Chapitre 01: Les rencontres sont parfois liées au destin
~Canada~Toronto~Septembre 2024~
-T'es vraiment une bonne à rien ! S'écrie mon
père, hors de lui.
Je devrais sans doute conter combien de fois il s'amuse à me dire cette phrase un jour.
-Regarde ta soeur, elle est en étude de médecine et elle travaille dur.
Il s'approche de moi et attrape mon visage en coupe avant de me gifler.
Je pose ma main à l'endroit où je viens de recevoir cette claque et baisse les yeux vers mes pieds.
Ce n'est pas dans son habitude de me frapper au visage. Les marques du lendemain risquent d'être plus difficiles à cacher que les autres.
-C'est bon Adrien, je pense qu'elle a compris là. Murmure ma mère, faussement inquiète.
Elle essaie de le calmer en vain, mon père continue de me fixer avec son fameux regard assassin.
- L'évaluation était super compliquée et les autres ont eu bien pire que 11/20. Je soupire sans le regarder.
Ma tentative censée le calmer provoque l'effet inverse, ses prunelles se remplissent d'une rage horrifiante.
-J'en ai rien à foutre des autres ! La prochaine fois que t'as une note comme ça, j'te fous dehors !
Son ton colérique me fait sursauter malgré que j'en sois habituée.
Je ravale mes larmes et me redresse doucement tandis qu'il attrape une clope et me tourne le dos.
Sa nonchalance face à la situation m'irrite, j'aimerais lui faire avaler sa cigarette encore enflammée.
Je remonte dans ma chambre quand ma mère m'intercepte par le bras.
-Ça va aller, n'en fais pas tout un plat. chuchote-elle.
Ma vue se brouille alors même qu'elle termine sa phrase. Ses talents pour me rassurer n'ont jamais été très spectaculaires. Je dirais même qu'elle a un don pour m'enfoncer.
Elle me prend dans ses bras en répétant quelque chose que je ne prends pas la peine de comprendre. Je ressens tout de même son aura sournoise malgré ses caresses qui se veulent réconfortantes.
Ma mère se contente de regarder son mari me frapper sans pitié et de me dire que tout ira bien.
-Bonne nuit. Déclare-elle avant de disparaître dans sa chambre.
Une fois dans la mienne, je m'écrase sur mon lit en laissant dévaler les larmes que je contenais.
Cela provoque une auréole sur la housse de mon coussin ternit pas la poussière.
Ma gorge se dénoue peu à peu, mais ses paroles restent gravées dans ma tête.
« La prochaine fois que t'as une note comme ça, j'te fous dehors ! »
En serait-il réellement capable ?
La question ne se pose même pas, je parie qu'il le ferait sans regret et avec satisfaction.
J'attache mes cheveux frisés en un chignon rapide et me contemple devant le miroir de ma chambre durant une éternité.
Le reflet de ma peau est humiliant à observer, l'hématome violet dans mon cou est répugnant.
Mon mascara a bavé, on peut voir les traces de mes larmes séchées sur mes joues poisseuses.
Il me suffira de cacher le tout sous une épaisse couche de fond de teint le lendemain.
Les yeux clos, j'inspire doucement, mes mains sur mon ventre.
Chacune des parties de mon corps me fait affreusement mal.
Une fois les lumières éteintes, je m'allonge et fixe le plafond pendant plusieurs heures sans jamais fermer l'œil de la nuit.
Dans les alentours de quatre heures du matin, mon téléphone retentit.
Je m'empresse de vérifier qui m'envoie des messages à une heure pareille mais l'expéditeur est un numéro inconnu.
De Numéro inconnu
> Je vais ruiner ta vie.
Les sourcils froncés, je relis la phrase en boucle sans percuter s'il s'agit d'une mauvaise blague ou d'un réel psychopathe qui me veut du mal.
De moi
> Ok.
***
En entrant dans le bus tous les regards semblent se poser sur moi. Je pense d'abord avoir oublié de cacher le bleu qui couvre ma joue mais ce n'est pas ça.
Sûrement une hallucination de ma part.
Mes yeux suivent le paysage qui défile derrière la vitre tandis que ma main est fortement accrochée à la rambarde.
Lorsque je me remémore l'évaluation de mathématiques qui m'attend, mon estomac se rétracte.
