Chapitre 1


Comme presque tous les jours, je suis assise sur ma chaise, et j'étouffe dans cette pièce trop lumineuse, trop petite, trop blanche, trop nulle en fait. Ma voisine de table, une fille plutôt sympa et beaucoup trop belle nommée Alicia, se balance sur sa chaise. Mes camarades assis derrière moi parlent sans gêne de leur vie, comme si on n'était pas en cours de maths. Il y a trop de bruit, je n'arrive pas à me concentrer (même si de toute façon, je n'écoute pas le blabla incompréhensible sur le théorème de l'angle inscrit ou je ne sais quoi d'autre). Comme pendant les cours d'anglais, d'allemand et de français, je pense, ou comme dirait le mathématicien-philosophe-scientifique-écrivain de ma classe, je philosophe. Il n'y a qu'en cours d'histoire-géo et de sciences que j'écoute attentivement. L'histoire, je trouve ça passionnant, et en plus c'est facile, tout comme la géographie. Et les sciences... c'est clairement ma passion. La biologie c'est trop cool, ça explique plein de trucs (le meilleur c'est le chapitre ADN). La chimie c'est faire exploser des trucs, c'est hyper drôle et un chouya dangereux (oui j'adore le danger). La physique c'est peut-être ce que j'aime le moins, parce que il y'a pleeeein de calculs à faire.

— Eh oh Try ! Tu philosophes encore ?

— Peut-être bien. Tu t'es déjà demandé comment tu pourrais mourir ? Perso ça fait 3 jours que j'examine toutes les raisons possible. Je pourrais écrire un livre : "Les 100 façons de tuer Trinity Lee"

— Il faudrait d'abord publier "Les 30 millions de raisons de tuer Trinity Lee"

— Eh ! C'est pas gentil... je te boude.

   Je tire la langue et croise les bras en tournant le dos à ma voisine. Nina rit et se remet au travail. Elle est tellement gentille et drôle, c'est toujours avec elle que je passe les meilleurs cours. De plus, elle est plutôt intelligente et elle comprend vite. C'est grâce à elle que mes notes en maths ne sont pas trop mauvaises. Pour le moment, je m'en sors avec une moyenne de 12 sur 20, donc ça passe.
   Alors que la prof explique je ne sais quoi, je poursuis mes rêveries. Si on pouvait recevoir des connaissances en une seule et unique matière, qu'est-ce que vous voudriez ? Moi j'aimerais tellement avoir les connaissances d'un chirurgien... Parce que depuis quelques temps, je suis passionnée par la médecine. Peut-être parce que j'ai regardé cette série Netflix trop incroyable nommée Good Doctor... Bref depuis je veux absolument devenir docteur mais c'est trop... trop de choses trop complexes à apprendre par coeur, trop d'études et je n'ai pas l'argent. Je vais donc commencer mes études de droit l'année prochaine, quand j'entrerai au lycée. Je suivrai les pas de mon grand frère, Matéo, qui est en 2e année de lycée. D'après lui c'est assez simple, et ça m'intéresse assez donc c'est ce que je vais faire. J'adore mon frère, il a toujours été gentil avec moi et me défend à chaque fois que nos parents me fâchent. Matéo et moi, on a toujours été assez proche malgré le fait que nous ne sommes pas du même sang.
Je continue ensuite à rêvasser. Alors que je me demande ce qu'est la beauté, quelqu'un toque à la porte. La prof se lève pour aller voir, mais la porte s'ouvre sans attendre. Trois hommes entrent dans la salle. Ils sont tous très grands et très musclés, et portent un uniforme noir, de grosses bottes de la même couleur et ont autour de la taille une grosse ceinture, comme pour les policiers, avec un pistolet et d'autres objets dans ce style. Il n'y a plus aucun bruit dans la salle, le silence c'est fait en moins de 15 secondes, ce qui est un record. Celui qui semble être le chef donne un ordre à ses deux collègues dans une langue qui m'est inconnue, bien que je parle couramment l'anglais et l'espagnol en plus du français, et que je comprenne plus ou moins le japonais, le russe et l'allemand.

— Ngoc, veuillez nous suivre.

