du l'écouter se venter de sa « vie de rêve » pendant qu'une femme nommée Mi-Kuong nous faisait une manucure, une pédicure ainsi qu'un maquillage comme si nous étions sur le point de défiler pour la Fashion Week.

Je ne pensais pas que le simple fait de cohabiter avec quelqu'un pouvait être aussi fatiguant.

Malicia m'en apprend tous les jours.

L'heure de la fameuse soirée approche à grands pas et la tension se fait de plus en plus lourde

Au moment où je dois enfiler mes chaussures mes mains tremblent tellement que je dois recommencer à trois reprises.

- C'est qu'une petite fête, pas besoin de stresser comme ça.

- C'est pas la fête qui m'inquiète, mais toi. Qui me dit que tu ne vas pas refaire un putain d'attentat ?

- J'aurais voulu te promettre de ne rien faire mais en fait... non.

Mon sang frappe sous mon épiderme, j'arrache la peau de mes lèvres en essayant de relativiser.

Son sourire malicieux que je hais plus que tout est revenu, comme pour me hanter.

Je suis désormais persuadée qu'il va se passer quelque chose ce soir.

Avant d'ouvrir la porte, Malicia me balance un collier avec une pierre d'émeraude en guise de pendentif que j'accroche aussitôt à mon cou et un sac à main noir en forme de petite pochette pour rappeler la couleur de mes talons ouverts.

En un instant nous nous retrouvons à nouveau dans sa limousine noir avec le chauffeur aigris au volent.

Le chemin silencieux me donne malheureusement le temps de repenser à cette dispute avec Thomas.

Puis j'imagine aussi la tête de Noa quand il a reçu la video.

Puis je réfléchis à ce que fait Josie depuis qu'on a arrêté de se parler.

Puis la culpabilité prend complètement le dessus sur moi même

J'ai beau essayer de dormir pour ne pas penser à tout ça et libérer ce qui occupe mon cerveau, ça semble impossible.

- Nous sommes arrivés mesdemoiselles.

Déjà ?

- Allez, descends.

J'ouvre la portière dans un geste rapide pour ne pas les faire attendre plus longtemps.

Je n'ai même pas observé le chemin pour arriver ici, peut-être qu'ils m'ont emmené dans une cave pour me séquestrer.

- Pourquoi tu fais cette tête ? Avance, c'est par là.

Les deux paumes de ses mains se posent sur mes omoplates pour me pousser en direction de l'énorme tente blanche.

Je traine pratiquement mes pieds jusqu'à l'entrée qui se fait drôlement bruyante pour une petite fête.

Malicia enlace nos deux bras ensemble avec force avant de me chuchoter quelque chose.

- Maintenant, ne me lâche plus jamais de la soirée.

Je n'acquiesce pas et me contente de faire le premier pas dans la salle rempli d'inconnus.

Les lumières jaunes m'aveuglent sur le coup, je dois fermer les paupières quelques instants avant de percevoir la salle.

La majorité des décos sont beiges, blanches et jaunes ce qui donne une ambiance cozzi à l'espace.

La simple tente ressemble désormais à une salle de mariage élégante.

Les gens par contre, sont habillés dans toutes les couleurs de l'arc-en-ciel et ressortent bien dans le décor.

- Tu as vu quelqu'un de Waterfalls ?

- Non.

J'ai mentis, bien évidemment.

J'aperçois le groupe de Karim et ses amis en train de faire un Beer Pong dans un coin mais je ne veux absolument pas qu'ils nous remarquent ensemble.

Ma robe traine par terre quand on s'avance pour s'approprier une table

J'ai la sensation que certains regards mauvais sont posés sur moi et le fait de savoir qu'il y'a des hommes de la vingtaine ici ne me rassure pas trop.

Malicia à mes côtés n'arrange rien, elle fait même monter l'angoisse en moi.

- Noa... tu penses qu'il viendra ?

- Oh il a intérêt. De toute façon il sait qu'il n'a pas le choix.

Je la regarde, ahurie par ses paroles qui sont sorties avec un ton bien trop désinvolte à mon goût.

Ça ne m'étonnerait pas qu'elle l'ait à nouveau menacé au briquet.

À cet instant, un grand jeune homme aux cheveux noirs brillants baisse sa tête pour rentrer dans la tente.

Tous les regards se braquent sur lui, plus particulièrement ceux des filles, dont le mien.

