17 Février 1475

PORTGAS D. ARYA (PRINCESSE SANGLANTE)

Depuis que mon âme a quitté mon corps pour devenir l'Air, j'ai toujours vu le monde d'une façon différente. En un instant, j'ai pu deviner tout ce qu'il se passait, sentir les feuilles des arbres bouger en moi, les sabres me fendre sans que je ne sente rien. Je m'étais habituée à cette sensation d'être tout, mais aussi d'être rien. D'être vivante, et d'être morte. D'être toujours présente, mais invisible.

Lorsque j'ai demandé à Zetsubo de remonter le temps en lui prêtant mes pouvoirs, je me suis demandée si j'allai vraiment rester sous forme d'air, ou disparaître. 

Et, lorsque je me suis réveillée doucement avec une sensation de ne plus être la même, j'ai compris que j'étais toujours vivante. Que mon âme était toujours l'Air. Mais j'ai aussi remarqué que je ne reconnaissais pas le paysage de mon enfance. Zetsubo... s'était trompé de temps. Il fallait que je sache. Jusqu'où était-il remonté dans le temps?

Un visage attira mon attention, dans les mers de l'Est. C'était une jeune femme, d'une trentaine d'années. Elle était assise sur un lit, et remettait sa mèche en place en souriant. Son ventre était rond, et sa main droite le caressait discrètement. Ses yeux noirs brillaient, et ses longs cheveux bruns tombaient sur ses épaules. Son sourire me rappelait celui de quelqu'un. Ma mère Emi? Non, cette femme avait une grâce qu'Emi n'avait pas. Qui était-elle?

AKUMA D. JANE

Je m'appelle Jane. C'est un prénom plutôt doux pour une famille de démons. Mais je pense qu'il correspond bien à mon caractère. Je suis quelqu'un de calme, et plutôt réfléchie. C'est à cause de cela que ma famille ne m'a jamais vraiment aimée. Je n'avais pas cet esprit de combat qu'ils ont tous. Cette hargne qui les pousse à se battre. 

J'ai épousé il y a quelques mois un jeune homme du nom de Sake. Une famille assez pauvre, mais aimante. Une famille bizarre, une famille qui me correspondait. Et aujourd'hui, j'attends un enfant. Cet enfant dont je rêvais depuis des années... Et qui ne devrait pas tarder à arriver...

-Comment est-ce qu'on l'appellera, Chérie? me demanda Sake en posant sa main sur mon épaule.

-Je ne sais pas encore... soufflai-je. Mais laissons ça au Destin. C'est lui qui choisira. 

Sake et moi croyions beaucoup au Destin. Tout est choisi par le Destin. Il n'y a rien qui est laissé au hasard. Chacun a une volonté, tout a un sens. Et cette volonté, et ce sens, se perpétuent de génération en génération. Lorsqu'une personne décède, le Destin choisit celui qui héritera de la volonté et du sens de la vie du défunt. Et le cycle continue. C'est ainsi. 

Une contraction m'empêcha de continuer à penser.

-Chérie! S'inquiéta Sake en me couchant sur le lit. 

Il appela les médecins. En une demi-heure, notre enfant été née. C'était une petite fille, avec un sourire d'ange et des joues roses. Ses cheveux étaient bleus nuit, comme son père.

-Comment est-ce que tu veux qu'on l'appelle? me redemanda Sake.

-Que dirais-tu d'Emi? demandai-je sans trop réfléchir. C'est le prénom d'une grande Impératrice qui a régné cette île il y a quelques décennies. Elle était connue pour avoir une intelligence hors-du-commun.

-C'est d'accord, le dit Sake avec le sourire. Le Destin réserve une grande destinée à notre petite Emi!

Je regardai le nourrisson dans mes bras, et je souris à mon tour. 

-Emi, je t'aime, dis-je.

