Chapitre 42

Diane 

Mon plan laisse les créatures surnaturelles peu convaincues. Mais après avoir clairement dis que j'irai avec ou sans eux, mes parents, puis les autres ont cédé. Mon père, très bon en stratégie, a perfectionné mon plan. A la fin, j'étais impressionnée. Mon plan suicidaire s'était transformé en un plan qui avait une chance de réussir. 

- Très bien, finit mon père, si tout le monde a bien compris et n'a aucune objection, allons-y !

Tout le monde hoche la tête, déterminé. Les sorcières sortent des pommades "cache-odeur" qu'elles avaient emportées avec elle en prévision de la bataille pour me sauver et chacun se tartine la peau en silence. 

Juste avant de partir, ma mère vient me voir et fait apparaître un carquois rempli de flèches dans mon dos. 

- Tu risques d'en avoir besoin, chuchote-t-elle doucement. 

Elle hésite quelques instants puis me caresse affectueusement les cheveux, comme elle a l'habitude de faire. Puis sa main effleure mon front tailladé et la tristesse, la culpabilité et la rage traversent ses yeux bleu océan. Je me détourne, pas encore prête à parler de ce qu'il m'est arrivé. Ma mère semble le comprendre et rejoint à regret son mari. Je vois mon père la prendre dans ses bras et lui murmurer quelque chose à l'oreille. Il l'embrasse amoureusement et ensemble, ils prennent la tête de l'expédition, main dans la main. 

Je m'en veux un peu de les repousser de la sorte, mais j'ai besoin de temps pour que tout redevienne comme avant. J'ai beaucoup souffert, il faut que je guérisse, et ça je pense que mes parents peuvent le comprendre. Et puis ce n'est pas encore terminé. Je ne pourrai souffler que lorsque Théo sera avec moi.

Nous commençons ensuite à avancer dans la forêt en faisant le moins de bruit possible. Amarok progresse en toute discrétion avec facilité, la forêt est son élément. Mon père et moi sommes suffisamment silencieux. En revanche les autres sorcières, sans être excessivement bruyantes, ne sont pas non plus très discrètes. Elles risquent de nous faire repérer. Amarok doit penser la même chose que moi puisqu'il envoie un coup d'œil appuyé à ma mère. Pour ne pas épuiser leur réserve de magie à se faire discrète (nous aurons besoin des sorcières en pleine possession de leurs pouvoirs quand la bataille commencera), ma mère propose que son loup-garou porte les deux sorcières. Mon père prend ensuite sa femme sur son dos. Notre petit groupe reprend ainsi sa marche vers l'antre des monstres sanguinaires. 

Nous sortons bientôt de la forêt. Ici, le danger s'agrandit. Les arbres ne nous protègent plus de leur feuillage. Amarok s'assure qu'aucun vampire ne se trouve dans les parages grâce à son ouïe ultra fine. Puis, nous accélérons la cadence pour remonter la pente enneigée et arriver sur la plateau blanc que j'ai parcouru il y a à peine quelques heures en sens inverse. D'un simple mouvement de poignet, ma mère fait se lever le vent pour qu'il efface nos traces dans la neige. Nous continuons ensuite de progresser ainsi à découvert, Amarok tendant l'oreille. Nous ne sommes plus qu'à environ un kilomètre de la grotte des vampires lorsque le loup-garou nous prévient d'un mouvement de vampires pas très loin de nous. Nous ne pouvons pas nous cacher, ni rebrousser chemin. Nous devons donc utiliser la magie pour continuer d'avancer sans se faire repérer. 

Les sorcières se donnent la main pour partager leur énergie et créées une bulle invisible qui nous enveloppe, nous permettant d'échapper aux regards perçants de nos ennemis. Quant à moi, je resserre mon emprise sur mon arc, une flèche déjà encochée. Nous marchons sans encombre le kilomètre nous séparant du trou donnant sur la salle du bassin de la grotte. Nous ne sommes plus qu'à une dizaine de mètres quand je remarque que des grosses pierres entourent le trou. 

Alors que je m'avance vers l'ouverture, Amarok me stoppe, penchant la tête sur le côté, semblant écouter. Lisant dans l'esprit de son loup, ma mère, toujours dans un silence de mort, nous fait signe que des vampires sont cachés sous les pierres, protégeant le trou. Mélanie a dû juger bon de faire garder cette entrée secondaire suite à ma fuite. 

Mon père nous enjoint de rester où nous sommes, puis, il fonce tel un rapace sur les pierres. Il est tellement rapide que je n'arrive pas à suivre son mouvement. Les trois vampires en embuscade n'ont pas le temps de donner l'alerte que déjà le Traqueur est sur eux. 

Mon père tourne sur lui-même, faisant voler sa cape noire. Il transperce un vampire d'un coup d'épée, envoie un poignard dans le cœur du deuxième. Un éclair argenté décapite le dernier vampire. Les buveurs de sang gisent à présent au sol, massacrés en une minute sans avoir pu esquisser le moindre geste pour se défendre. 

