Chapitre 27: Une journée pour pardonner
Le seul remède c'est la musique.
C'est la raison pour laquelle je me suis renfermée dedans durant toute la nuit.
Je pensais que les paroles suffiraient à recouvrir les pensées qui hantent mon esprit, malheureusement elles ne cessent jamais.
Les images et les phrases s'emmêlent et résonnent dans ma tête, ça en devient douloureux physiquement.
Même dormir je n'y arrive pas.
En ce quatorze février, j'aimerais seulement me jeter d'un pont, pour ne pas avoir à croiser une centaine de couple tout en sachant que la personne que je voulais est allée voir ailleurs.
Aïe.
C'était douloureux de le dire.
C'est drôle, après une rupture amoureuse difficile on pense souvent que plus rien ne nous atteindra.
C'est faux.
Ton coeur... il continue de se briser encore et encore et encore.
Mais j'ai espoir qu'un jour, la douleur ne se ressente même plus.
En attendant, j'ai mal.
Mais ça ne m'empêche pas de sourire à Amalia lorsque je sors de ma chambre.
- On passe la Saint-Valentin ensemble ou tu as quelqu'un cette année ?
- Oui, j'ai mon lit. Réfuté-je avant de continuer mon chemin.
- J'ai comme l'impression que tu me caches quelque chose. Est ce que N-
- Tais toi ! C'est sorti tout seul, je n'aurais pas supporté d'entendre son prénom.
Ma soeur fronce les sourcils sans pour autant s'énerver.
- Évite de... parler de lui, s'il te plaît.
- Ah, je peux connaître l'histoire ? Elle croise les bras devant sa poitrine et s'appuie sur le cadre de la porte à l'attente d'une réponse.
- En fait... non rien.
Impossible pour moi de décrire à nouveau cette scène.
Je jette un coup d'oeil sur son bureau rempli de feuilles.
- Va étudier, tu ne deviendras pas médecin par magie. Et puis... papa croit en toi. J'articule pour terminer.
Oui, papa ne croit pas en moi mais en toi.
C'est déjà ça.
Elle arque un sourcil mais retourne tout de même dans sa chambre, consciente que j'ai raison.
Il lui arrive d'être vraiment méchante, ou même parfois d'avoir une attitude de garce.
Mais depuis qu'elle est entrée à l'université, elle est constamment plongée dans ses copies et j'avoue qu'au fond, j'aurais aimé partager cette journée avec elle.
Seulement, ça aurait été trop dur de garder la face pendant un jour pareil.
Assise dans le canapé, j'écris un poème sur les étapes de la destruction d'un cœur dans mon carnet.
Mon petit être préféré se faufile par la porte fenêtre du jardin pour venir me rejoindre et se place sur mes genoux.
Après s'être bien installée, Rosa se met à miauler en direction de mon téléphone.
Je passe d'abord mes doigts dans son pelage en arquant un sourcil sans comprendre mais je finis par attraper mon portable que j'ai mis préalablement en silencieux.
Une notification de « Numéro inconnu » apparaît sur mon écran.
J'hésite quelques secondes puis clique dessus pour y lire le message.
La première phrase suffit à me faire un grand choc.
De Numéro inconnu
> Salut Lola, C'est Brad...
Brad ?
J'ai réussi à le bloquer il y a quelques semaines et finalement l'oublier pour de bon, pourquoi reprend-t-il contacte avec moi ?
> Comme tu sais aujourd'hui c'est la Saint-Valentin. J'aimerais profiter de cette journée pour te parler en tête-à-tête. Tu mérites des explications, rejoins moi au restaurant Canoe vers treize heures s'il te plaît.
C'est sérieux ? Pourquoi s'est-t-il réveillé tout d'un coup ? Et pourquoi maintenant ?
Ma main tremble en dessous de mon portable que j'éteins sans réfléchir.
Je regarde longtemps dans le vide avant de chuchoter à Rosa:
- Tu penses que... c'est une mauvaise idée ? Et si c'était un piège pour me séquestrer ou même me violer ?
Il n'a pas réussi lors de la soirée de Sacha, peut-être veut-il retenter sa chance ?
Rien que l'idée me donne des frissons de dégoût.
- En même temps... si je rate cette occasion, je risque de regretter toute ma vie.
Rosa relève la tête vers moi avec un regard accusateur comme si elle comprenait la connerie que je m'apprête à faire.
Des scénarios étranges se forment dans ma tête et mon sang se fige.
Pourquoi fallait-il qu'il rentre à nouveau dans ma vie ?!
Je ne sais pas si c'est la colère ou une simple montée d'adrénaline, mais d'un seul coup je me remets sur pieds.
Je vais y aller.
Probablement pour me prouver quelque chose à moi même.
Mon chat sursaute et s'enfuit après avoir poussé un cri de stupeur.
Elle gambade en montant les escaliers et je la suis pour rejoindre ma chambre lorsque je tombe sur Amalia une nouvelle fois.
- Depuis quand on a un chat ?
Ma soeur se penche pour la caresser mais Rosa s'échappe dans ma direction, je l'attrape dans mes bras comme pour la protéger.
