Recherche d'emploi
Point de vue Alya :
J'émergeais doucement des brumes du sommeil, gardant mes yeux fermés, profitant du soleil matinal qui caressais délicatement ma peau, traversant les fins rideaux de la porte-fenêtre. Je m'étirais longuement, délassant les muscles endoloris de mon dos, qui n'avaient pas appréciés de dormir avachis sur la table.
Nous avions déballés quelques autres meubles, et une petite table occupait maintenant l'espace central du salon. Nous possédions un couloir partant du salon, qui s'ouvrait sur deux chambres séparées et sur une petite salle de bain.
La porte-fenêtre aboutissait à une terrasse en carrelage blanc de taille moyenne, avec deux transats achetés la veille à Ikea. Une cuisine ouverte avec un comptoir donnait directement sur notre salon.
Avec l'aide d'Alex j'avais poussé notre vieux canapé contre un mur dans un recoin du salon. Deux chaises entouraient la table faite de bois clair, et une commode à la couleur sombre trônait dans l'entrée avec un portemanteau en métal à sa gauche. Des placards en bois foncés étaient accrochés dans la cuisine, et trois chaises hautes venaient compléter le comptoir qui détenait un plan de travail en pierre noire.
Pas de télévision chez nous pour l'instant, mais peut être qu'un jour nos économies seront suffisantes pour que l'on puisse s'en payer une. Le tout donnait à notre appartement un aspect plutôt sobre pour le moment. Les murs étaient toujours couverts de cette atroce peinture jaune pisse.
J'allumais mon portable, et regardais l'heure qui s'affichait sur l'écran : 9h23. La veille je m'étais endormie en planchant sur mes cours. Notre première semaine en fac s'était écoulée à une vitesse hallucinante. Les cours magistraux auxquels j'étais inscrite avec Alex me plaisaient vraiment, et me confortaient dans ma décision de devenir une brillante journaliste. Nous étions en Science Po, et nous suivions, en gros, des cours dans les domaines des sciences humaines et sociales, et dans les relations internationales.
Ces études permettaient de nombreux débouchés, et j'étais fière que mon dossier scolaire ai été retenu dans cette fac prestigieuse. Alors que je massais ma joue endolorie à cause de la surface dure sur laquelle j'avais passé la nuit, Alex débarqua en courant dans la pièce, manquant de s'étaler par terre.
- Alya c'est une catastrophe ! On a rendez vous dans vingt minutes en plein centre ville ! hurla-t-elle en panique, courant partout.
- Ah non c'est pas vrai ! Merde ! criais-je à mon tour, en plein désarroi.
J'avais complètement zappé ce petit détail. Je me levais avec affolement, me fit une queue de cheval à la vas vite et attrapais une veste au vol. Alex se saisit de son sac à main, et fourra nos CV à l'intérieur. Nous devions aller à un entretien d'embauche dans un grand restaurant chic. Elle enfila ses bottes hautes, prit les clés et sortit en courant. Je ne sais pas comment on se débrouillaient pour être perpétuellement en retard. On était pratiquement tout le temps en retard, et c'était sûrement dû au fait qu'on était un peu tête en l'air.
Mon ventre gargouilla, alors je revins sur mes pas et attrapais une pomme (on avait depuis, fort heureusement, fait les courses). Le seul bémol c'était qu'il nous manquait un frigo. Du coup, on squattait le réfrigérateur de Gabriel et Michael, qui hébergeaient notre nourriture par obligation. La voix d'Alex me parvînt depuis l'extérieur de l'appartement.
- Bouge toi Alya t'a pas le temps de rêvasser là ! On a besoin de ce job !
- C'est bon je suis là j'arrive ! Descend sans moi je te suis, met la clé sur le contact !
- Ok mais tu bouge ton beau petit cul ! cria-t-elle avant de disparaître dans les escaliers.
