Chapitre 12
Mon réveil est compliqué.
Ma tête me tourne et j'ai la sensation que quelqu'un me piétine le cerveau avant de braquer une lampe torche directement dans mes yeux. Or seule la lumière du jour est la véritable cause de ma torture.
Je grogne et me tourne de l'autre côté en tirant la couette.
Mon nez se loge et inspire doucement l'odeur des draps dans lesquels je suis allongé. Cette odeur est douce, un peu relevée d'une odeur légère de tabac. Alors que je prends une nouvelle inspiration, je comprends que ce ne sont pas mes draps, ni même mon lit.
Mes yeux s'ouvrent brusquement, mais se referment presque immédiatement à cause de la lumière qui inonde la pièce. Et c'est avec toute la volonté du monde que je découvre mon visage en enlevant ma main de devant mes yeux.
Bordel qu'est-ce que je fous là ?
Alors que mon regard balaye la pièce rapidement, je reconnais la chambre de Kurt. Ce n'est effectivement pas dans mon lit dans lequel je suis allongé, mais celui en fer du blond.
Je fouille ma mémoire à la recherche de la moindre explication, d'une raison plausible concernant ma présence ici. Mais rien, c'est le flou total. Quand je repense à la soirée d'hier, mes souvenirs s'arrêtent au moment où Kurt et moi entrons dans le supermarché, moi ayant le corps imbibé d'alcool.
L'angoisse monte en moi alors que je soulève la couette.
Je suis ravi de voir que je suis habillé de mon jean et de mon T-shirt, bien que la déception se fasse sentir très brièvement.
Mes pieds se posent sur le sol, et c'est d'un pas hésitant que je me dirige vers la porte de la chambre, ayant pris ma veste et mes chaussures au passage. Puis j'arpente le couloir avant d'accélérer le pas quand la porte d'entrée est en vue.
Or je m'arrête net quand Kurt apparait au bout du couloir, un sourcil levé interrogateur.
- Tu comptais filler en douce ?
- Je...
Mais ma voix se coupe.
Je regarde alors mes pieds, quelque peu gêné par la situation, puis je tousse pour combler le silence pesant.
Kurt pousse un petit rire, puis il reprend.
- Viens prendre un café.
Quand je lève de nouveau la tête il a disparu, et au bruit de la machine à café, je comprends qu'il est dans la cuisine.
J'hésite un instant, me demandant si c'est une bonne idée de m'attarder ici ou si je devrais prendre mes jambes à mon coup, les répercussions du trou noir concernant la veille étant trop important.
Mais finalement je le rejoins dans la cuisine, trainant des pieds sur le sol.
J'entre dans la cuisine, Kurt est bien là mais il n'est pas seul.
Je suis accueilli par le regard bleu surpris de Kane, ne comprenant pas ma présence dans la cuisine ce matin. Et son interrogation se confirme quand il s'exclame tout à coup.
- Qu'est-ce que tu fous là Blake ?
J'ouvre la bouche mais aucun son n'en sort.
Je ne peux dans aucun cas dire que j'étais avec Kurt hier soir, et qu'après une bonne dose d'alcool, je n'ai plus aucun souvenir du reste de la soirée. Puis de toute façon parler de Kurt l'intriguera, ne comprenant pas pourquoi je passe du temps avec son frère.
Alors je reste là, immobile sans dire un mot durant plusieurs secondes qui me semble être une éternité.
Heureusement pour moi, c'est Kurt qui prend la parole.
- J'ai croisé Blake hier soir près de chez nous, il était complétement bourré et incapable de me dire où il habitait, du coup je l'ai ramené ici.
Kane lève les yeux vers moi pour avoir ma version, donc je m'empresse d'entrer dans le jeu de Kurt, voyant une échappatoire à ma situation.
- Je suis allé à une soirée de Tom, et c'est vrai que j'ai pas mal bu.
- D'accord, mais qu'est-ce que tu faisais près de chez moi ?
- Je voulais te voir. C'est chiant quand tu n'es pas là, et comme je m'inquiète pour toi c'est pour ça que j'étais dans le coin.
Mon ami lève les yeux et soupire, ne voulant pas être confronté une nouvelle fois à ses problèmes. Donc je continue, ne voulant pas qu'il se referme sur lui-même.
- Je sais que tu as des problèmes et que tu ne veux pas en parler. Mais au moins reviens en cours. Tu ne peux pas rester chez toi toute ta vie, revis un peu.
- C'est facile à dire.