Mon ami, Fabien Ngoc, se lève et avance lentement vers ces hommes. Ces derniers échangent un regard étrange, puis l'un d'eux dit : « Pas toi, la fille Ngoc. »
Fabien s'arrête et fait demi tour pour regagner sa place au fond de la classe, l'air à la fois soulagé et un peu frustré.

— Il n'y a pas d'autre élève portant le nom de Ngoc, dit ma professeure.

— Si.

L'homme s'empare d'un petit bout de papier coincé dans sa poche et lit à haut voix ce qu'il y était inscrit.

— Collège Saint-Carmentin, classe MAT3h8f du niveau de 3e année. Fille Thanh Lin Ngoc. Son père, monsieur Allen Hsu Wu la réclame.

C'est là qu'un déclic se fait dans mon esprit. Mon nom complet actuel est Trinity Lin Lee, mais mon nom de naissance, c'est bien Thanh Lin Ngoc... Alors que la prof s'approchait de nos interlocuteurs et s'apprêtait à répondre, je levai la main.

— C'est toi, lâcha le chef en me dévisageant.

— Peut-être. Mais je n'ai pas de père.

— Ne racontez pas de bêtises, rigola-t-il. Votre père vous attend. Je crois qu'il a beaucoup de choses à vous dire.

— Ne l'appelez pas mon père. Il n'est rien d'autre que mon géniteur, qui n'a pas daigné pointer le bout de son nez lors de l'accouchement. Je ne l'ai jamais vu, je ne pourrais pas le reconnaître. Ce n'est donc pas mon père. Et quant à moi, je n'ai rien à lui dire.

— Comme vous voudrez. Dans tout les cas, vous êtes demandée par notre patron, donc vous allez nous suivre ou alors les choses se passeront très mal.

— Non. Je refuse. Je ne veux pas le voir.

— Je crains que vous n'ayez pas le choix, mademoiselle Ngoc.

— Je m'appelle Trinity Lee, sifflai-je en serrant les dents. Et je n'ai pas de père.

— Ça suffit. Suivez nous et tout ira bien.

— J'ai dit non.

Un des hommes commença à marcher en ma direction.

— Ne m'approchez pas, dis-je d'une voix ferme.

L'homme ne m'a bien évidemment pas écoutée. Me prenant par le bras, il me force à me lever et me tire derrière lui jusqu'à la porte. Je me débat comme je peux, mais il est trop fort. Je lance un regard suppliant à mes amis, mais aucun ne vient m'aider. Heureusement, la prof s'approche et les force à me relâcher. Je réussi à me faufiler en dehors de ses bras et je recule de quelques pas.

— Sortez de cette salle.

   Tout se passa très vite. Personne ne vit exactement ce qu'il s'est passé, mais notre professeure se retrouvait prise en otage, le revolver du chef contre sa tempe. Les deux autres hommes avaient eux aussi leur arme en main, prêts à tirer. Certains de mes camarades se mirent à crier, d'autre à pleurer, et d'autre encore à se cacher en renversant des tables. C'était le bordel total.

— Vous allez venir avec nous, ou bien on tue toutes les personnes ici présentes, dit le chef en me regardant.

   Quelqu'un pourrait avoir appelé la police, dans ce cas je devrais juste gagner du temps. Je regarde autour de moi mais personne n'a son téléphone en main. La plupart sont paralysés. On peut donc oublier cette option. Malheureusement, je n'en trouve pas d'autres qui n'implique aucun mort. Je m'empare discrètement du couteau suisse caché dans une poche de mon sac que je fourre dans ma poche de pantalon. Je vérifie très vite si mon téléphone est sur moi, puis je me lève en mettant les mains en l'air.

— Relâchez là. Dis-je en montrant ma prof du menton. C'est bon, je viens avec vous.

Je marche jusqu'à la porte, mais on me serre par derrière. Je sens un objet froid contre ma tête. Maintenant, c'est sur moi qu'ils pointent leur arme. Je baisse les bras et glisse ma main discrètement dans ma poche. Je tire sur la lame, qui se déplie facilement et je prends fermement le manche dans ma paume.



1335 mots, 1er janvier 2024, Thi Linh Nguyen

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