16- Espoir
Pdv Alice :
L'antre des Invisibles.
C'est un endroit froid et austère sans joie ni chaleur.
Remplie de personnalité au caractère sordide et dérangé, la grande pièce dans laquelle je me trouve ne m'inspire guère confiance. Le vent souffle au dehors d'une puissance inouïe et le tonnerre qui gronde sonne comme un terrible avertissement à mes oreilles. L'humidité et l'obscurité m'étreignent, l'une de son odeur et son atmosphère désagréable et l'autre de son mystère et son angoisse inévitable.
La table de bois sombre qui trône devant moi est longue, semble interminable et tellement vieille que la peur qu'elle se désintègre sous mes doigts me pousse à rester les mains sur mes cuisses sans bouger. Assise sur une chaise de la même matière un flot ininterrompu de questions déverse en moi une inquiétude qui me tort le ventre.
Jamais je n'ai été dans ma vie confronté à ce genre de situation.
Au bout de cette grande desserte, je reconnais l'homme qui a tué le père de Sophie. Cet homme au regard mauvais que je ne perçois que faiblement. Sur son visage un sourire mesquin se dessine, accentuant mon inquiétude.
Mais si il n'y avait que lui je serai peut être moins angoissé.
Devant mes yeux une vingtaines d'hommes et de femmes vêtus des manteaux noirs de l'organisation se tiennent stoïque sur leur chaise autour de la table. Je retiens mon souffle quand mon regard croise celui d'Alvar, le frère de Fitz et Biana.
Il a l'air tellement... Dérangé.
Je ne peux comprends ce qui a pu se passer de si horrible dans sa vie et dans sa tête pour qu'il soit autant différent de sa famille.
Une femme au loin m'observe, de ses yeux d'un bleu profond et torturés. Ses cheveux bruns couleur chocolat sont rassemblés en un chignon désordonné. Une lueur de folie se dégage de son visage tordu dans une expression de tristesse et de colère et sa silhouette penchée en avant alors qu'elle me fixe intensément sursaute de temps à autres.
Beaucoup de pyrokinésiste sont rassemblés dans cette pièce. Ils sont facilement remarquables. Orgueilleux, ils pensent impressionner leur congénères en jouant avec des petites flammes entre leurs doigts.
Beaucoup font semblant de se désintéresser de moi mais je ne suis pas stupide. Je suis leur projet le plus abouti. Je suis leur élément déclencheur.
Je suis la figure de leur rébellion, de leur chaos.
Je suis leur bombe, leur arme.
Comment Keefe a t'il fait pour survivre parmi eux ? Quand on ne leur est pas indispensable, ils se fichent bien de notre sort et semblent ne pas avoir un quelconque intérêt pour notre survie.
Toutes ses personnes ne sont que des pions dans une organisation qui les dépassent, orchestré par la folie d'un homme rêvant de combler ses pulsions meurtrière en une seule et même cause.
Rien de tout ce qui se passe ne serait arrivé si j'avais écouté Keefe.
Je le sais bien.
Mais je ne peux plus reculer.
Depuis maintenant une bonne vingtaine de minutes j'attends sur cette chaise devant cette table en bois qui menace de brûler sous les mains aux flammes meurtrières des Invisibles. Je ne distingue rien d'autre dans cette pièce, en dehors d'un feu de cheminée qui brûle au coin de la pièce dans une immense âtre brûlante. Je ne sais où la fumée s'échappe, par quel conduit elle arrive à voir le ciel et se dissiper entres les cumulonimbus gris et puissants qui grondent leur mécontentement. La pièce est dénuée de fenêtre car elle est sous terre.
Quand Hugo m'a amenée devant un immense chêne au tronc sombre et à l'écorce dure comme la pierre, je lui ai ri au nez. Stressée et angoissée, l'absurdité de la situation m'a parue irréelle. Il a prononcé deux petits mots en se penchant vers l'énorme plante et en se relevant a pressé ma main en signe de compassion.
Ce fut le dernier geste qu'il m'adressa avant qu'une porte dissimulée dans le tronc ne s'ouvre et qu'un ascenseur ne nous emmène dans les profondeurs des terres de la forêt.