Alors que je pense qu'il va s'énerver sur moi, Kane me surprend en m'accordant un bref sourire, sourire qui m'avait manqué à vrai dire. Puis il se lève et me donne une tape amicale sur le dos.
- Très bien.
Je lui souris, mais il enchaine en plissant le nez de dégout.
- Prends une douche, tu pues l'alcool comme si tu t'étais baigné tout entier dedans.
- Pas de problème, je rentre chez moi.
- On se voit lundi, en cours.
Je lui fais un signe de tête et Kane disparait de la cuisine.
La satisfaction envahit mon esprit. J'ai réussi à le convaincre de revenir en cours, même s'il ne m'a pas confié ses secrets, c'est tout de même un bon début. J'espère qu'il finira par se livrer à moi, bien que cela signifie la fin des rencontres avec Kurt.
Tout à coup je sens un souffle contre ma nuque. Mon cœur rate un battement et ma respiration se coupe durant quelques secondes. Mes membres deviennent lourds quand une voix murmure à mon oreille.
- Tu as bien dormi ?
Cette phrase pourrait être anodine si jamais elle n'avait pas été prononcée d'une voix envoutante, séductrice, me faisant frissonner alors que je reste sans voix.
Puis Kurt me dépasse sans m'accorder le moindre regard.
Je respire enfin, ne comprenant pas ce qu'il vient de se produire. Mais je ne reste pas trop longtemps à me questionner. En effet j'enfile en vitesse mes baskets puis j'ouvre la porte d'entrée avant de m'enfuir de cet appartement.
Sur la route menant chez moi je n'ai cessé de penser au souffle du blond sur ma peau, et de l'agréable sensation qui courait en moi, me donnant envie de fermer les yeux pour apprécier d'avantage ce moment.
Or chaque fois que j'y pense, j'essaye de me dire que c'est seulement son charme qui joue sur moi, qu'il se joue complètement de moi, et surtout que je dois arrêter de penser à cela à moins de devenir fou.
Certes la peur que j'éprouvais au début a diminué, laissant place à quelque chose que je ne gère pas bien, voire pas du tout. Et je viens à me demander si je ne préférais pas être terrifié devant sa présence que de désirer le voir sans cesse.
Je pose à peine un pied dans l'entrée de chez moi, qu'une tornade brune me tombe dessus, me hurlant au visage des choses que je n'assimile pas très bien.
La voix de ma sœur est insupportable, surtout avec le mal de crâne qui me scie la tête depuis ce matin.
- Dani, s'il te plait tais-toi.
Elle s'arrête brusquement, choquée. Puis elle écarquille les yeux de colère avant de reprendre de plus belle.
- Tu te fous de moi ? Tu veux que je me taise un peu, alors que je n'ai pas fermé l'œil de la nuit ?
Je soupire et m'adresse à ma sœur calmement, espérant la voir baisser un peu le volume de sa voix.
- En quoi tes insomnies me concernent ?
- En quoi ça te concerne ? C'est une blague ! Bien sûr qu'elles te concernent, c'est à cause de toi que je n'ai pas dormi !
- Pourquoi, je n'étais même pas là cette nuit.
Je ne comprends pas la colère de ma sœur, ni pourquoi elle m'en veut tant alors que j'ai été absent depuis hier après-midi.
Oh, merde.
C'est là que je comprends. Je n'ai pas donné de nouvelle à ma sœur depuis hier, elle ne savait pas où j'étais, ni même quand je rentrerais. C'est vrai que mon téléphone n'a plus eu de batterie du moment où Kurt et moi sommes arrivés chez Tom. Mais à vrai dire j'étais trop bourré pour m'en soucier.
Je suis sur le point de m'excuser, mais ma sœur ne m'en laisse pas l'occasion.
- Je t'ai appelé toute la nuit pour savoir où tu étais ! Tu n'as pas répondu une seule fois, et ton téléphone était directement sur répondeur. J'étais inquiète, je ne te voyais pas rentrer, ni même cette nuit. J'ai appelé les hôpitaux pour savoir s'il n'avait pas un homme qui pourrait être toi.
- Tu as fait quoi ?
La peur de ma sœur a vraiment été surdimensionné, je comprends qu'elle puisse être inquiète, mais pas au bout d'une soirée sans nouvelle de ma part.
Danielle fronce les sourcils, n'aimant pas le ton que j'emploie, puis elle reprend, sa voix étant plus calme.
- J'ai même appelé papa.
- Quoi !
Cette fois-ci c'est moi qui crie.