- Depuis environ trois ans, tu n'avais jamais remarqué ? Quelle conne tu fais. J'affirme avec sarcasme.
- Si papa la voit, c'est fini pour elle. Il t'as déjà averti plusieurs fois que si l'on ramenait un chat dans sa maison, il le tuerait.
J'hoche la tête en déglutissant, comment pourrais-je oublier ?
- Sinon, débute Amalia en se grattant la tête, il se pourrait que j'ai un date finalement.
J'ouvre de grands yeux pour paraître surprise même si en réalité je ne suis absolument pas choquée.
Amalia est magnifique dans n'importe circonstance, ce n'était qu'une question de temps avant qu'un garçon lui fasse des avances.
- Et alors quoi ? Tu veux une médaille ?
Elle roule des yeux en croisant ses bras.
- Non, je sais pas quoi me mettre !
Sérieusement ? Avec sa gigantesque garde-robe ?
On croirait un caprice d'enfant gâté.
- Tu te fous de ma gueule ? T'as au moins cinquante robes dans ton armoire. Ouvres le, tu verras.
Elle me tire par le poignet pour m'emmener dans sa chambre.
Son placard est ouvert et laisse une vue sur ses innombrables vêtements de toutes les couleurs.
Putain on se croirait à Zara mais elle arrive quand même à se plaindre.
Mes doigts défilent sur tous les tissus puis s'arrêtent sur une robe blanche en velour qui a attisé ma curiosité.
Je sors le cintre et la détaille de haut en bas avec attention.
- Tu penses que ça m'irait ?
- Non, je marmonne toujours en admirant le vêtement, c'est pour moi.
J'affiche un grand sourire à Amalia avant de m'éclipser de sa chambre.
L'horloge accrochée dans ma chambre indique douze heures alors je m'empresse d'enfiler ma tenue.
Une fois la robe sur moi et mon maquillage fait, j'en viens à me demander pourquoi je fais autant d'efforts pour lui.
Quelle est ma véritable intention ?
Peu importe, je secoue la tête et termine ma coiffure qui est une simple queue de cheval haute plaquée avec trois tresses.
Mon casque bien positionné sur ma tête, Slow Down de Chase Atlantic résonne agréablement dans mes tympans lorsque je tourne sur moi même devant le miroir de la salle de bain.
Mon bustier droit sans bretelles serre ma poitrine et descend jusque mes hanches là où la robe s'évase avec deux fentes qui caressent mes chevilles.
Bien évidemment j'ai le malheur de devoir rajouter à ça un collant couleur chair ainsi qu'une petite veste en jean clair.
Mon petit sac à main rouge sang fait ressortir le tout.
Je dévale les escaliers quand j'ai la mauvaise surprise de tomber sur ma mère qui se lime les ongles, confortablement installée dans son fauteuil.
J'ai l'impression qu'elle fait exprès de toujours être dans le salon lorsque je sors bien habillée.
- Tu vas où ? Sa voix sonne comme une alarme incendie bruyante et énervante dans mon crâne.
- Chercher l'amour d'une mère. Je déclare sèchement avant d'enfiler rapidement des escarpins rouges bordeaux.
Non pas que j'ai arrêté de complexer sur ma taille, je veux seulement lui montrer que je peux faire le contraire que ce qu'elle me demande.
Sa bouche est grande ouverte quand je claque la porte derrière moi sans un regard pour elle.
Je change ma playlist de Chase Atlantic pour mettre du Lana Del Rey, j'ai besoin de m'apaiser après lui avoir parlé.
Le bus met une éternité à arriver c'est pourquoi j'envoie un message à Brad pour lui prévenir de mon retard.
De Numéro inconnu
> Pas de soucis, prend ton temps.
Oh wahou, Brad un gentleman ?
Ça m'étonne.
Je rate presque mon arrêt à force de réfléchir au pire qui pourrait arriver.
Mes talons claquent de plus en plus en fort au point où j'en deviens mal à l'aise, la sensation que tous les regards sont posés sur moi revient une nouvelle fois.
La rue qui mène au restaurant est bondée de couples qui se tiennent la main et se lancent des regards mielleux.
Écoeurant.
Je pénètre finalement au Canoe, probablement l'endroit que tout le monde a choisi pour passer sa Saint-Valentin vu le nombre de tables déjà prises.
Je tourne la tête dans toutes les directions mais aucun trace de Brad, je décide donc de demander à un serveur.
- Une table au nom de Brad ? L'homme fait mine de réfléchir longuement en se grattant la barbe. Ah oui ! Votre copain vous attend au fond à gauche.
- C'est pas... je me ravise à la dernière seconde, il a sûrement autre chose à faire que d'écouter ce que j'ai à dire, merci.
Je suis ses instructions et me dirige au fond de la salle remplie de ballons en forme de cœur rouges et blancs.
À ma gauche, j'aperçois un homme de dos, habillé d'une chemise aussi noire que ses cheveux.
Persuadée qu'il s'agit de lui, je m'avance après avoir pris une grande respiration.
Au moment où mes yeux croisent les siens, je compris tout de suite que ce n'est pas lui.
