Combat
Point de vue de Petter
— Merde... Je déteste devoir aller à Richet, surtout quand ça concerne cette fille.
Je balançai mon jogging dans le panier à linge, puis posai mon téléphone sur le bureau. Je refermai la fenêtre qui donnait sur les toits, l'esprit encore envahi par son image. Je voulais absolument l'oublier, cette fille, mais plus je tentais de l'effacer de ma tête, plus elle revenait me hanter.
Je pris une grande inspiration. Je n'avais pas envie de me perdre dans ces pensées. Si je voulais vraiment me concentrer sur autre chose, je devais m'occuper. D'un geste distrait, je retirai mon t-shirt, le jetant négligemment sur le lit, et me dirigeai vers la salle de bain. Le couloir était étroit, éclairé par une ampoule qui clignotait sans fin, à la manière de ces vieilles ampoules défectueuses dans les films d'horreur.
L'eau froide me fit sursauter. Elle s'écoula comme un gel intense, traversant ma peau en un frisson glacé qui me coucha les cheveux sur la nuque. Je fermai le robinet après avoir rapidement frotté mon corps de savon, mais quand je tentai de rouvrir l'eau, il n'en sortit plus une seule goutte.
— Putain, mais qu'est-ce que je vais bien faire maintenant avec toute cette mousse ?!
Je regardai autour de moi, agacé. C'était vraiment pas ma journée. Habillé d'une serviette, je sortis précipitamment de la douche, glissant presque sur le sol de la salle de bain. Ce n'était pas qu'un problème de douche, l'eau était carrément coupée dans tout l'appartement. D'un regard furieux vers le plafond, je me laissai aller.
— Vraiment ? C'est ça, ce qui me manquait aujourd'hui.
Je n'avais pas envie de rester là, à ruminer. Je partis donc, sans trop réfléchir, frapper chez ma voisine, madame Devagio. Une vieille commère adorable, mais parfois envahissante. Elle vivait seule avec ses chats, dont elle s'occupait avec un soin presque sacré. Elle avait plus de cinquante ans, mais il fallait avouer qu'elle avait l'âme d'une matriarche du quartier.
Je toquai à sa porte et attendis quelques secondes avant qu'elle n'ouvre, le visage souriant.
— Salut, la vieille... Je tentai de la taquiner, un sourire en coin.
— Je crois que tu te trompes de porte, Petter, répondit-elle avec un clin d'œil. Je ne suis pas ta grand-mère.
Je souriais. Elle avait raison. Ce n'était pas ma grand-mère, mais elle avait ce quelque chose de rassurant, cette chaleur humaine qui me faisait du bien. Mais tout d'un coup, une voix familière retentit derrière la porte.
— Qu'est-ce que tu fais ici, Petter, avec toute cette mousse sur toi ? La voix d'Elene.
Elle se tenait là, dans l'encadrement de la porte, le regard curieux et légèrement moqueur.
Je me figeai. Elene... Elle n'avait pas changé. Je me souvins de tout ce que nous avions partagé, mais aussi de tout ce que je regrettais maintenant. Pourtant, je n'arrivais pas à m'empêcher de la regarder, de la revoir dans ce vieux décor. Ça m'énervait. Pourquoi fallait-il qu'elle soit là, tout le temps, avec ses manières ?
Elle s'approcha, presque trop près, son regard scrutant chaque détail de ma peau encore humide de la douche. Sa main se posa doucement sur mon torse, mais je la repoussai d'un geste ferme.
— Je crois que c'était clair, Elene... dis-je d'une voix basse, presque douloureuse. J'ai pas envie de revenir en arrière.
Elle rit, un son léger, mais il y avait quelque chose d'agacé dans sa voix.
— Ne sois pas comme ça, Petter. Ce n'était pas si mal, entre nous, non ? Elle glissa une main plus bas, et je sentis un malaise me saisir.
— Arrête. Ça suffit. Je fis un pas en arrière. J'ai pas envie de revivre ça.
Elle sembla hésiter un instant, mais la lueur de défi dans ses yeux ne s'éteignit pas. Elle se pencha en avant, comme si elle ne comprenait vraiment pas ce qui m'arrivait.
— Tu es si dur, Petter, murmura-t-elle, une pointe de frustration dans sa voix. Tu sais que j'ai toujours su te faire fondre.
