Chapitre 2 [Partie 5 - Game of Survival]

Que faire ... Quelqu'un vient de rentrer chez moi, chez nous. Mais qui ? je croyais que nous étions seuls. Sans doute l'autre type du phare, et si c'est le cas, il est dangereux. Toutes nos affaires sont là-bas, je dois faire vite. Sans perdre une seconde, je m'élance vers la porte d'entrée, en essayant de faire le moins de bruit possible. En effet, je possède un avantage considérable sur l'individu qui est entré. Je sais qu'il est là, mais lui ne sait pas que je suis là. Pas une lumière à l'intérieur, les interrupteurs sont éteints et seule la lueur du ciel tombant parvient à éclairer un tant soit peu la pièce principale de ce qui est devenu notre havre de paix, ou du moins l'était. En veillant à ne pas être dans le champ de vision de la fenêtre que nous avions cassé, je m'approche pas à pas afin d'entendre quoi que ce soit. Rien d'alarmant, uniquement des pas sur le parquet grinçant du sol. A en juger par la répétition des pas, il est soit très pressé, soit très paniqué, soit les deux. C'est alors que je réalise quelque chose de manière plutôt glaçante. Ce n'est pas la télévision, je peux mourir, et pour de vrai. Je ne sais pas s' il est armé, s' il nous veut du mal, s' il ... nous cherche ? Non je ne veux pas y penser, mais je ne sais toujours pas comment agir. Impossible d'aller chercher Tom, je perdrai trop de temps, et je risquerai de le laisser filer. Non, je suis bien seule, face à un inconnu dont je ne connais pas les intentions. Je n'ai pas pour habitude de prier, mais je crois qu'il est temps pour moi de faire face à l'idée d'une potentielle fin, pour la seconde fois en seulement quelques jours. Les pas continuent de se multiplier, mais plus loin dans la maison, l'homme, que dis-je, l'individu, a quitté la pièce principale. j'en profite pour glisser un œil par la fenêtre, qui donne directement sur celle-ci. J'aperçois la table qui nous avait servi de bureau. Sur celle-ci, tous nos plans et nos théories de la matinée sont encore là, intactes. Si l'on est venu pour quelque chose, ce n'est certainement pas pour nous voler nos idées.

Je veille à ne pas passer devant la fenêtre lorsque je me glisse jusqu'à la porte entrouverte de l'entrée. Une chose me rassure, je n'ai pas à faire à un habitué. Si il y a bien une chose que j'ai apprise au fil des années avec Arthur, c'est que lorsque l'on s'apprête à commettre un vice, on tâche toujours de fermer la porte derrière soi, ce serait dommage d'être surpris au milieu d'un règlement de compte. Mais qui dit amateur, dit impulsivité et nervosité, je dois garder mon calme. J'entends les pas se ralentir, avant de comprendre qu'il est en train de monter les marches de l'escalier. Ces mêmes marches qui mènent à nos sacs, nos réserves et toutes nos ressources de survie. Je dois l'arrêter, peu importe ses intentions. Je profite du brouhaha des escaliers n'ayant probablement pas été rénovés depuis quelques années pour me glisser à l'intérieur, à la fois terrorisée et boostée par l'adrénaline. Suis-je la proie, ou le chasseur ? A en juger par mes mains vides de toute arme, je ne suis pas vraiment en mesure de me considérer comme chasseur. Avant d'envisager quoi que ce soit, il me faut atteindre la cuisine. Je devrais pouvoir y trouver des couteaux, ou n'importe quelle arme pouvant me servir à me défendre si les choses dégénèrent. Malheureusement, je viens de rentrer sur le terrain de l'adversaire, et mes pas craquent tout autant que les siens sur le sol.