Maintenant, je ne sais où se trouve Hugo. Il a disparu à partir du moment où nous sommes arrivé ici, me laissant seule et désemparée.
Désormais je suis dans l'attente que quelqu'un ne daigne m'adresser la parole ou m'accorder un tant soit peu d'attention.
Mes yeux sont comme fous, mes pupilles se déplacent partout à une vitesse incroyable, scrutant le moindre geste ou détail qui me serait utile ou m'annoncerait un potentiel danger. Je retiens ma respiration ne pouvant me résoudre à briser ce moment par terreur de ce qui pourrait, de ce qui se passera, ensuite.
J'ai cette nette impression que l'homme du nom de Fintan ne souhaite guère me livrer ses secrets et qu'il a vu claire dans mon jeu. Il me jauge narquoisement, gouvernant les autres membres de toute sa souveraine folie.
Jamais je ne lui accorderai jamais ma confiance je m'en fais la promesse.
Soudain la femme au yeux d'un bleu abyssal tourne brusquement sa tête vers Fintan et lui souffle des paroles que je ne perçois pas. Un rictus colérique se forme à la comissure des lèvres du destinataire des ce message sifflé, presque inaudible, semblant transparaître une émotion derrière ce masque d'arrogance. Alors que je tente de comprendre ce que tout cela signifie et implique, la voix grave et rauque de Fintan s'élève et déchire l'air insoutenable de la pièce :
-"Nous sommes tous ravis de te recevoir Alice Jones."
Je frissonne et clos mes paupières, un sentiment de malaise, d'inquiétude et de détresse profonde s'insinuant dans chacun de mes membres, les engourdissant. Je relâche ma respiration me sentant soudainement bien trop oppressée pour contenir mon expiration. Un léger tremblement m'anime et je sais que cette voix je l'ai déjà entendu. Exactement comme celle de l'homme avec qui discutait Jeanne.
Je comprends que des souvenirs douloureux et destructeurs remoteraient à la surface si je parvenais à me remémorer la cause de ce traumatisme inconnu.
Puis je pense à Sophie, à Keefe, à Fitz.
À tous mes amis, qui doivent essuyer le chagrin de mon départ, de ma lâcheté, de ma souffrance et ma culpabilité.
Ils méritent que je sois forte.
J'ouvre mes yeux, un regain de courage et de détermination parvenant à atténuer ma peur, et affronte le regard dérangé de mon interlocuteur. Quand j'entrouve les lèvres mon corps se calme et je crispe mes doigts autour de mes cuisses, le ton ironique et débordant de méchanceté :
-"Tout le plaisir est pour moi voyons."
Ma réplique traverse la pièce et vient s'abattre sur cet homme au regard moqueur. Il arque un sourcil, visiblement amusé de ma répartie. Pas une once de gentillesse n'émane de ce personnage au yeux où brille un feu ardent de destruction.
Je suis prise de court quand il rit méchamment laissant son corps se secouer de soubresauts.
-"Tu as choisi d'être ici jeune idiote, je te serai gré de bien vouloir me respecter dorénavant. Tu n'es pas aux commandes et je t'interdis de recommencer à te payer ma tête. Est-ce clair ?"
Je suis stupéfaite.
Honnête et franc il n'a pas hésité à me remettre à ma place sous les yeux amusés de ses compères.
Il est le roi, le dictateur, de l'ordre.
Et aux regards inquiets de certains je comprends que j'ai tout intérêt à faire se qu'il me demande. Arme ou pas je serai traité de la même façon que tous ces autres hommes et femmes.
Cette voix résonne dans ma tête, me hante, m'obsède, je suis perdue. Je me suis moi même mené à ma perte en venant ici.
Mes yeux se posent sur cette femme au regard fou. Elle est avachi contre la table qui grince désagréablement et semble vide de toute émotion.
Cependant quand on s'attarde quelques secondes sur son visage dénué d'expression, on voit un larme roulée sur sa joue blanche.
