Chapitre 11 : Le Squale panse ses plaies

[Illustration par Yoshi Susuki]

Le monde a perdu en couleurs ces derniers jours. La vie a pris un goût quelque peu amer et il m'est difficile de me motiver à me lever chaque matin. Ah c'est donc ça ce sentiment lorsqu'on se prend un râteau ? J'avoue ne pas comprendre ce qu'il s'est passé. L'ai-je forcée à m'embrasser ? Il m'avait pourtant semblé qu'elle y ait d'abord répondu avec un certain enthousiasme avant de se rétracter et prendre la fuite.

« Tes dents, mec, tes dents... me souffle Deidara en sirotant un milkshake. Je suis sûr que ce sont de vraies lames de rasoir, je n'irais pas tenter...

— Ferme-la Deidara, marmonne Sasori en l'imitant. C'est du sérieux là, on parle de sentiments, à croire que tu en es dénué tellement tu es insensible !

— Moi ? Insensible ? C'est une blague ? Il m'a fallu des années à faire le clown et à tout tenter avant que tu ne daignes poser tes yeux sur moi ! Je suis insensible ? Est-ce que je suis aussi insensible quand tu viens et...

— Je crois que ça suffira niveau détails, merci, lance soudain Sasori en s'empourprant, agitant les mains et détournant le regard d'un air embarrassé.

— Euh attends... Vous êtes ensemble ? Lâche soudain Pein après avoir analysé leurs paroles.

— C'est pas nouveau, t'es débile ou quoi ? Lance Hidan en soupirant.

— Tu le savais ? S'étonne Sasori en rougissant de plus belle.

— Deidara est particulièrement attentionné avec toi ces derniers temps et toi, tu rougis bêtement dès qu'il s'approche ou te parle. De vrais gamins, abusé...

— Ah... soupire le rouquin.

— Et comment vous avez pu finir ensemble ? Lâche l'Ikari intéressé. On s'est bien foutu de moi quand je suis sorti avec Konan, moi je veux savoir comment c'était. Histoire qu'on se foute un peu du deuxième insociable de la bande.

— Oh, c'est simple... commence Deidara en regardant sur le côté en grimaçant.

— Deidara, ferme-la ! S'emporte Sasori en se redressant d'un coup.

— On était au fast-food et tout à coup, il me regarde et m'a simplement dit « Sors avec moi ». J'ai cru qu'il blaguait mais ensuite, je me suis rappelé ce n'était absolument pas son genre. L'humour, vous savez, c'est inexistant de son vocabulaire.

— Au fast-food ?? T'es sérieux, mec ? S'exclame Hidan choqué. Même Kakuzu n'est pas aussi pitoyable !

— Ben voyons, Kakuzu qui apparaît tout à coup dans la discussion alors qu'il n'a rien demandé à personne... bougonne le concerné.

— Wow, même Pein y a plus mis du cœur que toi... se moque Konan.

— Comment as-tu pu dire oui face à une telle déclaration ? Poursuit Hidan ébahi.

— Ah mais même sous son air froid et antipathique, Sasori est tellement mignon ! Il avait cette petite étincelle et...

— Purée, je vais gerber... grommele Rioji dégoûté.

— Hey, on s'éloigne du vrai sujet ! Et Kisame ! Les coupe soudain la bleue.

— Ah oui mais là... A mon avis, à part faire de la chirurgie esthétique... commence Deidara en réfléchissant.

— On a tous vu qu'elle était amoureuse de Kisame donc arrête de nous faire chier avec son physique alors que tu sais très bien qu'il fait baver les trois quarts du campus juste à cause de sa stature, espèce de crétin !

— Toi incluse ? Demande Pein un peu piqué.

— Ah vous m'énervez ! Non ! Je suis en couple, je te rappelle !

— Remarque, vous êtes un peu « bleus » les deux, c'est un bel assortiment... commente soudain Tobi en réfléchissant.

— Toi, je vais t'enterrer vivant, on va voir si ça fera aussi un bel assortiment...

— Hé hé hé, on se calme ma chérie, tu le sais bien que Tobi est un crétin, ne t'occupe pas de lui, reprenons avec Kisame, tu veux ? »

Mon regard se porte sur chacun des membres de mon groupe pour constater que je suis désormais quasiment le seul célibataire du groupe avec Itachi, Tobi et Zetsu. Décidément, malgré tout ce qu'on a pu me dire, j'ai pourtant bien l'impression que c'est encore mon physique qui coince. Suis-je si laid que ça, vu de près ?

« J'ai pas envie de faire partie de ces loosers de célibataires, lâche soudain Tobi, tu veux pas sortir avec moi, Zetsu ?

— Je préfère mourir vieux garçon, répond ce dernier en buvant un smoothie vert, comme à l'accoutumée.