Sur la pointe des pieds, je rejoins la cuisine et cherche à me munir du premier couteau dans le tiroir que j'avais vu la veille. Les pas reprennent en haut, signe que j'ai un peu plus de liberté, je suis théoriquement plus difficile à entendre, même si ma jambe blessée reste un poids considérable à manœuvrer. Vivement que j'en ai fini. J'ouvre avec précaution le tiroir pour me rendre compte avec stupeur que tous les couteaux ont disparu. Pas de doute, on cherchait à nous nuire, et je n'ai plus la moindre hésitation, ce n'est pas une erreur si il y a quelqu'un ici. Je me contente d'une fourchette, certes moins tranchante, mais c'est toujours mieux que rien. Soudain, alors que je referme le tiroir, la frénésie des pas s'arrête. Il est entré dans notre chambre, ou du moins ce qui l'est devenue. Je ne peux plus reculer, je dois réussir à monter, à arrêter celui qui veut nous détruire. Je pourrais l'attendre ici, mais je prendrais le risque de le laisser filer. La fenêtre donne directement sur l'extérieur, et même si l'on y voit pas la rue, il est très facile d'y accéder. Etant donnée ma condition physique, hors de question de m'engager dans une course poursuite qui serait perdue d'avance. Je dois monter, coûte que coûte. De longues minutes s'écoulent. Plus un bruit, si ce n'est quelques pas de temps en temps. J'avance tant bien que mal dans un silence de mort. Je ne prie que pour une chose, que Tom ne revienne pas à ce moment. Je suis au pied des escaliers. Là haut, la lumière de notre chambre est allumée, et j'entends des pages se tourner, comme si l'on cherchait à nous dérober des informations importantes. Alors pourquoi ne pas avoir récupéré nos documents en bas ? Je commence de plus en plus à croire que tout cela n'est qu'une manigance, du moins j'essaye de m'en convaincre. La seule idée de me retrouver face à face avec mon envahisseur, armée d'une simple fourchette me fait froid dans le dos. J'ai beau être un minimum armée, je n'ai jamais planté quelqu'un, ni même frappé quelqu'un. Alors comment vais-je être capable de TUER quelqu'un ... J'espère que l'instinct de survie et l'adrénaline feront leur effet. Je ne pourrais pas monter les marches sans faire de bruit. Je suis à quelques secondes d'un affrontement qui peut décider du reste de ma vie, et peu importe l'issue, je veux essayer. Il va falloir y aller, pour retrouver ma famille ... Et Tom. Je vais devoir le prendre par surprise, et une dizaine de marches me séparent de celui-ci. Impossible, je ne pourrais pas les monter aussi vite après l'avoir alerté de ma présence. Réfléchis Roxanne, réfléchis ! Je sais, j'ai trouvé ! Il me suffit de comm...

- "Roxanne, t'en es où ? Ça fait 20 minutes que t'es partie."


Et merde ... mes craintes se confirment, si je l'ai entendu, alors nul doute que l'étranger l'a entendu aussi, et je ne mets pas beaucoup de temps avant de le comprendre. Je l'entends pousser un soupir d'étonnement alors qu'il essaye vraisemblablement de rassembler toutes ces affaires à en juger par le brassage que je peux entendre. Fini de réfléchir, je dois intervenir maintenant, ou il sera trop tard. Sans plus attendre, je grimpe les escaliers à une allure surhumaine, oubliant la douleur. Les marches défilent, une par une, deux par deux, je ne sais pas vraiment. Tout se passe en quelques secondes, lorsque j'entends la course de l'individu reprendre, la fenêtre s'ouvre, et il s'apprête à sauter alors que je me hisse en haut des escaliers et découvre l'identité de notre ravisseur. Toutes nos affaires sont là, comme s'il n'avait rien pris, s'il était juste de passage. Je jette un œil et voit sur son dos un sac, plein à craquer de toutes sortes de couteaux et ustensiles tranchants que l'on peut trouver. Il en avait probablement pris la plupart ici. Avant qu'il ait le temps de s'élancer par la fenêtre, je parviens à attraper l'encolure de son sac et le plaque au sol sur le parquet qui manque de craquer sous le poids de la chute. Je brandis alors ma fourchette et m'apprête à menacer le voleur lorsque je m'aperçois que celui que je pensais être notre bourreau n'est autre qu' une petite fille, probablement âgée d'une dizaine d'années. Elle n'a pas l'air hostile, et n'ose même pas se débattre lorsque je brandis mon arme de fortune au-dessus de ses yeux. Elle ne peut que détourner le regard et se mettre à crier. Me vient alors une vision que j'aurais aimé ne jamais revoir. Le regard de cette petite me remémore celui de tous ceux qui ont subi mes agissements passés, et ma pensée se laisse aller à de sombres souvenirs, si bien que je m'écroule, d'une fatigue oppressante mêlée à l'adrénaline du moment qui retombe. Je ne peux qu'entendre la gamine s'enfuir alors que Tom entre en trombe, alertés par les bruits à l'étage.

