Chapitre 29: Le lac du passé

Je n'arrive toujours pas à réaliser.

Une petite partie de moi imagine que la scène qui vient de se produire n'était qu'un très mauvais rêve.

Malheureusement les cendres de ce qu'il reste de mon précieux carnet qui s'émiettent au fond de la poubelle ne font qu'aggraver mon état.

C'est une toute autre sorte de douleur que je ressens à cet instant même.

J'ai réellement eu la sensation de brûler en même temps et maintenant il ne me reste plus aucune solution.

Tout en réfléchissant à la réaction de ma famille lorsque mon corps sans vie sera retrouvé, je me précipite dans l'entrée en faisant le moins de bruit possible.

Comme je m'y attendais, la moto plus crade que ma santé mentale de Noa y est garée.

Après une demi-seconde d'hésitation, je passe ma jambe gauche pour la chevaucher sans penser à un potentiel accident.

Mes deux mains effectuent un mouvement de poignet pour faire gronder le moteur, la sensation est bizarrement agréable.

J'ai bien observé tous les faits et gestes de Noa lorsqu'il conduisait cet engin, ça devrait être un jeu d'enfant.

Mon pieds sur la pédale, je commence à sortir de l'entrée pour atteindre la route.

Pour le moment tout se passe bien même si mes doigts tremblent d'appréhension.

Les deux roues du véhicule sont finalement sur la route publique, les choses sérieuses peuvent enfin commencer.

Je peux enfin m'enfuir, pour de vrai cette fois.

Je me débrouille plutôt bien quand il s'agit d'une ligne droite mais au moment où je dois tourner à gauche, mon coeur se contracte, mes sens s'agitent et je finis par faire un gros dérapage.

Mes yeux se sont fermés le temps du virage et je suis étonnamment surprise de me voir toujours assise sur le scooter lorsque je les ouvre.

Ça va, plus de peur que de mal.

Le reste du trajet se passe dans la peur mais sans égratignure.

Les larmes ne franchissent pas la barrière de mes yeux pour une raison que j'ignore.

J'ai probablement déjà utilisé tout mon stock pour l'année.

Aucun mot ne s'est échappé de ma bouche non plus, ils restent dans ma tête à tourbillonner et à s'emmêler entre eux.

Ces mots que j'avais l'habitude de poser sur un bout de papier puisque personne n'a jamais pris la peine de les écouter.

Les paysages défilent devant mes yeux, tous aussi beaux qu'une page Pinterest.

J'ai la chance que les rues soient assez vides, mais le bruit est si inexistant que mon cerveau se permet de réfléchir en continu.

Est ce que c'est la bonne solution ?

Comment vont-ils réagir ?

Que va t-il se passer après ?

Et bien, je suppose que le vent continuera de frapper, la pluie de tomber et le soleil de briller.

Une vie en moins a tellement peu de signification, dans le cas contraire le monde s'arrêterait de tourner, mais ce n'est pas le cas.

Je me laisse tellement déstabiliser que je frôle un tronc d'arbre qui m'aurait sûrement tué sur le coup.

Les feuilles tombent encore malgré l'automne déjà écoulé depuis quelques mois.

Nous sommes maintenant presque au printemps et pourtant, l'hiver continue de me glacer le sang à chaque seconde qui passe.

Dans la précipitation je suis partie sans mon casque, un regret qui reste coincé dans ma gorge lorsque j'arrive enfin à l'endroit que je cherchais.

J'esquive les longs sapins qui bougent au gré du vent et m'immisce à l'intérieur de cette petite fôret qui m'a toujours intriguée.

Au moment de freiner, je panique.

J'appuie partout et agite mes pieds dans tous les sens mais ça ne suffit pas à arrêter le véhicule qui continue de descendre la pente dangereusement.

Mes yeux s'ouvrent et s'écarquillent, je fonce tout droit sans contrôle sur la moto que je conduis jusqu'à ce que ma roue avant cogne quelque chose de dur et que mon corps soit propulsé en avant.

