Accident ?
On continue de parler toutes les trois et assez vite, la répétition se termine. Je range ma guitare dans son étui et sors dans la nuit qui venait tout juste de commencer en direction du parking. Je dis au revoir à Emma qui partit à pied en direction de chez elle. Je cherche du regard la voiture noire de ma mère et finis par la trouver. Je la rejoins, ouvre le coffre pour y mettre ma guitare et me glisse sur la banquette arrière en voyant que le siège passager était encombré de cartons. Je referme la portière derrière moi et ma mère me salue en démarrant :
- Coucou, ça va ma puce ?
- Ouais et toi ? Ton travaille ?
- Comme d’hab.
- Mais t’avais pas une mission aujourd’hui ?
- Si, si. me répondit-elle froidement.
- Ça n'a pas été ?
- Écoute Ava, on en parlera à la maison.
Je n’insiste pas en sachant que quelque chose n’allait pas. Je le voyais rien qu’à ses sourcils qui étaient constamment froncés et ses yeux marron-verts fatigués. Sa queue de cheval noir était en pagaille et ses rides se voyaient plus que d’habitude.
- Tu sais où est ton frère ?
- Non mais il a dû rentrer.
Elle ne répondit pas et freina au feu rouge. Je sors mon téléphone de ma poche et envoie un message à Hassan pour lui demander où il était. Il me laisse un vue.
Je soupire et soudain, la voix de ma mère me fait sursauter.
- C’est pas lui là bas ? me demande-t-elle.
Hassan était seul avec un gars que je ne connaissais pas dans une rue en face de notre voiture. Il était en train de lui vendre de la drogue et le gars lui donnait une grosse liasse de billet en échange. Et je sus que ma mère l’avait vu.
- Putain mais qu’est ce qu’il fait ! Il déconne j'espère ! C’est ça l’argent qu’il nous ramène ? Il m’avait dit qu’il avait trouvé un job ! Depuis tout ce temps on se sers de cet argent ?!
- Maman, il a fait ça pour t’aider. j’essaye de lui dire pour la calmer.
- Parce que tu étais au courant aussi ? Et personne ne m’a rien dit. Ce n’est pas parce que je fais un métier de merde qu’il doit en faire un aussi !
Le feu passa au vert et elle accéléra vers la rue d’en face. Elle accéléra un peu trop. Il y avait un croisement juste avant d’arriver à la rue et je tourna la tête en priant pour qu’une voiture n’arrive pas au même moment.
Et c’est là que je le vis. Un gros camion noir fonça vers nous et je croisa le regard du conducteur qui fit tout son possible pour dévier la trajectoire de son véhicule mais il savait autant que moi qu’à cette vitesse, c’était trop tard.
Le camion entra violemment en collision avec notre voiture sur le côté. Mon corps parti brutalement en avant retenu par la ceinture qui me déboîte l’épaule. Surprise, ma mère lâcha le volant. Ça c’était passé tellement vite. J’avais juste eu le temps de voir le paysage tourner sur lui même alors que mon corps était secoué de toutes parts. Et puis d’un coup la voiture atterrit sur le sol dans un énorme fracas.
Je voyais flou mais je sentais que ma tête était en bas. J’avais mal à l’épaule et mon ventre me faisait souffrir. Je détache ma ceinture et atterrit sur le sol, je réussis à sortir de la voiture par la portière arrachée.
Dehors, les voitures s’étaient arrêtées et nous entourées. Je tourne ma tête et croise, au loin, le regard d’Hassan qui me reconnaît aussitôt avant de courir vers moi. Mais je ne l’attends pas. Je me tourne vers la voiture qui était sur le dos et ouvre la portière de ma mère qui était à moitié cassée. Sa ceinture s’était arrachée et sa tête reposait sur le sol dans un angle inquiétant.
Sans réfléchir, je la tire des débris et traîne son corps loin de la voiture et du regard des gens.
Je la mis sur le dos et pris son poul en me rappelant soudainement que je n’avais jamais su prendre le poul à qui que ce soit.
- Putain… Maman ? Maman ?!
Elle toussa faiblement et mit sa main sur son ventre dans un réflexe. Quand elle retira sa main, elle était pleine de sang.
- Maman ça va ? Tu peux te relever ? je lui demande dans un sanglot.
Je porte la main à ma bouche pour ne pas pleurer.
- Ça va aller maman d’accord ? Ça va aller. Tout va bien se passer… Je te le promets…
Elle dirigea faiblement sa main vers la mienne et je m'empresse de la saisir.
- Ava… Garde ça… pour moi…
Elle toussa encore plus fort et peinait à parler lorsqu’elle desserre sa main pour y laisser voir un minuscule flacon rempli d’un liquide bleu pâle.
- Prends le… dit-elle entre deux toux.
Je le pris sans faire d’histoire et le rangea à la va vite dans ma poche avant de reporter mon attention sur ma mère.
- Maman, écoute, je t’en supplie, accroche toi… Accroche toi, ça va aller d’accord ? Je te le promets… Je te le promets…
Je lui murmure en lui caressant le visage. Je ne pleurai pas. Je ne pleurai pas parce que tout irait bien, tout allait bien se passer. C’est impossible que ce soit la fin. C’est impossible.