Je me réveille quelques minutes plus tard, et découvre face à moi la jeune fille, assise sur mon lit. Que faisait-elle encore là, je l'avais pourtant entendue partir. Instinctivement prise de panique, je me redresse et m'écarte de celle à qui j'avais failli prendre la vie quelques minutes auparavant.

"Eh t'inquiète pas, je vais pas te faire de mal ... !

- Tom, qu'est ce qu'il se passe ? " lui dis-je, encore sous le choc de la présence de la voleuse à nos côtés, alors qu'il remonte les escaliers avec une assiette presque pleine de petit pois en conserve.

C'est plutôt à toi de me dire, je croyais que tu étais partie chercher un coca à la base donc bon ...


Si il y a bien quelque chose que je dois lui accorder, c'est ça. J'étais juste partie chercher une boisson avant que tout cela arrive. La fillette quant à elle ne décroche pas un mot. Elle a le visage fermé, pointé vers le sol, comme un enfant qui vient de faire une bêtise et que l'on gronde.

" C'était le but oui, mais j'ai vu quelqu'un rentrer dans la maison, donc je l'ai suivi, et elle allait nous voler ce qu'il nous reste d'affaires pour survivre.

- C'est pas vrai ! " s'exclame-elle alors, entre pleurs et colère.

"Explique nous alors ce que tu faisais ici, chez nous ? Et pourquoi est ce que tu as voulu partir avec tout ça ? " Mon regard balaye la pièce à la recherche du sac d'armes qui manquait à notre arsenal.

"J'ai pas le droit de vous dire ... "sanglote-elle

- " Pas le droit ? Tu te moques de nous ? Il va se passer quoi si tu le dis, tu vas avoir une fessée ? On va te priver de dessert ? C'est pas comme si tout allait bien non plus autour de nous, je sais pas si tu as remarqué mais il n'ya plus grand monde par ici."


Sans m'en rendre compte, je venais de soulever un point important de notre rencontre. Elle était la première personne que nous voyions depuis que nous avions atterri ici, par pur hasard.

"Ils vont me forcer à partir, je ne peux pas vous dire, laissez moi partir s'il vous plaît, je vais avoir des problèmes sinon ...

- Qui ça "ils" ? " soulève Tom, qui paraît tout aussi étonné que moi d'apprendre la présence d'autres personnes autour de nous.

" Je vous dirai pas tant que vous m'aurez pas laissé partir ! Mais j'ai besoin d'aide ..."


Tout ça n'avait pas de sens. Pourquoi aurait-elle besoin d'aide, qui sont ces gens ? Il nous fallait des réponses, et très vite. On ne sait toujours pas si c'est après nous qu'elle en a, et si quelqu'un va venir la sauver. Me vient alors une idée, qui certes ne me réjouit pas, mais qui s'avère nécessaire. J'étais habituée à molester les jeunes de son âge, alors forcément, lorsqu'il s'agissait de les faire craquer, rien de plus simple. Il ne me fallut que quelques minutes pour obtenir les informations dont j'avais besoin.