Ses pupilles, je pourrais les reconnaître entre mille.
- N-Noa ? Balbutié-je, perdue.
- C'est décevant.
Hein ?
Mon cerveau n'a jamais été aussi embrouillé qu'à l'instant.
- Qu'est ce qui est décevant ?
Il incline sa tête et déclare après m'avoir longuement caressé du regard.
- De voir que tu t'es aussi bien apprêtée pour un connard.
Mon coeur tambourine à l'intérieur de moi, tellement que j'ai peur qu'il sorte de ma poitrine.
Je lève les yeux au ciel et serre mon sac de toutes mes forces, prête à faire demi-tour.
- Splendide. Sa voix résonne dans mon dos alors je tourne sur mes talons en plissant les yeux.
- Tu es splendide. Il répète. Comme une rose blanche.
Il passe une main sous la table et lentement, il en sort un gigantesque bouquet de roses blanches qui brillent de mille feux.
Oh.
Il s'est souvenu de ma fleur préférée.
Mes joues sont en feu quand il le tend devant moi en souriant de ses dents alignées.
- Pourquoi... autant ?
Il doit y avoir au moins cent fleurs là dedans, même cinq m'auraient suffit, tant que ça vient de lui.
- Une pour chaque fois où j'ai pensé à toi.
Il y a quelques jours, j'aurais trouvé cette phrase tellement mignonne que je n'aurais pas arrêté de sourire pendant une semaine.
Mais à la place, la scène qui hante mes nuits repasse en boucle, comme pour me prévenir de ne pas retomber dans le piège.
- Tu peux les garder.
Il a d'abord un mouvement de recul sans comprendre, à croire que ma réaction l'étonne.
- Quoi ? J'anticipe après l'avoir longuement observé en espérant qu'il ouvre la bouche. Ne me dis pas que tu pensais que j'allais faire comme si de rien été juste parce que t'as mis une chemise et que tu t'es pointé avec un bouquet de fleurs ?
Ça l'a blessé.
Je le vois.
Mais au fond c'est ce que je voulais non ? Le blesser comme il l'a fait ?
Seulement, maintenant que je vois ses pupilles s'embuer et l'expression sur son visage se fissurer, je regrette légèrement.
Heureusement il me suffit d'une seconde pour me reconcentrer et remettre mes idées en place.
J'ai un mauvais rictus sur les lèvres et secoue la tête.
- D'autant plus que tu m'as clairement menti juste pour me faire venir ici. Ma voix se fait plus frappante, elle fait même tourner quelques têtes dans ma direction.
Il n'ose même pas répondre, même pas une seule explication.
Je serre mon sac et me retourne à nouveau pour m'extraire rapidement de ce restaurant.
Mes talons claquent si fort que les serveurs me dévisagent lorsque je me faufile entre eux pour atteindre la sortie.
Je n'ai pas entendu le bruit de ses pas dans mon dos, pourtant je sens ses doigts s'enrouler autour de mon poignet au moment où j'avais déjà un pieds dehors.
- Lâche moi ou je hurle pour dire qu'on m'agresse !
Ses yeux deviennent soudainement ronds et s'écarquillent puis il lâche finalement ma main.
- Tu sais très bien que si je t'avais invité avec mon numéro tu ne serais même pas sortie de chez toi.
Au moins il parle à présent, c'est déjà.
- Oui justement, c'est bien pour ça que je rentre chez moi. Ma dernière syllabe se brise du à mes cordes vocales que j'use probablement trop.
- Si tu restes, je t'expliquerais tout en détail.
- J'ai pas envie de savoir. Rétorqué-je en évitant son regard.
Si je le croise ne serait-ce qu'une fois, je risque de craquer.
- Bien sûr que si, t'en as envie.
Je le vois lever les yeux du coin de l'œil et une envie soudaine de m'enfuir à nouveau me viens.
Pourtant, mes pieds restent ancrés au sol comme si j'y été scotchée.
- Je t'ai laissé beaucoup mais vraiment beaucoup de temps pour t'expliquer, le chrono est écoulé.
- Ajoute quelques minutes au chrono alors.
Pendant un instant je suis tentée de voir s'il est sincère mais c'était une mauvaise idée.
Mes yeux se posent sur ses pupilles suppliantes et mon cœur est obligé d'accepter.
- T'as dix minutes.
Putain je suis si faible.
Une lueur d'espoir passe sur le visage de Noa et j'ai déjà des remords de mon choix.
Nous retournons à notre table tandis que je roule des yeux sans comprendre moi même ma décision.
Il tire ma chaise tel un gentleman pour me permettre de m'asseoir mais je le contourne et prends la chaise par moi même seulement pour ignorer son geste galant.
Il ne s'attarde pas trop sur mon comportement et rejoint sa place sans me lâcher du regard.
- On commande ?
- Non. Tu parles, j'écoute puis je m'en vais.
Noa est surpris du ton froid que j'emploie au vu de son expression faciale mais c'est exactement la réaction que j'attendais de lui.
- J'ai réservé cette table, on est obligé de manger.
- Alors une fois que je serais partie, tu mangeras en tête à tête avec ta propre personne.