Au dessus d'eux se tient mon père, la tête encapuchonnée et l'épée en main. Il essuie le sang noir des sangsues sur le pantalon de l'un des macchabées puis, avec classe, il range son arme dans le fourreau qui se trouve dans son dos. Je suis émerveillée par le charisme de mon père. C'est la première fois que je le vois à l'oeuvre et je dois avouer que sa prestance n'est pas une légende. Je me rends brusquement compte que dorénavant, j'admire plus mon père que ma mère. Moi qui ai toujours voulu ressembler à la fière Ensorceleuse, je désire aujourd'hui prendre le pas sur mon père le Traqueur. 

Nous rejoignons ensuite le trou menant à la grotte. Je remarque tout de suite que le cercle magique, que j'ai brisé en m'évadant, a été réparé. Cela complique les choses. Mais Circé ne devait pas s'attendre à ce que l'Ensorceleuse vienne tester ses défenses. Elle devait penser qu'elle affronterait ma mère au point de rendez-vous, lieu minutieusement choisi par Mélanie. Dommage pour elles, ma mère est là et ne va faire qu'une bouchée de leur protection magique. 

L'Ensorceleuse s'avance donc et pose la main sur le dôme magique. Pour ne pas avertir Circé, elle ne brise pas le cercle. Elle se contente de faire une brèche par laquelle nous nous faufilons. La brèche se referme immédiatement derrière nous. 

Nous avons réussi à pénétrer leurs défenses sans nous faire repérer ! Cela revient du miracle ! Il ne manque plus qu'à descendre dans la grotte et trouver Théo. Mais quand je m'approche du trou j'ai l'impression que la chute est encore plus vertigineuse que je m'en souvenais. Vais-je réussir à descendre par là ? 

Mon père ne se pose pas la question et déjà le voilà en train d'agripper la première prise. Avec une facilité déconcertante, il descend le long de la paroi argileuse. Les deux sorcières le suivent de près. Elles semblent avoir quelques difficultés et glissent par endroit. Mais elles utilisent la magie pour se stabiliser. Amarok leur emboîte le pas. Le loup plante ses griffes dans la roche et descends facilement, une patte après l'autre, sans utiliser les prises naturelles de la paroi. 

Mon père est à présent presque arrivé en bas. Ma mère me fait signe de passer avant elle. Je passe mon arc dans mon dos, j'inspire fortement et, les mains tremblantes, m'accroche du mieux que je peux. La paroi est plus lisse que je ne pensais et j'ai beaucoup de mal à descendre. Je reste bloquée à deux mètres à peine du début. Je regarde en bas et le regrette aussitôt. Une vingtaine de mètres me séparent de la terre ferme. Je suis soudainement prise de vertige, le vide m'appel et je manque de tomber.

Je me rattrape tant bien que mal en me plaquant contre le mur. A cette hauteur, la chute serait mortelle. Je relève les yeux et vois que ma mère a elle aussi commencé sa descente. Je ne peux plus faire demi-tour. Je dois me faire violence pour continuer malgré la peur qui me paralyse. Je réussi à faire quelques mètres sans accrocs. Au-dessous de moi, les créatures sont presque toutes en bas. Amarok, saute les quelques mètres qui lui reste et le loup atterri avec souplesse près du bassin. 

Je pose mon pied au hasard sur la paroi, espérant trouver un renfoncement faisant office de prise. Je parviens à en trouver une, c'est maintenant au tour de ma main. Je cherche une prise un peu au dessous de moi mais mes doigts ne rencontrent qu'un mur lisse. J'aperçois une prise à trente centimètres à gauche de ma main qui me permettrait de continuer ma descente. Malheureusement elle est trop loin, je dois sauter pour l'attraper. J'inspire un grand coup et tente ma chance.

Je relâche ma prise et jette mon corps vers la nouvelle. Le temps semble se suspendre pendant que je me tends vers ma cible. Mes doigts effleurent le mur rugueux à cet endroit mais mon saut est trop court. Je dérape et glisse. 

J'ai le réflexe d'attraper deux flèches dans mon carquois et de les planter dans la roche avant que je ne tombe. Je m'y cramponne de toutes mes forces. Les yeux fermés et les dents serrées j'essaie de ne pas paniquer. J'ai les pieds dans le vide et mes bras supportent seuls tout mon corps. Soudain, je ressens comme une légère force qui me pousse contre la paroi et me permet de trouver de nouvelles prises pour mes jambes. Je lève la tête et vois ma mère, les yeux rivés sur moi. C'est elle qui vient de m'aider à retrouver mon équilibre. Je ne la remercie pas et continue de descendre. L'escalade devient plus simple, le mur étant à présent plus rugueux, il y a plus de prises naturelles. J'arrive vite en bas. 

Je me détourne du mur et regarde autour de moi. Me voilà de nouveau dans le lieu que j'ai désespérément tenter de fuir.




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