Chapitre Bonus : Notre futur

Dynasty - MIIA

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2 ans plus tard...

Esme

Les rues de Paris semblaient plus calmes ce matin, comme si la ville partageait un instant de répit avec moi. Je me trouvais sur la terrasse d'un petit café, dans un coin tranquille du Marais. Devant moi, une tasse de thé encore fumante et un carnet noir posé à côté. C'était une habitude récente, écrire mes pensées, mes rêves, ou simplement des souvenirs qui revenaient parfois sans prévenir.

J'ai changé. Cela se voyait dans mes gestes, plus calmes, dans mon regard, plus serein. Les cicatrices du passé étaient toujours là, bien sûr, mais elles avaient cessé de me définir.

Je griffonnais des idées pour un projet que je menais depuis quelques mois : organiser une exposition artistique pour les jeunes talents parisiens.

J'ai trouvé ma place, ou du moins je m'en approchais. Je travaillais désormais dans un atelier de restauration d'œuvres d'art, un métier qui combinait ma passion pour la création et mon besoin de redonner vie à ce qui semblait brisé. C'était comme une métaphore de ma propre vie : patiente, lente, mais pleine de sens.

Le pardon avait été un chemin difficile, mais je l'avais parcouru, un pas après l'autre. Mes relations avec ma famille étaient loin d'être parfaites, mais elles étaient là. J'ai réappris à leur parler, à partager avec eux des moments simples. Ce n'était pas facile tous les jours, mais je savais que le temps finirait par adoucir les dernières aspérités.

Le serveur, un jeune homme avec un sourire chaleureux, posa une assiette de croissant devant moi.

- Vous êtes une habituée, non ? demanda-t-il avec un sourire.
- On peut dire ça, répondis je en haussant légèrement les épaules.

J'aimais cet endroit. C'était ici que je venais pour réfléchir, écrire, ou simplement observer le va-et-vient des Parisiens.

Malgré tout ce changement, le monde semblait s'être arrêté après cette nuit-là, mais il avait continué, bien sûr. Les jours s'étaient succédé, d'abord péniblement, puis avec un peu moins de douleur. Pourtant, même maintenant, des années plus tard, il y avait des matins où le poids revenait, comme une pierre sur ma poitrine.

Amory.

Son absence était devenue une part de ma vie, une ombre qui se superposait à tout ce que je faisais. J'avais longtemps essayé de comprendre, de reconstituer le puzzle de ses pensées ce soir-là, mais je savais qu'il n'y avait pas de réponse. Pas de logique qui expliquerait pourquoi il avait choisi de partir ainsi.

Je pris une gorgée de thé, le regard perdu dans la rue animée. Les passants allaient et venaient, leurs rires et conversations créant une mélodie de fond. La vie continuait, implacable, et je m'efforçais de suivre son rythme.

C'était étrange de réaliser à quel point il me manquait, malgré tout. Ses sourires en coin, ses mots parfois maladroits mais toujours sincères, cette façon qu'il avait de regarder les étoiles comme si elles lui murmuraient des secrets. Il avait laissé une empreinte en moi, une cicatrice tendre qui ne disparaîtrait jamais.

Je feuilletai doucement les pages du carnet, mes doigts glissant sur les mots que j'avais écrits pour lui. Des lettres que je ne lui enverrais jamais. Des pensées que je n'oserais jamais dire à voix haute.

Sur l'une des pages, j'avais griffonné une phrase :
"Les étoiles brillent encore, même après qu'elles se soient éteintes."

Je ne savais pas pourquoi cette idée m'apaisait. Peut-être parce qu'elle me rappelait qu'Amory, d'une certaine manière, vivait toujours à travers les souvenirs qu'il avait laissés.

Mon regard dériva vers le ciel, où le bleu était pur et infini.

- Tu aurais aimé cette journée, murmurai je, ma voix se perdant dans le vent.

Je fermai les yeux un instant, inspirant profondément. Paris continuait de vivre, et moi aussi. Mais ce n'était plus le même genre de vie. C'était une vie où j'avais appris à porter son absence, à en faire une partie de mon histoire sans qu'elle ne m'écrase complètement.

Cette année-là, le 25 décembre, je croyais que tout allait redevenir comme avant. Je n'entendais plus Amory dans ma tête. J'avais reconstruit avec ma famille. Mais j'étais loin d'imaginer qu'il allait disparaître sans moi. Que notre séparation allait le faire sombrer.

Je rassemblai mes affaires et quittai le café, mes pas me menant vers un parc où j'aimais souvent me promener. Le bruissement des feuilles et les rires d'enfants formaient une douce mélodie.