Je retombe sur des galets trempés par la boue, ça fait mal, mais jamais autant que ce qui se propage actuellement au fond de moi.

Je m'excuse intérieurement pour la moto de Noa que je viens sûrement de rayer un peu partout, de toute façon je ne serais plus là pour me faire engueuler.

J'essuie d'un geste bref mes vêtements en me relevant et c'est là que mes yeux se posent sur un magnifique et gigantesque lac bleu marine.

J'en suis si ébahie que ma bouche s'ouvre pour former un grand « O ».

Je n'ai jamais vu une création aussi belle de la nature, c'est exactement l'endroit que je cherchais.

Quelques flashbacks de ma misérable existence passent à répétition dans mon esprit mais je n'y prête pas plus d'attention et jette mes chaussures loin de moi.

Après un dernier coup d'œil autour de moi, j'avance pas à pas en direction du lac qui s'agite tranquillement.

Mes pieds touchent finalement l'eau et j'ai un petit mouvement de recul.

C'est gelé, encore plus que la piscine de Thomas.

Je prends une longue et puissante inspiration et sans réfléchir plus que ça, je cours et saute à l'intérieur les paupières closes de toutes mes forces.

C'est froid, extrêmement froid, si froid que j'en oublie mon prénom et absolument tous mes problèmes.

C'est ce qu'il me fallait.

Mon corps tourne sur lui même à une lenteur inconsidérable, mes membres semblent s'immobiliser et le sang stagne à l'intérieur de ma peau, désormais incapable de circuler normalement.

J'ai la stupide idée d'ouvrir mes yeux le temps d'une seconde mais je les referme soudainement à cause des picotements qui se propagent actuellement sur ma rétine.

Je m'enfonce de plus en plus, l'eau passe par mes narines et s'installe petit à petit dans mes poumons, exactement comme la fumée qui a failli me tuer il y a quelques semaines.

Il m'a fallut un peu de temps, mais désormais mon épiderme s'est habitué au froid et je ne ressens plus rien.

Je me mets en position étoile et compte jusqu'à trois dans ma tête avant de lâcher ma dernière expiration.

3...

2...

1...

Dernier souffle.







Aïe !

Quelqu'un m'attrape par les épaules et me secoue.

Je n'ouvre pas les yeux, l'eau ralentit chacun de mes mouvements tandis que je me débats avec force.

Ses cris se dispersent sans percuter mes tympans, ce ne sont que de simples bruits de bulles que j'entends.

Aïe !

Laissez moi !
Laissez moi tranquille !
Laissez moi mourir !


Mes larmes salées s'écoulent enfin pour se mélanger à l'eau glaciale du lac sombre.


Aïe !

La personne continue de me frapper comme pour me réanimer.

Non, non je ne veux pas me réveiller !

Va t'en !

Va t'en !

Va t'en...


Une dernière secousse me parvient mais c'est trop tard pour me ramener à la surface, l'air me manque.

Je n'ai plus... d'air.





- Qu'est ce qu'il vient de passer ?

Tout à coup, j'ai l'impression de revivre, je me lève dans un coup d'élan mais mes jambes retombent sur elles mêmes.

Je pose la paume de ma main dessus et m'aperçois qu'elles sont gelées, tout comme le reste de ma peau trempée.

Je crache de l'eau dans l'herbe tout en m'étouffant.

Je ne sais pas où je suis et comment j'ai atterri ici.

Un tee shirt noir est posé sur mes genoux, ce n'est que maintenant que je le remarque.

Je passe mes doigts dans mes boucles mouillées toujours sans comprendre pourquoi j'ai l'air de sortir d'une douche toute habillée.

Une voix au loin m'appelle quand je m'étouffe à nouveau mais je n'y réponds pas, l'impression d'être bloquée dans un rêve.

Il recommence, et cette fois-ci, sa voix s'approche dans mon dos.

- LOLA ! Tu t'es réveillée ?!

- Non, je dors.