Cette fois c'était peut-être un peu trop violent puisque le voile humide revient sur la surface de ses yeux.
Le serveur qui se présente à ma gauche interrompt notre jeu de regard qui devenait assez malaisant.
- Qu'est ce que je peux vous servir ?
- Des concombres pour madame. Réponds spontanément Noa en face de moi.
Oh purée, il a osé.
Je me pince les lèvres, gênée par l'homme en costume qui me dévisage pour attendre mon approbation.
- Hum non. Je bégaie en me mordant les joues.
Je jette un oeil rapide sur la carte des menus ouverte face à moi et prononce le nom du premier plat que j'aperçois.
- Une poutine s'il vous plaît.
Le serveur acquiesce et note quelque chose sur son calepin.
- Et pour monsieur ?
- Une tourtière pour moi.
Je me contente de demander de l'eau pétillante et Noa prend un Mojito.
- J'ai commandé seulement par politesse, maintenant parle. J'annonce juste au moment où l'homme disparaît derrière les cuisines.
- D'accord, déjà tu dois savoir que je suis rentrée avec Josie après l'incendie.
- À présent je le sais.
Il fronce les sourcils le temps d'une seconde avant de reprendre.
- Lorsqu'on arrivait dans le quartier, elle m'a annoncé pour son père...
Comment ça ?
- Son père ?
- Il est à l'hôpital, son cas s'aggrave et il n'en a plus pour longtemps.
- Oh...
Une mine surprise mélangée à de la compassion et de l'incompréhension s'affiche sur les traits de mon visage quand je plaque une main sur ma bouche.
Pourquoi lui avoir dit à lui, mais pas à... moi ?
- Et ensuite ?
- Ensuite elle m'a dit qu'elle se sentait mal et qu'elle voulait rentrer avec moi.
Ah... je vois.
- On était assis sur le canapé quand elle a commencé à me parler de sa vie et sans prévenir elle s'est mise à pleurer toutes les larmes de son corps.
Il marque une pause et regarde en l'air comme s'il revoyait la scène dans sa tête.
- Je ne l'avais jamais vu comme ça.
Moi même je n'ai jamais eu l'occasion de la voir au plus bas, mais toi elle t'as fait assez confiance pour te montrer cette facette d'elle.
- Et puis... et puis elle a plongé ses yeux froids dans les miens durant une éternité...
Pourquoi est-ce si difficile d'écouter ça ?
- Évite les détails.
- Hum oui... et au moment où elle s'est penchée pour m'embrasser, l'idée de m'éloigner et de lui faire encore plus de peine ne pas traversé l'esprit.
Je bats des cils à répétition pour ne pas laisser ne serait-ce qu'une seule larme couler sur mon visage.
- Je ne voulais pas la blesser alors qu'elle était déjà au plus bas, tu vois ?
Oui je vois, mais mon cœur ne s'est pas reconstruit soudainement comme je l'espérais.
- Noa, si un jour tu croise un inconnu bourré dans la rue qui pleure parce qu'il a perdu toute sa famille. Tu iras l'embrasser ?
Ma question ne sonne absolument pas comme une plaisanterie, les bras croisés sur la table, j'attends patiemment sa réponse.
- C'est une vraie question ?
- Je te le demande, oui.
- Non, déjà parce que Josie n'est pas une inconnue.
- Vu les moments que vous partagez ensemble, je l'espère de tout coeur. La rancœur parle actuellement à ma place.
Le serveur nous interrompt à nouveau, il dépose nos plats respectifs à chacun et s'en va après nous avoir souhaité une bonne Saint-Valentin.
Ma fourchette en main, je remue les aliments dans mon assiette avec dégoût sans aucune intention d'en avaler un seul.
- Maintenant j'ai une question pour toi. Sa voix a repris le dessus et son expression a changé.
- Je t'ai déjà accordé mon temps pour t'écouter, n'abuse pas.
Il m'ignore royalement et me demande:
- Si Thomas venait à perdre son père et pleurait devant toi, qu'est ce que tu aurais fait s'il s'était penché pour t'embrasser ?
Ah... je l'avais oublié lui.
Depuis sa déclaration étrange j'évite de lui parler ou même de penser à lui, ça me met dans une sensation bizarre.
- Je me serais excusée et lui aurait dit de reprendre ses esprits.
- Mais oui, bien sûr... il marmonne en prenant une bouchée de son repas.
- Si tu insinues que je mens parce que je n'ai pas la réponse que tu espérais, pourquoi m'avoir posé la question ?
- Je voulais simplement voir si tu aurais le courage d'être honnête pour une fois.
La conversation prend une tournure que je n'apprécie absolument pas.
- D'ailleurs puisque t'en parles, laisse moi te rappeler que tu dois aussi des explications à ton meilleur ami. N'oublie pas que c'était avant tout le mec de Josie.
- Je sais...
- Tu as tout gâché-
- Je sais ! Son exclamation me surprend tant que je sursaute sur ma chaise en faisant claquer mon talon. Je sais que j'ai merdé, mais c'est pas que de ma faute. Josie aussi y est pour quelque chose, c'est pas comme si elle était bourrée, elle était parfaitement consciente de ses actes.