Ça aurait pu, mais ce n'est malheureusement pas Noa.

Lui n'a pas de traits asiatiques, il a plutôt un air latino.

Un air qui me semble familier d'ailleurs.

Le grand roux qui le suit de près me fait tout de suite avoir le déclic.

C'est la bande de Thomas au complet qui se ramène, ils vont faire succès j'imagine.

L'idée d'imaginer déjà toutes ces filles succomber aux charmes de ces dealers me dégoûte.

J'écrase ma joue gauche sur mon poing en attendant que le spectacle se termine.

- Tu les connais ? Ils sont canons.

- Non, jamais vu de ma v-

- Enola ! Me coupe brusquement Marcus en criant à l'autre bout de la salle.

Il accourt vers moi un grand sourire aux lèvres et me prend dans ses bras comme si nous étions amis de longue date.

Je vois le regard accusateur et pleins de questionnement de Malicia du coin de l'oeil.

- Hum, qui êtes vous ?

Je le repousse légèrement en faisant mine de ne pas remarquer qu'absolument toutes les personnes se sont arrêtées de danser pour nous juger.

- Bah c'est moi, Marcus. Tu sais l'autre fois dans la piscine et puis aussi le jour où-

J'imite un petit rire nerveux pour le stopper rapidement.

- Ah oui, je vois que t'es pas dans ton état normal. Tu dois sûrement confondre avec une autre fille... Marc c'est ça ?

- Marcus ! Fais pas ta connasse, tu me reconnais très bien.

Je fronce les sourcils et effectue un mouvement de recul en zieutant autour de moi.

- Quelqu'un connaît cette homme ?

- Marcus !

Un de ses amis l'appelle finalement.

Il était temps.

Il me guette de haut en bas avec une mine boudeuse avant de se précipiter vers son groupe.

C'est seulement maintenant que je remarque qu'il est au complet désormais, dont Thomas.

Oh... il a l'air si... parfait ?

Il rit de bon cœur, ses dents sont si blanches qu'elles semblent fausses.

J'ai un petit pincement à la poitrine, le voir là, avec tous ses amis, à rire comme si de rien était alors que moi je suis là à ressasser notre dispute.

Ses mains sont enfoncées dans ses poches toujours avec son air nonchalant tandis qu'une bande de filles, majeures je dirais, se lance finalement pour aller leur parler.

Elles sont si belles, elles ont toutes leurs chances d'obtenir chacun le numéro d'un d'eux.

La première attaque directement avec Thomas, c'était prévisible.

Elle lui fait son plus beau sourire et après quelques échanges, il sort son portable de sa poche.

Il lui donne son numéro aussi facilement ?

De toute façon à quoi je m'attendais ?
Ça reste Thomas Johnson, le plus grand dragueur du quartier.

La main de Malicia se met à claquer des doigts devant ma figure à répétition.

- Lola !

- Quoi !

- C'est qui tous ces gars et pourquoi Thomas les connais ?

- J'en sais rien !

Ses traits se froncent durement, elle est contrariée par ma réponse.

Elle a l'habitude d'avoir le contrôle sur tout le monde, l'arrivée de ce gang inconnu doit sûrement la perturber.

- Ça se voit à cinquante kilomètres que tu les connais, maintenant explique moi !

- J'ai aucune idée de qui ils sont d'accord ? Fiche moi la paix.

Son escarpin écrase d'un coup sec mon doigt de pieds en dessous de la table.

Je pousse un cris étouffé en me tortillant sur moi même sans voir que la troupe de filles se trouve maintenant juste face à moi.

Elles passent non sans me lâcher un regard méprisant plein de dégoût.

Je fronce les sourcils en attente d'explications à ce regard hautain mais la première se contente de lever les yeux à s'en décoller la rétine.

- C'est quoi leur problème ?

Ma question n'obtient bien évidemment aucune réponse.

Peut-être que Johnson leur a raconté que j'étais la salope de Toronto ou un truc du genre.

Ça ne m'étonnerais pas.

- Allez viens, on va danser !

Sa réaction était si soudaine que je me lève pour examiner la piste de danse.

Comme je m'y attendais, Noa se trouve au centre, d'où son exclamation si surprenante.

Je ne sais pas comment il est arrivé là bas sans que je ne le vois mais je pourrais parier ma vie que lui, il m'a déjà aperçu.