Je sentis sa respiration qui ralentissait et elle me dit en murmurant :
- Ne le montre… à personne… personne… cours… cours !
- Non maman, non, non, non… Je te promets que tout va bien se passer, ok ?
- Cours Ava… Maintenant, vite…
- Non, non…
Ses yeux devinrent flou, triste, vide… c’est ça vide. Comme si elle n’était plus là mais que ce qui restait était juste un déguisement, une enveloppe… Je me refuse à dire la vérité mais… c’était comme si son âme était partie…
Je lâcha son visage et me releva aussitôt, les mains sur la bouche, prise d’effroi.
Non, ce n’était pas possible… pas ça… Ce n’était pas vrai, c’est un cauchemar, juste un cauchemar !
Les sirènes de police et des ambulances me réveillèrent soudainement et, prise de panique, je cours.
Je cours parce que ma mère me l’a demandé, parce que je ne supportais pas de voir ça… En fait je cours juste pour échapper à la réalité, pour qu’elle ne puisse pas me rattraper.
J’entends Hassan m’appeler au loin en criant mon nom mais je ne m’arrête pas. C’est lui qui l’a tué. S’il m’avait écouté quand je lui avais dit d’arrêter, on n’en serait pas là, maman n’aurait jamais accéléré.
Je cours dans la direction opposée sur le trottoir en bousculant les passants et en passant devant les boutiques encore ouvertes.
Je cours en laissant ma mère seule, en laissant mon frère qui me criait de revenir au loin, en laissant ma guitare qui devait sûrement être brisée en mille morceaux.
Je cours sans savoir où aller, sans but, je cours pour ma survie, je cours pour essayer de semer la réalité à travers les rues qui se croisaient, les passants que je bousculais.
Je cours encore et encore. Puis soudain, je me rendis compte que je n’entendais plus mon frère, que les sirènes avaient disparu. Je me retourne et constate que j’étais arrivée dans une rue sans lumières, sans commerces, calmes et sans personnes.
Je ne sais pas combien de temps j’avais couru mais quand je m’arrêta, je sentis les courbatures arriver et je sus que j’avais dû courir pendant longtemps.
Je mets mes mains sur mes genoux pour reprendre mon souffle mais mon ventre me fait immédiatement mal et je tombe assise sur le trottoir en serrant les dents. Je mis mes mains sur mon visage et me frotta les yeux. Je ne pleurai pas et c'était ça le pire. Comment je pouvais ne pas pleurer ?! C’est ma mère ! Je me déteste ! Je me déteste tellement putain !
J’avais mal. Pas seulement aux côtes ou à l’épaule mais surtout au cœur. Voilà pourquoi on disait avoir le cœur brisé. J’avais vraiment l’impression qu’il était brisé ou alors que je n’en avais pas. Comme s’il était vide ou froid.
J’avais envie de crier pour expulser toute ma rage ou ma tristesse mais je n’y arrivais pas, je n’en avais plus la force.
Je sentis soudain quelque chose de dur dans ma poche et j’en sors la minuscule fiole que ma mère m'avait donnée. Juste après, elle m’a dit de courir. Ce liquide bleu pâle avait certainement un rapport avec Hydra.
Je mis la fiole à la lumière d’un lampadaire et l’a retourne dans tout les sens en espérant y voir un indice ou une sorte de mode d’emploi. En dessous du flacon il y était écrit en tout petit “ À injecter”.
Est ce que maman voulait que je me l’injecte ? J’en sais rien. Je ne sais pas. Je ne veux pas savoir…
Je sors mon téléphone de la poche intérieur de mon manteau et, en découvrant qu’il était pratiquement intact, je téléphone aussitôt à Peter qui ne tarda pas à répondre :
- Allô, Ava ?
- Oui, Peter, faut que tu m’aides s’il te plait.
- Pourquoi ? Qu’est ce qu’il y a ?
- Je… C’est ma mère… Elle… Est ce que je peux venir dormir chez toi cette nuit s’il te plait ?
- Ava, ça va ?
- Est ce que je peux… venir ?
- Oui… Oui, oui, bien sûr.
- Ok, à toute. je lui dis en raccrochant.
Je savais que Peter n’habitait pas loin d’ici alors, je me relève avec difficulté et marche vers son immeuble. Je cache la fiole de ma mère dans ma poche intérieur et mis ma capuche pour ne pas que les gens voient que j’étais blessée.
Je ne tarde pas à apercevoir l’immeuble de Peter et, connaissant le code, j’y entre directement. J’arrive à la porte de son appartement et toque à toute vitesse. Il vient aussitôt m’ouvrir et j’entre sans le regarder. Il referme la porte derrière moi et je retire ma capuche en baissant la tête.
Surpris, il écarquilla les yeux en voyant que j’étais dans un sale état.
- Mais… Mais qu’est ce qui t’ai arrivé ?
- Je… Un accident. On a eu un accident… de voiture.
- Qui ça “on” ?
- Moi et ma mère.
- Et où est ce qu’elle est ?