Je sais, mais c'est plus facile de t'en vouloir à toi quand je suis habituée à pardonner Josie.
L'ambiance est glaciale et gênante quand quelques personnes passent à côté de notre table.
Je ne trouve rien à dire alors je passe quelques minutes à couper les morceaux de nourriture dans mon plat et à les éparpiller dans mon assiette.
J'amène quelque fois la fourchette à ma bouche mais finis toujours par la reposer dans mon plat.
À un certain moment, Noa relève la tête vers moi et m'analyse quelques secondes puis déclare:
- Cassie Ainsworth.
Je suis si surprise qu'il connaisse son nom que j'en fais tomber mes couverts.
- Tu fais sa technique, tu pensais que je n'allais pas remarquer ?
- Je ne pensais pas que tu regardais Skins surtout.
La plupart des gens à Waterfalls qualifient ceux qui regardent ce genre de séries de dépressifs.
J'en ai rien à faire puisque c'est ma série préférée et que je continuerai à la regarder, mais que Noa la regarde aussi, ça m'étonne.
- Mange.
J'arque un sourcil presque amusé par l'ordre qu'il vient de me donner.
Ça fait des jours que je tiens, comme si j'allais obéir.
- Je ne vois pas en quoi ça te dérange, je paierai mon plat de toute façon.
- Ça me dérange parce que tu es au bord du malaise. Oui, Thomas m'informe d'absolument tout.
J'avale ma salive avec difficulté, le regard vide.
Le moment où Thomas me demande si j'ai mangé après que je me sois presque évanouie une deuxième fois repasse dans ma tête.
- C'est très dérangeant.
- De quoi ?
- Comment ça de quoi ?! Vous vous partagez des choses sur ma vie que je dis à chacun de vous alors que j'aurais préféré que ça reste secret. Tout le Canada n'a pas besoin de connaître mes problèmes.
- Ça te dérange qu'on s'inquiète pour toi au point d'en discuter à deux ? Oh pauvre princesse.
Il lève les yeux au ciel comme si j'étais une enfant pourrie gâtée qui demanderais le dernier iPhone à son père.
- Si ça vous gêne tant que je ne sois jamais reconnaissante, arrêtez de m'aider ?
Dans ma tête ça sonne si logique mais d'après son regard, pas pour lui.
- Si on ne t'avait pas aidé jusqu'à maintenant, tu serais déjà morte au moins cinq fois.
Purée, j'aurais tellement aimé.
- Oh merci Noa le sauveur ! Je dois me mettre à genoux ou tu préfères un oscar ?
- Pourquoi tu fais ça ?
Sa voix s'est radoucie, il n'est plus en colère, ça me rassure.
- Faire quoi ?
- Sombrer. Tu n'essaies même pas de... de t'en sortir. Tu... tu t'éloignes de n'importe quelle main qu'on te tend et tu t'empoisonnes par tes propres moyens.
Je reste immobile le temps de répéter ce qu'il vient de dire dans ma tête pour m'assurer de ne pas avoir mal entendu.
Ah, il a vraiment dit ça.
J'ai l'impression d'avoir été percé au grand jour, c'est comme s'il lisait en moi avec tant de simplicité.
C'est énervant, je voudrais pouvoir mentir à nouveau mais ça ne servirait à rien.
- Tu as tout compris, bravo. Seulement, je ne suis pas venue ici pour te raconter l'arrière pensée de mes actions.
Je prends mon portefeuille avec précipitation et en sors quelques billets pour les poser en dessous de mon verre.
Déjà sur pieds, je m'apprête à rentrer maintenant que j'ai écouté sa version de l'histoire.
- Est ce que... est ce que tu m'as pardonné ? Sa question retentit dans mon dos et je ressens son regard sur mes omoplates.
- J'aimerais que ce soit aussi simple, mais non.
- Attends !
Prévisible.
- Tu peux me laisser une journée pour me pardonner ?
Non.
- C'est-à-dire ?
- À la fin de la journée tu décideras si tu ne veux réellement plus me faire confiance, dans ce cas là je te laisserais vraiment tranquille.
Toujours dos à lui, je finis par accepter après quelques réflexions.
- Il en faudra beaucoup pour me faire changer d'avis.
En réalité, un simple regard de sa part me ferait céder, mais ça, il ne doit surtout pas le savoir.
Ses mains se posent dans le creux de mes hanches sans prévenir alors que je pensais qu'il était encore assis derrière moi.
- Ne t'inquiète pas, tu ne pourras pas résister à mon charme.
- Quel charme ? Je plaisante en me radoucissant les paupières closes pour profiter de son touché.
- Celui dont tu vas tomber amoureuse aujourd'hui.
Noa, je suis déjà amoureuse à en mourir, littéralement.
Alors ne t'en fais pas pour ça.
Il paie rapidement avec sa carte puis nous sortons enfin de ce restaurant.
Le vent frappe nos visage et fait voltiger les tresses dans mon dos.
Une odeur de fleur et de printemps plane dans l'air malgré que nous sommes encore en hivers.