Amory ne reviendrait jamais, mais son écho, lui, ne s'éteindrait pas. Et en avançant, pas après pas, je savais que cet écho me guiderait, pas comme une chaîne, mais comme un souvenir tendre d'une vie qui avait compté.

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La nuit était tombée sur Paris, et les lumières de la ville scintillaient comme des étoiles tombées sur terre. Je me tenais sur la terrasse du dernier étage, celle de mon ancien loft, là où nous avions passé tant de soirées à rêver d'un avenir qu'on n'avait pas su construire.

Le vent léger agitait les rideaux blancs que j'avais toujours laissés ouverts, comme pour inviter l'air de la ville à entrer. Tout était resté presque intact, comme figé dans le temps. Et pourtant, tout était différent.


- Pourquoi toujours ici ? avait-il demandé un soir, alors que j'ouvrais une bouteille de vin sur la petite table ronde de la terrasse.
- Parce qu'ici, je suis au-dessus du monde, avais je répondu en souriant. Quand je suis ici, rien ne peut m'atteindre.

On avait ri, porté nos verres à nos lèvres, et passé la nuit à discuter sous un ciel étoilé. À cette époque, il croyait qu'il pouvait me protéger de tout, même de mes propres démons.


Je caressais le dossier de la chaise en fer forgé où il s'asseyait toujours, un livre à la main. Je pouvais presque entendre sa voix, les mots qu'il lisait à voix haute, comme si il cherchait à partager chaque émotion qu'il ressentait.

Je sortis mon carnet de ma poche. Chaque page était un souvenir que j'avais tenté de préserver, une trace de notre histoire. Mais ce soir, je ne voulais pas lire. Je voulais me souvenir autrement.


- Ferme les yeux, avait-il dit un soir, alors qu'on observait les lumières de la ville.
- Pourquoi ?
- Fais moi confiance, Esme.

J'avais obéi, un peu à contrecœur. Il avait pris mes mains dans les siennes, et j'avais senti la chaleur de ses doigts.

- Imagine ce que tu veux, avait-il murmuré. Ce que tu veux vraiment.

J'avais souri.
- Toi, Amory. C'est tout ce que je veux.

Il avait ri doucement, mais j'avais senti une ombre passer dans sa voix.

- Et si je disparais ? Qu'est-ce que tu veux, alors ?

J'avais ouvert les yeux, pris de court. Il avait fixé l'horizon, comme si il voyait déjà ce que je ne pouvais pas comprendre.


Je m'assied à la table, exactement comme on le faisait. La chaise de Amory restait vide, mais j'avais l'impression qu'il était encore là, quelque part, à mes côtés.

Le silence de la terrasse était lourd, brisé uniquement par le murmure lointain de la ville.

- Je t'ai imaginée, Amory. Je t'imagine toujours, murmurai je, mes mots emportés par le vent.

Je sortis une feuille de papier pliée de ma poche, ses bords froissés par le temps et l'usage. C'était une lettre que je n'avais jamais envoyée, un mélange de regrets, d'amour et de choses que je n'avais jamais osé lui dire.

Je la posai sur la table, face à la chaise vide, comme si j'espérais qu'il pourrait la lire, là où il était.


- Promets-moi quelque chose, avait-il dit une nuit, les yeux brillants d'une lueur que je ne comprenais pas encore.
- Tout ce que tu veux, avais je répondu.
- N'oublie jamais ça. Tout ce qu'on a eu. Même si... même si je ne suis plus là.

J'avais protesté, refusant d'entendre ces mots. Mais il avait insisté, presque désespéré.

- Promets, Esme.

J'avais promis. Et maintenant, je comprenais enfin pourquoi.


Alors que je me levais pour partir, je jetais un dernier regard à la terrasse. Ce lieu n'était plus qu'une scène vide, un souvenir figé dans le marbre du passé. Mais quelque part, en moi, je savais que Amory ne m'avait jamais vraiment quitté.

Je laissais derrière moi cette lettre, ce dernier écho de notre histoire, comme un adieu que je n'avais jamais su prononcer.

Paris brillait en contrebas, vivante et indifférente. Mais pour moi, cette terrasse resterait le seul endroit où je pouvais encore le retrouver, même si ce n'était que dans mes souvenirs.

Avant de remettre mon carnet dans la poche, j'étais tombé sur cette phrase qui n'était que le résumé de notre relation. Mot pour mot.

"Parfois, la distance n'efface pas tout. Elle ne fait que suspendre ce qui attend d'être retrouvé."

-Esme Ruiz

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