Mes pas m'emmènent jusque dans ma classe où mon groupe d'amies est déjà installé.
- Salut ! s'enthousiasment Shona et Alyssa en me sautant dans les bras.
Je ne saurais pas qualifier si ces filles sont vraiment mes amies ou si on joue toute la comédie.
Je les salue à mon tour et rejoins ma place discrètement pour ne pas éveiller l'intrigue de Karim et Mathieu.
Brad s'assoit sur la table face à moi et me fixe avant de déclarer:
-Tu t'es encore fait défoncer par ton père ?
- Ça se voit tant que ça ?
- Non pas vraiment, t'es toujours aussi belle. Il me rassure en posant une main sur mon épaule.
Chaque jour de ma vie je regrette un peu plus d'avoir confié ce secret à Brad.
Savoir qu'il ne fait rien pour y changer brise quelque chose au fond de moi.
Le sourire que je lui rends n'a rien d'enjoué, heureusement il n'a pas l'intelligence requise pour le remarquer.
Le professeur de mathématiques débarque dans la classe d'un pas rapide en nous demandant de ne garder qu'un stylo sur la table.
Une fois les copies distribuées, je la retourne en analysant chacune des questions.
C'est plus dur que je ne l'avais prévu.
Je saute la première question, puis la deuxième, et la troisième.
Putain je comprends rien, pourtant j'ai tellement révisé.
Mon angoisse ne fait qu'augmenter en pensant à ce qui pourrait m'arriver si je rate cette interro.
Je fais claquer mon stylo à répétition jusqu'à ce que mon voisin me menace d'arrêter.
Me triturer le cerveau pour fouiller dans mes connaissances ne sert à rien, mes calculs sont incompréhensibles.
Une fois l'heure terminée je rends ma feuille d'une main tremblante.
Je sais déjà ce qui m'attendra le jour de la remise des notes et la nausée me vient aussitôt.
Le prof disparaît aussi vite qu'il est apparu et le brouhaha reprend rapidement dans la salle.
- J'ai complètement raté. Admet Sacha en posant sa tête dans le creux de sa main.
- Je parie que toi t'as encore réussi, comme d'habitude. Râle Clémence dans son coin.
- Non pas vraiment, cette fois je vais avoir une note de merde.
- Arrête de mentir Lola, on sait tous que t'es une grosse intello. Réplique Sacha en admirant ses faux ongles de très mauvaise qualité.
Si elle pense que c'est une insulte, je le prends comme un compliment.
Je n'ai pas eu le choix d'obtenir ce rôle d'intello si je voulais me faire une place auprès de ma famille.
***
- Et du coup je suis tombée devant tout le monde, c'était hyper gênant. m'explique ma meilleure amie alors que je ne l'écoute qu'à moitié.
Je fixe un point invisible derrière elle en m'imaginant fuguer ce soir.
Je pourrais passer par ma fenêtre et m'échapper par le jardin.
- Oh ! Tu m'écoute ? se manifeste-elle.
- Est ce que tu penses que si je fugue, mes parents se rendront compte de mon absence ?
- J'en sais rien, je suppose que oui. Elle soupire, sûrement ennuyée par mes histoires à la con.
Son avis m'attriste légèrement, pour elle il est évident qu'un parent se comporte de manière affectueusement envers son enfant.
Ma jalousie pour elle et sa vie ne fait que s'accroître de jour en jour.
Deux mecs que je n'ai jamais vu de ma vie s'approchent de nous et s'assoient à notre table alors que j'étais plongée dans mes pensées.
Le self est gigantesque et une multitude de places sont libres, pourquoi venir ici ?
- Tu les connais ? Me chuchote Josie en bavant sur eux.
Je les contemple longuement, les deux sont gigantesques, même plus grands que moi ce qui est rare. Le premier a un rictus mignon, les cheveux noirs et des traits asiatiques. Le second possèdes des boucles brunes similaires aux miennes et de grands yeux gris, rien que dans son regard je peux deviner qu'il est insupportable.
- Je crois que l'asiatique est dans ma classe mais je ne connais pas encore les prénoms de tout le monde. Je lui réponds sans arrêter de les fixer.
Lola, oublie pas que t'as un mec.
- Le brun est plutôt pas mal.
- Arrête de le mater, il va te prendre pour une folle. Je glousse en attrapant mon plateau pour débarrasser.