Je relève ma tête et croise son regard. Il a dû y voir la douleur et comprendre parce qu’il appela aussitôt sa tante qui arriva en courant :
- Oh mon dieu, Ava ! Qu’est ce qu’il c’est passé ?!
Elle s’approcha de moi et me prit dans ses bras. Et je pleure. Je pleure en me disant que ma mère ne me prendrait plus jamais dans ses bras.
May me caressa les cheveux en me murmurant des paroles réconfortantes.
- C’est ma mère… Elle…
- Chut, chut, chut, ça va… Ne t’inquiète pas, je suis là.
Et je pleura de plus belle en laissant reposer ma tête sur son épaule et en laissant ses paroles me réconforter.
Je croise le regard triste de Peter.
Au bout d’un moment, May me lâcha et me détailla du regard :
- Tu t’es blessée, il faut appeler une ambulance.
- Non, non, pas la peine, ce n’est pas mon sang. je mens.
Je ne voulais pas que les infirmiers ou qui sais-je ne découvrent la fiole. Je l’ai promis à maman.
- Tu es sûr ? me demande May, inquiète.
- Oui, oui, c’est rien.
- Bon… Je ne vais pas insister. Peter, montre lui la salle de bain.
Je suivis Peter qui m’amena vers une salle de bain.
- Ça va aller ? me demande-t-il.
- Ouais.
- Tu veux dormir dans ma chambre, sur le lit superposé ou dans le canapé ?
- Je m’en fiche.
- Je te demande pour ne pas que tu sois mal à l’aise parce que…
- Peter, c’est le dernier de mes soucis là alors fais comme tu veux, je m’en fiche.
- Ok… Si t’as besoin de quoi que ce soit…
J’acquiesce et il referme la porte de la salle de bain derrière lui, me laissant seule, encore.
Je me lave en vitesse et jette mes vêtements remplis de sang dans une poubelle après avoir pris la fiole avec moi. Puis, je me rhabille avec les vêtements que May m’avait prêté. Mon épaule et mes côtes me faisaient horriblement souffrir mais je ne le montra pas quand je ressors dans le salon.
May et Peter étaient en train de parler entre eux et quand May me vit elle vint vers moi :
- Ava, il faut qu’on appelle la police. On ne va pas pouvoir te garder éternellement. me dit-elle à contre-cœur.
- Je sais…
Elle me sourit et part dans la cuisine, son téléphone à la main. Je me tourne vers Peter :
- Finalement je préfèrerai dormir dans le lit superposé, j’ai pas envie d’être seule.
Il acquiesça et je repris :
- Et je suis désolée de vous causer du soucis comme ça mais ton appart’ était le plus proche alors…
- Nan, t’inquiète c’est rien. J’aurai fait la même.
Je lui souris, reconnaissante. Puis, il reprit :
- Mais pourquoi t’es parti ? T’aurais pu rester là-bas après l’accident.
- Je sais pas… J’ai paniqué je crois. je lui mens.
- Tu veux manger quelque chose ?
Je secoue négativement la tête :
- Non.
Soudain, May ressortit de la cuisine et vint vers nous :
- Ok, j’ai appelé la police mais ils m’ont très clairement fait comprendre qu’avec l’accident, ils ne pourront pas venir tout de suite alors il m’a dit d’une voix très chaleureuse qu’ils viendront demain matin et qu’ils nous faisaient confiance. dit-elle ironiquement.
- Merci beaucoup May. je lui répondis.
- C’est pas grand chose après ce qu’il vient de se passer. Mais tu devrais aller dormir pour le moment, je ne sais pas à quelle heure ils vont arriver demain.
Je la remercie encore une fois et vais dans la chambre de Peter accompagnée de ce dernier.
- Tu vas dormir aussi ? je lui demande.
- Après cette soirée, ouais ça vaut mieux.
Je lui souris, heureuse de ne pas rester seule. Je mets mon téléphone à charger puis je monte sur le lit du dessus et me glisse sous la couverture. J’entends Peter qui fait de même puis le silence enveloppa la pièce laissant entendre la télé que May devait regarder.
Peter brisa le silence :
- Est ce que… tu veux en parler ou pas ?
Je soupire :
- Qu’est ce que tu veux que je te dise ? On était en voiture, ma mère a vu Hassan vendre ses trucs, elle a accéléré et un camion est passé en même temps. Le conducteur a fait tout son possible pour tourner avant mais vu la taille du véhicule, ça n’a servi à rien. Notre voiture à fait des loopings et… plus rien.
- T’en veux à Hassan ?
- Non, il vient simplement de tuer ma mère avec ses conneries alors non, je ne lui en veux absolument pas. je réponds d’un ton ironique.
Dans le noir de la chambre et à la lueur des lampadaires de la rue j’entendis Peter qui remuait dans son lit :
- Ce n'est pas vraiment de la faute de ton frère…
- C’est plus mon frère… Ça ne l’a jamais vraiment été. je le coupe.
Je l’entendis soupirer tandis que je me retournai du côté du mur en serrant de ma main droite, la fiole qui contenait le liquide bleu pâle.
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