Ma main dans la sienne, je lui emboîte le pas les yeux rivés sur les veines de son bras qui ressortent.
J'ai finalement récupéré une des fleurs du bouquet qu'il m'a offert avant de partir.
Elle ira avec celle qu'il m'a donné ce jour là après les cours, je l'ai précieusement gardé dans ma chambre et ne l'a jetterais sous aucun prétexte.
Plus on marche, plus le temps s'écoule et plus mes talons me font souffrir.
- On arrive quand ?
- Bientôt, mais d'abord on s'arrête dans un café. Tu vas manger Lola.
NON !
Mes pieds freinent par eux même ce qui l'arrête lui aussi.
Il se tourne dans ma direction en attendant des explications à cette réaction probablement exagérée.
- Non Noa, si c'est pour me faire manger je rentre chez moi.
Les gens nous contournent avec les sourcils froncés d'incompréhension.
- Tu finiras par avaler quelque chose, alors autant le faire maintenant.
Sa poigne est bien plus forte que la mienne, il me traine dans la rue sans effort tandis que je fais la moue.
Dans le pire des cas, je trouverais sûrement des toilettes dans lesquels vomir.
Il finit par trouver une petite boulangerie assez vide décorée dans le thème de la journée.
- Prend ce que tu veux.
- Une bouteille d'eau s'il vous plaît. Je demande à la dame chaleureuse derrière le comptoir.
- Et un sandwich jambon beurre pour moi, merci. Rajoute Noa au dernier moment.
- C'est pour toi je suppose ?
- Non, c'est toi qui va le manger et t'as intérêt.
J'acquiesce en sachant pertinemment que je ne toucherais pas à ce sandwich.
L'odeur de pain chaud envahie mes narines ainsi que le parfum des gâteaux à la crème qui sont exposés dans les vitrines.
Aussitôt payé, nous sommes déjà de nouveau dehors en train de marcher.
- Tu as une petite idée de là où on va ?
J'hausse les épaules avec ennui.
- Non. Ma réponse sonne comme un terme à la discussion mais il persiste.
- Réfléchis, quels sont les endroits que tu aimes ?
- Hum je sais pas, mon lit.
Noa soupire avec un petit rictus mignon sur les lèvres.
- Fais un effort, on ira pas dans ton lit. Enfin, pas aujourd'hui en tout cas.
Son sous entendu me réveille alors que je ne l'écoutais plus qu'à moitié et mes joues rougissent légèrement.
- Dans tes rêves, qui sait.
Il me jette un coup d'oeil amusé et faussement attristé toujours à l'attente d'une réponse.
- La forêt, un lac, la mer, un champs, je sais pas vraiment.
- Le troisième, il me semble que tu aimais beaucoup l'océan n'est ce pas ?
J'ai une sorte d'illumination puis fronce les sourcils en comprenant que ça ne peut pas être ça.
C'est impossible.
- Il n'y a pas de plages à ici, à part si tu me fais marcher jusqu'à ce que la nuit arrive.
- Ah oui ? Qui t'as dit ça ?
J'ouvre la bouche mais sa main me fait avancer jusqu'au tournant d'une rue où mes yeux rencontrent directement la mer.
Si seulement j'était au courant qu'il y'avait ça aussi proche de chez moi, j'y aurais passé ma vie.
Il n'y a personne assis sur le sable ou au bord de l'eau, bizarre pour une journée consacrée aux rendez-vous romantiques.
C'est vrai qu'on est tout de même en février et qu'il se la gèle.
Tant mieux, plus d'eau et d'espace pour moi.
J'ai la plus grosse réaction d'enfant qui est de dévaler la descente pour arriver au bord des vagues qui frappent fort dans le sens du courant.
Mes talons puis mon collant que je retire rapidement voltigent et retombent dans le sable pour que je puisse finalement marcher dans l'eau et ressentir le contact du liquide glacé avec la plante de mon pied.
Mon sang se gèle jusqu'au haut de mes chevilles, c'est exactement la sensation que j'espérais.
Les vagues se font de plus en plus violentes et le soleil presque inexistant commence déjà à se coucher.
Le bras tendu qui pointe l'horizon devant moi, je prononce la phrase avec un sourire aux lèvres:
- « Derrière les murs il y a une mer. Et au delà de cette mer, se trouvent nos ennemis ».
C'était sûrement plus fort que moi, je me devais de réaliser cette référence à mon animé de cœur.
À l'instant où je lève les yeux vers le ciel pour prendre une bouffée d'air frais, un son que je connais bien retenti dans mon dos.
The Beach de The Neighbourhood vient de débuter sur le portable de Noa qui est posé dans le sable froid.
Parfaitement dans le thème.
Celui ci accourt vers moi après avoir retiré son tee shirt, le sourire scotché sur son visage ne m'inspire rien de bon.
Je fais de grandes enjambées en m'enfonçant dans l'eau quand je comprends qu'il a pour but de m'attraper.
J'ai beau toujours le haïr dans une petite partie de ma tête, à cet instant précis lorsqu'il finit par m'atteindre et me soulève du sol, je ris aux éclats.
