Chapitre 13: Élégante nouvelle
Je positionne ma tête dans le creux de ma main avec ennui.
Mon père est concentré sur le match de foot qui se déroule sur l'écran derrière moi.
- Nous allons accueillir quelqu'un à la maison. Annonce ma mère avec un grand sourire.
Elle tourne la tête pour observer nos réactions mais aucun d'entre nous n'ouvre la bouche pour contester.
- En plus tu as de la chance Lola, c'est un élève de Waterfalls.
Cette fois-ci, je fais tomber ma fourchette de stupéfaction.
La vinaigrette éclabousse sur mon visage tandis que j'écarquille les yeux.
- Pendant combien de temps ? Je me surprends à m'exclamer soudainement.
- Normalement deux mois, mais il peut toujours y avoir des complications.
- Sérieusement Sophie ? Interviens mon père avant que je n'ai pus riposter. Tu ne m'en a jamais parlé, je ne suis pas d'accord. Laisse l'enfant des gens là où ils sont, ma maison n'est pas un centre d'adoption.
Il la regarde à peine dans les yeux alors que ma mère cherche de l'attention dans les siens.
Ma soeur se contente d'attraper son téléphone pour discuter avec ses amies sans prêter attention à la nouvelle.
- Il faut aider son prochain ! C'est le fils de Soo-min, elle essaie désespérément de divorcer avec son mari. Un enfant dans les pattes est trop complexe à gérer pour elle en ce moment. Lui explique ma mère en le suppliant du regard.
Il se contente de faire tournoyer le liquide rouge dans son verre sans lâcher le match du regard.
La Champions League est plus importante pour lui.
- Mais... on est vraiment obligé de l'héberger chez nous ? On peut pas trouver une autre solution ? Je propose déboussolée.
Je ne me vois pas vivre avec un enfoiré de Waterfalls pendant deux mois.
- Tu aurais aimé qu'on t'héberge toi, non ? T'es vraiment égoïste franchement Lola, j'ai honte d'avoir des enfants qui ne pensent qu'à leur confort sans imaginer le malheur des autres.
- Eh ! J'ai rien dit moi. Contredit Amalia en levant à peine les yeux de son portable.
Je ne peux pas m'empêcher de serrer les dents.
Je déteste quand elle se la ramène.
Ma mère secoue la tête pour montrer son exaspération.
- Demain nous irons au restaurant avec sa famille pour que vous fassiez connaissance, il rentrera avec nous par la suite.
- Demain ?! Non maman, s'il te plaît c'est trop tôt. Je la supplie.
- Surtout que je n'ai toujours pas accepté. Intervient soudainement mon père.
- C'est décidé, c'est tout. Maintenant allez vous coucher, et Lola, je veux que tu prépares sa chambre pour demain. Termine ma mère avant de se lever pour débarrasser.
Je sors de table à mon tour en soufflant.
Elle prend toujours des décisions sans nous en parler. Elle ne se préoccupe de personne mise à part sa grande gueule.
Je donne un coup de pied dans la porte de mes parents sous l'excès de colère en rejoignant ma chambre.
- Lola, qu'est ce que tu fais en haut ?! S'écrie mon père qui me fait sursauter au passage.
- R-rien, je suis tombée. Je mens en refermant ma chambre.
*
- Oui, cette robe est parfaite sur toi. J'acquiesce à ma soeur.
Je balance mes pieds dans les airs, assise sur le lit d'Amalia tandis qu'elle essaie toute sa garde-robe.
Elle m'a demandé de l'aider à choisir sa tenue pour ce soir comme si c'était un événement spécial.
Je lui ai assuré à plusieurs reprises que les mecs de Wateralls n'avaient rien d'exceptionnel, mais elle s'entête à penser que notre futur colocataire sera un putain de canon sorti d'un film.
- C'est vrai que le violet me va bien au teint. Elle s'extasie en tournant sur elle même, faisant tournoyer sa robe scintillante au passage.
Elle épouse les formes de son corps jusqu'à ses genoux où elle s'élargie. J'ai toujours détesté les robes sirènes mais Amalia adore ça.
- Et toi, qu'est ce que tu vas porter ? Me demande-t-elle en choisissant ses bijoux.
J'hausse les épaules sans le moindre intérêt pour cette rencontre.
- T'as pas intérêt à y aller avec tes vêtements larges tout moches, tu vas me faire honte.
- J'ai que ça.
Amalia soupire avant de se diriger vers son dressing.
Elle l'ouvre et me laisse apercevoir la multitude de robes qui y sont cintrées. Il y a toutes les couleurs de l'arc-en-ciel là dedans.