Elle détourne rapidement le yeux et me suit d'un pas pressé.
- Est ce que tu penses qu'ils sont nouveaux ? Est ce qu'ils sont célibataires ? Tu veux venir leur parler avec moi ?
Sa capacité à parler sans respirer m'impressionnera toujours autant.
Je n'ai aucune envie de leur parler ni de me lier d'amitié avec eux.
- J'en sais rien, et j'ai la flemme d'aller les voir.
- Allez, s'il te plaît. Je suis toujours célibataire moi !
Ce qui est d'ailleurs étonnant quand on sait que Josie est probablement l'une des plus belles filles de Waterfalls.
Sa tête de chien battue fini par me faire de l'effet.
- Ok, mais c'est toi qui parle. cédé-je finalement en soufflant.
Elle acquiesce en sautillant d'impatience puis me prend par la main et me ramène jusqu'à eux.
Je traine des pieds sur le sol tandis qu'elle balance ses cheveux blonds de droite à gauche.
- Salut ! Elle commence d'un ton enjoué.
Ils lèvent tous deux la tête puis échangent une oeillade en même temps.
- T'es qui ? Demande le brun d'un air insolent.
Je sais déjà qu'il va me saouler ce gars là, rien que sa tête de mec prétentieux me donne des envies meurtrières.
- Je m'appelle Josie, et vous, vous êtes nouveaux ?
- Qu'est ce que tu nous veux ?
- Elle t'as posé une question, répond et fais pas chier le monde. J'interviens en le défiant dans un jeu de regard.
J'ai l'habitude de gagner mais cette fois, ses iris livides me font baisser la tête.
- C'est vous qui venez nous casser les couilles, je vois pas pourquoi on prendrait la peine de répondre.
Pour qui il se prend ? Il vient d'arriver et il se la joue déjà président du lycée.
- Moi c'est Noa et le con à gauche c'est Thomas. Son ami aux cheveux sombres prend la relève. Contente princesse ?
- Ne m'appelle plus jamais princesse ou je t'étrangle. Le menacé-je les mains devant ma poitrine.
Ils pouffe et écarte ses bras en grand comme pour m'y inviter.
- Mais vas-y, fais toi plaise.
J'hésite à craquer mais la violence n'est pas vraiment mon domaine, je me contente de menaces non aboutis.
-Va te faire foutre. Craché-je en me retournant.
J'entends les deux pouffer derrière mon dos quand je rejoins l'extérieur, Josie serrant ma main.
Nous rentrons dans le bâtiment en traversant les couloirs pour rejoindre nos classes respectives.
Aucune de nous deux n'ouvre la bouche jusqu'à ce que j'intervienne enfin.
- Au moins maintenant on sait que c'est juste des enfoirés.
- Hum... Noa, je crois, a l'air plutôt sympa. Elle soupire tristement en pénétrant dans sa classe.
- Oui, oui allez. Salut.
Je fais de même et me sépare de Josie quand j'intègre à nouveau ma salle respective.
Ce Noa est bel est bien dans ma classe.
Il est assit au fond en train de lire des mangas, les filles lui tournent autour.
Je m'approche pour jeter un œil à ce qu'il lit mais Brad m'intercepte juste avant.
- Pourquoi tu vas voir ce gars ?
- C'est pas parce que je vais le voir que je vais baiser avec lui.
- Me parle pas comme ça.
Ses yeux déjà noirs s'assombrissent encore plus, il a une aura similaire à celle de mon père et ça a le don de m'effrayer.
- Me parle plus sur ce ton. Il continue tout en examinant Noa de façon exagéré.
Je n'ai pas haussé le ton, il s'imagine des choses seulement pour me faire culpabiliser.
- Ouais, désolée. Soufflé-je finalement.
Je connais parfaitement le pouvoir que Brad a sur moi, ça ne servirait à rien de me révolter. Je dois simplement accepter tout ce qu'il me demande. C'est comme ça que notre relation fonctionne depuis quelques temps.
Il s'éloigne sans m'accorder un regard de plus et rejoint ses amis, des abrutis.
- Et bah, on dirait que t'es sa chienne. Tu le suces combien de fois par jour ? glousse Karim avec son groupe d'amis dans mon dos.
Brad les laisse se moquer de moi, ça ne m'étonnerait pas de carrément le voir rire avec eux.