D'accord elle peut être inquiète, mais pas au point d'inclure mon père dans son angoisse, et créer chez lui aussi cette peur de ne pas m'avoir vu rentré cette nuit.
- Bordel Dani, pourquoi tu as fait ça ?
- Je n'avais pas de nouvelle, il fallait bien que j'essaye de savoir où tu étais.
- Et qu'est-ce qu'a dit papa ?
Elle regarde ses pieds, du rouge de honte teintant ses joues alors qu'elle marmonne dans sa barbe.
- Quoi ?
La brune pousse un gros soupire puis parle d'une voix plus claire et compréhensible, même si elle parle rapidement pour faire passer ça plus vite.
- Il a dit que je m'inquiétais pour rien, que tu étais sans doute en soirée.
- Et il avait raison.
Je suis content de voir que mon père n'est pas rentré dans le jeu de ma sœur. Mais il faut tout de même que je l'appelle, pour mettre les choses au clair.
Ma sœur me fusille du regard. Et je saisis l'occasion de son silence soudain pour la contourner, en déposant un baiser sur sa joue, pour ensuite me diriger vers les escaliers. Mais alors que je suis au milieu des marches, sa voix résonne tout à coup.
- La prochaine fois envoies moi au moins un message pour me dire où tu es, c'est la moindre des choses.
- Bonne nuit Dani.
Je souris et pars directement dans ma chambre, où je m'allonge péniblement après avoir fermé mes stores.
Il doit être très certainement autour des 10 ou 11 heures, mais je n'ai qu'une envie, celle d'être au calme et me reposer.
J'attrape une bouteille à côté de mon lit, puis je m'hydrate pour commencer à lutter contre la gueule de bois. Puis finalement je ferme les yeux, l'horrible sensation d'être sur un bateau me serrant le cœur. Mais j'arrive tout de même à m'endormir.
J'émerge doucement vers les 15 heures, mon mal de tête toujours présent mais un peu atténué.
Mon corps est un peu endoloris sans que je ne sache trop pourquoi. Je profite alors pour brancher mon téléphone, et je découvre avec horreur les 35 appels manqués de Danielle, ainsi que les 87 messages m'insultant et me disant qu'elle est morte d'inquiétude par la même occasion. Puis je vois un appel de mon père ainsi qu'un message, m'indiquant qu'il s'inquiète un peu et qu'il faudrait que je le rappelle le plus vite possible.
Mais le message qui m'intéresse le plus est celui d'un certain homme aux yeux verts. Ce message date d'hier soir, peu après mon départ, il me demande où je suis passé et si je peux le rappeler rapidement.
J'envoie un message à mon père pour lui dire que je suis rentré, puis une seconde plus tard j'appelle John. Ce dernier répond sur les dernières tonalités, ratant presque mon appel.
- Allo ?
Sa voix est pâteuse et indique très clairement que lui aussi à bien profité de la soirée de la veille.
Je souris, même si mon mal de crâne me glisse à l'oreille de ne pas trop faire le malin.
- Salut John, c'est Blake.
- Oh salut ! Tu étais passé où ?
- Je suis parti hier soir, j'en avais assez de la soirée.
- Tu es parti seul ou accompagné ?
Je n'ai pas besoin d'être un très grand détective pour immédiatement réaliser que John fait référence à Kurt.
Un soupir m'échappe, mais je ne veux pas lui mentir. C'est le seul à qui je peux parler de Kurt, de ce que je ressens vraiment. Et à vrai dire j'ai besoin de quelqu'un qui pourrait m'aider à sortir de l'obscurité de mes sentiments.
- Accompagné. De Kurt.
- J'en étais sûr ! Vous avez fini par conclure j'espère !
Un rire m'échappe.
Le franc parlé de John me plait, et c'est quelque chose qui fait, avec son expérience avec les hommes, que je veux bien me confier à lui.
Alors, après avoir pris une grande inspiration, je me lance.
- Non nous n'avons pas conclu. Par contre, de mon côté, je ne comprends pas ce que je ressens. Tout ce brouille dans ma tête, et je ne sais pas ce qu'il se passe.
- Développe.
Même si son ton paraissait amusé, maintenant il est redevenu sérieux, prêt à m'écouter et donc me conseiller.
Je me lance alors dans la description de ce que je ressens quand il est près de moi, de mon envie d'être près de lui alors qu'une partie de moi le craint, mais aussi des frissons qui me parcourt quand je sens sa peau ou son souffle sur moi.