Je secoue la tête sans prendre la peine de me tourner pour apercevoir la personne qui se trouve dans mon dos.

Je bouge les articulations de mes doigts de pieds qui avaient l'air congelé depuis un bout de temps.

Deux mains se posent sur mes épaules et tout à coup, c'est comme si son contact m'avait ramené à la réalité.

Soudain, tout s'éclaire, je me souviens d'absolument tout et manque de m'évanouir à nouveau.

J'étais dans l'eau après mon dernier souffle, prête à mourir, quand quelque chose s'est mise à me secouer dans tous les sens.

Je pensais avoir rendu l'âme avant qu'il ne puisse me ramener à la surface pourtant.

- Même crever j'y arrive pas putain... je marmonne en oubliant totalement toute présence autour de moi.

- Toujours là pour t'en empêcher.

Cette fois mon cerveau est assez réveillé pour analyser et reconnaître cette voix.

Je tourne ma tête doucement et tombe sur le visage que je ne voulais absolument pas voir.

- Toi.

- Oui, moi.

- Fallait s'y attendre. Soufflé-je plus désespérée que jamais.

- Bien évidemment, qui d'autre que ton prince charmant pour te sauver de la noyade ?

- Parfois un prince charmant doit apprendre à se mêler de ses couilles et laisser sa princesse mourir en paix.

Noa se laisse tomber dans l'herbe à mes côtés sans prononcer un mot de plus.

On se dévisage mutuellement pendant plusieurs minutes qui me semblent interminables.

Ce moment fait désormais parti des minutes les plus gênantes de ma vie.

- Quelle goutte d'eau a fait déborder le vase ?

J'hésite d'abord à lui dire puis au point où on en est.

- Mon père a brûlé mon carnet. Avec le briquet de Malicia, tu sais celui qu'elle a amené avec elle lors de sa petite visite dans ta chambre l'autre soir.

Son expression passe de la surprise à la culpabilité.

J'en ai marre de voir la culpabilité affiché sur son visage à chaque fois qu'il me déçoit.

Voyant qu'il ne dit toujours rien, je me lève avec difficulté mais finis tout de même sur mes deux pieds.

- Où tu vas ?

- Acheter un flingue, si je me tire une balle tu pourras pas me sauver cette fois.

- J'espère de tout coeur que c'est du sarcasme. Il grince en enfonçant ses doigts dans la terre.

- Espère très fort dans ce cas.

Je ne sais pas s'il s'attendait à des remerciements mais jamais au grand jamais je le remercierais de m'avoir empêché d'en finir pour de bon.

La moto n'est plus là où je l'ai laissé, Noa a du l'emmener autre part.

Je n'ai donc aucun moyen de m'échapper, mise à part utiliser mes jambes mais le froid les a complètement tétanisé.

- Tu as besoin de quelque chose ?

- Pas de toi en tout cas.

Mes mots rebondissent sur son visage et s'écrasent si fort que tous ses traits s'effondrent.

J'oubliais qu'il suffisait que je réponde de façon froide pour qu'il change complètement d'attitude.

- Tu as dis que tu me dévoilerais tout un jour, je commence en croisant mes bras tremblotants devant ma poitrine, ça fait une semaine. J'attends tes explications.

- Pas... pas aujourd'hui.

Mes yeux s'assombrissent en un instant si rapide qu'il effectue un pas en arrière.

Je suis déjà tout particulièrement sur les nerfs et mon corps entier tremble de froid.

- Si t'es pas capable de m'en parler et bien...

- Mais attends !

Sa peur s'est envolée puisqu'il se trouve maintenant à quelques centimètres de moi après avoir survolé la distance qui nous séparait.

- J'ai attendu assez longtemps.

- Je te jure, je rêve de t'en parler mais...

Il pose ses deux mains sur mes épaules que je retire aussitôt avec un mouvement de défense.

- Mais quoi ! J'hurle à pleins poumons pour déverser tout ce qui était bloqué au plus profond de mes organes.