Un grand sourire hypocrite se plaque sur ma bouche pour faire mine que tout cela ne m'atteint pas.
Je m'assois à ma place sans prêter attention aux autres même si je peux sentir leurs regards insistants sur moi.
***
En rentrant dans le bus, j'aperçois Noa assit au fond avec son pote insupportable. Il manquait plus qu'on doive faire le trajet du retour ensemble tous les jours.
Josie me force à aller les voir une fois de plus pour « repartir sur de bonnes bases ».
- Vous prenez le même bus que nous, c'est cool. S'extasie Noa, un grand sourire aux lèvres.
Je me méfie tout de même de sa soudaine bienveillance envers nous.
Thomas, quant à lui, lui donne une tape sur l'épaule, en désaccord total avec ce qu'il vient de dire.
Il lève à peine les yeux de son portable pour nous lâcher un bref regard.
- Encore vous ? On va finir par croire que vous êtes des prostitués en quête de clients.
Putain ce batard me tape sur le système.
- On voulait s'excuser et recommencer sur de bonnes bases. Admet ma meilleure amie en enroulant une mèche blonde autour de son index.
Comment ça s'excuser ? Il vient délibérément de nous traiter de putes mais ça n'a pas l'air de fortement l'inquiéter.
Il éclate de rire en passant sa main dans ses cheveux emmêlés.
- C'est quoi vos prénoms ? Comme ça si on est intéressé on reviendra peut-être vous voir.
Le petit jeu qu'il entreprend m'irrite plus que tout, sa voix est insupportable à écouter.
- Moi c'est Josie et elle c'est...
- Lola. L'interrompt Noa en scrutant les moindres détails de mon visage.
- Mec, t'as vite retenu son prénom. J'espère que tu bandes pas déjà sur elle. Le nargue Thomas en imitant un geste de fellation.
Il sourit discrètement, puis referme ses jambes comme pour cacher quelque chose.
- On est dans la même classe, c'est tout.
- Interessant. Chuchote Thomas avec un sourire pervers qui me dégoûte du plus haut point.
- Elle est déjà en couple, te fais pas d'idées.
Il détourne finalement ses yeux de moi pour admire le paysage innocemment. Exactement comme j'ai l'habitude de le faire.
- Comment tu sais ? l'interrogé-je les sourcils froncés.
- Ton mec... Brad je crois, me l'a clairement fait comprendre.
Sérieusement, putain ?! Je passe pour une gamine qui ne peut pas vivre sans la défense de son copain maintenant.
Il m'humilie, une fois de plus.
- Dommage. Soupire le brun en tournant maintenant ses yeux vers Josie.
Ce mec change de proie aussi rapidement qu'un clignement des yeux.
Il analyse chaque traits de son visage et descend ses yeux sur tout son corps.
Ils s'arrêtent sur sa chemise ouverte qui laisse entrevoir la naissance de sa poitrine pendant un temps qui me semble bien trop long.
Je passe devant elle contrariée, mais surtout dégoûtée par ce connard.
- Ça va le pervers, j'te gêne pas ? Je m'exclame en le défiant des yeux.
- Décale toi juste d'un mètre et c'est parfait princesse.
Thomas se permet carrément d'exécuter un geste avec sa main pour me faire comprendre que je dois bouger.
Je ne recule pas d'un centimètre alors il se ravise et retourne sur son téléphone.
Je le déteste déjà.
Nous nous éloignons toutes les deux, les laissant pouffer comme deux gamins de la maternelle.
-Je crois que je kiffe Thomas, j'aime bien son côté arrogant. M'avoue Josie en donnant un coup d'œil à l'arrière du bus.
- Tu vois, c'est ça ton problème.
Elle se contente de sourire en rêvassant sûrement d'un monde alternatif où il l'a prend langoureusement dans ses bras en disant « t'es différente des autres filles avec qui j'ai baisé Josie ».
Pathétique.
On se salue de la main avant de rentrer chacune de notre côté.
Je m'affale sur le canapé une fois chez moi quand mon regard croise l'endroit où mon père se défoulait sur moi hier encore.
J'efface ce mauvais souvenir de mes pensées et ravale mes larmes quand une notification arrive sur mon portable.
De Numéro Inconnu
> T'as aucune idée de ce qu'il t'attend.
{La suite dans le prochain chapitre✨}
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top