Chapitre 5
Nous sommes en fin de soirée, la nuit est tombée depuis longtemps. Dehors, tout est sombre, et à l'intérieur du bâtiment principal de la meute, toutes les lumières sont allumées. En raison de l'heure tardive, la majorité des loups est retournée chez soit, laissant la maison pour moi, le bêta, et ce curieux Alpha qui ne cesse de me tourner autour et gronder chaque fois que quelqu'un m'approche, sur le qui-vive comme un chien de garde.
-Je vais aller me coucher. s'exclame Drickes en se levant du canapé où, tous les deux assis, nous avions commencé à discuter.
Il jette un regard à Tobia, toujours sous sa forme de gros chien noir. Etalé sur le tapis du salon, devant la cheminée, l'Alpha me surveille, ses deux iris rouges constamment rivés sur ma personne et ce qui m'entoure.
-Si jamais il y a quoique ce soit qui pose problème, n'hésite pas à me réveiller. m'informe le bêta avant de prendre congé.
J'observe l'animal au pelage sombre un instant. Je ne sais absolument pas comment m'y prendre pour ramener l'humain aux commandes. Je ne sais même pas comment j'ai réussi pour le rendre si docile, tellement moins sauvage. En le comparant au loup que j'ai croisé la veille dans la forêt, et celui que je vois maintenant, il est clair qu'il y a eu une nette amélioration.
Le vibrement de mon portable sur la table basse me détourne de l'Alpha. J'attrape le téléphone et l'allume afin de voir le destinataire du message ainsi que son contenu. Je suis un peu surprise d'appercevoir le nom de Jasha, l'ainé de la famille, s'afficher sur l'écran.
" Maman m'a appelé. Tu ne réponds à aucun de ses appels. Elle souhaite que j'aille te rendre visite sur le territoire de la meute Sombre. Doit-on réellement s'inquièter ou bien l'ignore-tu délibérément ? "
Je soupire. En tant qu'ainé, Jasha a bien une dizaine d'années de plus que moi, et il prend son rôle de grand-frère à la perfection - ou plutôt l'imperfection étant donné que la majorité des frères et soeurs passent leur temps à se battre. Jasha est protecteur envers nous tous, enfants de l'horrible couple Lalwen. Il prend bien soin de nous, malgré la distance qui peut nous séparer. Notre mère le sait également et se sert de lui et de sa préoccupation envers le bien-être de ses frères et soeurs pour obtenir de lui ce qu'elle n'arrive pas à avoir.
Je ne donne pas de réponse à ma mère, Jasha lui en obtiendra.
Mes épaules s'affaissent lorsque je m'avoue enfin vaincue. J'ai ignoré ma mère toute la journée, pas encore prête à lui expliquer la situation. À présent, je constate que je ne serais jamais prête, et que l'on ne me donnera jamais le temps pour. Enfin déterminée à faire face, j'écris une réponse rapide à mon frère.
" Je vais bien. J'appelle notre mère de suite. "
Un peu plus tard, je lance l'appel, tout à track. Le portable sonne, une fois, une deuxième. Et quand je pense que personne ne décrochera, une voix rassurante mais bien trop rauque pour être celle de ma mère résonne à travers le combiné.
-Bonsoir, Alethea. Ta mère s'est inquiétée. Es-tu rentrée du territoire des loups ?
J'ouvre la bouche, comme un poisson hors de l'eau, et perds le peu de confiance que j'ai emmagasiné.
-À vrai dire, je, euh, non, ne suis pas suis pas, euh, rentrée. je m'emmêle, encore un peu sous le choc.
Si ma mère n'appelle ses enfants que lorsqu'elle a des clients importants à nous livrer, mon père, lui, ne nous appelle que très peu, en fait, je dirais même jamais. Si un de ses enfants a le malheur de recevoir un appel de Nolan Lalwen, c'est qu'il a commis une faute très grave.
Je suis foutue, donc.
-Il y a eu... je me râcle la gorge, tentant de reprendre constance ... quelques petits imprévus.
-Quels genres d'imprévus ? souhaite préciser mon père, d'un ton neutre et lent.
Je me mordille la lèvre, nerveuse. Toujours affalé sur son tapis, le loup noir m'observe, le museau couché sur ses pattes.
-Le bê... je commence avant de m'interrompre, me rappelant avec force qu'il vaut mieux ne pas ébruiter la malencontreuse situation dans laquelle se trouve la meute Sombre. L'Alpha a demandé à ce que je lui rende un deuxième service.
-Un deuxième service ? Comme un deuxième loup à guérir ?
-C'est exact.
J'inspire profondément, et me lance.
-Et ça va me prendre beaucoup de temps. Le loup que je dois soigner possède un cas particulier. je lui explique sans trop entrer dans les détails. Et avant que tu ne dises quoique ce soit et m'ordonne de rentrer, je tiens à dire que je ne bougerais pas d'ici avant d'avoir réglé cette affaire. Ce loup, c'est un défi pour moi. Si je réussis, je renforcerai sans doute mes pouvoirs !
Un silence glaçant me répond.
-Et, euh, un service comme celui-ci, ça doit valoir beaucoup d'argent. je rajoute, m'insultant mentalement d'idiote.
