♣Chapitre 20.

     Depuis l'incident au club de duel hier, les regards qu'on posait sur mon frère et moi avaient changé. Méprisants du côté des Poufsouffle, satisfaits du côté des Serpentard, des fois même fuyants ou plein de jugement pour un peu tout le monde... Les jumeaux m'avaient expliqué la raison de ce que je prenais pour de l'impolitesse. Harry avait parlé Fourchelang à ce serpent, et j'avais été la seule à le comprendre. Quelle ironie d'avoir peur des serpents et de savoir parler leur langue. Je commençais à croire que ma vie entière était une ironie. Heureusement, les jumeaux n'en avaient pas vraiment quelque chose à faire, de savoir que je parlais Fourchelang. D'ailleurs, ils avaient trouvé ça plutôt cool après être passés outre leur panique, et m'avaient demandé de leur dire un truc, mais je n'avais pas réussi à le déclencher, et ils avaient bel et bien compris que je n'avais pas dit "les jumeaux Weasley sont au-dessus de tous" comme ils le voulaient... Un autre mystère de ma journée avait été ma dispute avec Alazéa ce matin. Je voyais bien que cela faisait un moment qu'elle prenait ses distances avec moi, et aujourd'hui, les choses avaient dégénéré dès l'instant où j'avais demandé quel était son problème à un Gryffondor insupportable et que je m'étais tournée vers elle pour m'en plaindre.

"- Salut, Alexis !"

C'était la première fois depuis bientôt vingt-quatre heures que quelqu'un d'autre que mon frère ou mes amis Gryffondor m'adressait la parole. Miracle ! Je me retournai vers Gas, tout sourire, et nous nous enlaçâmes.

"- Salut !" Souris-je. "Comment tu vas ?

- Mieux que toi, on dirait." Répondit-il en montrant mon visage en une grimace. "T'es éclatée, ma belle."

Je levai les yeux au ciel et lui donnai un coup de coude.

"- C'est pas comme ça qu'on parle aux jeunes filles, monsieur."

Il se mit à rire avant de reprendre.

"- Dis, j'ai vu ce qui s'est passé avec Justin au club de duel hier. Je savais pas que tu parlais Fourchelang ! Pourquoi tu nous l'as jamais dit ?

- Parce que moi non plus, je savais pas." Soupirai-je. "Alors tu comprends mon incompréhension face à des regards comme celui-ci."

Je pointai un Poufsouffle au regard méprisant qui nous regardait discuter. Levant mon majeur en sa direction, un grand sourire aux lèvres, il détourna le regard, puis s'avança plus loin dans le couloir.

"- Je vois." Rit Gas.

     Il observa les alentours et reprit.

"- Alazéa n'est pas avec toi ?

- Non."

J'haussai les sourcils et soufflai en baissant les yeux vers le sol, bras croisés. Mon ton avait dû se faire trop froid, puisque Gas parut surpris.

"- Oula... Y a l'air d'y avoir un problème. Qu'est-ce qui se passe entre vous ?"

J'haussai les épaules.

"- On s'est disputées ce matin. Et je sais même pas pourquoi ! Elle s'est emportée d'un coup."

Il pencha la tête sur le côté, confus.

"- Tu penses que c'est par rapport à Cedric ?

- Bien sûr que non, elle est persuadée que je suis amoureuse de Fred. Je doute être une menace. Mais je comprends pas, elle..."

Je me stoppai en plein milieu de ma phrase et fronçai les sourcils en relevant la tête vers lui.

"- Comment... Elle t'en a parlé ? Comment t'es au courant ?

- Oh, non. Ni Cedric, d'ailleurs. Mais tout le monde en parle dans la salle commune des Poufsouffle du bellâtre et son Américaine." Ricana-t-il. "Les filles qui te jalousaient apparemment l'année dernière sont jalouses d'Alazéa, maintenant. C'est si facile de voir qu'elle est folle de lui. Du coup, je me demandais si c'était pas une question de jalousie. Cedric et toi, vous êtes tellement proches !"

Je ne pus retenir un rire.

"- Oh non, elle peut être rassurée sur ce point-là, parce que Cedric aussi est à fond sur elle. Et j'arrive clairement pas à voir quoique ce soit de romantique avec lui." Ris-je.

"- Bien sûr que non, puisque Fred a ton cœur."

Je soupirai et me pinçai l'arête du nez.

"- Merlin, vous m'épuisez...

