Prologue
Deux silhouettes vêtues de sombre courent sous un soleil tapant. Un enfant crie dans leurs bras, de peur peut-être.
Elles filent le plus vite possible, slalomant entre les arbres, évitant branches basses et mares vaseuses. Elles sont en train de traverser le continent, et tout cela en courant. Les orques sont à leurs trousses, mais les coureurs les sèment petit à petit. Les hideuses créatures sont trop maladroites pour réussir à suivre deux elfes agiles dans la forêt dense et emmêlée.
La silhouette fine, qui est une femme, est paniquée. Elle doit à tout prix mettre sa fille à l'abri, elle le sait. Elle sait aussi que cet enfant sera un jour précieux pour Dilaulen. Son compagnon le sait aussi, c'est son instinct qui le lui souffle. Lui paraît, au contraire, tout à fait calme, réfléchi et rationnel, mais une tornade fait rage dans son esprit et dans son cœur.
Enfin la plage est atteinte. Au loin, l'océan est calme, les vagues faibles et les oiseaux ont l'air de s'amuser, comme si c'était un jour ordinaire.
Sauf que ce jour est loin d'être ordinaire. Non, car en ce jour est née Akileha, et en ce jour est aussi né le désire des orques de capturer l'héritière au trône de Dilaulen.
Les deux elfes courent toujours, et au moment précis ou leur jambes effleurent l'eau, ils se métamorphosent. La femme en un splendide phénix orangé, l'homme en un puissant milan royal couleur ébène. Ainsi hauts dans le ciel, les orques ne peuvent les atteindre ni par des flèches, ni par aucun autre moyen. Akileha, dans les pattes fortes de sa mère, est donc protégée.
Les elfes sous leur forme animale volent silencieusement. Seul le battement frénétique de leurs ailes se fait entendre, et les cris de l'enfant. À l'horizon, Valarwen, leur continent sauveur, apparaît. Ils se rapprochent à une vitesse extraordinaire, avides de mettre leur fille en sécurité. Lorsque la terre est enfin sous leurs pattes, ils ne cessent de voler, pour rejoindre la maison de Gorina. Gorina, leur amie, qu'ils ont choisie pour s'occuper d'Akileha. Une fois devant la porte de la maison taillée dans un arbre, ils se transforment à nouveau en elfes, et retirent leurs capuches. La femme a une chevelure rousse resplendissante, alors que celle de l'homme est de la teinte exacte du plumage de son totem, le milan royal. Il toque sur la porte en bois clair et très vite, Gorina leur ouvre.
— Arthen, Serendil ! J'ai reçu votre message...
Sa voix était brisée, comme si elle partageait la tristesse du roi et de la reine de Dilaulen. Serendil hocha la tête, sa crinière rousse reflétant la lumière du soleil couchant, ne pouvant dire un mot tandis que les larmes lui montaient aux yeux. Elle donna plutôt sa fille à la vieille elfe, qui la prit sans mot dire. Elle l'observa, puis releva la tête vers les régents de l'autre continent, le continent oublié des habitants de Valarwen. Serendil ne tint plus et fondit en larmes, nichant son visage dans le cou d'Arthen, qui la serra contre lui en un geste rassurant et consolateur. Ses larmes perlaient aussi au coin de ses yeux, mais il les refoula.
— Merci, dit-il à l'intention de Gorina.
Discrètement il lui déposa quelque chose dans la main, et elle lui offrit un signe de tête en guise de salut. Le couple royal se détourna, se métamorphosant une fois de plus pour s'envoler vers un Dilaulen brisé, en guerre.
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