Pourquoi diable n'ai-je pas commencer par-là ?
-Bien. Je te laisse un délai d'une semaine. Mais cette intervention à intérêt à rapporter gros. réplique t-il d'une intonation qui ne laisse pas place à l'imagination, avant de raccrocher.
Mon père vient de me menacer, pas indirectement, mais rien qu'au ton de sa voix, je sais que si les métamorphes ne leur donne pas une somme d'un montant à pervertir un sain, il y aura des conséquences.
J'allais payer cher ma bêtise.
Dégoûtée d'eux et de leur obsession perverse pour l'argent, je me lève du canapé et monte rejoindre la chambre que l'on m'a présentée plus tôt dans la journée. Derrière-moi retentit le bruit des griffes de Tobia sur le parquet en bois. Lorsque j'entre dans la pièce et allume la lumière, la tête de la charmante Hasna, celle-ci sur une place de l'énorme lit, se relève et l'ocelot pousse un miaulement, nous signalant que nous l'avons dérangée. Je n'y prête pas attention et retire ma veste en m'approchant du lit. N'étant aucunement préparée à rester ici, je n'ai aucun bagage avec moi, aucun vêtement de rechange, même pas une brosse à dents ou à cheveux. Alors je m'affale sur le lit. Près de moi, le loup m'observe. Je ferme les yeux un instant, soupire, et quand je les ouvre, c'est un homme complètement nu qui se tient accroupi à mes côtés.
-C'est pas vrai ! je m'écrie en me redressant d'un bond.
J'attrape la couverture et la tire avant de la lancer sur le métamorphe en tenue d'Adam, dérangeant la petite chatte au passage.
-Je n'ai pas froid. se moque le loup sous sa forme d'homme très très très, même trop, séduisant.
Bon sang, je dois être encore plus rouge que ses yeux.
Je n'ai pas admirer longtemps, mais j'en ai assez vu pour constater que ce type est vraiment bien bâti.
De partout.
-Mais qu'est-ce que tu fais là d'abord ? Tu n'as donc pas une chambre à occuper plutôt que de squatter celle qu'on m'a attribuée ? je m'agace, les nerfs à vifs.
Toute la journée, le loup a été là, à me coller aux basques. Partout où j'allais, il me suivait.
-Je ne sais pas. me répond le loup en haussant les épaules, son sourire suffisant scotché à ses lèvres.
L'un de nous ne survivra pas.
Je m'assis lourdement sur le bord du lit, le visage enfoui contre mes mains, et soupire. Ces simples gestes m'aident à me calmer et à réfléchir plus clairement.
Je ne dois pas perdre mon objectif de vu.
Je relève la tête en direction de l'homme, assis en tailleur, la couette posée sur son bassin et ses jambes nus.
-Pourquoi est-ce toi qui prend sans arrêt le contrôle ? Qu'est-ce qui s'est passé ce soir-là pour que vous déraillez comme vous l'avez fait ? je le questionne posément.
L'homme-loup penche la tête sur le côté.
-Puis-je te faire confiance ? m'interroge t-il, le visage soudain si sérieux.
-Bien-sûr. j'affirme.
Il hésite.
-Comment puis-je en être sûr ? veut-il savoir.
J'ouvre la bouche, mais la referme. Je fronce les sourcils.
-Eh bien, euh... j'essaie de commencer, mais aucune ne réponse ne me vient, si ce n'est une terrible révélation. Tu ne peux pas me faire confiance. je réalise brusquement.
Je plisse les lèvres.
-J'ai été élevée par des gens avides de pouvoirs. Ils m'ont appris à subtiliser les autres en quête de guérison, et je maitrise leurs tours à la perfection. Je pensais que si je faisais ça, c'était simplement parce que j'y étais obligée, à cause de mes parents, que, si je reste ici, c'est dans l'unique but d'aider mon prochain. Mais en fait, pas du tout. Je ne suis ici que parce que l'on m'a promis la protection. Je ne suis pas mieux que mes parents, au final. Je profite de la faiblesse des gens pour obtenir ce que je souhaite. Je n'ai pas de quoi être fière de moi. je constate, acceptant enfin d'ouvrir les yeux sur la personne que mes parents ont réussi à ce que je devienne.
À quelques mètres de là, le loup m'observe avec insistance. J'ai l'impression désagréable qu'il me juge. Ce qui me révulse un peu, étant donné que lui a fait bien pire.
-Je n'ai pas compris un traitre mot de ce que tu viens de dire. lâche t-il enfin.
Ah.
-Mais j'ai bien compris que tu t'es confiée. À moi. Ce qui me prouve que tu me fais confiance. Je suppose que je pourrais en faire de même. semble t-il se parler à lui-même.
Soudain, il se relève. La couverture retombe sur le sol, ne recouvrant rien de plus que le sol à présent. Il pose ses mains de chaque côtés de ses hanches et me sourie.
-Je te raconterai ce qu'il s'est passé, dans les moindres détails. Mais pas ce soir. C'est encore trop tôt.
Sur ces mots, il quitte la chambre, me laissant seule avec toutes ces questions sans réponse.
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