- Va falloir t'en rendre compte à un moment !

- On est amis, Gas." Assurai-je. "Juste amis. Tu vas voir, quand t'auras quelqu'un dans le viseur à quel point je vais t'emmerder !

- Oh, donc tu admets que tu l'as dans le viseur ?"

     Je râlai à nouveau contre lui quand un jeune homme arriva derrière Gas pour l'interpeller. Il me jetait un regard noir, puis, tapa l'épaule de mon ami en m'ignorant complètement, ce qui me fit rouler les yeux.

"- Oui, Alec ?

- Tu peux venir s'il te plaît ? Je dois te parler."

Agacée, je retins un soupir.

"- Pourquoi on aurait besoin d'être que tous les deux ? On peut très bien parler ici.

- Justement."

Je vis ses yeux se poser sur moi et je levai les mains en retenant une remarque cinglante.

"- Tu sais quoi, Gas ? Je vais partir avant de commencer à m'énerver. J'en ai ma claque des joutes verbales. À plus."

Je partis en quête d'un endroit calme pour me poser en attendant mon prochain cours. Alors que je partais, j'entendis Gas râler sur le dénommé Alec, et je ne pus m'empêcher de penser que ma seule hâte était d'enfin rentrer dans ma salle commune pour monter me poser sur mon lit tout le reste de la soirée, plongée dans un vieux bouquin.

     À la fin de la journée, j'étais remontée m'asseoir sur le canapé de la salle commune, enterrant ma tête entre mes mains. J'allais attendre encore un petit peu pour le vieux bouquin, allongée sur mon lit puisque j'allais redescendre un peu plus tard pour aller manger. Alors, j'entendis quelqu'un arriver et j'ouvris de nouveau les yeux pour regarder qui c'était. Mais en me voyant, elle soupira et commença à faire demi-tour.

"- Al' !" Tentai-je de l'interpeller.

"- Je n'ai pas envie de te parler." S'agaça-t-elle en repassant le tableau.

Je me levai rapidement et la suivis, mais elle pressait le pas pour m'ignorer. Enfin, après presque cinq minutes à essayer de m'esquiver alors que je l'appelais, je la rattrapai et la retournai vers moi.

"- Qu'est-ce que tu me veux encore ?" Lança-t-elle, sèchement. "Tu vas continuer à te plaindre ? Je ne suis pas le bureau des pleurs, Alexis !"

J'ouvris de grands yeux, prise au dépourvu, puis lançai.

"- Non mais qu'est-ce qui t'arrives, aujourd'hui ? Je veux juste savoir pourquoi t'es aussi énervée contre moi !"

Elle regarda autour d'elle et croisa les bras sur sa poitrine en constatant qu'il n'y avait personne autour de nous.

"- T'es tellement susceptible, je comprends pas ! On est pas censées tout se dire ? Pourquoi là, tu te tais et tu passes ta colère sur moi ?

- Je suis susceptible ? C'est moi qui suis susceptible ?" S'exclama-t-elle.

Elle se mit à rire, me faisant froncer les sourcils, puis reprit.

"- J'espère quand même que tu t'es vue ?

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Que depuis le club de duel hier soir, tu passes ton temps à pleurnicher pour un regard de travers et un murmure que tu crois contre toi ! Le monde entier ne tourne pas autour d'Alexis Lily Potter, pour l'amour du ciel ! Tu sais, on a des vies à côté de toi ! On est pas tous préoccupés par le fait que les Potter parlent la langue des serpents. Y en a qui ont des problèmes plus graves auxquels penser. Et crois-moi, savoir que les enfants qui ont survécu jouent les charmeurs de serpents avec leurs sifflements bizarres n'est pas sur la liste !" Termina-t-elle.

Quelque chose clochait. Elle avait l'air... Blessée ? Comme si j'avais dit quelque chose de mal alors que je n'avais pas encore ouvert la bouche. Mais pour être honnête, c'était le cadet de mes soucis. Après ce qu'elle venait de me lancer, c'était moi qui devrais me sentir blessée. Elle m'en voulait parce que j'étais énervée ? Sérieusement ?

"- Non mais c'est quoi ton problème ?" Finis-je par répondre. "Détends-toi, t'es pas à ma place, tu peux pas décider de comment je dois me comporter, pigé ? Toi, tu la fermerais peut-être si t'étais à ma place, mais pas moi ! Je sais bien que le monde tourne pas autour de moi, mais je pensais pas que t'étais aussi énervée contre moi juste pour ça.