Malgré mon aveuglement, je sais de quoi il s'agit. Mais tout ça est nouveau pour moi, je n'ai seulement ressenti quelque chose pour un homme une seule fois, et cet homme est celui avec qui je suis au téléphone.
John patiente que j'ai fini puis répond.
- Je pense que tu es attiré par lui.
- C'est-à-dire ?
- Que tu veux le mettre dans ton lit voyons !
Il est direct.
Mais je ne suis pas sûr qu'il ait raison. Je ne l'ai pas imaginé de cette façon, enfin du moins jusqu'à maintenant. C'est vrai qu'en y pensant seulement, mon corps réagit au quart de tour, et montre clairement que je le désire.
Je ne veux pas l'avouer et je détourne un peu le sujet.
- Mais je n'ai jamais couché avec un homme.
- On peut s'arranger si tu veux.
Je ris. Mais tout à coup je ne sais pas s'il est sérieux ou non. John alias Honey est un travailleur du sexe, et même si ça ne paraît pas un sujet tabou pour lui, moi je ne suis pas très à l'aise avec cela.
John remarque mon trouble et donc se précipite de mettre les choses au clair.
- C'était une blague Blake. Je couche avec des hommes contre de l'argent, mais je ne couche pas avec des amis. Cela serait trop étrange.
- Je suis d'accord.
Il rit et je me joins à lui.
Je suis désolé pour lui qu'il ait recourt à de telles activités pour vivre et même s'il semble passer outre, je sais qu'il en souffre. Qui n'en souffrirait pas ?
Mais je ne m'attarde pas sur ce sujet, considérant que c'est à lui de m'en parler si l'envie lui vient.
- Je ne sais pas où ça va me mener.
- Est-ce qu'il ressent la même chose ?
Je ne pense pas. Kurt est le type de mec à baiser des femmes, à avoir une attitude horrible envers les gays. Je ne le vois pas prendre plaisir à m'embrasser. Il est comme Kane, et donc très loin d'être gay.
- Ça m'étonnerait.
- Il est hétéro ?
- Etant donné qu'il a couché avec une femme à la soirée étudiante hier, je pense que oui, c'est assez clair.
John rigole.
Je ne comprends pas sa soudaine hilarité, surtout que ma voix était un peu teintée de déception, voire de tristesse, rien ne prêtant occasion à rire.
- Qu'est-ce qu'il a de drôle ?
- C'est seulement que toi aussi tu couches avec des femmes, et pourtant tu es bel et bien attiré par les hommes.
- C'est différent.
- Rien n'est différent.
Il marque un moment de silence puis enchaine.
- Désolé je dois te laisser. On se rappelle plus tard si tu veux. Raconte-moi comment ça se passe avec Kurt bien sûr, s'il y a évolution.
Puis après l'avoir salué, je raccroche.
Je jette mon téléphone sur mon oreiller et je me lève commençant à faire les cents pas dans ma chambre.
Je suis perdu, vraiment perdu.
John m'a mis dans la tête que je pourrais être gay, et quand je l'ai embrassé c'est ce qui m'a fait réaliser que je n'étais pas insensible aux hommes comme je le pensais. Certes j'avais déjà fantasmé sur certains garçons au lycée, ou bien même à l'université, mais je m'étais toujours persuadé que ce n'était rien, que je les trouvais simplement attirant mais que ça n'allait pas plus loin que ça.
J'ai ensuite couché avec un grand nombre de femme, et dans ces moments mon esprit s'égarait quelque fois, rendant ma performance assez exceptionnelle. Mais je n'étais jamais à cent pour cent avec elles, mais plutôt dans mes pensées, là où ce que je désirais vraiment se trouvait.
Là encore j'ai préféré ignorer, me concentrant seulement sur mon palmarès, sur la liste des filles qui étaient passées dans mon lit.
Mais maintenant je ne m'y intéresse plus. Je n'ai pas couché avec une fille depuis Anna, une rousse que j'ai traitée comme les autres. Et là encore je ne garde pas un bon souvenir, seulement du sexe de besoin, pour assouvir des désirs que je n'arrive pas à accomplir avec ceux dont j'ai vraiment envie.
Encore une fois j'ai fermé les yeux.
Mais John m'a mis face aux faits. Il m'a dit que mon baiser n'était pas anodin, qu'il y avait bien plus que de la curiosité là-dedans. Puis Kurt est arrivé. Kurt est son aura terrifiante, qui m'intriguait, me rendait en quelque sort à sa merci. Puis ses souffles contre ma peau, ses contacts brefs mais intenses, puis la façon dont il pose ses yeux sur moi.