- Comment t'as eu tous ces vêtements ?
- Maman me les a acheté. Elle admet simplement.
Moi, elle ne veut jamais rien m'acheter.
- Bon dépêche toi de choisir, papa ne va pas nous attendre une éternité.
J'explore du regard chaque détail de chaque robe.
Mes yeux se posent sur l'une d'elles.
Elle est bleu, bleu marine.
Elle est parfaite.
Je l'attrape rapidement puis remercie ma sœur avant de me diriger vers la salle de bain.
Je l'enfile à toute vitesse sans difficulté.
Mes pas me dirigent dangereusement jusqu'au miroir.
Je suis surprise.
Surprise de voir que c'est potable.
Cette robe n'est pas comme celle de la dernière fois.
Elle est aussi en satin, mais beaucoup moins serrée.
Je pourrais respirer cette fois.
Il n'y a pas de bretelles, le bustier prend une légère forme de coeur.
Elle est cintrée au niveau de ma taille mais évasée sur mes jambes.
Je tournoie sur le tapis de ma salle de bain en admirant les paillettes bleu nuit.
Encore une fois, elle m'arrive aux chevilles mais je préfère cacher mes ecchymoses pour être sûre.
Je me munis d'un beauty blender et applique une grosse couche de fond de teint sur mes blessures en serrant les lèvres.
Je suis habituée à les voir mais ça me fait toujours un petit quelque chose quand je les aperçois de près.
Elle me dégoûtent.
- Grouille toi ! Tambourine ma soeur à la porte.
J'enfile rapidement un collier de perles pour rappeler l'océan, histoire d'accessoiriser mon cou.
Quand je dévale les escaliers, il n'y a personne dans le salon.
Ils sont déjà probablement dans la voiture tous les trois, à éclater de rire.
Comme la parfaite famille qu'ils forment.
Je reste fidèle à mes bottines noires et scrute une dernière fois la maison avant de sortir.
La prochaine fois que je reviendrai, je serais accompagné d'un gars avec qui je vais devoir cohabiter.
Je vérifie que la porte soie bien fermée puis m'empresse de rentrer dans la voiture.
- T'en a mis du temps ! S'exclame Amalia en appliquant une couche de rouge à lèvres bordeaux.
Contrairement à elle je suis constamment maquillée, je n'ai donc pas besoin de le faire avant de sortir.
- Pas plus que toi en tout cas.
J'admire son profil en l'enviant.
Elle est si belle et intelligente, pas étonnant que mes parents la préfèrent à moi,
Nous roulons une éternité avant d'enfin atteindre le restaurant.
J'ouvre la portière en imaginant toutes les scènes gênantes qui arriveront en compagnie de notre futur coloc.
Je n'avais vraiment pas besoin de ça maintenant.
Mes bottines claquent sur le parquet pendant qu'on avance entre les tables.
Le serveur nous en indique une avec sept places.
Je m'assois en observant mon entourage.
La salle me semble particulièrement chic, tout est dans les tons rouge et noir.
Il y quelques néons qui m'aveuglent à l'autre bout de la pièce.
On se croirait en enfer.
Toutes les tables sont rondes, et les personnes qui y mangent sont tous élégamment habillées.
Je m'y sens presque mal à l'aise, entourée de toutes ces personnes particulièrement riches qui discutent et se nourrissent avec trois fourchettes, une pour chaque plat.
Je me mords les lèvres et fais tapper ma chaussure contre le sol à répétition.
Mes parents font défiler les pages du menue pour patienter.
L'ambiance commence à devenir pesante quand me mère se lève, un grand sourire aux lèvres.
Mes yeux se posent sur un homme en costard ainsi qu'une femme habillée d'une robe rouge éclatante.
J'ai l'impression de les avoir déjà vu puis mes yeux croisent désormais des pupilles noisettes que je pourrais reconnaître parmi mille.
Mon corps et le sien se tétanisent au même instant.
Noa.
Noa va habiter chez nous.
Il ne bouge pas d'un millimètre, ce qui me laisse le temps de l'examiner.
Son torse est recouvert d'une chemise noir, ses deux premiers boutons détachés et ses mains enfoncées dans les poches de son pantalon lui donnent un air nonchalant.
Il a opté pour de simples baskets noirs malgré l'élégance de ses vêtements.
Il décroche finalement mon regard pour rejoindre la chaise juste en face de moi.
Je l'observe pendant qu'il s'installe alors que nos parents entament la discussion.