— Mais pourquoi est-ce que tu consommes encore le sang de tes frères et sœurs ? J'ai de la peine pour eux ! S'offusque l'Uchiha.

— Tu serais le dernier humain sur terre que je préférerais finir ma vie seul.

— Tu es tellement cruel ! Tu devrais sortir avec Kisame alors, ça ferait un beau plateau de sushis !

— Tobi, ferme-la, ordonne soudain Itachi sur un ton glacial.

— Bon, je vais vous laisser, dis-je soudain en me levant. Je travaille ce soir alors je ne dois pas être en retard.

— Mais, tu ne travailles pas d'habitude ce jour-là, non ? S'étonne le taciturne.

— Je remplace une collègue malade. Bonne fin de journée. »

Plus rien n'a de goût et même les plaisanteries de mes amis ne passent plus. Leur présence m'étouffe alors qu'ils font leur possible pour me changer les idées. Suis-je une mauvaise personne à penser ainsi ?

Lorsque j'arrive chez moi, je tombe sur la pire surprise qui soit m'attendant devant ma porte : Kumi. Je ne suis vraiment pas d'humeur à la voir, je n'ai pas besoin qu'elle voit à quel point je suis pitoyable, je n'ai pas besoin de ses fausses paroles pleines de compassion, je n'ai besoin que de solitude pour panser mes plaies.

« Tu ne devrais pas être ici, dis-je d'un air neutre.

— J'ai entendu dire que tu n'étais pas en forme alors je venais te rendre visite... fait-elle en arquant un sourcil.

— Je vais très bien, tu peux rentrer chez toi maintenant.

— Non, je partirai que lorsque je serai convaincue. »

Je vais pour répondre lorsque j'entends la porte d'à côté se déverrouiller. Mon cœur ne fait qu'un bond : je dois fuir à tout prix. La situation est trop étrange et je me sens trop blessé : je ne peux pas lui faire face.

« Hoy mais qu'est-ce que tu fais ? » s'exclame Kumi lorsque que je la pousse à l'intérieur de mon appartement et m'empresse de refermer derrière moi.

Mes yeux se plissent un moment et je reprends mon souffle, ou mes esprits, je ne sais pas trop. Je sens mon cœur battre très fort dans ma poitrine et mes pensées sont confuses. Comment faire face à Aya le lendemain en allant en cours ?

« OK, je vois, ça ne tourne pas rond avec l'autre d'à côté. Elle t'a mis un râteau ? Vu ta tête déprimée, j'imagine que j'ai vu juste. Arf, quelle idiote, elle ne sait pas ce qu'elle rate. Mais... Elle avait l'air bien amouraché pourtant ? Franchement, je ne la connais que depuis peu mais ça se voit comme les yeux au milieu du visage qu'elle en pince pour toi. Qu'est-ce que ça peut m'énerver ça, d'ailleurs ! Si tu veux, je peux aller lui casser la gueule pour toi ?

— Ça va pas, non ! M'exclame-je choqué.

— Alors oublie-la, si elle t'a mis un râteau, c'est qu'elle ne vaut pas la peine que tu t'attardes sur elle. Hey, c'est quoi cette tête ? Même quand on s'est séparés, tu ne donnais pas l'impression d'être aussi déprimé... Je vois, c'était donc sérieux... Mais est-ce qu'elle t'a donné une raison de te rejeter au moins ?

— Non... »

S'asseyant sur mon lit l'un à côté de l'autre, je prends le temps de tout lui expliquer. Je n'aurais pas pu le faire face à cette bande qui avait pris plus de plaisir à se moquer de moi, de mon apparence ou à discuter d'autres choses en parallèles. Kumi est là et m'écoute attentivement. Elle a mis de côté son arrogance et ses gamineries habituelles pour me faire face avec une maturité que je ne lui connaissais pas jusqu'alors. Ce réconfort inattendu font alors voler en éclat mes derniers remparts et je peux enfin laisser place à mon chagrin que je n'ai pas pu évacuer auparavant. J'ignorais jusqu'alors que vider mon sac me ferait autant de bien.

Kumi m'a écouté une bonne partie de la soirée jusqu'à l'heure de me rendre au travail. Elle me propose même de m'accompagner et prendre ensuite le bus à la station adjacente au fast-food dans lequel je travaille. Lorsque l'on sort de chez moi, je me sens beaucoup plus serein et même prêt à retourner en cours le lendemain alors que quelques heures plus tôt, j'envisageais de simuler une quelconque maladie pour rester chez moi.

En descendant les escaliers, mon cœur manque un battement lorsque je croise Aya revenant visiblement de courses car elle porte un sachet. Pire encore, je reconnais le logo du restaurant dans lequel je travaille : elle a donc pris un repas à emporter pour ne pas avoir à me croiser ce soir. D'accord, j'ai compris.