Je pris un chemiser blanc, et enlevais mon tee-shirt de pyjama Metallica, me retrouvant en soutif au milieu de la cuisine. Je mis des chaussettes et pris mes baskets à la main. J'enfilais à moitié mon chemisier en dévalant les escaliers.
- Encore en retard à ce que je vois, m'apostropha une voix grave.
- J'ai pas le temps pour toi Gabriel, lui criais-je en continuant ma descente.
- Joli soutien-gorge au fait, ricana-t-il.
Pour toute réponse je lui fit mon plus beau doigt d'honneur. Puis je fixais la pomme dans ma main, et remontais les marchés une à une. Je rouvris mon appartement sous les rires de Gabriel. Je déboulais dans la cuisine, reposais la pomme et me saisi le pot de Nutella à la place. Après avoir fermé derrière moi, je descendis à nouveau les marches quatre à quatre. J'entendis alors des bruits pas derrière moi. J'étais en pleine crise de stress : on ne pouvait pas se permettre de ne pas avoir ce job, on en avait cruellement besoin.
- Eh attend moi Alya ! s'exclama Gabriel en me poursuivant sans relâche.
- Quoi encore ? C'est pas vraiment le moment, lui répondis-je, essoufflée.
- T'es pas au courant ? Alex nous a appelé en catastrophe y'a une minute : votre voiture et en panne, m'informa-t-il en soupirant.
Je stoppais net ma course folle.
- Comment ça en panne ? m'affolais-je en passant nerveusement ma main dans mes cheveux.
- Bah tu sais, quand une voiture démarre plus en général on dit qu'elle est en panne, se moqua-t-il cyniquement.
- Oh non pas ça ! hurlais-je soudain dans l'escalier.
Ma voix résonna dans les couloirs vides de toute présence. Il n'y avait que nous dans les longs corridors de l'immeuble.
- Et les merveilleux voisins que nous sommes allons vous sauver la vie une fois de plus en vous emmenant à votre rendez-vous "super énormément important, une question de vie ou de mort" d'après Alex, ajouta Michael, qui débarqua à son tour. On a pas trop eu le choix, elle menaçait de nous castrer si on vous aidez pas...
- C'est pas vrai ! Et merde ! jurais-je entre mes dents avant de repartir en courant, ma paire de converse blanche dans une main, le pot de Nutella calé sous mon bras.
On a la poisse ou quoi aujourd'hui ? Je secouais la tête, dépitée.
- Bon d'accord mais grouillez vous, soufflais-je, haletante.
Une fois en bas avec Alex on courut tous ensembles, tous transpirants (super pratique quand on porte un chemisier blanc) et cette scène me rappela le documentaire sur les troupeaux de gazelles que j'avais visionné hier. J'adorais les documentaires sur les animaux depuis ma plus tendre enfance, j'étais fascinée par eux et leur nature sauvage et indomptable.
Quelque part, je les envies, ils sont aussi libres que l'air, n'ont aucun devoir, aucune obligation. J'aimerai me sentir comme eux, être à leur place, avoir une vie palpitante. Gabriel et Michael s'arrêtèrent devant une superbe Audi blanche. Ma bouche s'ouvrit toute seule à la vue de ce superbe bolide. Des souvenirs de mes anciennes activités illégales remontèrent à la surface de ma conscience et je ne pu m'empêcher de parler.
- Oh mon dieu ! m'exclamais-je tout en passant ma main contre la carrosserie rutilante de la voiture. C'est une Audi R8 coupé blanche qui possède un cylindre de 5204 cm3, et qui a une vitesse maximale de plus de 330 km/h ! Elle est équipée d'un moteur V10 ! Je n'ose même pas imaginer à quel point elle pourrait être rapide si...
- Alya ! me coupa soudainement Alex en me pinçant discrètement le bras, mal à l'aise. Ce n'est pas le moment.