Les sapins qui forment un grand cercle autour de nous se balancent si fort qu'ils pourraient se déraciner du sol.

Le vent balaye mes cheveux qui me bloquent la vue sur le visage pâle de Noa.

Ce n'est que maintenant que je me rends compte qu'il est lui aussi trempé jusqu'aux os et claque des dents depuis tout à l'heure.

- J'y arrive pas ! Sa voix sort enfin de ses cordes vocales qui semblaient s'être déchirées.

La colère ainsi que l'impatience montent en moi, et j'ai beau essayer de me calmer, ça n'a jamais donné un très bon résultat.

Mes doigts passent sur mon crâne et dans les noeuds de mes cheveux pendant que je tourne sur moi même.

- J'en peux plus ! J'en peux plus de tes secrets de merde, j'en peux plus de toutes tes erreurs qui s'accumulent et j'en peux plus d'être constamment surveillée par quelqu'un !

La distance entre nos deux corps en ébullition se réduit une nouvelle fois, ses yeux ne me lâchent pas tandis que j'attends une réponse de sa part.

- Si tu savais comme j'en ai envie mais-

- Dis le !

- Je...

Sa phrase ne s'achève pas, il baisse la tête et attrape violemment la mienne sans perdre une seconde.

Nos lèvres se rencontrent pour la première fois et se lient comme si elles étaient faites l'une pour l'autre.

Mon cerveau s'éteint automatiquement, je n'arrive plus à penser à rien.

J'aimerais me détacher de lui mais c'est comme si quelque chose m'en empêchait.

Ses lèvres brûlantes font monter la température de tout mon corps, il les entre-ouvre pour laisser place à ma langue qui rejoint la sienne pour s'emmêler langoureusement.

C'est comme si mon coeur criait: enfin !

Le monde a arrêté de tourner tout autour de nous, c'est une sensation que je n'ai jamais connue, ce n'est pas comme avec Thomas, c'est mille fois mieux.

Noa se détache de moi mais garde ses mains de part et d'autre de ma tête pour m'admirer de plus près.

Son souffle chaud se propage sur mon visage essoufflé et mouillé.

Je vois mon reflet dans le fond de ses yeux et le simple fait de penser à ça me rappelle ce fameux jour.

- Pourquoi t'as fait ça. Je chuchote tout bas.

- J'en avais envie. Depuis très, très longtemps.

- Et tu t'es dis que le moment le plus approprié c'était maintenant ?

- Je n'aurais pas pu patienter une minute de plus. Tes yeux ont un trop grand effet sur moi et ta bouche m'appelait.

Tu as bien fait de céder, ou je l'aurais fait en première.

Il m'a fallut quelques temps mais je percute enfin ce qu'il vient de se passer et me recule en fronçant les sourcils.

Comment c'est possible ?
Il y a à peine une minute on se gueulait dessus.

- Si c'est une sorte d'envoûtement pour que j'oublie tout et te pardonne, sache que ça ne fonctionnera pas !

Ou peut-être bien, si.

- Bravo, tu as tout compris.

Il enroule ses grands bras protecteur autour de mes hanches mais je ne dois pas me laisser me laisser bercer dans ses muscles.

- Oh du calme ! C'est toi qui m'a embrassé pas l'inverse. Je n'ai jamais dis que j'allais te reparler.

Il baisse soudainement les yeux en direction du sol et prends une longue inspiration.

- Lola ?

- Dis moi.

- Tu t'es souvent posé des questions sur ma vie avant d'arriver au Canada n'est ce pas ?

- Ça m'est arrivé quelques fois, oui.

Autrement dit, absolument tous les soirs.

- Si tu me promets de fermer les yeux et de ne jamais me regarder, je veux bien tout t'expliquer.

- Tout ? Je m'extasie les yeux brillants d'espoir.

- Oui absolument tout.

Ma colère s'évapore peu à peu mais quelque chose me dérange tout de même.