Ses cheveux encore mouillés de la douche le rendent attirant même si je ne pourrais jamais l'avouer.
Ma mère m'ordonne de me lever pour faire la bise à ses parents qui me dévisagent.
Ils ont l'air tout aussi mal à l'aise que moi.
Je frôle le bras de Noa qui ne se gêne pas pour me déshabiller du regard.
Je fais craquer mes doigts un par un pour canaliser mon stress et prends un air neutre.
Une fois rassise, j'attrape un menu que je place devant mon visage pour cacher à quel point je suis gênée.
Il fallait vraiment que ce soit lui qu'on doive héberger ?
- Alors qu'est ce que je te disais ? Tu vois qu'il est canon. Me chuchote ma soeur en scrutant chaque détail du visage de Noa.
- Putain t'es tarée. Il a cinq ans de moins que toi, arrête de le mater comme ça. Je lui souffle en guise de réponse.
- L'amour n'a pas d'âge.
- Amalia il est mineur, va sur Tinder et laisse le tranquille.
- Je vois maintenant, tu veux m'éloigner de ta proie ?
Je lui donne un grand coup de coude sous la table pour la faire taire.
Elle se contente de glousser.
Le serveur arrive plus rapidement que prévu.
Quand il me demande mon plat, je parcours le menu à toute vitesse en réfléchissant au plat que je n'ai pas choisi.
- Prenez lui une assiette d'haricots verts. Finit par lui déclarer ma mère.
Je la fusille du regard mais elle m'ignore et continue sa conversation avec son amie.
Je la déteste.
Son but est-ce de m'humilier ?
Le son d'un message me tire de mes pensées.
Je débloque discrètement mon téléphone et suis surprise de constater qu'il provient de Noa et non pas de ce putain de psychopathe.
De Noa
> Cette robe... c'est pour me tuer ?
De moi
> Si je te fais autant d'effets,
tu n'as qu'à pas me regarder.
> Impossible, t'es hypnotisante.
Je souris bêtement, sachant pourtant pertinemment qu'il s'agit d'un rôle qu'il s'amuse à jouer.
> T'es au courant qu'à la base nous deux
c'était juste un jeu ?
> Je sais, j'adore le jeu.
Je lève les yeux de mon téléphone pour le contempler.
Il a lui aussi un sourire affiché sur son visage.
J'éteins subitement mon portable en voyant le serveur apporter nos plats.
Je fixe longuement mon assiette d'haricots sans y toucher tandis que les autres entament leur pizza avec appétit.
- Alors, vous vous connaissiez ? Demande ma mère avec un sourire forcé.
Nos regards se croisent au même moment mais aucun d'entre nous n'ouvre la bouche pour répondre.
- D'après leurs messages, oui. Intervient ma soeur en mastiquant, l'air de rien.
Elle a vu notre conversation.
Merde, elle va se faire des idées.
Mon père me lance un regard assassin en fronçant les sourcils.
Lui non plus ne se réjouit pas de notre nouveau venu.
Mais ma mère a réussi à le manipuler pour qu'il accepte, comme d'habitude.
- Oui, on s'est rapproché y'a pas longtemps. Acquiesce Noa. Mais elle est surtout très proche de mon meilleur ami, Thomas.
Je lui donne un coup de pied sous la table pour qu'il arrête ses insinuations débiles.
C'était censé lui faire mal mais à la place il s'esclaffe derrière sa serviette.
Je roule les yeux en espérant que ma mère soit trop débile pour comprendre le fond de sa pensée.
Tout le monde recommence à manger, je reste figée, les mains croisées.
Après un certain temps à les observer sans rien faire, je reçois une nouvelle notification.
De Noa
> Pourquoi ta mère a commandé à ta place ?
Je soupire avant de rapidement taper une réponse.
De moi
> Parce que ma mère est une garce.
Il dépose alors son téléphone et attrape son assiette ainsi que la mienne.
D'un mouvement discret il échange nos deux plats sans que personne ne s'en rende compte.
Je me retrouve alors face à une immense pizza déjà entamée.
Il croise ses bras devant son torse et m'examine en attendant que je me mette à manger.
De moi
> Je vais pas manger ton plat ???
De Noa
> Tu vas manger quoi alors ?
> Rien, j'ai pas faim.
> Moi non plus.
Je souffle d'exaspération en comprenant son petit jeu à la con.
J'attrape alors une fourchette tremblante.
Pourquoi manger est si difficile pour moi alors que j'aime tant ça.
Mes couverts découpent lentement un morceau de pizza que je fourre dans ma bouche.
