20 Avril 2020
Le jeune homme traverse les couloirs du service de néonatalité. Il essaie de se repérer et de trouver la pièce qu'il cherche, grâce aux informations données par une infirmière. Et il voit enfin cette porte. Derrière elle, un minuscule être l'attend. Son bébé. Son fils. Il ne l'a pas encore vu. Il tremble d'impatience. Il a tellement envie de le rencontrer. Pourtant, il a peur. Il est terrifié de le voir. C'est risible, n'est-ce pas ? Il est effrayé par un si petit être. Mais il n'y a pas que lui. Il y a les médecins, les infirmières et les puéricultrices qui vont tous l'observer. Dehors, il y a ses parents qui ne sont pas vraiment ravis qu'il devienne père à dix-huit ans, mais qui le soutiennent quand même. Ils n'ont qu'un seul fils et maintenant, ils ont un petit-fils qu'ils n'abandonneront jamais. Pourtant, ça a été dur à accepter pour eux. Timothée le sait et il s'en veut de les avoir déçus.
Le jeune adulte prend une grande inspiration avant d'ouvrir la porte. Une infirmière lui sourit quand il entre dans la pièce. Et il n'arrive pas à en faire de même, alors qu'elle ne semble pas le juger. Il a peur du regard des autres. Les médecins qui pourraient lui dire que c'est de sa faute. Ses parents qui l'ont traité d'inconscient. Ses amis qui pensent qu'il a été stupide. Il ne veut pas qu'on le juge. Parce que ce n'est pas entièrement de sa faute. Il a envie de hurler qu'il a juste fait une erreur. Il aimerait que certains ne le regardent pas avec mépris, parce que ce n'est pas lui le problème. Ce n'est pas à cause de lui que son fils va si mal.
L'infirmière continue de lui sourire et lui demande qui il vient voir. Timothée donne le nom de son enfant puis la suit jusqu'à la couveuse qui maintient Alexandre en vie. Il s'approche doucement. Il est fébrile. Et ses yeux s'écarquillent en voyant son bébé. Il est si petit. Il semble si fragile avec son bonnet jaune et les tubes qui l'entourent. Le jeune homme pose sa main sur la couveuse, ne pouvant détacher son regard de son fils. Une douce chaleur se diffuse dans son corps et écarte la peur.
— Il est si petit...
Son murmure résonne dans la pièce quasi silencieuse où seuls les bruits de monitoring se font entendre. Alexandre a l'air si minuscule, comparé à d'autres bébés. Evidemment, Timothée savait bien qu'il ne serait pas bien gros puisqu'il est prématuré. Mais il ne pensait pas que ça l'atteindrait à ce point. La culpabilité refait surface. Il s'en veut tellement, alors qu'il ne devrait pas. Ce n'est pas de sa faute. Esther a continué de se droguer pendant sa grossesse. Et il ne savait pas. Ils n'étaient pas en couple. Esther, c'était juste une fille sympa qu'il croisait en soirée et avec qui il s'amusait bien. Ça n'a jamais été plus, sauf que maintenant, Alexandre est là.
— Vous voulez le prendre ?
Timothée détache ses yeux de son enfant qui dort et scrute l'infirmière qui n'a toujours pas perdu son sourire. Est-ce une blague ? Il n'ose pas y croire. Il a tellement envie de parler à son fils. Il a envie de le caler dans ses bras et de l'admirer encore et encore, pendant des heures.
— Je... je peux ?
L'infirmière acquiesce et lui demande ensuite de s'asseoir sur le fauteuil juste à côté de la couveuse. Timothée ne réfléchit pas plus que ça et s'exécute. Il va pouvoir tenir son fils. Une bulle de félicité éclate dans son corps et l'ombre d'un sourire commence à naître sur ses lèvres.
— Si vous voulez, nous pouvons essayer le peau à peau. Ça sera bénéfique pour votre bébé et je suis sûre que vous allez adorer.
Timothée regarde l'infirmière comme si une deuxième tête venait de lui pousser. Il ne comprend rien à ce qu'elle raconte. Et elle le remarque quand elle se tourne vers lui avec son fils dans ses bras. Alexandre est toujours endormi et le jeune adulte n'a qu'une envie, le sentir contre lui.
— Enlevez votre haut.