PORTGAS D. ARYA (PRINCESSE SANGLANTE)

J'en étais sûre. On était revenu une centaine d'années plus tôt. A la naissance de ma mère, Emi. Je n'avais jamais connu ma grand-mère Jane, mais elle avait l'air d'être une personne formidable. 

Soudain, une personne dont les airs me rappelaient quelqu'un arriva dans la pièce. C'était un garçon d'une quinzaine d'années, avec un grand sourire d'idiot et des cheveux bruns. Il avait un tee-shirt bleu marine, et des sandales rouges.

-Oh, bonjour, Garp, comment vas-tu? demanda Jane en souriant.

GARP?!!!

En y regardant de plus près, c'est vrai qu'il ressemblait à Garp. Mais le voir jeune me semblait tellement absurde... Et puis, ces goûts de vêtements et son sourire d'idiot me rappelaient tellement Luffy... 

-Je vais bien, et toi, Jane? Je viens d'apprendre que tu as accouché! s'écria Garp.

-Oui, d'une petite fille. Les nouvelles vont vite, dis-moi!

-En même temps, Fushia n'est pas un très grand village!

Fushia?! Le village ne ressemblait pourtant pas du tout à ce qu'il était durant mon enfance!!! Seuls quelques moulins et un petit port me le prouvaient.

-Ca fait longtemps que je ne t'ai pas vu, Garp, continua Jane. Qu'est-ce que tu faisais?

-Mon père n'a emmené en mer, pour que je puisse m'entraîner. Mon poing est devenu plus fort que tout! 

Jane rit doucement.

-Je vois, tant mieux. Tu veux toujours devenir Marine, n'est-ce pas?

-Bien sûr que oui! s'écria Garp. Je suis l'Homme qui deviendra le plus puissant et respecté des Marines!

On aurait cru entendre Luffy... Mais l'ambition n'était pas la même!

-Et, au fait, comment est-ce que tu l'as appelée, ton enfant?

-Emi, dit Jane en souriant. Akuma D. Emi.

-Elle ne porte pas le nom de son père? demanda Garp.

Il était déjà perspicace, le vieux. Enfin, à cette époque, je dirais plutôt le jeune.

-Non, toute personne dotée des pouvoirs de la famille Akuma doit porter le nom. C'est ainsi.

-Je vois... 

Il prit Emi dans ses bras. 

-Bien, enchanté, Emi!

Puis il la reposa et partit en courant.

-A la prochaine, Jane! Je vais voir Hoop Slap!

Je le suivis sous forme de petit courant d'air.

Et je n'en crus pas mes yeux. Hoop Slap était le futur maire du village de Fushia. Il avait des airs, mais était si jeune que je faillis crier de surprise. Il avait lui aussi une quinzaine d'années. Ses cheveux bruns étaient cachés sous un foulard rouge. Il avait un air sérieux, mais souriait quand même. Ses yeux étaient pétillants.

-Oh, Garp! Tu es rentré! s'écria t-il en s'élançant à la rencontre de son ami.

-Oui, mon père et moi venons d'accoster!

-Tu as de la chance, Garp.

-Oui, je sais! Et, j'aimerai te reposer une question! Tu es sûr de ne pas vouloir venir avec moi te présenter au Quartier Général quand on sera assez grands?

-Non, j'aimerai rester ici, j'aurai le mal du pays si je partais, tu le sais très bien, dit le futur maire.

-Mais pourtant, tu es un grand justicier, comme moi! répliqua Garp avec des étoiles dans les yeux.

Je ne l'aurai jamais cru comme ça. Lui, un grand justicier? Laissez-moi rire.

-Non, je ne veux pas, Garp, je suis désolé. Allez, tu viens, on va s'amuser au Grey Terminal?

-Avec plaisir!

Ils s'élançèrent sur la colline en riant. 

Eh bien, Garp avait une enfance plutôt heureuse. Et ma mère Emi avait des parents formidable, on dirait. Ca me plaisait bien.