"Mon papa et moi, quand on est arrivé ici, on a rencontré trois personnes, ils ont dit qu'ils étaient perdus aussi, alors on a décidé de vivre tous ensemble le temps de trouver une solution. Mais le problème, c'est qu'ils commencent à profiter de nous pour aller leur chercher tout et n'importe quoi, on est devenus leurs esclaves. Et maintenant, ils vont tuer mon papa si ils voient que je ne reviens pas " finit-elle, avant de s'effondrer en pleurs.


Ce n'était pas le premier enfant que je faisais pleurer, mais c'était probablement le contexte le plus incongru. Je vois dans les yeux de Tom de la peine, mais aussi de la crainte, comme si il se méfiait de tout cela bien plus que moi. Je n'avais pas pour habitude d'avoir de la compassion, mais l'histoire de la petite me paraissait crédible et tout à fait entendable, et je ne pouvais pas la laisser tomber. Il l'avait apparemment envoyée chercher les armes que l'on pouvait avoir pour les aider à se défendre des trois autres. Elle nous explique alors qu'elle est censée revenir avec de la nourriture pour ses "chefs", et quelques couteaux pour que son père et elle puissent s'échapper de cet enfer.

"Désolé, on ne peut pas t'aider, il faut que tu rentres chez toi, tu as pu manger, voilà quelques armes, mais on ne peut rien faire de plus, bonne journée"


Quelle idée était passée par la tête de Tom à ce moment. Bien sûr que si on peut l'aider, et il n'est même pas question de pouvoir, on doit l'aider. La promesse que je m'étais faite tenait toujours, je veillerai à ne plus faire de mal à personne.

" S'il vous plait ... on va tous les deux mourir sinon ..."


Alors que j'emmène Tom dans la pièce d'en face qui n'est autre que la salle de bain de la maison, je veille à ce que la petite ne s'échappe pas, avant de réaliser qu'elle n'a plus aucun intérêt à s'échapper, maintenant qu'elle sait que l'on ne va pas lui faire de mal, enfin, pas plus.

Ça va pas la tête ? On doit l'aider !

- Non Roxanne, on ne peut pas l'aider, tu as bien entendu ce qu'elle a dit, ils sont dangereux là-bas

- Et alors, tu préfères la laisser mourir, comme si il ne s'était jamais rien passé ? Hors de question, on va la sauver.

- On a commencé à deux, on finit à deux Roxanne, on ne sait même pas ce qu'ils savent ! Je te rappelle qu'on a toutes les informations dont on a besoin maintenant, pourquoi s'encombrer avec ça.

- Tom, je me suis promis de ne pas .... oh laisse tomber, tu ne comprendrais pas. On va les sauver, et si ils sont sympas, on les emmène avec nous jusqu'à la Dame de fer.

- On emmène personne ! " me crie-il, d'une rage qu'il n'avait jusqu'ici jamais laissé paraître, comme si j'avais déclenché en lui une colère noire à la simple imagination qu'on ne soit pas seuls.


Quoi qu'il en soit, ma décision était prise. Je ne la laisserai pas retourner seule d'où elle vient, et si cela doit me causer du tort, alors j'aurais été au bout de mes idées. J'avais enfin ma réponse, je n'étais pas la proie, mais le chasseur, et ma cible, c'était eux. J'allais partir, avec ou sans Tom, et je reviendrai le chercher ici après s'il le souhaitait.

"Même si je me suis promis de rester avec toi jusqu'au bout, tu vas devoir accepter ma décision. Je vais avec elle, peu importe ce que tu en dis. Je reviens te chercher après, si tu es toujours là."

- Roxanne ....

- J'espère que tu es prête, on part cette nuit, toi et ton père avez trouvé votre sauveur."

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