Son visage semble tout aussi surpris que moi mais rapidement, ses yeux se plissent et changent de direction avant de passer à côté de nous sans le moindre regard. Je sens ma poitrine se serrer, j'ai envie de lui demander pourquoi mais en la voyant passer, j'ai l'impression qu'elle partage le même chagrin que moi. Pourquoi ?

« Ses yeux sont rouges, grommelle Kumi lorsqu'Aya est éloignée. C'est quoi son problème au juste ?

— Je n'en sais rien... soupire-je. J'imagine que ça ne nous concerne pas. Viens, allons-y sinon je serai en retard. »

Une fois arrivés au restaurant, Kumi m'esquisse un large sourire mais tristement, je constate qu'il n'a rien à voir avec celui d'Aya. Il ne m'inspire pas ce sentiment de bien-être et de réconfort. Ses bras s'enlacent autour de ma taille et sa tête vient s'appuyer contre ma poitrine.

« Ne t'en fais pas, ce n'est pas une tentative. J'essaye juste de te donner des ondes positives pour que tout s'arrange pour toi. Si tu as besoin de quoi que ce soit, je serai là pour toi, Kisame. Alors n'hésite pas à m'appeler, tu as toujours mon numéro, il n'a pas changé depuis cette époque. A bientôt ! Et courage ! »

Kumi qui ne fait aucune tentative ? Étonnant de sa part. Aurait-elle une motivation derrière tout cela ? Je l'ignore mais je dois rester sur mes gardes. Je la trouve beaucoup trop gentille pour ne pas avoir d'idée tordue en tête... Mais sa présence m'a soulagé et je me sens prêt à affronter la journée de demain...

« Kisame... On est vraiment désolés... me fait Deidara le lendemain en s'inclinant et suivi du reste de la bande qui l'imite. On n'a pas été à la hauteur comme amis hier et... Je t'ai fait des remarques inappropriées, je m'en excuse. Sasori nous a fait la morale hier soir et... Je dois reconnaître qu'il avait raison, on n'a pas été à la hauteur et tu es parti sans que l'on puisse te soutenir...

— Ah euh... Merci... J'apprécie... réponds-je étonné tandis que Sasori se tient en retrait d'un air courroucé.

— Kisameeeeee !! s'exclame Tobi en se jetant dans mes bras sous le regard choqué de toute la classe. Je suis désolé de t'avoir comparé à un plateau de sushis !!

— C'est rien, c'est rien, dis-je d'un air embarrassé. J'ai l'habitude de ce genre de comparaisons... Maintenant, si tu pouvais juste me lâcher, c'est assez gênant...

— Kisameeeee !!! Tu es vraiment trop gentil !! Et je suis sûr que ce n'était pas à cause de tes dents ! Deidara, il est pas sympa non plus !!

— Hoy, tu veux que je te les casses tes dents à toi ? Tonne le blond dans son dos.

— Dégage, Tobi ! Lâche Konan en repoussant l'Uchiha vivement. On est vraiment désolés pour tout ça. Pour se rattraper, on aimerait t'inviter au restaurant, celui que tu voudras, un soir où tu ne travailles pas et on fera notre possible pour te remonter le moral, promis ! »

Cette fois-ci, c'est un sourire sincère que j'esquisse. Certes, je les avais trouvés odieux la veille mais ils ont compris que j'avais été vraiment affecté par cette histoire. Et tout à coup, cela me fait chaud au cœur de me sentir soutenu. Après tout, ce n'est qu'un râteau, je devrais m'en remettre. Qui n'a pas connu de situation similaire ?

« D'ailleurs, elle n'est pas là aujourd'hui apparemment, j'ai entendu des profs parler d'elle tout à l'heure. Ils n'ont pas dû voir que j'étais là... nous annonce Deidara.

— Ah bon et qu'est-ce qu'ils ont dit ? S'étonne Konan. Elle joue la fausse malade parce qu'elle n'ose pas affronter Kisame, c'est ça ? C'est tellement pitoyable comme comportement ! Franchement, qui fait encore ça de nos jours, quoi ? »

Bien que je me tienne en retrait, je ressens un certain malaise face aux paroles de Konan mais je tente de faire bonne figure pour éviter qu'elle ne comprenne que j'étais à deux doigts de faire la même chose...

« Je ne sais pas si c'est ça mais apparemment, elle a appelé ce matin en catastrophe pour leur dire qu'elle devait s'absenter plusieurs jours pour motif familial. Je ne sais pas si elle joue la comédie mais si c'est le cas, c'est une excellente comédienne car les profs semblaient inquiets pour elle en l'évoquant... »

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