10 - Le blond
À force de patience et de calme, j'ai réussi à plus ou moins expliquer tout ça à Calum. Je crois qu'il est inutile de préciser qu'il était dans un état de choc extrême et qu'il s'était mit en tête de retrouver les coupables (disait-il) et de leur péter la gueule.
J'ai fini par réussir à le calmer en lui disant que ce n'était pas nécessaire, et que j'étais passée au delà maintenant, que tout allait « mieux ». Nous avons encore discuté un long moment avant que je rentre finalement chez moi.
Je suis actuellement sur mon balcon, assise sur une petite chaise pas très confortable, et mille et une pensées me taraudent.
Il y avait une chance sur plus de cinq million pour que ce soit Cal qui me vienne en aide. Une sur cinq million.
Ça me semble tellement improbable, tellement incroyable.
J'ai du mal à tout assimiler.
Et puis, on a pas vraiment abordé la question des autres. De savoir s'il allait leur en parler, s'il allait leur dire qu'on s'est « croisé ». Enfin, je ne sais juste pas s'il va leur en parler. Et je ne sais pas si j'en ai envie ou pas.
C'est vrai que ça fait déjà deux ans, et que malgré tout deux ans c'est long, mais je n'arrive pas à savoir comment je me sens vis-à-vis de ça, d'eux. Je n'arrive pas à savoir si quelque part au fond de moi, réside l'envie de les revoir.
Peut être bien que oui, peut être bien que j'aimerais les retrouver. M'excuser. Les remercier pour tout ce qu'ils m'ont apporté. Probablement.
+++
Cela fait maintenant une semaine, et je n'ai pas de nouvelles de Calum. Alors que pendant deux ans, je me suis passée de leur présence, je me suis habituée à leur absence, à mon départ, voilà maintenant que je réalise qu'il me manque. Que j'ai envie de le revoir. De le retrouver. De revivre avec lui cette amitié, cette complicité que je n'avais jamais eue avec personne avant.
Sans trop savoir ce que je fais, je me décide à aller m'habiller, et à sortir de chez moi.
Après une dizaine de minutes de marche, je me retrouve face à un immeuble blanc et noir, et j'attend.
Mes pas m'ont guidés jusqu'au pied de l'appartement de Cal. Je fixe la sonnette où son nom est inscrit, et j'hésite longuement.
Après quelques longues secondes d'hésitation, je me décide à sonner. Au moment où mon doigt atteint le bouton, quelqu'un sort et ouvre la porte l'espace d'une courte minute, avant que j'ai pressé la sonnette.
C'est une jeune demoiselle, grande, brune et élancée. Elle me tient la porte avec un grand sourire, m'incitant à entrer. Je la remercie rapidement et passe la porte en un éclair.
Je monte jusqu'à l'appartement, lentement. Je suis bien consciente que je n'ai pas sonné, pas prévenu, et qu'on va juste se retrouver nez-à-nez.
Oh divinités, qu'est-ce que je fais?
Je me retrouve à appréhender, alors qu'au fond, il n'y a pas vraiment de raison.
Mais peut être que si.
Peut être qu'il n'est pas là.
Possible.
Peut être que tu as disparu pendant deux ans.
Pas faux.
Peut être que tu le dérange.
J'avais pas pensé à ça.
Peut être qu'il n'est pas seul.
Ah, oui.
Peut être que les autres sont là.
Je me fige, quelques marches avant le palier de sa porte, et cette phrase résonne dans ma tête. Peut être que les autres sont là. Peut être, peut être pas.
Je n'ose plus avancer. Cette idée me terrorise presque.
Enfin, plus précisément le fait qu'il puisse être là.
Je m'avance, très lentement. Je dois avancer d'environ 1 millimètre par seconde.
Une fois devant la porte, je ne sais plus ce que je fais là. J'ai réellement peur. C'est ridicule. Je me sens ridicule. Je ne comprend pas pourquoi mes réactions sont si démesurées.
Après un long moment à me battre contre moi-même, mon index fini par presser sur la sonnette de chez Calum.
J'entend rapidement des bruits de pas s'approcher et je n'ai qu'une envie, déguerpir à toute allure. Pourtant, quelque chose me retient, je suis figée.
J'entend un échange de voix à l'intérieur, et la panique monte en moi crescendo, il n'est pas seul.
Je panique, je veux partir, mais au moment où je tourne les talons, la porte s'ouvre presque à la volée. Je fixe la personne qui me fait face. Ce n'est évidemment pas Calum, sinon ça aurait été trop beau pour être vrai.
Je soupire et fixe le blond qui se tient raide comme un piquet devant moi.
~ Euh... Brooke?
Je souris timidement.
~ Salut Luke, ça fait longtemps.
Il ouvre grand la bouche, mais aucun son n'en sort. Ses yeux sont grand écarquillés, j'en déduis que Cal ne leur a pas parlé de notre entrevue, au vu de l'étonnement et du choc qui s'étalent sur son visage.