Gabriel et Michael affichaient des mines étonnées, et semblaient choqués par mes connaissances pointues sur le domaine. Ils échangèrent un regard circonspect, et me dévisagèrent sans vergogne.
- C'est juste que j'ai toujours rêvée d'en conduire une, mentis-je en tentant de me justifier.
- C'est pas prêt d'arriver, rigola Gabriel. Allez les filles arrêtez de vous extasier devant mon bébé, dit-il en montant derrière le volant.
J'ouvris la portière arrière tout en ricanant méchamment devant Gabriel que je trouvais tout simplement pathétique. Michael, en parfait gentleman, ouvrit la portière à Alex, et je levais les yeux au ciel. Elle s'assit à côté de moi sur la banquette arrière, et Michael posa son postérieur sur le siège passager.
La voiture dégageait une odeur écœurante de cuir neuf, si bien que j'ouvris la vitre en grand. L'Audi partit dans un grand bruit de moteur, et l'air frais vint fouetter mon visage. J'adorais être dans une voiture, et la vitesse me procurait une sensation totalement grisante. Seulement, Gabriel conduisait à deux kilomètres à l'heure, et je tapais du pied, énervée, en me demandant si il le faisait exprès.
- Tu peux accélérer s'il te plaît ? À ce rythme là on sera en retard c'est sûr... Même en courant on irait plus vite, dis-je à Gabriel, agacée.
Je vis son fameux sourire "pub de dentifrice" se refléter dans le rétroviseur.
- Estime toi heureuse, on vous amène un samedi matin en plein centre ville, alors qu'on aurait très bien pu rester dormir chez nous tranquillement. Tu vas pas te plaindre non plus, me répondît-il en me lançant un regard dédaigneux. Je ne prendrais certainement pas le risque d'abîmer mon petit bijoux pour vos belles fesses.
- Non mais sérieusement, je pense qu'on irait plus vite à pied, me lamentais-je en soufflant bruyamment.
- Attention, je pourrais te prendre au mot et vous déposer sur le trottoir, là ou est votre vraie place, ricana-t-il.
- Sombre connard, sifflais-je.
- Petite merde, rajouta Alex.
On reçus les rires de Michael et Gabriel pour toute réponse. J'enfilais mes chaussures, et ouvris le pot de Nutella. Je plongeais mon doigt dedans, bientôt imité par Alex. Alors que je savourais pleinement mon déjeuné, reprenant une couche généreuse de Nutella sur mon doigt, Gabriel freina brusquement, et je partis en avant, me cognant contre son fauteuil. Dans la précipitation j'avais oublié d'attacher ma ceinture. Alex rigola en se moquant de moi, et Gabriel aussi. Soudain, ce fut le drame.
- AHHH ! hurlais-je, hors de moi, alors que je contemplais, effarée, la grosse tâche de Nutella étalée en plein sur mon chemisier blanc.
Alex observa l'étendue du désastre et se frappa la main sur le front en fermant les yeux. Gabriel, paniqué, se retourna en même temps que Michael, freinant une deuxième fois en plein milieu de la route. Je me retenais au siège pour ne pas glisser encore une fois.
- Mais ça va pas ! Mais qu'est ce qui te prend putain ! mugit Gabriel, se garant sur le côté de la route.
- Tout est fichu ! Ma vie est merdique ! Ce chemisier m'a coûté vingts putain d'euros ! braillais-je dans le petit habitacle.
- Il se passe quoi bordel ! Mais tu vas pas bien ! J'ai frôlé la crise cardiaque avec tes conneries ! fulmina Gabriel.
- C'est pas le jour, tu roules et tu fermes ta gueule toi, aboyais-je, excédée.
- Oh c'est qu'elle mordrait presque, se moqua-t-il en redémarrant.
- T'as même pas idée, persiflais-je.
- Sans rire il s'est passé quoi en fait ? Vous allez bien ? J'ai pas tout compris, nous questionna Michael en se tournant vers nous, l'air interrogatif.