J'étais à deux doigts de craquer, mais je me forçai à respirer. Il fallait que je me tienne, que je reste fidèle à ce que j'avais décidé.
— Non, Elene. Je te le dis une dernière fois. Mon ton se fit plus sec. Je n'ai plus envie de ça.
Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais à ce moment-là, la voix de madame Devagio s'éleva .
— Elene, arrête de déranger Petter. Sa voix était ferme, maternelle.
— Mais mamie, je n'ai rien fait, répondit-elle avec un sourire malicieux, sans me quitter des yeux.
Madame Devagio insista, plus sérieusement cette fois.
— Comment va ta mère, Petter ?
Cette question me glaça un instant. Je n'étais pas prêt à en parler. Ni à elle, ni à qui que ce soit. Mais c'était plus fort que moi.
— Elle tient le coup, répondis-je en forçant un sourire. Mon cœur se serra. La question m'avait ramené à cette réalité dure et incertaine. Je n'avais pas envie de la revivre chaque jour, mais ça faisait partie de mon quotidien maintenant.
Madame Devagio sourit, compatissante.
— Nous prions tous pour qu'elle s'en sorte.
Je hochai la tête, une gratitude discrète dans mes yeux.
— Je peux terminer ma douche chez toi ? demandai-je, hésitant.
Elle me fit signe d'entrer avec un sourire bienveillant.
— Bien sûr, entre, Petter. Ça ne me dérange pas. Puis, avant que je ne puisse répondre, elle ajouta : Tu n'es pas au courant de l'histoire avec l'épicier ?
Je secouai la tête, agacé par la répétition de cette question dans le quartier.
— Non, je ne sais pas, et franchement, ça ne m'intéresse pas. Je lâchai un petit rire nerveux.
Quelques minutes plus tard, je me retrouvai sous un jet d'eau chaude, qui me réchauffait, m'apaisait. L'eau glissait sur ma peau, comme une caresse après la brutalité de la froideur de tout ce qui m'entourait. Je fermai les yeux, me laissant envahir par une sensation de bien-être.
Quand je sortis, je remerciai madame Devagio et partis en direction de la porte. Elle était là, entourée de ses chats, l'un blotti contre elle. Elle avait une sérénité qui me faisait défaut, mais que je n'enviais pas. C'était simplement... réconfortant.
— La douche t'a fait du bien ? demanda-t-elle avec un sourire chaleureux.
— Oui, beaucoup. Je souris faiblement. Un sourire un peu timide, mais sincère.
Elene me suivit alors, sans dire un mot. À la dernière seconde, elle m'attrapa la serviette, m'empêchant de sortir.
— Elene, j'en ai vraiment marre de ça. Tu veux que je te le dise ? Je la regardai dans les yeux. Je suis fatigué de ton attitude.
Elle resta figée, déstabilisée par ma réponse. Mais rapidement, elle baissa les yeux, comme si quelque chose avait changé en elle. Elle me tendit une petite gamelle.
— Je voulais juste te donner ça, murmura-t-elle. C'est pas grand-chose, mais ça pourrait t'aider avec ton entraînement.
Je pris la gamelle sans un mot, un peu surpris par ce geste. Pas grand-chose, mais... c'était tout de même quelque chose. Un geste simple, presque humble.
Je la remerciai d'un ton calme, mais elle s'éclipsa déjà dans la cuisine sans un mot. Peut-être qu'elle avait compris. Peut-être qu'elle ne savait tout simplement plus quoi dire.
Je pris une profonde inspiration et sortis sans me retourner.
Quelques minutes plus tard, je me retrouvai devant la librairie de Patty. C'était étrange. Le rideau de fer était toujours baissé, alors qu'elle aurait dû être ouverte depuis longtemps. Intrigué, je me dirigeai vers l'arrière-boutique. L'odeur de café emplit immédiatement mes narines. Mais alors que je m'approchais de la porte, entrebâillée. Je n'étais pas préparé à ce que j'allais voir. Un jeune homme, à la silhouette tendue, tenait une arme contre la tête de Patty. Son visage était marqué par la peur et la colère, et Patty, même si elle semblait calme en apparence, n'était pas du tout dans une situation confortable.
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