Il décide d'écouter la professionnelle qui lui remet son enfant une fois son tee-shirt écarté. Elle l'aide à bien positionner Alexandre et Timothée se détend immédiatement au contact de son bébé. Il n'y a plus aucune peur. Il y a seulement son fils et lui. L'infirmière pose une couverture médicale sur eux puis les laisse.
Les mains entourant Alex, le jeune homme le dévore du regard. Il n'arrive pas à détacher ses yeux de cet être si minuscule dont il tombe instantanément amoureux. Et d'une ombre, naît un grand sourire.
Quelques jours plus tard
— Comment ça, tu t'en vas ?
Timothée fixe Esther, complètement perdu. Il ne veut pas comprendre, parce que la réalité, elle fait trop mal.
— Je me casse de cette ville, Tim. Je pars. C'est difficile à capter ?!
Le jeune père ne sait même pas comment réagir. Doit-il lui hurler de ne pas faire ça ? Doit-il la supplier de rester avec lui, et surtout avec Alexandre ? Parce que son fils a besoin de sa mère, peu importe qui elle est. Tim sait qu'il est capable d'élever seul Alex, avec l'aide de sa famille. Et il n'en veut pas à Esther si elle décide de rester sur le côté. Mais il ne supporte pas qu'elle veuille tout quitter. Que dira-t-il à son fils plus tard ? Alexandre a besoin d'Esther, même si cette dernière n'arrive pas à le concevoir.
— Putain, mais oui ! C'est ton fils, Esther.
La colère refait surface et balaie toute sa patience. Il n'a jamais voulu bousculer Esther. Il ne veut pas lui faire de mal, alors que c'est de sa faute si Alex a souffert durant les premiers jours de sa vie ! Il a juste envie de lui cracher à la figure qu'elle est une horrible personne, une foutue droguée qui mérite de souffrir. Cependant Tim n'a jamais été comme ça. Il est en colère, mais il ne veut pas se venger. Ça ne servirait à rien. Et aujourd'hui, Alexandre, même s'il est toujours hospitalisé, reprend du poil de la bête. Il est en vie. Il va bien. Et c'est tout ce qui compte.
— Mais je peux pas, Tim ! Je veux pas être mère.
Voilà la vérité, Esther s'en fout d'Alexandre. C'est juste une erreur qui n'aurait jamais dû se produire. Ils auraient dû mieux se protéger pour qu'elle ne tombe pas enceinte. Elle est trop jeune pour être mère. Et de toute façon, elle ne serait pas une bonne mère. Elle est juste une pauvre fille qui a fait du mal à son gosse en continuant à prendre de l'héroïne pendant sa grossesse. Si elle avait pu avorter, elle l'aurait fait. Sans hésitation. Alex, elle n'en veut pas. Elle ne veut pas être maman. Esther ne sera jamais comme Timothée. Ce jeune homme qui passe des heures auprès de son fils. Un garçon tout juste sorti de l'adolescence qui écoute religieusement les médecins quand ils lui parlent de la santé d'Alex. Un futur étudiant qui a décidé de changer d'université à la dernière minute pour rester chez ses parents. Oui, Tim, c'est juste un adulte qui a décidé de sacrifier son rêve parce qu'aujourd'hui, tout ce qui compte, c'est son bébé à peine né.
Sauf que la jeune femme, elle ne peut pas. Et Timothée s'en rend compte. Alors il ne dit rien. Il se contente de la regarder finir sa valise. Elle déménage. Elle fuit cette ville où est né Alexandre. Elle ne peut pas rester.
— On sait tous les deux que je serais pas une bonne mère.
Elle n'arrive déjà pas à s'occuper d'elle-même. Au fond de lui, Timothée sait. Il sait parfaitement qu'elle ne décrochera pas. La jeune femme ne voudra jamais arrêter la drogue pour un bébé qu'elle n'a jamais voulu voir. Car, c'est aussi ça la réalité. Elle peut paraître triste. Elle peut paraître moche. Mais Esther, elle n'a jamais vu Alexandre. Il est né par césarienne, des semaines trop tôt. Il souffrait du syndrome de manque et lors de sa naissance, tout ce qu'Esther voyait, c'étaient les regards de reproche. Et elle ne veut pas avoir à supporter ça. De toute façon, elle n'est pas assez forte pour ça.