Sur le moment même, je crois me rendre compte ne plus avoir ris de bon coeur depuis bien longtemps.
Je suppose d'ailleurs que je n'ai plus jamais ris honnêtement après la mort de Lana.
Malheureusement j'ai cette putain de manie qui m'empêche de profiter des bons moments.
Elle me rappelle que dans quelques minutes à peine, je serais nostalgique de ce que je vis actuellement et l'état dans lequel je suis.
Malgré avoir longuement persisté à m'accrocher à ses épaules, Noa finit par me balancer dans les vagues qui m'avalent sans difficulté.
Je bois une grosse tasse salée et m'étouffe de rire quand ma tête reviens à la surface.
Ses mains sur ses hanches, il m'observe triomphant.
Il croit s'en sortir comme ça ?
Je me relève précipitamment pour me jeter sur lui comme il l'a fait.
- C'est comme ça que tu penses obtenir le pardon d'une fille ?
- Fie toi à mon expérience.
Je n'ai pas le temps de m'attarder sur ses mots et d'être vexée, j'escalade son dos pour le renverser à mon tour mais sa musculature me dépasse.
J'en suis carrément venue à bout, c'est une statue il ne s'écroulera donc jamais.
Avant d'abandonner, j'opte tout de même pour une dernière technique qui fonctionne d'ailleurs très bien.
Je ne pensais pas qu'il craignait à ce point les guilis mais c'est le cas puisqu'il se met à glousser et retombe finalement dans la mer salé qui l'attendait.
Par simple peur d'une nouvelle vengeance de sa part, je sors de l'eau en courant et change au passage la musique qui s'était terminée pour mettre Ocean Eyes de Billie Eilish.
Par chance, ma robe est si épaisse qu'elle ne laisse pas trop paraître ce qui se cache en dessous et j'ai toujours ma veste sur le dos.
Seulement la moitié de mes jambes sont à l'air, j'attrape donc le blouson de Noa pour la poser sur mes tibias quand je m'assois sur le sol.
Ma coiffure s'est défaite, j'en profite donc pour détacher mes cheveux mouillés qui gouttent dans le creux de mon dos tout en observant Noa qui sort de l'eau.
Merde, il est encore plus canon que d'habitude.
Sa tête en arrière, il secoue ses cheveux d'ébènes qui gouttent. L'eau ruisselle lentement sur son torse et descend entre ses abdominaux.
Il cligne à répétition des yeux avec ses cils excessivement longs en me lorgnant du regard.
Si c'est une technique pour m'envoûter, et bien ça marche un peu trop bien.
Je chantonne et fais mine de l'ignorer pour ne pas baver devant lui, encore.
Il attrape son tee shirt d'un geste bref pour frotter son crâne et sécher le haut de son corps.
Je ne sais pas pourquoi je me sens si bien mais c'est assez perturbant.
J'ai déjà l'impression que ça ne durera pas, que ce n'est pas fait pour moi d'être heureuse.
Noa finit par s'enfoncer dans les grains de sable à son tour près de moi.
- Je n'ai pas oublié tu sais ?
Je m'apprête à lui demander de quoi il parle mais le bruit du sachet de la boulangerie sonne comme quelque chose d'aussi maudit que la sonnerie de Waterfalls.
- Lâche moi avec ça ! Tu vas pas me forcer.
Il ne m'écoute absolument pas et déballe le sandwich pour le présenter juste devant mes yeux.
- Arrêter de manger ne règlera pas tes problèmes.
- Tu n'en sais rien. Rétorqué-je sèchement en éloignant le bout de pain de mon visage.
- Malheureusement si, j'en sais quelque chose. Tu es courant que la mère de Thomas est morte d'anorexie ?
Il ne préviendra donc jamais avant d'annoncer quelque chose d'aussi grave ?
J'ai un hoquet de stupeur mais surtout plusieurs questionnements.
- Mais... il y a quelques mois je l'ai vu parler à sa mère sur son téléphone, une certaine « Diane ». C'est très récent alors...
- Non, Diane c'est sa belle-mère. Sa mère biologique est morte l'an dernier en mars.
Oh, comme Lana.
Je repense à ce jour où il m'a sauvé de cette voiture qui m'aurait probablement écrasé sans pitié.
Je n'imagine même pas ce qu'il a du ressentir lorsque j'ai demandé pourquoi il appelait sa mère par son prénom, je m'en veux terriblement.
- C'est sûrement pour ça qu'il est le premier à s'inquiéter pour toi Lola. Même si ça ne ce voit pas, Thomas a terriblement peur que tu finisses comme sa mère.
Je comprends maintenant comment avait-il fait pour comprendre si rapidement la cause de mon mal à marcher droit, il a du voir sa mère dans le même état.
Si seulement il m'en avait parlé lui même, j'aimerais tellement qu'il me fasse assez confiance pour le faire.
Assez culotté sachant que je ne dévoile absolument rien sur ma vie et que j'ai pété un cable quand ils en ont finalement découvert une partie.
- C'est quoi ton chiffre préféré ?
- Trois. Je réponds en espérant qu'il change de sujet.