Une vague de satisfaction m'envahit une fois que je l'ai avalé.
Ça faisait longtemps que je n'avais pas mangé autre chose que des crudités.
Ma mère me toise ouvertement mais je fais l'aveugle.
Exactement comme elle.
Je déguste mon repas jusqu'à la fin avant d'être submergée par un sentiment de regret et de honte.
Pourquoi ai-je mangé tout ça déjà ?
J'ai la sensation que tous les regards sont posés sur moi.
Ça me donne si chaud que je suis dans l'obligation d'enlever le petit gilet qui recouvrait ma poitrine, maintenant habillée de mon simple bustier.
Noa me reluque sans se cacher avec un sourire en coin.
Gênée, je lui tape rapidement un message.
De moi
> Arrête ça.
De Noa
> Ça quoi ?
> Tu sais très bien, arrête de me
mater comme si j'étais un bout de viande.
> Tu es bien plus qu'un simple bout de viande à mes yeux, ne t'inquiète pas.
Je lui donne un second coup de pied, mais celui-ci le fait grimacer comme je l'espérais.
> Ta gueule Sherlock.
> Pourquoi tu m'appelles comme ça ? C'est mon nouveau surnom ?
> C'est ironique, c'est parce que t'es con.
J'envoie le message avec un petit sourire fier.
> Aïe, ça me blesse.
Je ne peux pas empêcher un petit ricanement que je cache avec un raclement de gorge indiscret.
Nos parents se lèvent au même moment, ce qui nous indique que le repas est enfin terminé.
Je range mon portable à toute vitesse avant de sortir à mon tour.
Noa enlace ses parents sans le moindre regret.
Il n'éprouve aucune mélancolie, il n'y a pas une once de chagrin sur son visage. Il a même l'air heureux de les quitter.
Ses parents font mines d'être profondément affligés puis disparaissent dans leur petite Clio 3.
- Noa, tu peux te mettre à l'arrière avec les filles.
Il acquiesce à ma mère avant de nous rejoindre dans la voiture.
Assise au milieu, je me sens un peu oppressée mais j'essaie de ne rien laisser paraître sur mon visage.
Noa à ma gauche, je parcours chaque détail de son bras pour penser à autre chose.
Les veines de ses mains ressortent même s'il ne contracte pas ses muscles.
Une montre en argent habille son poignet.
À vue d'oeil, elle a l'air chère.
Mes yeux remontent sa manche jusqu'à arriver à son col puis se perdent sur son visage.
Je détourne rapidement le regard avant qu'il ne s'aperçoive que je le contemple.
Le trajet me semble beaucoup plus court que l'allée, et nous arrivons à destination en un clin d'œil.
J'attrape sa seconde valise sous les ordres de ma mère qui insiste pour que je l'aide à installer ses affaires à l'étage.
Je lui fais visiter chacune des pièces au passage.
- C'est ici ma chambre ? C'est gigantesque ! Il s'exclame en découvrant son nouveau dortoir. Où est la tienne ?
- Juste en face. Je lui réponds en me pinçant les lèvres.
Il essaie de dissimuler le rictus qui apparaît sur son visage mais je l'ai déjà aperçu.
Il me devance et ouvre ma porte lentement.
L'expression sur son visage me laisse deviner qu'il est impressionné par la déco de ma chambre.
- C'est incroyable, on a l'impression d'être sous l'eau.
- C'était le but.
Il marche à travers ma chambre en inspectant chaque recoin.
Chacun de ses recoins où je me suis isolée, où j'ai pleuré, crié, hurlé.
Tous les endroits de cette chambre représentent une partie de moi parce que c'est ici que je me cache en permanence et là où j'ai probablement vécu les pires moments de ma vie.
Il revient finalement sur ses pas et se positionne sur l'encadrement de la porte alors que je me laisse tomber sur mon lit.
- Tu vas apprécier ma présence princesse, j'en suis sûr.
Mes sourcils se froncent, il recommence avec ce stupide surnom embarrassant.
- Tu m'as appelé comment ?
- « Princesse », c'est ce à quoi tu me fais penser quand je te vois dans cette robe. Il admet fièrement.
- Arrête tes conneries, à demain Sherlock. Je le réprimande en me frottant les yeux.
- Bonne nuit, fiore mio*.
* « ma fleur » en italien.
Il disparaît alors après avoir fermé la porte derrière lui.
Je rêve où il vient de parler italien et parfaitement bien en plus de ça ?
J'ai du mal entendre à cause de la fatigue.
{ La suite dans le prochain chapitre ✨}
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