Alors le jeune père la laisse partir. Il n'a pas le droit de la forcer. Esther a pris sa décision. Aujourd'hui, elle n'est pas prête. Mais qui sait, peut-être qu'un jour, elle le sera.
Eté 2023
Timothée pose le livre sur le sol et borde son fils dont les yeux peinent à rester ouverts. Le jeune homme sourit et se penche pour embrasser le front de l'enfant avec tendresse.
— Papa ?
Tim se redresse et observe Alex qui essaie de tout faire pour ne pas s'endormir. Il a une question à poser à son papa et il veut le faire maintenant. Sa curiosité naturelle prend le pas sur son envie de dormir.
— Oui, qu'est-ce qu'il y a ?
Le père s'attend à des questions sans queue ni tête, vu l'état de fatigue de son bébé.
— Elle revient quand ton amoureuse ?
Timothée a juste envie d'éclater de rire face à la question mignonne de son fils. Son amoureuse, même lui n'ose pas appeler Victoire de cette façon. Seul un enfant peut le faire. Pourtant, le jeune adulte aime ce terme, parce que c'est le cas, il aime Victoire et c'est pour cela qu'elle a rencontré Alexandre.
Alexandre a trois ans et c'est la personne qui compte le plus pour lui. Son fils, c'est son tout. Même s'il sait qu'il doit aussi vivre pour lui, il préfère se sacrifier pour Alex. Peut-être est-ce mal de s'interdire de vivre ? Après tout, il a seulement vingt et un ans. Il est jeune et il doit en profiter, comme la plupart des personnes de son âge. Mais il ne peut pas. Non, en fait, il ne veut pas. Il pourrait sortir plus et s'amuser dans diverses soirées tous les week-ends. Ses parents sont toujours d'accord pour garder leur petit-fils qu'ils ont appris à chérir de toutes leurs forces. Pourtant, Timothée n'aime pas sortir autant que les autres. Certains disent qu'il a grandi trop vite. D'autres soutiennent qu'il a gâché sa vie. Cependant, il ne pourra jamais être d'accord. En voyant le regard curieux et à moitié endormi de son enfant, Tim ne peut que sourire.
— Bientôt, d'accord. Tu l'aimes bien ?
Cet après-midi, il a présenté Victoire à Alexandre. Et le courant est tout de suite passé. Le jeune homme avait tellement peur que ça se passe mal. Victoire, c'est la première femme qu'il présente à Alex. En fait, c'est la première qui est restée. Il a mis des semaines à lui avouer qu'il avait un enfant. Il était tout simplement terrifié à l'idée qu'elle fuit, car c'est souvent la réalité. Victoire aurait pu lui dire que ça n'allait pas le faire. Elle aurait pu tout arrêter avant que ça ne commence réellement. Sauf que la jeune femme n'est pas comme ça et c'est pour cela que Timothée lui fait confiance. Au fond de lui, derrière la peur, il savait que cette rencontre se passerait bien. Alexandre a tout de suite accepté sa petite-amie.
— Voui. C'était trop bien aujourd'hui.
Timothée sourit à son fils qui semble avoir adopté Victoire, et le jeune adulte sait que la réciproque est vraie. Vic n'a pas rejeté Alex. Elle a joué avec lui et ça semblait si naturel pour elle. Tim n'aurait pas pu rêver mieux comme première rencontre. Il espère que cela va continuer.
— Tu la reverras très vite, ok ?
— Ok.
Le sourire d'Alex est la chose la plus merveilleuse qu'ait jamais vue Timothée. Et il fera tout pour que son fils n'arrête jamais de sourire. Il embrasse son front une nouvelle fois en remontant la couverture.
— C'est l'heure de dormir. Bonne nuit, bonhomme.
— 'Nuit. T'aime, Pa'.
— Je t'aime aussi, Alex.
Le père se lève alors que son fils ferme les yeux. Il éteint la lampe de chevet. Il observe encore Alexandre pendant quelques secondes avant de sortir silencieusement de la chambre.