- Ok alors, fais trois bouchés et j'arrête de t'embêter.
Super.
- Non je me suis trompée, mon chiffre préféré c'est zéro.
Il incline sa tête, la compassion s'installe dans ses iris profondes mais son sourire s'affaisse faiblement.
- Juste trois Lola.
- Je peux recracher après ?
- Non, tu mâches et t'avales. Tu veux un tuto ?
- Oui !
Je lui tends volontiers le morceau de pain avec un grand sourire.
- Finis le, je veux un tuto complet.
Il lève les yeux au ciel après m'avoir redonné le sandwich que je fixe avec dégoût.
Il ne va pas me lâcher alors autant s'en débarrasser rapidement.
Peut-être que si je fais simplement une bouchée il aura pitié et me laissera tranquille.
Les yeux fermés, je finis donc par croquer dans la baguette qui croustille sous mes dents.
La bouche tremblante de honte et de déception, je mâche à une lenteur considérable toujours sans ouvrir les paupières.
C'est bon, mais ce à quoi je pense c'est plutôt tous les calories qui se trouvent dans le beurre à l'intérieur.
À l'aide de la bouteille d'eau, j'avale rapidement puis réouvre les yeux.
- C'est bon !
- Encore deux.
Mon regard s'assombrit à nouveau alors qu'il s'était éclairci.
Actuellement j'aimerais me trouver au fond de mon lit en train d'écrire dans mon carnet sans être obligée d'engloutir cette foutue nourriture.
- Tu n'as donc pas pitié de moi ?
- Princesse, tu me remercieras plus tard.
- Ne m'appelle pas comme ça, je ne t'ai toujours pas pardonné et je n'oublierai jamais ce que tu as fais.
Mon rappel est identique à un coup de marteau sur sa tête qui le réveille tout à coup.
Pour éviter de faire durer ce moment une éternité, je croque à nouveau deux fois sans réfléchir aux remords qui me rongeront ce soir alors que j'essaierais de m'endormir.
Je mâche à peine et fais passer le tout avec beaucoup d'eau.
- Maintenant fiches moi la paix.
- Bravo, je sais que c'était dur.
Cette fois ça sonnait réellement comme des félicitations, il ne plaisantait pas et ce simple fait me réchauffe le coeur.
Le soleil est désormais pratiquement couché, il perce l'eau dans l'horizon lointaine ce qui provoque une ambiance orange et apaisante.
Je ne peux pas m'empêcher de penser à ce que Josie fait actuellement, si elle a déjà rompu avec Thomas ou s'il ne lui a toujours pas dit.
Est ce qu'elle pleure à cause des regrets ou se réjouit-elle du bordel qu'elle a fait ?
C'est presque effrayant de simplement se poser une telle question vis-à-vis de sa propre meilleure amie.
*
Malheureusement, une journée ne peut pas durer toute une vie, nos pas nous ramènent chez moi mais aussi et surtout à notre vie ennuyeuse et éprouvante.
On peut dire que aujourd'hui était une sorte de pause émotionnelle.
Les baskets de Noa sont à mes pieds puisque mes talons ne supportaient plus les escarpins qu'il porte actuellement dans ses mains.
Des feuilles se collent à ses chaussettes trempées mais il n'a pas l'air d'y prêter beaucoup d'attention.
- Est ce que un jour tu comptes les appeler ?
- Appeler qui ?
- Les services sociaux.
La salive se bloque dans ma gorge tout comme mon corps qui s'arrête en plein milieu de la route.
Je ne pensais pas qu'il allait en reparler, j'espérais qu'il oublie simplement ce qu'il a vu.
- Non.
- Alors je le ferais à ta place.
Mon sang remonte jusque mon cerveau à une vitesse folle.
- Si tu fais ça, je jure de ne plus jamais t'adresser la parole dans ma vie.
- Mais... qu'est ce qui t'effraie tant ?
Les lèvres scellées, j'hésite un très long moment.
- Je ne veux pas... me retrouver seule. Et puis ma soeur m'en voudra éternellement. Durant le restant de ma vie, on me reprochera constamment d'avoir dissous ma propre famille.
Je suis moi même surprise d'avoir dis ça tout haut à quelqu'un.
- Mais c'est compréhensible !
- Non. Pour ça tu peux être sûr que je ne céderais pas.
J'ignore sa moue exaspérée et enfonce mes clés dans la serrure.
Chez moi, toute l'ambiance redevient morose et plus rien n'a l'air agréable.
Nous rejoignons nos chambres respectives, épuisés à cause de cette balade interminable pour rentrer.
Une fois en pyjama, je prends mon courage à deux mains pour aller remercier Noa mais une fois dans sa chambre, je m'aperçois qu'il est à la douche.
Je décide donc d'attendre sur son lit mais un petit objet perdu en-dessous intrigue mon oeil.
Je me baisse pour le ramasser et l'examine de plus près.
Non.
C'est impossible.
Ça ne peut pas être ça.
Qu'est ce que faisait le briquet de Malicia dans la chambre de Noa ?
Finalement je ne suis plus sûre de vouloir lui pardonner.
{ La suite dans le prochain chapitre ✨}
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