- Vas-y sans moi, je te rejoins-

- Non ! Elle me tire le bras à m'en décrocher l'épaule. Tu fais tout ce que je te demanderais ce soir, t'as pas intérêt à encore faire foirer mon plan.

De toute façon, un jour ou l'autre, il aurait bien fallu que j'affronte Noa pour qu'on s'explique.

Je lance un dernier coup d'œil à Thomas qui ne dédaigne toujours pas me regarder puis m'élance avec Malicia sur la piste pleine de lycéens.

Elle lève ses mains en l'air et se trémousse comme les autres.

J'affiche une mine de dégoût sans même m'en rendre compte, la situation me met mal à l'aise.

- Mais allez danse !

Ses yeux deviennent noir, c'est étrangement terrifiant, comme si la rage prenait parfois possession de ses iris.

Je m'exécute alors très rapidement et me mets à danser comme une idiote effrayée.

Je n'ai pas la vue extérieure de mes mouvements mais vu la façon dont les gens me scrutent, ça ne doit pas être très beau à regarder.

- Je ne pensais pas te voir ici, à danser comme une folle, et avec Ciliama en plus.

Il a chuchoté si doucement dans mon tympan qu'il m'a fallu quelques secondes pour comprendre que quelqu'un me parlait.

- Qu'est ce que ça peut te faire ?

Je continue à lever les bras et me force à rire pour avoir l'air de m'amuser comme Malicia et tous les autres.

- Tu penses pas que c'est à moi d'être en colère cette fois ?

Il marque un point.

Je me mords les lèvres sans rien dire, tout simplement parce que je n'ai pas réfléchi à comment m'expliquer.

Comment lui expliquer que je commence à ressentir des sentiments pour son meilleur ami depuis quelques temps ?

Sa patience s'est écoulée, il enroule ses doigts froids autour de mon poignet et me tire contre lui.

Nos bustes s'entrechoquent, j'ai si honte que je n'ose même pas lever la tête.

Je fixe les boutons noirs de sa chemise parfaitement taillée pour lui.

- Je dois te forcer à me regarder ?

Il soulève lentement mon menton et nos regards se croisent enfin, depuis une éternité je dirais.

Ses yeux n'ont pas changé, ses pupilles sont toujours de la même couleur mais...

Une lueur de déception semble gravée quelque part dans le fond, elle semble cachée mais si simple à décrypter en même temps.

Il est déçu de moi.

- Lola.

- Hum ?

- J'ai vu la vidéo.

Mon regard se baisse à nos pieds, j'en reste immobile.

Je le savais déjà, mais qu'il le dise à voix haute m'a donné un haut le coeur.

Mes côtes me font soudainement souffrir ainsi que ma poitrine qui se rétracte.

- Pourquoi ? Je veux juste savoir... pourquoi ?

Il n'est pas énervé, c'est déjà ça.

Sa voix est d'ailleurs plus posée que d'habitude, rassurante, mais pas assez pour que je sois à l'aise actuellement.

- Est ce que... est ce que tu l'aimes ? Thomas ?

La fameuse question.

- Non ! Enfin je... non. J'en sais rien... je ne pense pas que ce soit de... l'amour.

- De la simple attirance sexuel donc ?

- Non ! Je m'écrie à nouveau tandis qu'il reste totalement calme. Non, c'est pas ça non plus. Je vois Thomas comme bien plus qu'un simple... corps.

Malicia s'est finalement aperçu de ma disparition et à l'air de me chercher avec attention dans chaque recoin.

- Et moi ?

- Hein ?

Je ne suis pas sûre d'avoir écouté.

- Est ce que tu m'aimes ?

Oh.

C'est... direct.

Mes lèvres sont scellées, impossible de les ouvrir à nouveau.

Je n'ai pas la réponse à cette question et la simple idée d'en avoir une me fait si peur que je ne pense pas la dire à voix haute un jour.

- Je ne sais pas, désolée.

- Est ce que ça t'amuse de jouer avec nous deux ? Je veux dire, avec nos sentiments.

Mes yeux deviennent ronds et s'agrandissent subitement.

Il pense vraiment... ça ?

C'est vrai que ça en a tout l'air effectivement.

- Non, si tu savais, j'aimerais être capable de choisir mais... c'est comme si j'avais un blocage.

- Si tu mets trop de temps à prendre une décision, il peut arriver qu'il ne reste plus rien à la fin.