C'est là que j'ai compris, c'est là que je comprends. Je le désire, vraiment, c'est peut-être une des raisons pour lesquelles je veux me jeter dans la gueule du loup, c'est-à-dire retourner me confronter à Jane. Ses sourires m'ont manipulés, sans vraiment avoir conscience de ce qu'ils provoquaient chez moi.
Mon pantalon devient étroit.
Bordel, John a raison, je veux mettre Kurt dans mon lit.
J'ai passé le reste de la soirée avec ma sœur.
Même si au début elle refusait de m'adresser la parole, trop en colère contre moi, elle a fini par craquer et nous avons passé notre repas devant une série qu'elle m'a forcé à regarder, Atypical, qui finalement était plutôt pas mal.
Mon père est rentré vers 23 heures, ce qui était une bonne nouvelle. Son retour à la maison signifiait sa présence le lendemain, et donc une nouvelle journée en famille.
Enfin du moins c'est ce que je pensais.
Harold Wilson a fini par nous dire, à Danielle et moi, qu'il avait invité sa copine à venir manger à la maison le lendemain midi, pour un repas présentation. Et je ne savais pas trop quoi en penser. Ma mère est partie il y a des années, mais je ne suis toujours pas prêt à voir quelqu'un prendre sa place.
Bien que ma sœur ait haussé les épaules, signe qu'elle n'en avait rien à faire, j'ai préféré hocher simplement la tête, alors qu'une boulle se formait dans mon estomac.
Mon père n'a rien dit, et c'est sur une absence totale de discussion que je suis monté dans ma chambre, claquant légèrement la porte derrière moi.
Il est presque trois heures du matin.
Je n'arrive pas à dormir. L'annonce de mon père un peu plus tôt dans la soirée tournant encore et encore dans ma tête, mais aussi ajouté à ça le fait que j'ai dormi une bonne partie de l'après-midi et donc que je n'ai maintenant plus sommeil.
Je tourne puis me retourne dans mon lit, enlevant ma couette avant de finalement la remettre sur moi.
Des grognements sortant en masse de ma bouche, alors que je tape nerveusement des pieds, ne supportant pas d'être dans cet état.
Mais soudainement je m'arrête de bouger. Je tourne la tête vers mon téléphone, posé sur l'oreiller de gauche. Ce dernier vibre, signalant un appel.
Mes sourcils se froncent, me demandant qui peut bien essayer de me joindre à une telle heure de la nuit. Mais la question ne reste pas longtemps en suspens, en effet je viens attraper le téléphone et donc lire le nom sur l'écran.
Mon cœur rate un battement.
Le nom de Kurt est sur mon téléphone, et je m'empresse de répondre sans vraiment réfléchir auparavant.
- Allo ?
- Merde.
Je sourcille légèrement, ne m'attendant pas à une telle réponse. Sa voix est rauque et assez faible.
Mais je n'abandonne pas et insiste une nouvelle fois.
- Qu'est-ce qu'il se passe ?
- Tu n'étais pas censé répondre.
Sa voix est dure, mais elle ne sonne pas comme d'habitude. Il parle d'une manière lente, cherchant ses mots, comme si son esprit était ailleurs.
Je ne comprends pas, s'il m'appelle, c'est pour m'avoir et non pas tomber sur mon répondeur.
- Pourquoi ?
- Parce que ça aurait été facile.
- De quoi ?
Il ne me répond pas.
Je comprends qu'il n'est pas dans son état normal, un peu plus vulnérable, son air terrifiant ayant quitté sa voix. Il doit être alcoolisé ou bien sous d'autres substances. Et c'est donc sans réfléchir que j'enchaine, d'une voix assurée.
- Tu veux que je vienne ?
Il semble hésiter, ne répondant pas tout de suite.
Mais tout à coup il parle.
- Non.
Puis il raccroche.
Je reste un moment interdit, ne comprenant pas ce qu'il lui a pris. Puis je réessaye de l'appeler à nouveau, notre appel ayant peut-être été coupé par erreur. Mais il ne répond pas quand je le rappel. Ni la première fois, ni la deuxième. Et c'est au bout de la troisième fois que je comprends qu'il a éteint son téléphone, ne désirant pas me parler.
J'ai passé le reste de la nuit à essayer de comprendre ce que voulait dire cet appel, mais en vain. Je n'avais pas de réponse, et Kurt n'avait pas l'air de vouloir me les donner.
AudreyPh18
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