C'était plus simple de partir si j'en voulais à Noa mais si on se réconcilie je ne sais pas si j'aurais encore le courage pour le quitter.

J'aurais du mourir, pourquoi je suis là à m'installer sur l'herbe pour l'écouter raconter toute son enfance ?

Je l'aime.
Alors je le fais quand même.

Il s'allonge dos à moi et clos ses paupières doucement, le vent frapper notre peau mais ça importe peu.

- Essaie d'imaginer absolument toute la scène dans ta tête, ça t'aideras à comprendre mieux.

J'hoche la tête mais me rends compte plus tard qu'il ne peut pas me voir.

- Donc... tu sais déjà que je suis né en Corée du Sud, dans la capitale, et que j'y ai passé toute mon enfance.

Il prend une pause comme pour se replonger dans le passé, je le sens d'ici que c'est difficile pour lui.

- Mes parents étaient cuisiniers et tenaient un petit restaurant peu connu dans un village près de Séoul. Ça n'a jamais vraiment trop marché pour eux et les fins du mois commençaient à être compliqués à payer.

J'avale difficilement ma salive en prenant compte des informations qu'il me dévoile.

Je l'imagine jeune, dans une petite maison traditionnelle, qui écoute de la musique dans sa chambre pendant que ses parents se disputent pour une histoire d'argent.

- De ma primaire à ma seconde, j'ai toujours habité en face de ma cousine, Ciliama Park.

- C'est... original comme prénom. Je me permets de l'interrompre.

- Bizarre hein ? Ciliama s'est longtemps faite harcelée pour son prénom hors du commun puis pour son physique. À l'époque elle avait des kilos en trop, ma mère lui faisait d'ailleurs aussi beaucoup de remarques là dessus.

Oh, pauvre Ciliama, je la comprends en quelques sortes.

Même si les remarques venaient de sa tante, elles sont toujours douloureuses lorsqu'elles viennent de la famille.

- Je l'aimais beaucoup, j'adorais la regarder jouer aux poupées après les cours et quand on était jeune j'avais un petit faible pour elle.

- T'étais amoureux... de ta cousine ?! Je me redresse subitement pour le confronter.

Il ouvre lui aussi les yeux et tourne maladroitement sa tête vers moi.

- J'étais en sixième !

- C'est quand même hyper bizarre !

- Tais toi !

- Ok !

On se rallonge sans rien dire de plus, vaut mieux ne pas approfondir sur ce sujet apparemment tabou.

- Bref, les parents de Ciliama étaient eux aussi cuisiniers et avaient un restaurant très réputé dans la ville. Ils gagnaient beaucoup d'argent au vu du monde qui s'y ruait chaque jour.

Il raconte tout ça telle une légende très ancienne, c'est apaisant d'écouter sa voix.

- Un jour mes parents ont pris la décision d'ouvrir un nouveau restaurant juste à côté de celui des Park. Ils ont eu beaucoup de succès, tellement qu'ils ont fini pas leur voler la vedette et les parents de Ciliama ont fait faillite.

Je plaque ma paume sur ma bouche pour éviter de lâcher à nouveau un commentaire inutile.

C'est vraiment débile de provoquer des disputes de familles bêtement pour une histoire de travail.

Quelle idée de s'installer juste à côté ?

- Après ça, nos parents étaient en froid et les siens lui ont formellement interdit de m'adresser à nouveau la parole. Je la voyais chaque jour se faire insulter et frapper mais j'étais impuissant à la situation.

Est ce que c'est pour ça qu'il tenait tant à ce que les garçons arrêtent de m'harceler ?

Peut-être se sentait-il encore coupable pour cette histoire.

- Un jour... un jour je...

Il se coupe à nouveau, incapable d'articuler un mot de plus.

Je passe ma main derrière mon dos pour attraper la sienne en signe de soutien.

- Un jour je rentrais des cours, et... et il y avait la police dans mon salon.

Oh mon dieu.

Mon coeur se resserre, j'appréhende ce qui suit.