Je ravale ma salive avec énormément de difficulté.

Il vient implicitement de me dire de me dépêcher ou ils vont finir par tous les deux me lâcher.

Je cligne lentement des yeux à plusieurs reprises sans savoir quoi ajouter face à ça.

- Qu'est ce que tu foutais dans ce garage à poil avec Thomas ? C'est une question qui me tracasse depuis hier.

Oh la connasse.
Elle m'a vraiment filmé au mauvais moment.

- On était au cimetière et... on s'est fait suivre par Malicia donc je... enfin c'est une longue histoire tu vois ?

Il acquiesce avec un sourcil levé et un regard inquisiteur.

Ça n'a pas l'air de le convaincre.

- Vous avez... est ce que vous avez couché ensemble ?

- Non !

- Tant mieux.

J'ai un petit mouvement de recul, un rictus scotché aux lèvres.

- Pourquoi ça ?

Je croise mes bras devant ma poitrine en plissant les yeux.

Un sourire malsain vient se dessiner sur ses lèvres fines.

Il pose une main sur mon épaule et se penche pour me chuchoter une phrase.

- Je n'aimerais pas passer juste après que Thomas y soit déjà allé, si tu vois... ce que je veux dire.

Je cache mon gloussement dans un raclement de gorge.

- Qui te dit que tu y passeras ?

- T'es si facile à-

- Laisse moi te rappeler qui était au dessus la dernière fois ?

Il ricane et je le suis sans cacher mon rire cette fois.

Ça faisait longtemps qu'on avait pas juste rit comme ça ensemble, ça m'avait manqué et je peux voir sur son visage qu'à lui aussi.

La réalité nous rattrape un peu trop vite puisque deux mains se posent sur mes épaules pour me secouer et je sais déjà à qui elles appartiennent.

- T'étais où ?!

- Toujours là pour nous gâcher la vie, n'est-ce pas ?

- Je t'avais dis de ne pas me quitter ! On devait faire semblant d'être meilleures copines devant Noa bordel !

Le principal concerné sort de derrière moi, un grand sourire aux lèvres en agitant sa main.

- Hey, je suis là au cas où hein.

La mâchoire de Malicia tombe au sol, et ses yeux redeviennent noirs de rage comme il y a quelques instants.

Mes dents disparaissent, vaut mieux ne pas sourire lorsqu'elle est comme ça.

- Lola, vient avec moi tout de suite.

- Hum non, elle reste avec moi.

Les deux tiennent un de mes bras et commencent à me tirer telle une partie de tir à la corde.

J'ai la sensation que je vais me casser en deux quand tout à coup, la musique et toutes les lumières s'éteignent.

Mes pieds restent accrochés au sol, mes membres sont tétanisés.

Tout le monde fait le silence, puis à peine cinq secondes plus tard, tout ce rallume et la fête reprend comme si de rien était.

Ceci... n'était absolument pas un hasard.

Les événements qui sont arrivés dans ma vie depuis la rentrée me l'ont appris, ce qu'il vient de se passer était forcément prévu et quelque chose a du avoir lieu durant ces cinq putain de secondes.

- Malicia, me dit pas que c'était encore un de tes stupides plans, je t'en supplie.

Elle ne répond pas à Noa et fait demi tour en agitant ses cheveux et en se dandinant.

Au moins, on est fixé.

- Je vais au toilette.

J'abandonne Noa pour aller reprendre mes esprits dans un coin tranquille, il me faut de l'air, tout de suite.

Je suis littéralement en ébullition, je croise tout un tas de gens de Waterfalls et même ma soeur qui roule une pelle à Marcus près du buffet.

J'atteins finalement les W-C mais quelqu'un me retient avant d'entrer.

Je sursaute et me retourne rapidement pour tomber face à face avec un homme bien trop âgé pour la tranche d'âge de cette soirée.

Il se gratte la barbe quelques instants en m'examinant avec précision.

- Salut toi, c'est Lola Davis n'est ce pas ?

- Qui êtes vous ?

Il éclate d'un rire rauque et flippant tout un sortant un objet de sa poche.

J'ouvre la bouche pour lui demander son nom mais un gros morceau de scotch vient se coller à mes lèvres.

Une personne que je n'ai pas vu m'attrape les bras par derrière et l'homme devant moi me soulève brusquement

- On va s'amuser, promis.

{ La suite dans le prochain chapitre }

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