- Mon chemiser est fichu, lui expliquais-je en secouant la tête. Je me suis mise du Nutella dessus.
Alors que Michael se foutais de moi, Gabriel m'engueula parce que j'avais osé manger dans sa voiture, que j'aurais pu l'abîmer, que j'étais complètement inconsciente, que c'était trop dangereux pour les nouveaux sièges en cuir, que si on recommençait il nous tuerait toutes les deux,... Il me fit un sermon jusqu'à ce qu'on arrive devant le grand restaurant très chic.
La devanture était magnifique et de grands buissons finement taillés encadraient la porte d'entrée. Pendant ce temps là Alex avait tant bien que mal essayé d'enlever le Nutella étalé partout sur le chemisier autrefois d'un blanc immaculé. Ça n'avait fait que barbouiller toujours un peu plus mon chemisier.
- Allez les filles on descend, vous abusez trop de notre gentillesse en ce moment, nous déclara Michael en soupirant.
- Il a raison, affirma Gabriel en me regardant dans le rétroviseur, plongeant son regard intense dans le mien.
- Taisez-vous un peu, ronchonna Alex en sortant de la voiture. Repassez nous chercher à dix heures quarante, vous serez mignons, dit-elle en s'éloignant déjà vers le bâtiment.
- Ta gueule Alex ! dirent-ils en chœur.
Alors que j'allais sortir à mon tour, ignorant les protestations des garçons, j'ordonnais tout à coup à Gabriel de me passer son tee-shirt blanc.
- Pardon ? me dit-il en haussant les sourcils.
- Ton tee-shirt, tu l'enlève, il me le faut absolument, le somais-je sévèrement. Il est hors de question que je me pointe comme ça à mon rendez-vous.
- Non ! C'est ton problème, pas le mien ! s'indigna-t-il en tapant sur le volant.
- S'il te plaît Gabi ! J'ai besoin de ce boulot ! le suppliais-je en lui faisant les yeux doux.
Il soupira devant mes yeux de merlan fris et retira son tee-shirt, dévoilant une rangée d'abdos et une musculature à faire pâlir les dieux grecs. J'avalais douloureusement ma salive, et saisis son tee-shirt. Alors que je commençais à enlever mon chemiser je vis les deux regards des garçons attendant avec impatiente que je me déshabille.
- Fermez les yeux bande de pervers ! m'écriais-je, outrée.
- Alors toi t'a le droit de me mater mais moi non ? bougonna-t-il.
- J'ai dit : Fermez les yeux ! Plus de temps à perdre, je suis déjà assez en retard comme ça ! assénais-je d'un ton sec.
Ils me regardèrent sans réagir.
- Allez ! repris-je en leur faisant signe de se retourner.
Ils soupirèrent mais s'exécutèrent néanmoins. Je me changeais rapidement, et sortis à toute allure de la voiture, abandonnant le chemisier et le Nutella sur la banquette arrière. Je rejoignit Alex qui me foudroya du regard.
- Son tee-shirt te vas trois fois trop grand, essai de le rentrer dans ton jean, soupira-t-elle en m'entraînant vers l'entrée. On a à peine dix minutes de retard...
- Oh non... m'exaspérais-je en passant ma main sur mon visage.
Je pénétrais, Alex sur mes talons, dans un intérieur chic, élégant et sophistiqué, décoré avec des meubles hors de prix. Des lustres en cristal pendaient, illuminant une pièce à la décoration onéreuse. De grand vases remplis de fleurs blanches trônaient ça et là sur des commodes en marbre.
Après une longue entrevue avec le patron, un homme plutôt sympa avec une calvitie naissante, on fut finalement embauchées à l'essai. On avait de l'expérience dans le domaine, ce n'était pas notre première fois en tant que serveuses. Heureuses, comblées, et surtout soulagées, on décida d'un accord commun d'aller manger un petit Mac do avec les garçons pour fêter la nouvelle.
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