Je ne me sens pas à ma place.
S'il n'a pas parlé de moi c'est peut être -surement- parce que ça n'avait pas assez d'importance pour lui. Oui, ça doit être ça.
Il faut que je m'en aille.
~ Je voulais pas déranger, je souffle rapidement, je repasserais une autre fois, salut.
Avant même que j'aie le temps de me retourner, Luke m'attire dans ses bras et me serre contre lui.
~ Je pensais que Cal se foutait de nous, je savais pas que c'était vrai, il souffle tout bas en m'étreignant.
Les larmes me montent aux yeux et un poids s'enlève de mes épaules lorsqu'il prononce ces mots. C'est vrai que Luke et moi n'avons jamais été très proches, mais ça me touche de le voir comme ça. De le voir, tout simplement. Il s'est passé tellement de choses, il s'est écoulé tellement de temps depuis la dernière fois que je l'ai vu.
Lorsqu'il desserre son emprise, je décèle une multitude d'émotions dans son regard. Je ne peux m'empêcher de le détailler longuement.
Il a changé, mais pas tant. Il n'a plus cette petite tête d'adolescent, il est devenu un véritable jeune homme, mais il reste le même. Ses cheveux sont toujours aussi blond mais sont plus longs qu'avant, ses yeux toujours aussi bleus. Je remarque qu'il n'a plus son piercing à la lèvre. Délire de jeunesse dépassé, probablement. C'est dommage, ça lui faisait un certain charme.
Je fini par baisser les yeux. Je me sens honteuse, car je réalise à ce moment là que je vis avec un énorme vide en moi depuis que je suis partie. Leur absence, mon départ, tout ça a fait de moi un fantôme. Je ne suis pas épanouie, je ne suis pas heureuse. Je me sens vide. Et d'avoir ce grand blond devant moi, avec son sourire léger accroché au coin des lèvres, et ses yeux remplis de bienveillance, je me sens mieux, mais en même temps je me sens mal.
Je ne sais plus comment réagir, je ne sais plus si je dois rester ou partir, si je dois franchir cette porte qui s'ouvre à moi.
Je regarde derrière le blond et souris à ma propre remarque mentale en observant la porte de l'appartement de Calum ouverte derrière lui.
D'ailleurs, au moment où je pense à lui, je l'entend crier depuis l'intérieur.
~ Bon Luke, tu ramènes ton cul? Tu tires ton coup ou bien c'est quoi là?
Luke me fixe en se grattant la nuque, gêné et m'explique:
~ Je suis venu ouvrir parce que je pensais que c'était mon ex, il rit nerveusement, elle est passée ici me rendre mes affaires il y a genre dix minutes, et je pensais que c'était encore elle.
Je souris au blond et lui dit qu'il n'y a pas de soucis. Il tend sa main vers la porte, m'invitant à entrer. Mal à l'aise, je me sens obligée de lui poser cette question qui me brûle depuis mon arrivée devant la porte de l'immeuble:
~ Il n'y a que vous deux? je demande en baissant les yeux.
~ Oui, dit-il.
Je relève les yeux et acquiesce.
~ Il n'est pas la, souffle-t-il, tu peux entrer, ne t'inquiètes pas.
Je hoche encore une fois la tête et soupire de soulagement.
Lorsque Luke claque la porte, Cal gronde dans le salon
~ C'est pas trop tôt gros, j'ai cru que t'étais entrain de te la faire sur le palier! s'exclame-t-il en se retournant.
Son regard se pose sur moi et un sourire se dessine sur son visage.
~ Bah dis donc, je savais pas que c'était toi l'ex de Luke! il s'esclaffe.
Il se lève du canapé et vient me serrer dans ses bras. Il se recule et commence à faire une tonne de gestes en parlant à toute allure.
~ Nan mais plus sérieusement, j'ai voulu t'appeler tu vois, mais je me suis rendu compte que t'étais partie sans que je choppe ton numéro, et je sais pas où t'habites, du coup je pouvais pas dire de passer. Donc je me suis dit que si tu voulais qu'on se revoie, tu savais où j'habitais.
Je souris pendant son petit monologue et le regarde froncer les sourcils à chaque explication.
~ Je pensais que t'allais prendre plus de temps que ça, du coup c'est cool, j'ai pas du trop attendre, mais heureusement que t'es pas arrivée y a deux heures parce que --, il se stoppe net et me fixe en retenant sa respiration, les yeux écarquillés.
Je tourne la tête et regarde au dehors et hochant lentement la tête.
~ Parce qu'il était là, je souffle doucement.
Je souris, mélancolique.
Heureusement, oui.
Je ne suis pas encore prête pour ça, je ne suis pas prête à affronter son regard. Pas toute suite.
Mais je sais que je n'y échapperais pas éternellement.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top