Printemps 2030
Alexandre se frotte les yeux en sortant de sa chambre. Il serait bien resté au chaud sous sa couette, mais il entend du bruit dans la cuisine, signe qu'il est encore le dernier à se lever. Dans la pièce, son père et Victoire prennent leur petit-déjeuner, tout en surveillant Méline du regard. Cette dernière, dans sa chaise haute, alterne entre son biberon et son bol de céréales. Comme chaque matin, Alex constate qu'il y a autant de céréales à l'extérieur qu'à l'intérieur du bol. Méline pousse un cri de ravissement en le voyant et il ne peut s'empêcher de sourire. Parfois, il aimerait pouvoir la détester, mais c'est impossible. Sa petite sœur est bien trop craquante.
— Bonjour Alex, bien dormi ?
L'enfant acquiesce en embrassant son père et Vicky. Il finit par déposer un bisou sur la joue de sa petite sœur qui lui sourit, la bouche pleine de céréales. Alexandre s'assoit et attrape lui aussi des céréales pendant que son père lui donne un verre de jus d'orange. Le petit-déjeuner a toujours été un repas calme dans leur famille. Alexandre met toujours du temps à émerger le matin et n'aime pas beaucoup parler. Le plus souvent, il se contente de manger en écoutant distraitement ses parents. Méline fait sa vie de bébé, ses petites mains renversant les céréales un peu partout. Alors comme d'habitude, Alex se préoccupe seulement de son bol à lui. Mais ce matin est différent.
— Mama !
Le temps s'arrête dans la cuisine. Les deux adultes et Alexandre se tournent vers Méline qui s'agite. Son biberon échoué sur la tablette de sa chaise haute, elle applaudit des deux mains. Pendant quelques secondes, le garçon se demande s'il a rêvé. Est-ce que Méline vient vraiment de dire ce mot interdit ? Son cœur ne veut pas y croire.
— Mama !
Méline appelle une deuxième fois Victoire et Alex comprend que ce n'est pas une hallucination. Une immense tristesse l'envahit alors que Vicky se lève brusquement, un énorme sourire illuminant son visage. Elle attrape sa fille, la félicitant. Alexandre les fixe, mais finit par détourner le regard. Il n'arrive pas à supporter cette vision qui paraîtrait pourtant si tendre et joyeuse aux yeux de tous. Ses yeux sont attirés par son père qui sourit aussi. En fait, il n'y qu'Alex qui ne sourit pas. Sa petite sœur vient de dire ce qui ressemble à « maman » pour la première fois. Sauf que lui, il a juste envie de pleurer. Son père rejoint Vicky et embrasse le crâne de Méline. Les yeux du petit garçon s'embuent en les voyant tous les trois. Il descend de sa chaise et court dans sa chambre. Il s'effondre sur son lit, le nez dans l'oreiller. Il attrape une de ses peluches et la serre fort dans ses bras.
Méline vient d'appeler Vicky « maman » et le cœur d'Alexandre souffre. Parce que lui, il n'en a pas le droit. Il considère Victoire comme sa mère depuis des années alors qu'il n'a pas le droit de le faire. Tout le monde lui dit que Victoire, ce n'est pas sa maman. Parfois, il leur affirme que si. Et d'autres fois, il se tait en comprenant qu'il ne gagnera jamais, parce que la vérité est terrible. Personne ne veut admettre qu'il a raison. Et l'explication est plutôt simple. Esther, cette femme qui l'a abandonné avant de revenir dans sa vie. Elle a tout chamboulé, reprenant le titre de « maman » qu'Alex veut accorder à Victoire. Mais pour lui, Esther, c'est juste la femme qui l'a fait naître. Elle n'est pas sa maman et ne le sera jamais. Elle a beau l'appeler et passer du temps avec lui, deux à trois fois par mois, elle n'est pas sa mère.
Cependant, il n'y a que le garçon qui ne la voit pas comme ça. Ses grands-parents font toujours la tête quand son père leur dit qu'il va passer l'après-midi avec Esther, mais ils disent que c'est bien. Ils affirment qu'ils sont contents qu'elle ait enfin accepté sa maternité. Sauf qu'Alexandre a toujours envie de leur hurler que ce n'est pas Esther sa maman, c'est Victoire. Mais il n'en a pas le droit. Son père et Victoire lui ont assez répété.
Le premier mot de Méline est celui qui lui est interdit. Et ça le fait pleurer d'autant plus.
Octobre 2032
Timothée ouvre la porte de la chambre et Méline se précipite à l'intérieur, excitée de revoir Vicky et impatiente de découvrir son petit frère. Elle a seulement trois ans, mais elle se rend bien compte que la famille s'est agrandie.