- T'as rien compris, en fait ?

- Mais comment tu veux que je comprenne quoique ce soit si tu me parles pas ? Merde, à la fin, je suis pas Legilimens !"

Elle leva les yeux au ciel en soupirant et commença à faire un pas en arrière.

"- Ca, c'est la meilleure.

- Tu sais quoi ? Va manger pour calmer ton Mogwai intérieur et revient me voir une fois calmée. T'en profiteras pour m'expliquer ce que je comprends pas, et ce, de manière civilisée." Souris-je.

"- C'est ça, ouais."

Elle tourna les talons et partis à mon opposé alors que je lançai.

"- Merci, Alazéa, bonne soirée à toi aussi !"

Sans se retourner vers moi, elle disparut au coin du couloir et je m'adossai au mur à ma gauche avant de m'asseoir contre celui-ci. Je posai mes mains sur mes yeux et les fermai en soupirant.

"- Génial." Murmurai-je.

     Alazéa et moi n'avions jamais vraiment eut de grosses disputes entre nous quand nous étions à Ilvermorny. Toujours de petites crises de nerfs par-ci ou par-là, mais nous communiquions assez pour comprendre ce qui n'allait pas chez l'une et chez l'autre. Je ne comprenais pas pourquoi aujourd'hui précisément, elle avait décidée de se renfermer comme une huître sans rien m'expliquer, et pourtant, elle me blâmait de ne rien comprendre.

"- Un problème, miss Potter ?"

Je sursautai et posai une main sur mon cœur en relevant la tête vers celui qui venait de m'interpeller. Nick Quasi-sans-tête me surplombait avec un sourire amical.

"- Pas vraiment." Commençai-je. "C'est juste une histoire idiote. L'adolescence, que voulez-vous ?"

Je vis son sourire s'élargir.

"- C'est bien loin pour ma part !"

Je ne pus m'empêcher de rire.

"- C'est bizarre, c'est pas du tout l'impression que vous donnez !"

Il accompagna mon rire du sien alors que je me relevai. En passant une main dans mes cheveux, j'entendis une voix lointaine que j'avais déjà cru entendre.

"- Voulez-vous que je vous raccompagne dans la Grande Salle pour dîner ?

- Je n'ai pas très faim, je pense remonter tout de suite." Affirmai-je avant d'entendre la voix se rapprocher en distinguant ses paroles.

"Du sang... Je veux du sang... Ils doivent tous mourir..."

"- Vous êtes sûre ? Un peu de nourriture ne vous ferait pas de mal, vous savez ? On pense toujours mieux l'estomac rempli."

Je ne l'écoutai qu'à moitié, perturbée. C'était cette voix. Cette voix glacée et sifflante que j'entendais à nouveau, et elle se rapprochait de nous.

"- Je sais, mais je viens de me disputer avec quelqu'un, et... Bon, ça m'a un peu coupé l'appétit."

"Tuer... Tuer... Tuer..."

Un frisson parcourut ma colonne vertébrale en entendant l'étrange voix répéter encore et encore qu'elle voulait tuer, et en constatant qu'elle se rapprochait dangereusement. Nick Quasi-Sans-Tête ajouta.

"- Très bien. Eh bien, bonne soirée, miss !

- À vous aussi, Sir Nicholas."

Je me retournai vers lui pour lui sourire et l'observai partir en sifflotant dans le couloir. Mais alors qu'il venait à peine de faire quelques mètres, une ombre gigantesque se dressa face à nous, et j'entendis, plus fortement que jamais, cette voix terrifiante et glacée.

"C'est l'heure de tuer..."

     Terrifiée par la gigantesque ombre à l'allure reptilienne, aucun son n'eut le temps de sortir d'entre mes lèvres, et mes pensées se précipitèrent dans mon esprit quand mes yeux croisèrent deux pupilles jaunes en train de me fixer. Le fantôme face à moi ne bougeait plus, raide mort, tandis que mon corps commençait à lui aussi se raidir. La bouche ouverte, car j'avais voulu hurler, le bras tendu face à moi, espérant me protéger d'une menace mortelle, tous mes muscles se figèrent les uns après les autres à une vitesse fulgurante, comme si je me transformais en pierre après avoir croisé les yeux de la gorgone. La dernière chose dont je me souvins fut que mon corps, pétrifié, tomba en arrière, et que dans mes veines coulait une quantité de terreur signifiante.

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