- Ils ont arrêté mon père. Ils... ils lui ont passé les menottes juste devant mes yeux.

Je n'arrive même pas à imaginer à quel point ça a du être traumatisant pour lui de voir sa figure paternelle se faire emmener par des policiers alors qu'il n'était qu'au collège.

- Mon père était accusé de viol. Accusé d'avoir violé Ciliama.

- Quoi ?!

C'était trop d'informations en même temps, je n'ai pas pu garder cette exclamation en moi.

- Eh oui, Ciliama avait déposé une plainte la veille. Mon père n'a pas réussi à se prouver innocent et a pris une grosse peine.

Mais, comment se fait-il qu'il vive avec eux ?

Il n'a pas du faire beaucoup d'années de prison.

- Je passais chaque nuit à me demander si mon père était réellement coupable ou non. Je me demandais comment mon propre géniteur avait pu faire un acte aussi horrible. Je n'en dormais plus et c'est de là qu'ont apparu mes insomnies.

Tout s'éclaire maintenant, toutes ces choses de son passé expliquent le Noa du présent.

- Ma mère n'arrivait plus à s'en sortir toute seule, elle pleurait chaque jour et je me contentais de la regarder sans savoir quoi faire. Par la suite, leur restaurant a aussi fait faillite.

Tout s'enchaine, je n'arrive presque plus à tenir le fil de son histoire.

- Deux ans plus tard, l'affaire a été re-évalué et mon père était finalement innocent. Il est donc sorti de prison et par la suite nous avons tous déménagé au Canada pour prendre un nouveau départ, loin des Park et de notre ancienne vie.

Je suis sur le point de me relever, sûre que l'histoire s'arrête ici mais il me retient avec son coude.

Ah parce que ça continue ?!

- Lola, prends le prénom Ciliama et mélange les lettres pour en former un autre prénom.

J'arque un sourcil peu convaincu mais m'exécute tout de même.

AICILAM ? Non.

AMIALIC ? Non plus.

CILAIMA ? Je ne pense pas.

Je me creuse encore la tête jusqu'à ce qu'une révélation éclose dans mon cerveau.

Mais non...

C'est impossible...

- Malicia ? Je demande d'une voix tremblante.

- Oui. Ciliama est Malicia.

- Mais comment...

- Elle a changé son prénom et son nom avant de déménager au Canada. Elle a énormément maigri et fait de la chirurgie esthétique, elle avait tout prévu.

Je refuse d'accepter ces informations, que Malicia soit la cousine de Noa ?
C'est tout simplement impossible.

- Et depuis quand tu es au courant ?

- Ce jour là, lorsqu'elle a oublié son briquet, elle m'a tout avoué. Si elle ne m'avait rien dit je n'aurais jamais deviné. Le viol... c'était faux ça aussi. Ses parents l'ont forcé à inventer n'importe quoi pour faire tomber le restaurant de mes parents.

Mes lèvres tremblent de peur, je n'arrive plus à bouger, mes membres sont cloués au sol.

La seule chose qui s'affiche dans mon esprit est la tête de Malicia.

Ou devrais-je dire Ciliama.

- Mais pourquoi être revenue, et dans ton lycée ?!

- Elle veut m'anéantir. Elle veut me faire tomber moi et ma famille comme mes parents ont fait tomber la sienne. Malicia est prête à tout, elle est bien plus intelligente que ce que tu t'imagines, je t'assure que cette fille est sadique.

- Et dire que je pensais qu'elle était simplement amoureuse de toi.

Noa émet un petit rire nerveux sans se retourner pour autant.

- Jamais de la vie, si elle pouvait me tuer elle le ferait. D'ailleurs...

Oh non, je m'attends encore au pire.

- Tu te souviens de l'attentat au concert de Josie ?

Non...

- C'était elle. Malicia a réussi à trouver toute une armée de terroristes coréens qu'elle a emmené au Canada pour tuer une multitude de gens ce jour là. Dans le seul but de te tuer.