— Maman !
Alexandre entre à son tour et son père referme la porte derrière eux. Le garçon observe sa petite sœur essayer de grimper sur le lit d'hôpital. Leur père rit en l'aidant et Alex décide enfin de s'approcher. Il évite de regarder le berceau transparent à côté du lit. Il ne veut pas le voir. Il ne veut pas faire sa connaissance. Il n'est pas comme Méline ou leurs parents. Il ne veut pas de lui. Mathias, c'est juste un intrus qui vient parasiter leur famille. Alex n'a jamais été autant en colère que lorsque son père et Vicky lui ont annoncé la nouvelle. Son père lui a fait regretter cette crise de colère en le punissant pendant un mois. Pourtant, aujourd'hui, Alexandre ne s'est toujours pas calmé. Et là, il a juste envie de sortir en courant de cette chambre.
— Méline, doucement.
Il revient à la réalité en entendant la voix de son père. Méline dans les bras, ils sont tous les deux penchés au-dessus du berceau. L'adolescent détourne la tête. Son père a l'air tellement heureux et Méline a les yeux écarquillés d'émerveillement. Il ne sait pas comment réagir. Il ne sait pas quoi faire dans cette chambre. Inconsciemment, il se balance d'un pied à l'autre, mal à l'aise. Alex a envie de fuir loin d'eux. Il a envie de se rouler en boule dans son lit et de pleurer.
— Al'...
Il relève la tête et Vicky lui sourit en lui faisant signe d'approcher. Il hésite pendant quelques secondes, mais le sourire de Victoire le console et il vient s'asseoir sur le lit, à côté d'elle. La main de la femme se pose sur la joue qui n'a pas encore perdu la rondeur de l'enfance. Et Alexandre aimerait tellement plus. Il aimerait pouvoir l'appeler maman comme Méline. Il aimerait qu'elle le rassure sur sa place dans cette famille. Ce petit frère vient de tout bouleverser. C'est un garçon, Alex aurait préféré une deuxième petite sœur.
— Tu veux le prendre ?
Son père le scrute. Il a Mathias dans les bras. Le bébé semble réveillé et Méline pose question sur question à leur père. Il y a un moment de flottement. Alexandre n'entend plus rien. Tout ce qu'il voit, c'est l'enfant qui s'agite dans les bras de son père. Ce petit frère, c'est leur fils légitime. Ce bébé, c'est leur garçon à tous les deux, alors que lui ne représente rien pour Vicky. Mathias est son fils. Alex est juste celui de son mari.
On ne vit pas dans un monde tout rose. Le début de la relation entre Victoire et Timothée a été compliquée. Ce dernier a dû laisser une personne entrer dans sa vie et celle de son fils. Victoire a dû s'adapter. Elle a dû apprendre à aimer un enfant qui n'était pas d'elle. Et même si ça n'a pas été difficile, elle a rapidement compris que la vie à trois, ce n'était pas un long fleuve tranquille. Cependant, Alex n'a rien à lui reprocher de ce côté-là. Elle n'a jamais dit qu'elle ne voulait pas vivre avec lui. Elle a toujours fait attention à ses mots quand il était là. Alexandre n'a jamais entendu ses parents se disputer.
Sauf que les critiques, il les entend quand même. La famille de Vicky n'a jamais été tendre. Ses parents n'ont pas vu d'un bon œil sa relation avec un homme qui a eu un enfant à dix-huit ans. Comment leur en vouloir ? Ils ont toujours voulu le meilleur pour elle. Mais Alexandre est encore un enfant et ces remarques lui font du mal. Il ne supporte pas les différences que les parents de Vicky font entre Méline et lui. Ça fait mal. Il déteste aller chez eux parce que, même s'ils se sont adoucis avec son père, ils le regardent toujours d'un mauvais œil. Alex ne fait pas partie de leur famille. Il n'en fera jamais partie. Et ce n'est pas l'arrivée de Mathias qui va arranger les choses.
— Alex ?
Son père le fixe toujours, attendant une réaction de sa part. Vicky le scrute aussi, sans comprendre son manque de réaction. Ses parents semblent tous les deux inquiets. Les yeux d'Alexandre commencent à le piquer. Il ne veut pas approcher Mathias. Il le déteste.
— Non.
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