***
Pdv Keefe :
De retour à Everglen, je me dirige immédiatement vers le grand salon où je sais que j'y trouverai tout les autres. La voix de Linh derrière moi, me demandant de ralentir, n'est guère importante.
Je traverse les couloirs rapidement et déterminé de recevoir des explications de Dex.
Si Alice l'apprenait, elle serai folle de rage.
Et moi aussi.
Bien que nous ayons une piste importante je ne peux me résoudre à calmer mes nerfs et les battements irréguliers de mon cœur qui résonnent jusque dans ma tête. Les points serrés je ne réussit pas à calmer ma colère qui doit se lire sur mon visage de façon très explicite car quand je bouscule Biana en entrant dans l'immense salon au parois de cristal de la propriété Vacker elle ne proteste pas et ouvre des yeux ronds.
Sans prendre le temps d'analyser ce qu'il se passe dans la pièce, je hurle presque de mécontentement :
-"Dex ! C'est quoi ton putain de problème ? Je peux savoir pourquoi tu te permets de tracer les autres à leur insu ?"
Finalement mes yeux se posent sur une silhouette assise, presque recroquevillée, dans un fauteuil, les yeux embués de larmes et les mains tremblantes tenant une tasse entre ses doigts fins.
Sophie.
Elle paraît tellement fragile, elle qui a toujours été si forte.
Ma rage s'estompe rapidement quand ses yeux marrons se fixent dans les miens avec une intensité qui me submerge. A ce moment précis toute la tristesse de mon amie se déverse en moi et je sens mon cœur se serrer. Elle relève les yeux vers moi et je vois son regard se voilé de larmes.
Je ne peux parler, la gorge serré par l'émotion.
Elle vient de tout perdre.
Son père, son innocence, sa joie de vivre et Alice, une de ses meilleures amies.
Je me sens soudain coupable de faire un scène envers Dex pour un ordre du Conseil qu'il se devait de respecter alors que Sophie traverse le moment le plus dur de sa vie.
Elle se lève lentement, les jambes flageollantes et s'approche doucement vers moi. Ses cheveux blonds semblent s'être ternis de tristesse et son teint est plus pâle que d'habitude. Jamais je ne l'ai vu aussi abattue et ses émotions me transpercent telles des lames acérées. Arrivée à ma hauteur, elle m'offre un sourire compatissant débordant du désespoir qu'inflige le deuil et se relève sur la pointe des pieds comme le fait Alice quand elle m'embrasse.
Les bras frêles de mon amie viennent m'étreindre avec force et sa voix tremblante, aux trémolos déchirants, déclare :
-"Je suis tellement désolé qu'elle soit partie... Je ne lui en veux pas... Ce n'est pas de sa faute... Je sais a quel point elle compte pour toi Keefe..."
Pendant quelques secondes je reste les bras ballants ne sachant comment réagir.
En réalité je ne sais pas comment faire face à la situation. Je suis en colère, triste, affreusement triste même, fatigué, à bout de mes ressources mentales. Je n'en peux plus de cacher ce que je ressens. Je ne peux pas me résoudre à accepter sa disparition.
J'ai beau tout faire pour tenter de la retrouver, une part de moi voudrait la laisser découvrir et endurer ce terrible choix qu'elle a fait. Comme pour lui prouver qu'elle n'aurait pas du nous abandonner. Comme pour lui faire payer ma tristesse,ce désespoir qu'elle me fait ressentir.
C'est une des pires sensations qui existent.
Je suis là contre Sophie qui commence à pleurer, ses larmes salées humidifiant mon haut.
La tristesse est insoutenable.
Elle me manque.
Déjà.
Je suis pathétique.
N'y tenant plus et en sachant pertinemment que tous nos amis nous observent, je laisse des larmes s'échapper de mes yeux et la douleur m'envahir réellement. Mon corps retombe contre celui de Sophie et je murmure contre son oreille :
-"Je suis tellement désolé pour toi Sophie..."
On resserre l'emprise de l'un sur l'autre et je laisse des sanglots incontrôlables remuer mon buste.
J'avais découvert une nouvelle raison de vivre qui c'est évaporée.
Heureusement tous mes espoirs ne se sont pas envolés.
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