Ma tête bascule en arrière, je suis au bord de l'évanouissement et l'envie de vomir me parvient tout à coup.

J'aurais pu mourir ce jour là, elle a fait tout ça pour m'atteindre moi.

À cause d'elle, adultes et enfants sont morts pour rien.

- Le feu dans les toilettes, c'était fait exprès ça aussi. Tu aurais du mourir une nouvelle fois. Mais à chaque fois tu survis et ça a le don de la mettre sur les nerfs.

Quelqu'un veut ma mort.
Quelqu'un cherche à me faire tomber par tous les moyens.
Depuis le début elle me manipule, depuis le début elle rêve de voir mon corps inerte.

- Mais pourquoi moi ?!

- Parce qu'elle sait que tu es la personne à qui je tiens le plus au monde. Elle n'a pas eu besoin de beaucoup de temps pour s'en rendre compte. Ça l'amuse de mettre du temps à établir ses plans de merde pour me faire stresser encore plus. Chaque jour que je passe en ta compagnie m'angoisse parce que je ne sais pas de quoi est-elle encore capable.

Il a déversé ce monologue sans prendre une seule inspiration tandis que moi je n'arrive plus à reprendre mon souffle.

Trop de détails retombent sur moi et je n'ai pas assez de mains pour tous les attraper.

- Son briquet... elle l'a placé sous mon cou et... elle m'a fait jurer de ne plus m'approcher de toi où elle fera de ta vie un enfer.

Les yeux fermés je tends une main dans sa direction pour qu'il s'arrête.

Je n'arrive déjà pas à m'en remettre.

- Elle essaie de te voler tout ce que tu as Lola, elle t'a déjà pris Josie, bientôt elle va nous séparer. Je sais pas comment mais je suis sûr qu'elle parviendra à ses fins.

Mais comment... comment est-ce possible d'être autant obsédé par la destruction de quelqu'un ?

Elle ne vit que pour nous, elle ne vit plus pour elle.

Son but c'est de nous anéantir pour prendre enfin la vengeance de sa famille.

Et il a fallu que je me trouve sur le chemin de cette psychopathe.

- Mais comment peut elle trouver tout une armée de terroristes en si peu de temps, c'est insensé !

- Elle a ses contacts, elle est capable de tout. Elle a réussi à piéger la police pour mettre mon père en prison alors qu'elle n'avait que quatorze ans.

Finalement sur pieds, je tourbillonne de partout.

C'est donc ça qu'il me cachait.

C'est ça qu'il voulait tant me dire mais il n'osait pas.

- Et qu'est ce que... qu'est ce qu'on doit faire maintenant ? Attendre patiemment qu'elle nous détruise sans rien faire ?

C'est stupide de ma part de dire ça alors qu'il n'y a même pas une heure je faisais une tentative de suicide.

C'est étrange, mais si je dois mourir je ne veux pas que ce soit de cette façon.

Je ne veux pas que ce soit Malicia !

- On est pris au piège. Il ne faut surtout pas qu'elle apprenne qu'on se parle et encore moins ce qu'il s'est passé entre nous il y a quelques instants. Il suffit d'une seule rumeur comme quoi nous avons une quelconque relation et elle enclenchera son plan.

- Mais putain pour qui elle se prend ?! On est pas dans un film bordel !

Mes oreilles deviennent rouges à cause du froid et mon nez coule.

Mes mains tremblent le long de mon corps lâche.

Il fait quelques pas pour m'attraper le visage en coupe comme lorsqu'il m'a embrassé.

Ses pupilles ont quelque chose de rassurant mais cette fois ça ne suffit pas à faire redescendre la tension en moi.

- Je vais pas te laisser tomber pour Malicia, je te le jure Lola.

- Mais... elle pourrait aussi s'en prendre à toi cette fois.

- J'en ai strictement rien à foutre. Il souffle en collant son front contre le mien.

- J'ai peur Noa.

- Je sais, mais on va s'en sortir. Je te le promets.

{ La suite dans le prochain chapitre }

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top